Je suis né dans l’Eastside L.A., d’un père carrossier et d’une mère serveuse dans un petit restaurant du coin. C’était pas le grand luxe, mais on était bien, à trois dans notre petite maison toute crado parce que personne se souciait trop de faire le ménage. On était pas si pauvres que ça, on se démerdait et j’avais à bouffer tous les jours, des cadeaux à mes anniversaires, c’était pas un problème. Pas plus que je puisse dire que j’aie eu une enfance malheureuse, loin de là.

Quand j’ai eu quelque chose comme deux ans, ma mère s’est taillée avec un Anglais. Monsieur Gentleman-Super-Snob, comme l’appelait mon père. Je crois que j’ai pleuré deux jours… Puis ça a été fini. Moi, je m’en rappelle plus, de tout ça, mais mon père, lui, il ressasse encore. Et ces deux jours-là, à trimballer un môme braillard partout avec lui, il s’en rappelle bien.

Mon enfance, je l’ai passée entre l’école, courir les rues et regarder mon père bosser sur des bagnoles. Je m’asseyais au volent et m’imaginais devenir un super pilote ! C’était ça que je voulais faire ! Parce que j’adorais quand mon père filait sur la route juste pour m’amuser.

Puis j’avais plein d’amis dans l’Eastside et on faisait de temps en temps la guerre avec les latinos pour jouer. Eux, ils se prenaient pour les Los Diablos (beaucoup avaient d’ailleurs des parents qui en faisaient partie) et nous, on était d’une super unité secrète d’élite. Combien de fois on leur a mis leur branlée avec Howard Stone ? Moins que le nombre de fois qu’eux nous ont mis la nôtre, je crois.

Un soir, ma mère a essayé de revenir, quand j’avais 3 ou 4 ans. Mon père lui a dit : « Va te faire foutre. » Et je crois que c’est ce qu’elle est allée faire parce que je ne l’ai plus jamais revue.

En grandissant, comme je n’étais pas un foudre de guerre à l’école, mon père m’a appris sur le côté à travailler sur des voitures avec lui… Au cas où… Et le reste du temps, je continuais à courir les rues avec Howard Stone et d’autres… Des courses de vélos, on est passé aux courses de voitures. Howard, c’était pas un pilote, c’était un parieur… Et à nous deux, on a vite amassé un petit pactole. Lui pariait sur moi, et moi, je gagnais les courses. C’était aussi simple que ça.

Mais les courses illégales, ça suffit pas à mettre à manger sur la table… Puis j’ai eu une petite amie qui voulait qu’on puisse se mettre en ménage. J’avais le talent pour devenir pilote et faire du sport automobile. Mais c’était un putain de sport réservé aux riches, ça…

C’est pendant une nuit blanche à réfléchir à une solution, à un job que je voudrais faire (parce que carrossier, c’est bien, mais mon père ne conduisait jamais les voitures qu’on lui donnait à réparer), que j’ai eu l’illumination… Passez une nuit blanche dans l’Eastside et à partir d’une certaine heure, vous vous rendrez compte que vous n’entendez plus que deux choses : les sirènes des flics… Et celles des ambulances qui filaient à travers la ville.

Je ne pouvais pas devenir flic, je n’avais pas le caractère pour (puis j’avais pas trop envie de coffrer mes potes, sans compter que je ne pourrais plus participer aux courses)… Mais ambulancier, par contre, ça me parlait : je pourrais prendre mon pied tout en aidant des gens, c’était pas beau, ça ?

J’ai suivi une formation d’un an, je me suis accroché, j’étais motivé… Et je suis devenu ambulancier et formé aux premiers secours. A partir de là, j’ai été vite engagé au Good Samaritan Hospital.

Je me suis mis en ménage avec la fille avec qui j’étais et puis, comme toutes les femmes, elle a fini par se tailler. Mais c’est ce qu’elles font toutes, non ?

Ça fait 15 ans maintenant que je suis ambulancier… Et que je continue à participer à des courses illégales à Los Angeles et ses alentours. Je suis comblé… Et complètement accro à l’adrénaline.