-Tu n’irais pas jouer dehors, Ward ?

La voix embrumé par l’alcool de ma mère s’éleva alors que je mangeais mes céréales sur la table de la cuisine de la villa de Ricardo. Elle fumait sa cigarette, le regard dans le vide et diriger vers la fenêtre de la cuisine. Je levai un sourcil… Je m’étais levé il n’y a pas dix minutes parce que j’avais passé ma nuit à jouer les intimidateurs pour le compte de Ricardo dont j’étais le second depuis une semaine maintenant. Un travail que j’adorais sans compter qu’il me payait grassement pour ça.

-Pourquoi? Je t’ennuie déjà ?

Je dis ça d’un ton aussi détaché que celui de ma mère. Je savais qu’elle me virait de la maison pour l’avoir pour elle et Ricardo. Elle essayait désespérément de tomber enceinte de lui mais, jusqu’ici ça n’avait rien donné.

Elle quitta la fenêtre du regard et le plongea dans le mien. Autrefois, ma mère était une femme angoissée et dépressive qui n’avais aucune confiance en elle. Depuis qu’elle vivait avec Ricardo, elle se sentait intouchable mais n’en restait pas moins dépressive et nouvellement alcoolique.

-Sincèrement ? Oui. Chaque fois que je te vois, je vois ton père.

Je penchai légèrement la tête sur le côté. L’alcool donnait à ma mère ce sentiment de toute puissance alors qu’elle n’était rien d’autre qu’une épave. Mais ce genre de provocation gratuite, c’était la première fois.

-Pourtant, c’est Sean qui ressemblait le plus à mon père… Moi, je te ressemble, il parait.

J’avais dit ça sur un ton dénué de toute émotion alors que le visage de ma mère afficha, enfin, autre chose que le vide. Ses yeux s’embrumèrent de larmes comme à chaque fois quelqu’un évoquait Sean. Je n’aimais pas revenir sur le souvenir de Sean mais si c’était pour faire mal à Maman alors ça valait le coup.

-Ne parles pas de Sean ! Laisse-le en paix, Ward.

J’esquissai un sourire en coin avant de me lever.

-Tu sais, Maman… Je crois que tu devrais penser à rejoindre Sean. C’est mieux que d’essayer de lui faire un remplaçant. T’es trop vieille pour ça.

Elle se leva elle aussi d’un bond alors que j’allais quitter la pièce. Mais avant que je ne passe la porte ma mère pris mon bol encore sur la table et le lança vers moi.

Mais elle rata et le bol se brisa contre le mur. Je pris un air contrarié mais n’en montrait rien à ma mère.

J’aimais bien ce bol.

-Raté. Comme d’habitude…

C’est ce qu’elle est. Une ratée.

Je quittai alors la pièce décidant de filer au skate park de South L.A.. Histoire de voir s’il n’y a pas mieux à faire là-bas. Une fois arrivé, je vis que quelques Los Diablos y étaient. Il y avait un petit attroupement autour d’un type un peu plus vieux que moi aux cheveux blonds. Alonso semblait boire ses paroles alors qu’Hernan, lui, paraissait impressionné.

Ça devait être le petit riche dont j’avais entendu parlé à la maison de la bouche d’un Los Diablos plus vieux qui causait avec Ricardo. Apparemment, le petit riche voulait vendre de la drogue lui aussi…

Pourquoi ? J’en sais rien. C’est complètement con. Surtout que j’ai oublié le nom de ce riche.

Je m’installai pas très loin de l’attroupement pour entendre la conversation. Ils buvaient vraiment tous les paroles du type. Au point où j’étais curieux de savoir ce qu’il avait de si intéressant. Mais je n’intervins que quand je réussi à me rappeler le nom que Alonso appela le type Jimmy.

Jimmy Reed. Voilà comment il s’appelait. Je lis souvent les magazines, dont les people, et j’avais déjà vu sa tête dedans parce que c’est l’héritier de la maison de disques BSC. L’une des plus grandes maison de disques de la ville.

Du coup, je décidai de dire assez haut pour que Jimmy m’entende :

-Tu essayes de devenir leur ami pour qu’ils achètent les disques de BSC ?

Ma voix dénotait un rien par rapport à celles des autres parce que, contrairement à eux, j’étais toujours en train de muer. Mais ça ne m’empêchait pas de parler quand même.

Je savais qu’il était pas ici pour vendre des disques… Mais voir que tout le monde était fasciné par se type me rendait curieux. Et je voulais savoir ce qui les attirait tant chez ce type qui, en réalité, n’avait de plus que nous que de l’argent sur un compte.

@ Billy Lighter

Mes parents étaient partis en voyage d’affaires au Canada où la promotion du tout premier disque de Victoria Hunter, la petite perle de mon père, devait être faite. Heureusement que ma mère se souciait un peu de moi et m’avait mis au courant parce que sans ça, mon père ne m’aurait jamais dit où ils partaient.

De plus, c’était les vacances scolaire, je n’avais donc pas à aller écorcher mes fesses sur les bancs de Fairfax, ni à désespérer devant les conneries d’Evan Kurtz et sa bande de bras cassés.

Non.

Au lieu de ça, j’étais allé dans un endroit bien plus intéressant, pour faire moi aussi de la promotion. J’avais pris des copies du disque de Victoria avec moi et était allé m’installer au skate Park… Je ne faisais pas de figure avec un BMX ou un skate-board… D’ailleurs, j’exécrais n’importe quel sport et boycottais systématiquement le cours de sport à l’école.

Ce qui ne m’empêchait pas d’avoir un corps d’Apollon qui n’avait pas laissé Victoria Hunter indifférente.

Je n’avais eu qu’à attendre quelques minutes puis Alonso, qui dealait un peu plus loin, était venu me rejoindre, s’asseyant à ma droite. Puis Delfino Alvarez, qui s’installa à ma gauche. Puis Hernan…

-Bonjour, mes amis ! Comment vont les affaires ?

Ils me répondirent qu’avec les vacances, ça roulait très bien parce que tout le monde était dehors et n’avait rien d’autre à faire que de se droguer puisque la plupart des parents les foutaient dehors pour avoir la paix.

Je leur souris.

-Je vous ai apporté un cadeau…

Et je distribuai les copies des disques.

-Il s’agit du premier disque d’une jeune artiste de mon père, Victoria Hunter. Elle a un talent certain, même si je trouve qu’elle aurait fait une meilleure secrétaire que chanteuse… Mais sa voix est très excitante, quand on arrive à lui faire chanter ce qu’on veut…

Alonso me regarda avec de grands yeux après avoir découvert la belle sur la pochette du disque.

-Tu veux dire que tu l’as sautée ?

Je rigolai…

-Mieux, je lui ai fait l’amour et elle a aimé ça… Elle a un visage d’ange, des yeux bleus comme j’en ai rarement vus et des jambes, les amis ! Des jambes interminables, fines et musclées !

Arriva alors un autre jeune homme. Grand pour son âge. Cheveux bruns, les yeux presque noirs… Il ne me souhaita pas le bonjour mais entra directement dans le vif du sujet.

-Ce sont des amis et les disques sont des cadeaux.

Je pris un disque et mon paquet de cigarettes.

-Disque et cigarette ?

Je le regardai droit dans les yeux.

-Tu dois être Ward… les autres m’ont beaucoup parlé de toi. Il parait que tu es impitoyable.

@ Billy Lighter

J’avais l’oreille bien tendue vers le petit groupe composé de mes sous-fifres et d’un blondinet un peu trop riche que pour se mélanger à la clique d’Alonso. D’où mon intérêt de savoir pourquoi il était là et ce qu’il allait retiré de fréquenter la racaille du coin.

Pour l’instant, j’entendais simplement que le blond parlait de la nouvelle artiste en vogue. Victoria Hunter. J’avais entendu Victoria Hunter à la radio. Ses chansons n’avaient rien de bien intéressant. C’était une fille qui chante… Je préfère largement Jerry Lee Lewis… Mais je compris bien vite que c’était pas les talents de chant de la fille qui intéressant autant le blond que les latinos mais le fait qu’elle était bien foutue.

Ouais. Là, je suis d’accord. Victoria Hunter est bien foutue.

Et le type qui n’était autre que l’héritier de BSC se l’était faite. Est-ce que c’était vrai ou non, j’en savais rien. Peut-être qu’il faisait que frimer. Mais les autres étaient impressionnés pour ça vu qu’ils semblaient croire sur parole Reed…

C’est là que je m’avançais dans le but de comprendre non seulement ce que Reed avait de si intéressant mais, en plus, ce qu’un riche comme lui trouvait d’intéressant à devenir un Los Diablos.

Alors, c’est en m’approchant et en demandant si Reed achetait ses amis à coup de disque que j’entamai la conversation. Il répliqua que c’était déjà des amis et qu’il offrait les disques. Il ne les vendait pas. Ça ne lui coutait rien, bien sûr, vu qu’il pouvait avoir autant de copies gratuites qu’il voulait… Du coup, je me demande si Jimmy Reed veut pas simplement passé pour un type qui fait dans la charité.

Pour preuve, il me proposa à moi aussi un disque mais, aussi, un cigarette. Je fixai le paquet de cigarette avant de reposer mon regard sur Reed.

-Non. Ni l’un, ni l’autre.

Je me fichais des chansons d’Hunter et je ne fumais pas. Ma mère fumait assez pour tout le monde à la maison.

Le type soutenait mon regard alors que les autres latinos me fixaient avec un air plus mauvais. Entre eux et moi, ça n’avait jamais été le grand amour. On ne s’aimait pas… Particulièrement Alonso, qui, lui me haïssait carrément. Il l’a eut mauvaise, je crois, quand j’ai été nommé lieutenant de mon beau-père.

Je penchai légèrement la tête sur le côté affichant un léger sourire quand Jimmy Reed réussis à comprendre que j’étais Ward. Les autres avaient parlés de moi et avaient dit que j’étais impitoyable.

-Oui. Ward.

Je jetai un coup d’œil vers Alonso.

-Impitoyable. Il parait, oui. Certains pensent même que je suis le Diable incarné… Ou le fils du Diable… Je ne sais plus très bien.

Je reposai mon regard sur Reed ignorant, maintenant, les autres. Alonso marmonna un truc en espagnol que je ne compris pas. Mais je me fichais de lui. C’était Jimmy Reed qui m’intéressait, là.

-Et toi ? Tu es l’héritier de BSC. Jimmy Reed. C’est ça ? Pourquoi tu tiens tant à être amis avec eux ? Tu veux dealer, il parait… Je me trompe ? Tu sais que c’est un métier dangereux ? Plus dangereux et difficile que de se taper Victoria Hunter.

Je dis ça sur un ton légèrement moqueur parce que je voyais vraiment mal ce type dealer. Il allait se faire descendre par le premier South Panthers venu.

@ Billy Lighter

Le garçon s’était approché… Il n’était pas encore tout à fait un homme, sa voix muait à peine alors que la mienne, cigarette aidant, était déjà bien grave et posée. Il était un peu plus jeune que moi mais semblait me mépriser.

Je ne le pris pas en grippe pour autant, lui proposant disque et cigarette quand il se décida à venir se joindre à nous. Mais il déclina l’un et l’autre. Moi, je pris une cigarette et l’allumai avant de faire passer le paquet à Alonso pour qu’il fasse le tour de notre petit groupe.

Le garçon avait un visage fermé, peu expressif, mais je réussis à le faire sourire en l’appelant par son prénom… Enfin plutôt par son surnom. Je savais par Alonso qu’il détestait qu’on l’appelle Edward ou Fleming.

-Viens t’asseoir avec nous… C’est bien d’avoir de nouveaux contacts. C’est même primordial en affaire.

Il semblait ravi d’être considéré comme impitoyable et m’annonça que certains disaient qu’il était le Diable, ou le fils du Diable.

Je rigolai gentiment.

-Les latinos sont superstitieux… Mais il parait que tu as de qui tenir. Ton père, c’est le boucher de Los Angeles, non ?

Je soufflai la fumée de ma cigarette.

-Impitoyable, il faut l’être. Fou à lier, ce n’est pas bon pour les affaires.

Alonso marmonna quelque chose en espagnol que je n’arrivai pas à comprendre tellement il avait parlé bas.

Mais c’était maintenant à moi que s’intéressait Ward.

Il me demanda si j’étais bien Jimmy Reed, si je voulais dealer et me prévint que c’était un métier dangereux.

Je rigolai comme s’il venait de raconter une bonne blague puis me levai pour aller poser ma main sur son épaule.

-Oui, je suis bien Jimmy Reed… Et oui, je veux dealer. Mais avec moi, toute une nouvelle clientèle s’offre à vous !

Je marquai une pause, le regardant dans les yeux.

-Vous n’avez pas vos entrées dans la jet-set, moi oui. Et crois-moi, il y en a qui sont prêts à payer très cher pour un peu de poudre. Plus cher que ce que vous vendez la même came dans la rue.

Je souris.

-Ricardo semble emballé… Ce n’est qu’une question de temps. Séduire Victoria Hunter à côté de ça, c’est un exercice autrement plus compliqué.

@ Billy Lighter

Jimmy Reed me proposait de m’asseoir avec eux mais loin de moi l’idée de copiner avec Alonso et ses amis. Bien que Jimmy Reed disait que c’était bien d’avoir des nouveaux contacts… Que c’était primordial dans les affaires. Donc, il est en affaire, là ? S’il veut dealer, c’est Ricardo qu’il doit convaincre… Pas le bas de la hiérarchie…

-Je préfère rester debout.

Et ne pas avoir d’amis… Je n’en avais jamais eu. Je n’en avais jamais eu besoin. Alors à quoi bon commencer maintenant ? Je n’ai aucune sympathie pour eux… Quant à Reed, j’allais savoir s’il pouvait être intéressant ou non.

Et, déjà, il marqua un point en sachant me resitué et en disant que j’étais impitoyable. Je me ventai alors du nom que se plaisait à me donner Alonso. Il pensait que j’étais la réincarnation du Diable ou, du moins, son fils… Reed, lui, trouvait simplement les latinos superstitieux. Moi, je pensais que c’était surtout une bande de couillons.

Quant à mon père… Je penchai légèrement la tête sur le côté.

-Oui. Mais il n’a plus vraiment d’importance là où il est. Il faut être un looser pour se faire prendre.

Si son nom faisait encore trembler certains, moi, je n’avais jamais eu peur de mon père. Il ne tuait que des femmes sans défense qu’il embobinait. Je suis bien meilleur que lui.

Jimmy disait qu’il fallait être impitoyable et j’étais d’accord avec lui. Mais je levai un sourcil quand il déclara qu’il ne fallait pas être fou à lier parce que c’était pas bon pour les affaires. Je fais pas d’affaires, moi… J’intimide et je tue, c’est tout.

-Tout le monde ne fait pas des affaires… Et je ne suis pas fou à lier. Je sais ce que je fais.

J’entendis Hernan se marrer et je lui envoyai un regard noir. Il le soutint mais se tu quand même alors je reposai mon regard sur Jimmy.

Il voulait être dealer. C’est ce que j’avais entendu. Mais je le voyais mal vendre dans la rue alors je le questionnais là-dessus. Il confirma d’abord être Jimmy Reed et qu’il voulait bien être dealer.

Puis, il parla d’une nouvelle clientèle. Je le fixai d’un regard neutre alors qu’il m’expliquait qu’il comptait vendre aux autres gosses de riches dans la jet-set, un endroit où on pouvait pas vendre, nous. Enfin, les autres Los Diablos parce que, moi, je ne dealais pas. C’était un métier de latino, ça… Et de gosse de riches, aussi, vu que Jimmy voulait être dealer. Il déclara que Ricardo était intéressé.

Normal… S’il peut se faire plus de thunes à travers un abruti de gosse de riche, alors, il le fera…

-Ricardo est emballé parce que tu vas lui rapporter plus de thunes.

Et Jimmy sera en-dessous de moi dans la hiérarchie… Mais ça expliquait pas vraiment ce type en question.

-Dealer, c’est déjà pas super excitant comme boulot… Mais dealer sans danger dans la jet-set, ça doit être vraiment encore plus ennuyeux et, ouais, je te l’accorde, du coup, ça sera pas trop compliqué. Puis, c’est un travail de latino, ça, dealer… Ils sont nés pour ça. Toi, t’es né pour hériter, normalement. Chacun sa place, non ?

Et moi, j’étais né pour tuer. Simple.

Alonso marmonna encore en espagnol… Surement des insultes. Il passait son temps à m’insulter.

-Mais je te comprends pas… Pourquoi tu veux faire ça ? T’es riche. Ça te servira à rien de dealer… Tu n’as rien d’autre à foutre ?

Je voulais comprendre. Il fallait vraiment que je comprenne ce type. J’aimais les choses simple et j’avais l’impression que ce type n’avais rien de simple.

@ Billy Lighter

Ward préférait rester debout… Apparemment, il y avait un gouffre entre le clan des latinos et le nouveau beau-fils de Ricardo. D’ailleurs, je pouvais voir les regards qu’ils se lançaient l’un l’autre.

Moi, je comptais bien faire plus ample connaissance avec Ward que je resituai ce qui sembla lui plaire. Mais apparemment, la comparaison avec son père biologique ne lui plut que moyennement. En effet, le boucher de Los Angeles était en prison et d’après Ward, il fallait être un loser pour se faire prendre.

-Ou avoir été trahi. Je déteste les traîtres… Et il n’y a pas pire que la jet-set pour ce genre de coup bas.

Je lui expliquai qu’il fallait trouver, en affaires, un juste milieu entre être impitoyable et fou à lier. Et ça fit tiquer mon jeune interlocuteur qui était déjà une terreur avant même d’avoir mué.

Il disait ne pas faire d’affaires et qu’il n’était pas fou à lier, qu’il savait ce qu’il faisait.

-Ah oui, c’est vrai… Toi, tu es le grand intimidateur de Ricardo… Je me demande comment tu fais alors que tu n’as même pas encore fini de muer. N’y vois pas d’offense, juste de la curiosité.

Hernan rigola, mais Ward le fit taire d’un regard.

Je souris, tirant sur ma cigarette.

-Ok, je vois… Tu n’as pas besoin de parler. Tu as le regard du tueur.

Il se demandait ce que je venais faire dans le gang… Et je lui expliquai qu’avec moi, Ricardo avait une porte ouverte sur la jet-set… Ward, lui, disait que Ricardo était emballé parce que j’allais lui rapporter des thunes.

-Mais j’aurai ma part, même si ça représente peu d’argent pour moi…

Décidément, Ward était perplexe. Et il formula cette perplexité tout haut… Il ne voyait vraiment pas quelle place je pouvais avoir dans le gang… Ni quel plaisir je retirerais à dealer, ce qu’il considérait comme une occupation chiante.

Je réfléchis une seconde au meilleur moyen d’expliquer ça à Ward.

-Dealer dans la jet-set est presque sans danger. Comme je te l’ai dit, on est pas à l’abri des coups de putes et des mauvaises langues, ce qui pourrait me mener en prison. Donc, du risque, il y en a…

Je souris à Ward.

-Et je ne compte pas seulement hériter. Je veux me faire un prénom et ce dans tous les recoins de L.A., même les plus sombres comme l’Eastside ou South L.A.

Je tirai sur ma cigarette.

-Donc je devrai aussi être un peu impitoyable, comme toi. Mais en affaire.

Il se demandait toujours ce que ça m’apporterait de dealer, puisque ce n’était sûrement pas pour l’argent.

-Je vois ça comme un jeu d’échec… J’ai envie de jouer avec le feu. J’ai envie de ressentir l’adrénaline de faire quelque chose d’interdit.

Je regardai les autres latinos autour de moi.

-Mais surtout, j’ai trouvé ici des amis dont la fidélité ne fait aucun doute.

@ Billy Lighter

Comme bien des gens dans cette ville, Jimmy Reed connaissait la réputation de mon père. Un père que je n’estimais pas du tout vu qu’il avait réussi à se faire prendre bêtement… Mais Jimmy, lui, disait qu’on pouvait se faire prendre en ayant été trahi. Il disait détester les traitres. Apparemment, il y avait plein de traitres dans son petit monde de riche.

-Mon père n’a pas été trahi. Il a simplement loupé son dernier nettoyage… Donc, c’est un looser.

Puis, le riche étala sa science des affaires en disant qu’il fallait être impitoyable mais pas fou… Je n’étais pas fou. C’est ce que je disais. Il savait que j’intimidais pour le compte de Ricardo mais se demandait comment j’arrivais à faire ça sans avoir mué. Mais c’est Hernan qui attira mon attention en se foutant de ma gueule. Je le foudroyai du regard ce qui le fit taire. Et ce simple regard sembla répondre à la propre question de Reed. Je le fixai, à nouveau.

-Pas que le regard si tu vois ce que je veux dire… J’ai pas besoin de parler, en général… Les gens savent ce que Ricardo leur reproches, en général.

C’est ce que j’avais compris en une semaine. Parce que ça ne faisait qu’une semaine que j’avais ce poste bien que j’avais déjà intimidé avant pour le compte de Ricardo. Avant d’être second, je veux dire…

Mais Jimmy Reed restait un mystère pour moi. Je ne comprenais pas ce qu’il voulait faire, ni pourquoi il voulait le faire. Il m’expliqua qu’il voulait dealer pour Ricardo dans la jet-set. Une idée qui plaisait à Ricardo. Je comprenais que ça plaise à Ricardo. Ça allait rapporter des thunes et de la main d’œuvre en plus, il aimait ça. Même si Jimmy disait qu’il aurait sa part ce qui revenait à avoir de l’argent de poche, pour lui. Je levai un sourcil.

-Il compte te payer ? Waw… Il est plus stupide que je ne l’aurais imaginé.

Ouais… Je n’estimais pas forcément Ricardo. Il m’était juste utile. Très utile. Bien plus utile que tous les loosers que s’était tapé ma mère jusqu’ici. A l’exception de mon père biologique qui, finalement, m’a été le plus utile.

Sans lui. Pas de Ward Fleming.

Mais ça n’empêchait que je ne comprenais toujours pas Reed. Il n’avait pas besoin d’argent alors pourquoi faire ce boulot chiant ? Il déclara d’abord que dealer dans la jet-set n’était pas totalement sans danger à cause des traitres et que ça pourrait le mener à la prison. Je ricanai.

-Depuis quand les riches vont en prison ?

Ouais. Je suis pas stupide. Je voyais pas Jimmy Reed, héritier de BSC, aller en prison pour avoir dealer un peu dans la jet-set… Il avait sûrement 3000 avocats rien que pour lui que son père aura payé.

Il ajouta qu’il ne voulait pas seulement hériter mais aussi se faire un prénom. C’est vrai que Charles Reed était bien plus connu que Jimmy Reed. Même moi, il m’a fallut le temps de le replacer. Pourtant, j’oublie pas vite les gens… Il voulait se faire un nom partout même dans les rues de l’Eastside et South L.A.. Je plissai des yeux uniquement parce que j’essayais de comprendre.

-C’est tout ? Tu veux juste qu’on te connaisse dans tout L.A. ? Et tu vas te taper un travail chiant pour ça ?

On peut se faire un nom en faisant autre chose. Je commençais à m’en faire un moi et j’aimais mon job.

Il disait qu’il devra être impitoyable en affaire… J’haussai des épaules.

-Pour dealer, il faut simplement être un bon vendeur… C’est tout… Puis, la plupart son camé, donc, ils sont facile à convaincre.

Il n’y avait aucun challenge dans le fait de dealer. Ricardo avait bien compris que je n’aimais pas ça alors il m’avait trouvé une autre utilité après avoir tester pour savoir jusqu’où je pouvais aller.

Mais comme je ne comprenais toujours pas, je posais encore la question de savoir « pourquoi ? ».

Et ce qu’il dit après éclaircis un peu les choses. Il voulait se faire mousser. Là, je comprenais. Sa vie de riche était ennuyeuse alors il voulait sa dose d’adrénaline. Ok. Compris. J’hochai de la tête pour montrer que j’avais compris avant qu’il n’ajoute qu’ici, il avait trouvé des amis fidèles.

Je levai un sourcil.

Je fixai les latinos un par un avant de poser mon regard sur Jimmy Reed.

-Tu crois que les riches sont des traitres et les pauvres fidèles ?

Je le fixai toujours.

-Ce n’est pas garantis, ça… Peut-être que l’un d’entre eux va te trahir, un jour. Des traitres, il peut il y en avoir partout. Si tu veux ne pas te faire trahir, il faut simplement ne pas avoir d’amis. On est jamais mieux servi que par soi-même. Tu veux une preuve ? Je suis devenu second parce que l’ancien second de Ricardo l’a trahi. Ils étaient meilleurs amis depuis longtemps mais ça a pas empêché Oscar de trahir Ricardo. Résultat ? Plus d’Oscar… Maintenant, c’est moi le second.

Alonso sortit alors de son mutisme.

-Parce que tu as tué Oscar et sa fille ! Elle avait rien fait sa fille !

Il y avait de la haine dans la voix d’Alonso. Je savais qu’il aimait bien la fille d’Oscar.

Je le fixai d’un air détaché.

-C’était les ordres de Ricardo… Je n’ai fais que les suivre… Et ça m’a valu une promotion. Je crache pas dessus, moi.

Je fixai Reed à nouveau.

-Alors ? Toujours sûr qu’ils vont jamais te trahir ? Sinon, tu peux larguer ces loosers et être mon ami à moi. Je pourrais te montrer comment on peut avoir encore plus d’adrénaline qu’en dealant.

Est-ce que je voulais vraiment être son ami ? Je ne sais pas ce que c’est avoir un ami donc je ne sais pas. Mais je voulais voir si Jimmy, il pouvait aller plus loin. Il disait vouloir de l’adrénaline alors je me disais que je pourrais lui montrer ce que j’avais découvert la semaine dernière : que le seul moyen d’en avoir, c’était de tuer…

Rien d’autre.

@ Billy Lighter

Ward n’en démordait pas. Pour lui, son père était un loser parce qu’il s’était fait prendre non pas à cause d’une trahison, mais parce qu’il avait mal nettoyé derrière lui.

-Oui… Il parait qu’il travaillait très salement.

J’eus ensuite un petit aperçu des méthodes d’intimidation de Ward quand il fit taire Hernan d’un seul regard. Un regard que j’avais rarement vu, même au cinéma. Et là, je fus convaincus qu’aussi jeune qu’il puisse être, Ward Fleming était capable de tuer.

Et de tuer salement.

Mais quelque chose me disait qu’il ne louperait jamais de nettoyer derrière lui.

J’eus une once d’admiration dans le regard.

Il ajouta qu’il n’avait pas besoin de parler en générale parce que les gens savaient ce que Ricardo leur reprochait.

-Je vois ça… Tu es doué, Ward. Très doué.

Mais peut-être un peu trop doué à mon goût. Je n’avais pas besoin d’avoir un regard de tueur pour intimider, moi… Je préférais bouger mes pions pour piéger mes adversaires, comme je m’y entraînais souvent à Fairfax…

Puis c’est à moi que s’intéressa Ward. Apparemment, j’étais une énigme pour lui. Et je rigolai, jetant mon mégot, quand il dit que Ricardo était encore plus stupide qu’il l’aurait imaginé car il comptait me payer ma part.

-Oh… Quel manque de respect envers ton supérieur… Il faut dire que Ricardo n’a pas le charisme d’un grand meneur. Mais n’oublie pas de ne jamais mordre la main qui te nourrit, Ward…

Je lui souris et me rallumai une cigarette.

Je lui expliquai ensuite que dealer dans la jet-set n’était pas sans danger, mais lui se demandait depuis quand les riches allaient en prison.

-Oh on y va… Tout dépend de l’avocat, mais là où tu as raison, c’est qu’on y va toujours moins longtemps que vous et qu’on y est traité beaucoup mieux.

Je disais que pour être dealer, je devais être impitoyable en affaires. Ward, lui, disait qu’il suffisait d’être un bon vendeur et qu’en plus, vendre à des camés était facile…

-Si tu le dis… Je pense que tu es bien loin de comprendre mon monde, Ward. Et probablement que tu ne le connaîtras jamais.

Je disais, je pensais, que mes amis latinos ne me trahiraient pas. Je les traitais bien, ils m’admiraient. Je leur étais sympathique et ils me respectaient.

Mais Ward ne croyait pas qu’ils ne me trahiraient jamais et il me donna un exemple. Et je haussai les sourcils de surprise en apprenant que l’adolescent avait tué. Et pas seulement un traitre, sa fille y était passé aussi et ça, ça ne faisait pas l’unanimité et Alonso se décala.

Je le regardai en biais.

-Tu es sûr que Ricardo t’a demandé de tuer la fille ? Ou c’était juste un extra pour toi ? Une petite dose d’adrénaline en plus ?

Je désignai Alonso.

-En tout cas, tuer ne t’apportes pas le respect, ni la crainte de tes pairs…

Ward me demanda alors si j’étais sûr qu’ils n’allaient jamais me trahir.

-Oui… Car je ne ferai jamais quelque chose qu’ils désapprouvent.

Il me proposa alors d’être son ami à lui et de me montrer comment avoir de vrais shots d’adrénaline.

Je posai ma main sur son épaule et le vrillai du regard.

-Non merci, Ward. Je ne suis pas et ne serai jamais comme toi.

Là-dessus, je repris ma place entre Alvarez et Vega…

-Si tu ne veux pas partager un bon moment avec nous, tu es libre de partir… Je crois que ça vaut mieux, pour la mémoire de la fille d’Oscar…

Puis je regardai les autres.

-Je propose qu’on dise quelques mots pour elle.

@ Billy Lighter

Oui. Mon père travaillait salement. J’en avais été témoin plusieurs fois. Même une fois où ça avait ruiné mon t-shirt parce que le sang avait éclaboussé jusqu’à moi. Mon père l’avait enterré avec sa victime, je crois, et m’avait racheté un t-shirt sur le chemin. Il avait dit à Maman que je l’avais déchiré et qu’il a dû m’en trouver un autre… Du coup, j’hochai de la tête pour confirmer les dires de Reed.

Après quoi, je fis taire Hernan d’un regard montrant à Reed que j’avais pas besoin de causer pour intimider les autres. Et là, je vis dans le regard de Reed un truc… Un truc qui me fit esquisser un sourire. Il me regardait comme j’avais vu Alonso le regarder tout à l’heure. Et j’aimais bien ça surtout qu’il ajouta que j’étais doué.

-Oui. Je le suis.

A cet instant, même si je comprenais pas spécialement Reed, je ne le détestais pas non plus. Mais je devais comprendre pourquoi il venait ici se lier avec des loosers comme Alonso au lieu d’aller se pavaner dans un château. Il m’expliqua alors son envie de dealer dans la jet-set… Il sera payé pour ça vu que Ricardo comptait le payer ce que je trouvais con. Reed n’a pas besoin d’argent. Et quand je dis ma pensée tout haut, Reed me fit remarquer que je n’avais pas de respect pour mon supérieur et que je ne devais pas mordre la main qui me nourrissait. Je penchai légèrement la tête sur le côté.

-Je ne lui manque pas de respect. Je dis juste un fait. Puis, avant d’être mon supérieur, Ricardo est mon beau-père…

J’esquissai un sourire en coin.

-En l’insultant, je ne fais que remplir mon rôle d’adolescent en crise, non ?

Je n’étais pas un ado en crise. Mais mon manque de respect envers Ricardo pouvait passer pour ça. Il m’élevait comme si j’étais son fils alors que, pour moi, il n’est qu’un toit sur ma tête et une rentrée d’argent et de fun. C’est tout.

Reed enchainait les cigarettes et les explications. Je disais que dealer dans la jet-set manquait de piment parce que c’était pas dangereux mais Reed disait qu’il risquait la prison en faisait ça… Il disait que même les riches allaient en prison. Ils y allaient juste moins souvent que les autres. Je levai un sourcil.

-Si on te prend en train de dealer, ton avocat aura vite fait de te faire éviter la prison. Je suis sûr que tu peux te payer le meilleur avocat du pays… Puis, t’es jeune, tu seras pas jugé comme un adulte. Je sais tout ça.

Je le sais parce que je m’étais déjà fait arrêté plusieurs fois depuis que j’avais 12 ans. Et jamais j’ai été en prison ou quoi parce que j’étais un mineur.

Puis, dealer c’était pas si difficile. Suffisait d’être bon en vente. C’est tout. C’est ce que je dis. Mais il disait que je comprenais pas son monde. Je plissai des yeux.

-Je veux pas connaitre ton monde… Je préfère le mien.

J’aimais bien avoir de l’argent. Mais pas vivre entouré de riches complètement stupides. Même si, là, je devais avouer que Reed était pas si stupide que ça. Il était juste bizarre et j’avais du mal à comprendre ce qu’il voulait faire.

Puis, je compris qu’il voulait de l’adrénaline chose que je comprenais… Et des amis fidèles, chose que je ne comprenais pas. Mais je le mis en garde disant que les pauvres, ils étaient pas plus fidèles que les riches. Je pris l’exemple d’Oscar mais mon histoire fit causer Alonso qui me reprochait le meurtre de la fille d’Oscar. Mais c’était les ordres. Je n’avais fait que suivre les ordres.

Pourtant, Reed était pas sûr que j’avais suivi les ordres. Il pensait que Ricardo m’avait donné la fille d’Oscar en bonus. Je levai un sourcil.

-Non. Il m’a demandé de tirer sur la fille d’Oscar pour qu’Oscar voit la mort de sa fille. C’était le prix de sa trahison. Puis, il m’a demandé de tué Oscar. C’est tout. J’ai suivi les ordres. Il ne faut pas mordre la main qui nourrit, pas vrai ?

Reed montra ensuite Alonso disant que mon acte ne m’avait pas apporté le respect, ni la crainte de mes paires. Je tiquai.

-C’est pas mes paires. Je suis au-dessus. La crainte, ça viendra. Le respect, je m’en fiche.

Et Alonso de se décaler encore :

-J’aurais jamais peur de toi.

Je lui envoyai un regard dépourvu de la moindre expression avant de reposer mon regard sur Reed.

Un jour, il aura peur.

Un jour, ils auront tous peur.

Reed était certain, lui, que cette bande de looser ne le trahira jamais parce qu’il ne fera jamais quelque chose qu’il désapprouve. Je levai un sourcil.

-On verra…

Mais c’était stupide d’être leur ami alors, je proposai mieux à Reed. Je voulais qu’il soit mon ami ainsi, je pourrais lui montrer comment on peut avoir plus d’adrénaline qu’en dealant. Reed, il était pas comme Alonso et les autres. Il y avait quelque chose en lui que j’aimais bien. Je crois que, d’une façon, il m’admire aussi.

C’est ça que j’aimais bien voir.

Mais il mis sa main sur mon épaule refusant mon offre… Je tiquai. Il disait qu’il ne sera jamais comme moi.

Je le fixai sans rien dire. En moi, j’avais senti un truc. Un truc que je n’aimais pas. Surtout que, maintenant, Alonso, il souriait.

Et puis, Reed me vira, en quelque sorte. Il me proposa d’abord de rester mais disait que ce n’était peut-être pas une bonne idée vu qu’ils comptaient dire quelques mots pour la fille d’Oscar que ce gosse ne riche prétentieux ne connaissait même pas !

Je les fixai serrant les poings. J’avais envie de casser la gueule à Reed qui semblait se croire plus malin que moi.

-T’es pas dans ton monde, ici, Reed ! Alors prends pas trop tes aise ! Toi et moi, on joue pas dans la même cour. Ici, c’est la mienne !

Et je tournai des talons prêt à partir quand Hernan lança :

-Ouais, c’est ça, casse-toi, le puceau. La fille d’Oscar vaut mieux que toi.

Je m’arrêtai d’un coup… Je vis rouge… Ma pensée s’arrêta d’un coup. Il n’y avait plus que la phrase d’Hernan qui tournait dans ma tête.  

Et je me retournai d’un coup pour foncer sur lui et le faire tomber au sol. Je me mis alors à frapper sur lui de toute les forces. Il essayait de se protéger le visage mais impossible pour lui de reprendre le dessus.

Alonso s’exclama et lui et Delfino tentèrent de me faire arrêter mais j’étais fou de rage. Je n’entendais plus rien de ce qu’il y avait autour. Du coup, je ne sentis pas quelqu’un me tirer en arrière avec bien trop de force pour que je puisse résister.

C’était le vieux Miguel. Il était pas très loin et il avait dû voir la scène. Miguel était l’un des plus vieux membre des Los Diablos et avait la place de troisième homme au sein du gang. C’était lui, maintenant, qui m’entrainait à la boxe depuis la mort d’Oscar.

Il me retenait malgré que je me débattait cherchant à retourner achever Hernan qui était au sol alors qu’Alonso et Delfino était près de lui pour l’aider.

-Calme, Ward ! Compte depuis 30 jusqu’à 0 et respire.

C’était ce que disait Miguel calmement.

-Non ! Je veux le tuer. Et le gosse de riche aussi!

Parce qu'il m'avait rejeté... Il m'avait rejeté pour des loosers.

Miguel me disait de le compter quand même et puis, il regarda vers Jimmy Reed. Il le toisa un moment.

-Tu dois être Jimmy Reed. Ricardo m’a parlé de toi… Qu’est-ce qu’il s’est passé, ici ? Il y a un problème entre vous ? Vous êtes du même gang, non ? C’est bien ça, Reed, tu fais partie du gang?

Il parlait calmement alors que je me débattait toujours mais il tenait bon.

@ Billy Lighter

Pendant un instant, on se toisa, Ward et moi, d’égal à égal. Il y avait des choses que j’admirais chez lui et vice versa. Il était doué, je ne pouvais pas le nier. Mais il parla ensuite de Ricardo comme si c’était lui aussi un loser, au même titre que les autres gamins avec qui je traînais. Mais il disait que Ricardo était son beau-père avant d’être son supérieur et qu’il ne faisait que jouer son rôle d’adolescent en crise.

Je le regardai droit dans les yeux, sondant son âme.

-Tu n’es pas un adolescent en crise. Comme tu l’as dit, tu sais ce que tu fais.

Je pris une autre cigarette alors que j’expliquais à Ward que je risquais moi aussi la prison en dealant dans la jet-set… Juste moins souvent et moins longtemps que lui ou mes nouveaux amis. Mais Ward n’était pas dupe, il ajouta que j’étais mineur et que je serais jugé comme tel.

Je rigolai.

-On ne la fait pas à Ward Fleming.

Je lui dis qu’il ne connaissait quand même pas mon monde et il disait n’avoir aucune envie de le connaître. Qu’il préférait le sien.

-Très bien… J’aurais pu te montrer pourtant. Nous faisons souvent des fêtes, je t’aurais fait entrer. Mais puisque tu ne veux pas.

Je lui fis un signe de la main comme quoi ce n’était pas grave.

Puis Ward parla d’un meurtre qu’il avait perpétré. Ce n’était même pas un meurtre, c’était carrément une exécution ! Et d’une innocente en plus de ça… Mais il affirma avoir juste suivi les ordres… Je secouai la tête, la fumée de ma cigarette formant un écran de fumée devant mon visage.

-Tu as un libre arbitre… Et je suis sûr que ton beau-père ne t’en aurais pas voulu d’avoir épargné la fille.

Je lui expliquai qu’un tel comportement ne lui apporterait ni respect, ni crainte, mais il s’en fichait. Parce qu’il aimait ça. Il avait aimé ça, ça se voyait dans ses yeux, dans tout son non-verbal. Et comme de fait, Alonso affirma qu’il n’aurait jamais peur de Ward.

-Doucement, Alonso.

Parce que si le latino se décalait, je sentais bien qu’on était à deux doigts de dégoupiller Ward. Et qui sait ce qu’il ferait s’il explosait ?

Je refusai ensuite sa demande d’amitié en même temps que tout ce qu’il voulait me montrer. Et sans le vouloir, sans le savoir, ce n’était pas Alonso qui avait été la goutte qui avait fait déborder le vase, mais moi.

Il me menaça alors, disant qu’on ne jouait pas dans la même cour. Je le regardai dans les yeux.

-On verra ce que le futur nous réserve, Ward.

Je lui fis signe qu’il pouvait partir, avant de proposer aux autres de dire quelques mots en mémoire de la fille d’Oscar.

Hernan y mit son grain de sel, et tout dérapa…

Je m’écartai pour laisser passer Ward qui fondit sur Hernan, le frappant sans discontinuer. Et je le regardais faire, sans réagir, impressionné par toute cette rage qui émanait de Ward. Ça avait quelque chose de fascinant.

Puis je me sentis bousculé. Un adulte venait d’entrer en scène et tira Ward vers l’arrière avec difficulté.

Puis, une fois que Miguel eu Ward en main, c’est à moi qu’il s’adressa…

-Oui, je suis Jimmy Reed. Et vous devez être Miguel.

Je tirai sur ma cigarette, heureux que Miguel soit intervenu avant que Ward ne s’en prenne à moi parce que je n’aurais eu aucune chance.

-Nous avons eu un petit différent de point de vue quant à l’exécution de la fille d’Oscar. Oh… Et j’ai refusé d’être l’ami de Ward aussi… Mais oui, nous serons bientôt du même gang, quand j’aurai fait mes preuves.

Je rejoignis ensuite Alonso et Delfino qui aidaient Hernan. A trois, on le redressa.

-Viens, on va chez ta mère soigner tout ça.

Je me retournai un instant, toisant Ward.

-A bientôt, Ward.

Et on se mit à marcher au rythme d’Hernan qui avait le visage en sang.

Ward Fleming était un psychopathe, rien d’autre.  

@ Billy Lighter

Jimmy Reed avait bien compris que je le charriais quand je déclarai qu’en rabaissant Ricardo je ne faisais que remplir mon rôle d’adolescent en crise. Il savait que je ne mentais pas quand je disais que je savais ce que je faisais. Et j’esquissai un sourire assez content qu’il me prenne au sérieux.

Après ça, j’essayais de le comprendre et il essaya de m’expliquer. Et s’il disait qu’il y avait tout de même des risques à dealer dans la jet-set, moi, je n’en voyais pas. Il n’irais jamais en prison pour la simple et bonne raison qu’il était autant riche que mineur. Et il sembla comprendre que j’avais bien capté qu’on ne pouvait pas m’embobiner aussi facilement.

Et j’aimais ça. J’aimais qu’il le reconnaisse.

-Non. On ne la fait pas à Ward Fleming.

Jimmy Reed déclara que je ne connaissais pas mon monde et simplement parce que je ne le comprenais pas totalement, je déclarai que je n’avais aucune envie de le connaitre. Sincèrement ? Je préférais le mien mais je fronçai les sourcils quand il déclara qu’il aurait pu me le montrer. Je sentais que j’avais raté quelque chose… Mais ma fierté m’empêchait de faire marche arrière et je finis par hausser les épaules… A vrai dire, je préférais largement montrer mon monde à Jimmy Reed plutôt qu’il me montre le sien. Aucune envie de devoir jouer un rôle pour entrer dans ce genre de monde.

Je préférais être moi. Jouer un rôle, je ne le faisais que quand je voulais obtenir quelque chose d’une autre façon que par la violence.

Mais dans l’Eastside, je n’avais pas besoin de jouer et je préférais ça.

Et si, jusqu’ici, mon admiration pour Jimmy Reed et celle qu’il avait pour moi était bien présente, tout s’envola d’un coup quand le sujet d’Oscar arriva sur le tapis et qu’Alonso mit son grain de sel en montrant qu’il désapprouvait le meurtre de la fille d’Oscar…

Je n’avais fait que suivre les ordres. J’avais aimé ça mais je n’avais pas décidé des cibles. Est-ce que j’avais un remord vis-à-vis de la mort de cette fille ? Non. Aucun. Elle n’était rien pour moi.

Reed répliqua que j’avais un libre arbitre et que j’aurais pu épargné la fille. Que Ricardo ne m’en aurait pas voulu pour ça. Il en savait quoi ?

-Je crois que je connais mieux mon beau-père que toi… Il la voulait morte. Pourquoi j’aurais voulu l’épargné de toute façon ? Oscar connait le prix de la trahison. Il savait que sa famille y passerait.

Il était l’ancien second de Ricardo. Il savait comment Ricardo procédait.

Mon estime pour Reed pris encore un coup quand il m’expliqua que ma façon de procédé ne m’amènerait ni le respect, ni la crainte des autres. Mais je savais qu’un jour, ils auront tous peur de moi.

Alonso disait que non… Jimmy le calme et Alonso exécuta. Je levai un sourcil.

-Si. Même toi, tu auras peur, Vega.

Mais tous ses loosers, excepté Jimmy, ne m’intéressait pas. Jimmy lui, il avait quelque chose qui me fascinait. Je voulais revoir la lueur qu’il avait tout à l’heure dans les yeux. Alors, je lui proposai une amitié. J’avais envie de lui montrer toutes les possibilités qu’il y avait à vivre comme moi. Tout ce que ça pouvait apporter. J’avais envie de ça. Tellement fort que quand il refusa, je me sentis insulté.

Très insulté.

Surtout quand il mit en avant qu’il ne sera jamais comme moi. Je serrai des poings disant que lui et moi, on ne jouera jamais dans la même cour. Mais il répliqua qu’on verra bien ce que le futur nous réservera.

-Si tu continues de jouer dans ma cour, tu n’auras pas de futur.

Et comme cette bande de loosers (Jimmy compris, cette fois) voulait dire des mots à la mémoire de la fille morte, moi, je n’avais plus rien n’à faire ici.

Je tournai les talons.

Mais Hernan en profita pour m’insulter.

C’était trop… Si le refus de Reed avait rempli le vase presque à fond, Hernan avait lâché la goutte de trop et j’avais vu rouge frappant sur le latino.

Je le frappais encore et encore sans aucune intention de m’arrêter.

Mais Miguel, qui était plus baraqué de moi, réussit à me tirer en arrière. Je me débattait mais Miguel tenait bon malgré que je disais tout haut que j’avais clairement envie d’achever Hernan et de m’en prendre, après, à Jimmy Reed.

Mais c’est vers Jimmy que l’attention de Miguel se porta alors que je me débattais toujours. Il confirma être Jimmy et connaissait Miguel. Ou, du moins, il en avait entendu parlé.

Il expliqua notre différent. Et quand il parla du refus qu’il avait eut d’être mon ami, je me débattis un peu plus et Miguel fit un peu plus pression ce qui me fit grimacer.

-Tu feras jamais tes preuves !

C’est ce que je lâchai mais Miguel m’ignora.

-Je suis certain que tu t’en sortiras très bien.

Il dit ça avec du respect dans sa voix. QU’est-ce que ce gosse de riche a de si intéressant, hein ? Pourquoi ils sont tous à genou devant lui ?

Je le savais… Je savais ce qu’il avait d’intéressant mais, désormais, je ne voulais plus me l’avouer. Jimmy Reed, en refusant mon offre, était devenu mon ennemi.

Miguel me tenait toujours fermement quand Reed, Vega et Alvarez aidèrent Hernan à se relever. Ils s’en allèrent non sans que Reed me salue en partant et en m’envoyant un dernier regard.

-C’est ça ! Dégage ! Va torcher le cul d’Hernan. T’es bon qu’à ça !

Je criai ça alors que le petit groupe s’éloigna et que Miguel n’avait visiblement pas l’intention de me lâcher. Je me débattais toujours mais je respirais de plus en plus vite. Une respiration où on pouvait entendre ma souffrance. Celle que j’avais dans ma tête. Celle que Jimmy Reed avait provoqué en prenant le parti des autres et en refusant le mien… Le vide que je comblais en tuant, je sentais que j’aurais pu le combler en ayant Jimmy Reed à mes côtés. Je l’avais senti tout à l’heure. Mais cette sensation avait brutalement disparu pour creuser un peu plus ce foutu vide.

Je ne remarquais même pas que je commençais à ne plus arriver du tout à me débattre.

-Ward… Il faut vraiment que tu te calmes… Tu ne peux pas attaquer les hommes de Ricardo.

J’avais arrêté de me débattre lâchant :

-Je les hais…

Dans un souffle et Miguel me lâcha alors que j’avais glissé assis à terre. Il se mit à ma hauteur.

-Ce genre de crise de colère, Ward, c’est une faiblesse. Si tu arrives à contenir ça, tu seras plus fort que tous les autres. Ils auront peur de toi. Alors, garde ça en tête. Compris ? Et utilise tout ça contre tes ennemis pas contre ceux qui sont dans ton camp. D’accord ?

Je fixai Miguel. Miguel qui n’avait pas encore compris que je n’avais aucun ami. Aucun. Que des ennemis. Mais j’avais compris.

-Oui. Compris.

J’avais bien tout compris. Et Jimmy Reed ne perdait rien pour attendre.

@ Billy Lighter