J’avais pris mon traditionnel rail de coke avant de me préparer pour le gala de ce soir. Je savais d’avance que j’allais m’amuser. C’était toujours le cas à ce genre de gala. Et j’avais la quasi-certitude d’y trouver Jimmy Reed. Je voyais mal le milliardaire ne pas aller à une fête de cette envergure. J’y trouverais aussi beaucoup d’autres personnes. Des amis comme des ennemis. Il faut de tout pour faire un monde.

De plus, il y aura tout un tas d’animations dont un concert. Je serais donc au rendez-vous pour juger le groupe local qui allait prester ce soir. L’invitation ne nommait pas le groupe, ça allait donc être une vraie surprise. Ils seront avantagés s’ils sont un groupe de BSC, désavantagé s’ils sont chez MTI et je ferais à la tête de l’emploi s’ils n’ont aucun contrat. Je suis impatient de découvrir de qui il s’agit !

Je pris le temps de m’apprêter comme il faut avec mon costard noir et mon nœud papillon noir. Je plaquai mes cheveux un arrière pour être encore plus présentable. Je m’amusais à essayer de deviner la tenue qu’allais choisir Jimmy. Il était toujours très classe.

Encore un rail de coke et je partis pour le penthouse des Sherman. Un petit carnet et un bic étaient coincés dans la poche intérieure de mon costard, tout comme un peu de coke pour la soirée. Un journaliste ne partait jamais juger un concert sans ses outils de travail.

J’arrivai sur le coup de 20h et sorti de ma voiture. Mon sourire campait déjà sur mon visage alors même que je n’étais même pas encore entré dans le penthouse. Je n’eus pas le temps de faire deux pas que je vis Atticus Fetch se diriger vers le même endroit que moi. Il était invité à la fête ce qui n’était pas vraiment étonnant. Il avait repris goût à la vie depuis la sortie de son album. Je ne savais pas ce qui avait produit le déclic qui l’a fait sortir de sa réclusion. Quand il arriva à ma hauteur, mon sourire s’élargit.

-Atticus Fetch. Comment allez-vous ?

Ma dernière critique sur son album ne devait pas lui avoir plu.

@ Billy Lighter

En dehors de l’immeuble, il y avait des caméras. Le gala était sur invitation et certains de mes confrères journalistes n’avaient pas eu l’honneur d’être choisi pour couvrir l’évènement. Ils se contentaient des restes en restant dehors pour avoir des bribes d’interviews avec les invités de marques. Je souris d’un sourire carnassier, très content d’être parmi les privilégier.

Je repérai Atticus près de l’entrée en train de fumer. Je l’interpellai. Il fit mine de ne pas bien me connaitre, ce qui m’arracha un sourire amusé. Ça ne me vexait pas vraiment parce que j’étais assez intelligent pour savoir que c’était une façon pour Atticus de me montrer qu’il me méprisait. Je savais, quand les stars agissaient comme ça, qu’elles n’avaient pas aimé les critiques que j’ai faits sur leurs œuvres. Et un type avec l’ego surdimensionné comme Atticus ne devait pas avoir raté mon article. Et ça ne devait pas lui avoir plu.

-C’est ça !

Il me disait aller bien en reprenant un terme que j’avais utilisé pour parler de son album. Il complimenta mon article. A qu’est-ce que j’aimais quand les stars faisaient mine que tout ça ne les atteignaient pas.

-Merci beaucoup. Il faut dire que vous m’avez donné de la matière à écrire. Tout comme The Burning Fire.

Un sourire sarcastique s’afficha sur mon visage. Je n’avais pas que descendu l’album d’Atticus. J’avais aussi descendu celui de The Burning Fire. Qu’est-ce que je ne ferais pas pour Jimmy.

-Oui, je viens pour la couverture médiatique. Je suis là pour Guitar&Pen étant donné qu’il y aura un concert, ce soir. Je ne sais pas qui se produira, j’attends de voir. J’ai déjà mon carnet prêt pour ma prochaine critique.

Guitar&Pen, quand ils ont eu l’invitation, n’ont pas hésité une seule minute avant de me choisir pour couvrir l’évènement. Je regardai autour d’Atticus.

-Vous êtes venu seul ? Je pensais qu’une rockstar comme vous aurait quelqu’un accroché à son bras pour l’accompagner à ce genre de gala.

Je souris. Atticus était réputé pour sa vie dissolue et débauchée. C’était étonnant de ne pas voir à son bras ou fille de bas étage ou l’autre.

@ Billy Lighter

Le crash de 79. C’est donc comme ça qu’Atticus appelait son passage à vide ? Ça faisait plus crise économique qu’autre chose. Alors qu’Atticus était, d’après bien des médias, en dépression ou en manque d’inspiration. Il savait utiliser les bonnes images pour que ça passe mieux.

-C’est vrai, vous avez fait pas mal de Unes avant votre… Dépression ?

Je ne faisais que paraphraser avec des termes plus exacts ce qui était arrivé à Atticus. La conversation restait polie même si on y allait avec nos sourires sarcastiques. Mais ça risque de tourner à des banalités plus méchantes au fur et à mesure.

Je pris les rênes de la conversation en bon journaliste. Et j’envoyai une question à Atticus. Il n’était pas accompagné et c’était bizarre pour une rockstar comme lui. Il affirma que sa partenaire était déjà en haut. Et qu’il voulait, avant de monter, fumer un peu avant d’aller voir des gens qu’il n’aimait pas forcément. C’était ça les galas, il y avait de tout. Les gens qu’on aimait bien et ceux qu’on n’aimait pas.

-Oui, je sais très bien ce que c’est. Qui est cette partenaire ? Quelqu’un d’important ?

Je n’étais pas journaliste people donc ce genre d’information n’avait d’importance que pour moi et pas pour le journaliste qui est en moi. Atticus me proposa une cigarette que je pris. II l’alluma et je tirai dessus.

Le chanteur avait plus d’un tour dans son sac. Il me renvoya la question d’une manière qui aurait pu s’avéré embarrassante pour moi vu qu’il avait tiré dans le mille. Je ne savais pas s’il soupçonnait quelque chose ou si c’était une phrase en l’air. Je me contentai de sourire en soufflant la fumée vers Atticus.

-Je connais très bien Reagan. C’est un ami de mon père.

Je souris un peu plus.

-Il n’y a pas de Madame Moriarty. Et encore moins de Monsieur. Je suis bien trop républicain pour ça. Je préfère les filles du Wild Wild Beaches. C’est bien mieux que de se caser avec une riche, je suis encore trop jeune pour ça.

Je soufflai la fumée.

-Je suis venu seul mais j’ai des amis à l’intérieur. Ils ne sont pas nombreux, mais grand est leur compte en banque. Et vous, hormis votre partenaire, qui de vos amis sera présent ce soir ?

Atticus Fetch devait avoir des amis dans le monde de la musique. Mais pas que…

@ Billy Lighter

La dépression d’Atticus avait autant fait la Une que ses exploits artistiques. Même pendant sa réclusion, le chanteur faisait les choux gras de L.A.People. Parler de cette période noir sembla le crisper un peu. Tant mieux.

Je posai des questions par déformation professionnelle. Il n’y avait que des gens de nature curieux qui pouvait exercer le métier de journaliste sinon ça n’en vaut pas le coup. J’étais un Moriarty, ma curiosité était malsaine par définition. Je lui demandai qui était partenaire. Il répondit que c’était Alexie Greatfield. Je levai un sourcil. Atticus avec Alexie… La journaliste méritait mieux. Je respectais cette femme, elle faisait partie des rares personnes que je n’avais pas envie de détruire par plaisir.

-Je ne vous aurais jamais imaginé vous pavaner à un gala accompagné d’une animatrice télé.

On parla d’homosexualité et, surtout, de républicanisme américain. Je connaissais Reagan. Mais Atticus aussi. Il avait réussi à se faire connaitre partout dans le monde pendant sa carrière. Il évoqua son lien avec Reagan en s’en vantant avec pas beaucoup de subtilité. Mais c’est bien Lincoln et sa bisexualité qui nous ramena au sujet. Je n’aimais pas vraiment parler de ça. Mais si je ne voulais pas paraitre suspect je devais faire avec et sourire.

-Sûrement. Il y aura des stars de la musique et Dieu sait combien sont bi sans qu’ils se l’avouent vraiment. Je suis même prêt à parier que certains vieux magnats d’entreprises le sont. On ne le saura peut-être jamais.

Je souriais. Je parlais à Atticus de bisexualité comme si c’était quelque chose de normal. Je savais que parler de ça comme d’un vice ne ferait qu’éveiller les soupçons.

Je continuai à poser des questions. Ma cigarette était finie. Atticus ne voulait pas me donner le nom d’amis à lui qui seraient à l’intérieur. Je devais l’observer pour savoir. Et il était prêt à me trouver une Madame Moriarty. Je rigolai un peu.

-Il y en a une qui m’attend à Chicago. Mon père veut m’y marier. Brune, maigrichonne. Pas mon style. J’ai un faible pour les blondes, si vous souhaitez m’aider à trouver mon bonheur.

Je souris. Je ne comptais pas suivre Atticus toute la soirée. J’avais bien mieux à faire. Et il n’était pas le centre de mon univers.

-Je crois que je ne vais pas passer ma soirée à vous filer pour découvrir qui sont vos amis. J’ai un concert à analyser. Et mes propres amis à voir.

Et par là, je montrai tout le désintérêt que j’avais pour le chanteur.

-Je ne vais, d’ailleurs, pas tarder à monter.

@ Billy Lighter