Je commençais à émerger, lentement, dans ma cellule d’isolement capitonnée. Je ne savais pas pourquoi ils m’avaient enfermé là-dedans. Ce n’était pas comme si j’avais un jour chercher à me faire du mal à moi-même ou à me jeter contre les murs. Je ne faisais pas ça, je n’étais pas cinglé.

La lumière crue diffusée par les néons protégés par un grillage commença à me faire mal aux yeux et je grommelai avant de secouer la tête pour essayer de faire disparaître les vapeurs épaisses dans lesquels me plongeaient les médicaments et les injections.

Et je me rendis compte que j’étais de nouveau affublé d’une camisole de force. Je roulai des yeux, soupirai en essayant vainement de bouger les bras. Ils avaient profité que j’étais sédaté pour me la mettre et maintenant, ils attendaient que j’émerge suffisamment pour pouvoir communiquer avec quelqu’un…

Je commençais à saisir comment ça fonctionnait. Mais j’étais, pour l’instant, encore trop dans les vapes pour pouvoir déterminer si c’était une visite inhabituelle ou simplement une séance de thérapie quelconque. Je perdais la notion du temps, là-dedans. Je ne savais pas quand c’était le jour et la nuit et les calmants n’aidaient pas mon horloge interne qui devait être complètement déglinguée.

Quand je fus suffisamment réveillé, j’essayai d’articuler :

-Hey… Y a quelqu’un ?...

Je roulai sur le côté, pour essayer d’atterrir sur mes pieds au bord de mon lit. Et je dus vraiment forcer sur mes jambes tremblantes pour pouvoir tenir debout. M’appuyant d’une épaule contre le mur capitonné, j’avançai lentement vers la porte de ma cellule pour pouvoir regarder au travers du vasistas.

Je ne pouvais pas frapper contre la porte pour attirer l’attention, pas attaché comme je l’étais.

-Hey !... Qu’est-ce qui se passe… ? Qui est-ce qui vient ?...

Mes jambes cédèrent et je me laissai glisser à côté de la porte pour me retrouver assis avant de tomber.

Je soupirai, étendant mes jambes devant moi, regardant mes pantoufles blanches, mon pantalon blanc… J’espérais qu’ils n’avaient pas perdu ma chaîne avec mon crucifix inversé…

La porte s’ouvrit et je renversai ma tête en arrière contre le mur, fermant les yeux…

-Laissez-moi deviner… Thérapie…

J’aurais préféré que ce soit une nouvelle visite de Robin… Histoire d’en rajouter une couche à propos de cet endroit…

Mais quand je rouvris les yeux pour voir qui arrivait, je ricanai…

-Nan… Pas thérapie… On se fait un groupe de parole ? Juste à nous deux ? Paraît que je suis cinglé et toi, tu l’es…

Je haussai les épaules autant que la camisole me le permettait.

-Ou alors c’est juste que tu en veux encore ?

@ Billy Lighter

Je n’ai eu qu’une toute petite sanction, comme une petite tape sur les doigts pour avoir commis une erreur de débutante, comme ils ont dit. Et, j’ai eu droit a quelques jours de repos, parce que ce pauvre cinglé de River Moriarty m’a sauvagement agressé dans la cours des employés de l’établissement.  En terme un peu plus claire, je suis morte de rire.

Pour ajouté à mon délire, on m’a autorisé à poursuivre avec le psychopathe parce que je devais apprendre de mon erreur, et que de le faire avec un autre patient ne m’aurais pas permis de bien  reprendre les choses en mains.

J’ai pris un air apeurée plutôt convaincant pour que le Docteur Storm  me rassure, le forçant même, sans en avoir l’air à clamer à qui voulait bien l’entendre que j’étais sa meilleure relève formée jusqu’à présent. Une petite étoile dorée dans mon cahier qui va me permettre de non seulement réintégré le staff régulier mais de sélectionner mes cas parmi ceux de Storm dont l’agenda déborde de plus en plus. Ouais, Los Angeles est peuplée de  dingo, c’est connu !

Mon repos forcé écoulé, je suis revenu au Hollywood Mental Health Center, plus prête que jamais à reprendre le collier. Les premiers jours, nous n’avons fait que des revu de cas tous sans grands intérêts, à mon avis personnel, ce qui est loin d’être celui de Storm et bien entendu, je lui ai flatté l’égo dans le bon sens pour qu’il me croit en total admiration devant autant de discernement.

Il aura fallu du temps pou que le dossier de River émerge du lot et qu’il me soit à nouveau exposé.  Nous l’avons maintenant sous les yeux et, je m’en passerais la langue sur les lèvres, me pourléchant d’excitation si je n’avais pas eu mon formateur devant moi. Là aussi, j’ai dû sortir le grand jeu pour lui assurer que j’étais plus que prête à reprendre le contact, alors que je croyais que c’était chose faite depuis ma rencontre post évènement !

Qu’importe!

Tous les gestes, toutes les paroles, tout ce que je fais est voué au but que je me suis fixé : Retrouver River Moriarty le plus rapidement possible. Ce sera chose faite aujourd’hui même, d’ailleurs, m’annonce Storm.

Moriarty se trouve confiné dans le bloc D, celui des cas sous hautes surveillances, les plus instable mentalement ou susceptible de représenter un danger pour les autres ou pour lui-même.  C’est fâcheux quand même un peu, ça va limiter de beaucoup les actions entre nous deux mais je ne perds pas espoir de pouvoir le faire transférer graduellement d’une aile à l’autre, au moins jusqu’à la B, là où il sera dans une chambre privé avec droit de sortie de 3 heures par jours, échelonnées sur toute sa journée.

Son dossier en main,  je me dirige, Storm sur les talons, jusqu’au bloc D, souriant distraitement à la réflexion que je me suis faites. On dirait que je déambule dans les couloirs d’une prison et que je vais arriver sous peux aux condamnés à mort !

C’est excitant, non ?

J’ai droit à une petite chaise de bois inconfortable placé devant la porte de River et, les dernières directives de Storm énoncées, il repart pour permettre un certain respect entre un patient et sa thérapeute. En fait, c’est moi qui lui ai suggéré. Citant le passage de son propre livre pour appuyer ma demande. Flatté de voir que je puisse citer ses dires, il n’a pas cherché à argumenter ma demande.

- Juste toi et moi, oui. Je suis venue voir comment tu vas.  

Son dossier sur mes cuisses croisées, mes doigts pianotent sur le carton du document alors que j’observe la position de River, installé au sol, jambes allongées droit devant lui. Il semble que la démence le gagne petit à petit ou alors est-ce l’effet des injections et autres qu’on lui sert plus que de raison, pour le garder dans le cirage.

- Tu as eu un visiteur, c’est bien.  Tu devais être heureux de voir un visage amical, je me trompe ?

@ Billy Lighter

Il y avait une autre porte que celle au travers de laquelle j’avais regardé par le vasistas. Une porte qui pouvait s’ouvrir de l’extérieur et qui dévoilait juste une vitre qui permettait de pouvoir interagir avec l’extérieur… Tout en gardant le visiteur en sécurité. Des petits trous me permettaient d’entendre la voix de ma psy… Dont j’avais même carrément oublié le nom…

Mes paupières un peu lourdes, mais les effets des médicaments s’évaporant peu à peu à mesure que le temps passait et alors qu’on ne m’avait pas refait d’injection justement pour que je puisse être suffisamment conscient pour cette séance, je regardai la jeune femme dans les yeux. Je me tournai un peu, m’appuyant contre un autre mur pour lui faire face, mes jambes toujours étalées devant moi, au sol.

Elle était venue voir comment j’allais. Je ricanai, bougeant un peu sous ma camisole de force.

-Comment toi, tu vas ?

Je passai ma langue sur mes lèvres…

-Avec quelques neurones asphyxiés en moins… J’espère que j’ai tué les bons, au moins… J’espère que…

Je penchai la tête sur le côté.

-J’espère que ça a calmé tes ardeurs…

Ou pas… Parce que si elle était toujours autant branchée sexe… Je pourrais l’appâter facilement… Il me suffisait d’avoir un service trois pièces dans mon pantalon et ça tombait bien, parce que c’était le cas.

Elle savait que j’avais eu la visite de Robin North… Et ça me fit sourire… je ne me rappelais pas tout ce que j’avais pu dire à Robin… Je savais que j’avais fait en sorte qu’il plaide en ma faveur, comme Jerry The Kid l’avait fait. Je le savais parce que le Dr. Storm m’avait montré l’article de L.A.People lors de l’une de nos dernières séances…

-J’aime les visites… J’aime beaucoup ça…

Je lui souris…

-Pourquoi tu ne viens pas me parler à l’intérieur ?

Je regardai autour de moi, les murs capitonnés de ma cellule.

-Je me sens à l’étroit… Dans cette chambre…

Je tirai un peu sur les pans intérieurs de ma camisole en grommelant…

-Et là-dedans…

Puis, la fixant à nouveau…

-Ou alors tu as trop peur ?

@ Billy Lighter

Je m’installe sur une chaise inconfortable mise à ma disposition devant la chambre aux murs capitonnés de River alors que lui-même est installé au sol, jambes allongées devant lui. Il ressemble à un gros marshmallow qui peine à garder son équilibre.

River ne perd pas le nord, non plus de temps, en amorçant la conversation sur un ton sans équivoque. Il veut une joute verbale, il veut montrer qu’il est encore ‘’ bien là ‘’.  À ma question, il répond par une question, ça me fait sourire autant que ça me permets de l’évaluer.

- Tu t’intéresse à comment je vais ?

Il évoque bien évidement notre dernière (et première) rencontre en faisant référence à l’asphyxie de mes neurones.

- Tu sembles entretenir beaucoup d’espoir. J’espère… J’espère…. Mes neurones sont ce à quoi tu t’emploies à réfléchir, ici, dans cette chambre capitonnée ?

Je notre sur mon bloc-notes que le patient fait preuve de beaucoup de remords.  Il n’en est rien, mais je dois écrire le plus possible, comme me l’a recommandé Storm. Il ne s’attend probablement pas, cela dit, à  lire ce qu’il y trouvera.

Je soulève les feuilles du dossier bien garni de River, passe un œil sur certaine chose que j’ai souligné au stylo. La visite de Robin North m’interpelle. Rare sont les fois où Moriarty a la chance de recevoir des visiteur et, quelques jours à peine après notre ‘’incident’’, surprise! Ça me semble trop beau pour n’être qu’une simple coïncidence.

-  Pourquoi tu aimes beaucoup ça, les visites ? Tu espère y trouver quelque chose ? Du réconfort, peut-être ?

Une oreille aussi, quelqu’un qui l’écouterait et donnerait du crédit à ses délires érotiques qu’il nourrit à mon endroit.  Parce que c’est quand même la version officielle, à quelques mots près.

River veut m’attirer plus près de lui, m’invite à m’approcher, à entrer dans sa chambre, même, se plaignant d’y être à l’étroit tout comme il l’est, dans sa camisole.

- Je ne suis pas autorisée à entrer dans la pièce, tu devrais le savoir, pourtant.

À nouveau, je fouille dans le dossier, bien que je n’y cherche rien de précis, sauf pour me donner un air détaché.

- Je vois que tu as un bon comportement, jusqu’à présent.  Tu sais que si tu continu comme ça, tu  pourras réintégrer une chambre régulière et te voir débarrassé de toutes entraves ?

Je referme son dossier, décroise mes jambes pour  me replacer sur ma chaise, bouge mes bras, comme pour le narguer un peu, lui montrer le plaisir d’être libre de ses mouvements.

- De quoi aurais-je peur ?  Ai-je une raison d’avoir peur, River ?

Je me penche légèrement vers l’avant et le fixe dans les yeux, un demi-sourire sur mes lèvres.

- De quoi tu as peur, toi ? De quoi le petit River de 5 ans avait-il peur, la nuit, dans sa chambre, dans le noir ? Quand maman ne répondait pas quand il pleurait, seul, dans son lit ?

@ Billy Lighter

Ma psy nymphomane était de retour... Jamais je n'aurais cru qu'ils la remettraient face à moi après ce que nous avions vécu ensemble. Quelque chose de fort, quelque chose de dangereux pour elle comme pour moi... Quelque chose de délicieusement intense...

Je n'avais qu'une envie en la voyant reparaître devant ma cellule capitonnée: achever ce que j'avais commencé.

Elle demanda si ça m'intéressait, comment elle allait, et je hochai la tête en ricanant. Oui... Oui ça m'intéressait très fort de savoir quel marque j'avais pu lui laisser... Au-delà des marques physiques. Pour moi, si elle était ici aujourd'hui, c'était qu'elle en voulait encore.

Et je voulais bien lui en donner encore. Je rêvais de lui en donner encore.

Comme je répondais, ne fut-ce que par des signes, elle sembla être encouragée à poser d'autres questions...

Elle disait que j'entretenais beaucoup d'espoirs. Je levai un sourcil alourdi par les calmants.

-Regarde-moi... L'espoir est plus ou moins tout ce qu'il me reste.

Je souris en coin, laissant tomber ma tête vers l'avant, mais mon regard bleu que les néons rendaient encore plus glacial resta braqué sur elle dans le mouvement. Ma tête avait bougé... Pas mes yeux.

-Et non. Je n'ai pas réfléchis à tes neurones... Mais j'ai beaucoup pensé à ce que je t'ai fait. Pas à toi. A ce que tu évoques pour moi.

L'étranglement... Et ça, ça m'excitait.  

Elle se donnait un air détaché en feuilletant encore et encore les feuilles qu'elle avait sur ses genoux. Je me demandais si elle ne cherchait pas à ce que les feuilles caressent sa peau, juste pour lui provoquer quelque chose, juste pour lui faire sentir quelque chose... Quelque chose d'aussi agréable que ce que j'avais pu ressentir en serrant son cou entre mes mains.

La visite de Robin était mentionnée dans mon dossier, apparemment. Elle demanda ce que les visites m'apportaient.

-On joue au psy maintenant? Plus de jeux érotiques entre nous?... D'accord. J'aime les visites. Parce que le décor change.

On me sortait de cette pièce qui allait finir par me rendre réellement cinglé.

Je voulais qu'elle approche, je voulais qu'elle joue avec moi... Mais elle refusa l'invitation. Je ricanai, mes lèvres brillantes de salive.

-On joue au psy et on respecte les règles... Ils t'ont fait quoi? Electrochocs?

Ou alors, je lui avais fait tellement peur que je l'avais effectivement soignée de ses vices malsains.

Et en fouillant dans mon dossier, encore et encore, elle me donnait l'impression de fuir mon regard...ou de m'ignorer. J'aurais eu les mains libres, je me serai redressé pour aller frapper contre la vitre et forcer son attention sur moi.

Je ris encore quand elle affirma que j'allais pouvoir bientôt réintégrer une aile moins sécurisée du centre. Avec ce qu'ils me donnaient, j'aurais même voulu mal me comporter que je n'y serais pas arrivé.

Puis elle demanda de quoi elle devait avoir peur... Si elle avait une raison d'avoir peur. J'éludai la première question, mais répondis à la deuxième d'un nouveau hochement de tête.

-Mais tu es trop folle pour avoir peur.

Elle se pencha vers l'avant, me regarda dans les yeux... Et pour répondre à sa provocation et à ses questions, sans la quitter des yeux, je me mis sur mes genoux et avançai vers elle, mes bras entravés... Tout en répondant d'une voix rauque.

-Le petit River n'a pas peur. Le petit River ne pleure pas. C'est maman qui a peur et qui pleure la nuit dans son lit.

Je penchai la tête et souris.

-Elle a peur de moi.

Je redressai ma tête.

-A mon tour. Je ne réponds plus si tu ne réponds pas. Une question chacun. Donnant-donnant.

Je passai ma langue sur mes lèvres et demandai avec une sincère curiosité.

-Comment c'était? Est-ce que ça a été aussi bon pour toi que ça ne l'a été pour moi?

@ Billy Lighter

River est l’artisan de son malheur. Il n’a pas été assez intelligent pour se sortir de cette fâcheuse position dans laquelle nous nous sommes retrouvés lui et moi et voilà ce qu’il en est. Une chambre capitonnée dans le fond d’une aile d’un hôpital psychiatrique, sa liberté réduite aux limites d’une camisole de force.

C’est triste, j’en pleurerais presque.

Non, pas du tout en fait.

J’avais les cartes en mains pour m’amuser, mais j’avoue avoir mal calibré les tours. Ce n’est que partie remise et c’est ce que je viens vérifier aujourd’hui, avec la bénédiction de mes patrons, si c’est pas beau, tout ça !

- L’espoir fait vivre à ce que l’on dit.

Son corps parle pour lui tout comme son attitude. Il pourrait sembler inoffensif mais il joue ses propres cartes, une joute mentale, raffinée, subtile.

- Tu as eu beaucoup de temps pour penser, en effet.  Tu as mis ton temps à profit, c’est bien.

C’est un brin sarcastique, parce que, sauf pour penser, je ne vois pas comment il peut utiliser son temps seul avec lui-même.

- Ce que je t’évoque… tu veux m’en dire plus sur ce que je t’évoque ?

De la haine, de la colère, du mépris, du dégoût, de la fascination, qu’importe. Je me doute bien que je ne dois pas lui évoquer beaucoup de bons sentiments. Il n’est pas le seul à avoir pensé à ce moment. L’excitation que j’ai ressentis, le plaisir de sentir ses mains broyer ma gorge, m’asphyxié, me faire vaciller lentement entre la vie et la mort.  

Rien que d’y repenser, j’en mouille ma culotte !

Je dois me contrôler, pour éviter d’agir trop spontanément mais l’envie de récidiver me ronge, aussi sûrement qu’il me fixe de ses yeux bleus acier. Je lui souris, soutiens son regard en me mordillant la lèvre, il me donne chaud et il le sait.

- Je ne joue pas. Je fais mon travail. C’est ce que vous avez, comme besoin, de changer de décor ?

Celui de la cours extérieur était plutôt pas mal. Aujourd’hui, nous devons nous contenter du couloir de sa chambre, séparé par une vitre résistante.

- Tu semble fasciné par mon comportement, River.  J’ai pourtant la même attitude que lors de notre première rencontre.

Il cherche à me provoquer, il sait très bien que j’ai envie de franchir la limite, qu’il m’attire et me donne envie de le faire.

- Je n’ai pas peur de toi. Pourquoi devrais-je avoir peur de toi ?

La folie est suggestive. Ce qui rend dingue quelqu’un peut être tout à fait acceptable pour quelqu’un d’autre. Jusque où peut-on prétendre qu’une personne est folle selon ce qui est socialement défini comme normal ?  Et si River et moi étions les deux seules personnes saines d’esprit dans tout Los Angeles ? Qui a décidé qu’il en était autrement ?

Je me penche vers l’avant pour le soutenir du regard de la même façon qu’il ne me toise depuis que je me suis installée sur cette chaise devant sa porte, abordant un sujet qui semble tenir à cœur au Docteur Storm, soit, la relation entre River et sa chère maman, bien que je doute que le chemin que j’emprunte aurait été celui de mon collègue.

La réaction de River est délectable, alors qu’il se dresse habillement sur ses genoux pour s’avancer vers moi,  tout en me répondant que c’était plutôt sa maman qui avait peur.  Je me délecte de cette histoire sans même encore en avoir entendu les détails. Que lui a-t-il fait ? Pourquoi avait-elle peur de lui ? Qu’est-il arrivé d’elle, par la suite ?

Mais pour continuer de gratter, je dois répondre à sa question, sauf qu’en y répondant, ce serait admettre qu’il ait eu quelque chose entre nous et je m’y refuse, parce qu’il n’a pas eu le courage d’aller jusqu’au bout, parce qu’il a échoué.

Personne ne saura égaler Ward, même pas en rêve.

- Aussi bon que mon imagination me permet de le croire.

Un fantasme qui m’a suivi pendant plusieurs nuits ensuite. S’il voulait, s’il comprenait, il pourrait se servir de moi pour l’aider ici. Pour lui permettre de passer au travers des mailles du filet et sortir d’ici.

- À mon tour…Quel plaisir éprouve-tu en agressant les gens ?

@ Billy Lighter

Elle jouait autant que moi. Et je la soupçonnais de ne pas être à son coup d'essais. Très bien. Nous allions voir lequel de nous deux avait le plus d'expérience dans le domaine. Bien qu'au vu de sa fonction, elle avait probablement un avantage sur moi. Mais j'étais trop dans le cirage encore, et surtout trop impulsif, pour réellement penser jusque-là. Je le ressentais, mais l'exprimer en pensées cohérentes dans ma tête, c'était autre chose.

Je voulais juste retourner ses armes contre elle.

Devenir un miroir. Un miroir pour qu'elle puisse se voir dedans.

Elle voulait savoir ce que je lui évoquais... Je passai ma langue sur mes lèvres. Je voulais choisir mes mots, être percutant. Mais la question n'était pas simple. Comme je le disais, c'était dans mon corps que ça se passait. Ce qu'elle m'évoquait?

-Un piège... Je ne sais pas si je veux m'y laisser prendre ou pas.

Elle réveillait quelque chose en moi. Non. Pas elle. Le souvenir de son cœur battant pour survivre dans ses artères qui pulsaient entre mes doigts qui serraient. Ce souvenir réveillait quelque chose et pas seulement le désir dans mon pantalon d'hôpital qui ne cachait rien.

Mais céder à cette pulsion... Ce serait me démasquer. Céder, ce serait me tuer moi-même.

Elle prétendait ne pas jouer, ne faire que son travail.

-Aujourd'hui. Aujourd'hui tu fais ton travail. La dernière fois, tu as fait bronzette les seins à l'air.

Je penchai la tête et souris.

-Donc tu n'as pas la même attitude...

Je passai ma langue sur mes lèvres, mes yeux étant descendus de son regard à sa poitrine. Que je finis par désigner d'un signe de tête.

-Si tu veux avoir la même attitude... Ouvre ton décolleté.

Elle me provoquait... Je la provoquais... Et elle ne m'avait pas caché être nymphomane. Je voulais l'amener à se dévoiler encore, comme la première fois. J'étais prêt à aller jusqu'à la pousser à se caresser devant ma cellule pour gagner. Et je savais que si j'arrivai sà la pousser jusqu'à la limite où elle ne pourrait plus tenir, j'aurais gagner.

Mais si elle voulait me pousser dans mon propre vice, elle n'aurait d'autre choix que d'entrer dans ma cellule. Si elle voulait que je lui fasse mal, il fallait que je puisse physiquement l'atteindre.

Et qui sait, peut-être qu'avant la fin de cette séance, nous arriverions à nous combler mutuellement.

Elle demanda pourquoi elle devrait avoir peur de moi.  

-Parce que je décide… si tu vis ou si tu meurs. Fais attention… Je suis capable de te laisser vivre.

Elle n’avait pas peur de la mort. Ça, j’avais pu le voir dans ses yeux alors que son visage tournait au mauve.

Je m’étais dressé sur mes genoux, je m’étais approché, reprenant petit à petit le dessus sur la sédation. Mon fin pantalon de toile blanc était tendu au niveau de mon entrejambe, trahissant combien j’aimais ce jeu. Un jeu dont je posai les bases. Question pour question, réponse pour réponse.

Elle répondit à ma question, si on pouvait appeler ça une réponse. Je souris en coin, m’approchant encore de la vitre blindée. Elle avait trouvé ça « bon »…

-Et je ne doute pas que tu aies beaucoup d’imagination.

Nouvelle question de sa part. Quel plaisir éprouvais-je à agresser les gens ?...

-Je n’ai jamais agressé que toi. Et je l’ai fait pour le Pouvoir.

Une sensation enivrante. En l’étranglant, j’étais son Dieu. Celui seul en mesure de décider si elle vivrait, ou si elle mourrait.

-A mon tour. De quoi as-tu envie, maintenant, tout de suite ?

@ Billy Lighter

J’hoche la tête d’un air entendu, un sourire s’étirant lentement sur mes lèvres quand River répond à ma question. Je lui évoque un piège, je trouve que c’est un très beau compliment, surtout dans les circonstances.  Disons que je vais le placer dans la liste des plus beaux qu’on m’a jamais fait.

River est fascinant, de part sa façon d’être évidement mais c’est bien plus puissant que sa personnalité. C’est quelque chose qu’il dégage, qui est en lui, comme… un poison émanant de son être et qui nous envoûte à son contact.

Une fatale attraction.

Je passe la pointe de ma langue sur mes lèvres en me redressant, affirmant que je ne jouais pas, que mon attitude n’a rien de bien différent que d’habitude.

Mensonge !

Mais  on s’en fou un peu de savoir qui a raison et qui a tord parce que le résultat à la fin sera le même, si tout va comme je le veux. Aujourd’hui n’est qu’un tampon servant à faire ombrage sur le malheureux incident de l’autre fois.

-  Mon attitude dépend de celle des gens avec qui je me trouve.

River ne démord pas, sa ténacité m’excite. Le souvenir qu’il évoque, notre dernière ( et seule) rencontre, me fait vibrer, sur ma chaise, j’en serre les cuisses pour ressentir tous les frémissements d’excitation qu’il fait naître avec une seule phrase. Mes seins, dans mon chemisier, pointe contre le tissu.

- Tu étais assis au sol, le soleil m’éblouissait, les quelques boutons détachés de mon chemisier t’ont permis de croire à une illusion. L’abstinence forcée de ta détention stimule tes pensées érotiques. N’importe quelle femme ici contenterait ton appétit.

Un trou à remplir n’en demeure pas moi un trou. Il mettrait sa queue dans la bouche de n’importe quel patient comateux pour se soulager.

S’installe un jeu de question réponse. Une question, une réponse et la main passe à l’autre. River, dressé sur ses genoux, s’est approché de moi et les ondulations de son corps maintenu de force dans une camisole n’en demeurent pas moins d’une sensualité délectable.

- C’est un jeu, River. Tu ne peux pas décider, avant de lancer les dés, si je vis ou si je meurs.

Je dicte les règles à ce jeu, il s’agit de ma vie après tout.  Et jusqu’à preuve du contraire, je reste la seule à décider de ce que j’en fais. Même Ward n’a pas réussit à gagner contre moi.  Ils se dégonflent tous quand on passe au niveau supérieur et, River, ici présent, semble croire que nous jouons à une partie de serpent/échelle et qu’il a déjà passé par la plus grande des ascensions.

Chaque chose en son  temps, je suis prête à lui laisser plusieurs lancés de dés, s’il se montre  digne d’être le successeur de Ward.

J’éclatais de rire, un vrai, d’amusement en tapant des mains.

- Il est vrai que j’ai beaucoup d’imagination !  Je crois que je te rejoins bien à ce niveau, ne crois-tu pas ?

À ma question, à savoir ce qu’il ressent en agressant les gens, il rétorque qu’il n’a agressé que moi, pour le pouvoir.

Là par contre il me déçoit !

L’index dressé, j’allais dire un truc mais je me ravise en ravalant mes paroles, restant muette quelques secondes puis je me reprends essayant de décoder ses paroles.

- M’agresser te donnais une impression de… pouvoir… mais en m’agressant, tu as perdu tout pouvoir que ta semi liberté avec les autres patients qui ne sont pas en confinement comme ici, te procurait…  C’était en fait le pouvoir d’avoir le dessus sur moi que tu voulais savourer, même si ce n’était que de très courte durée.  Je comprends.

Il voulait ses deux minutes de gloire, en fait.

Qui pourrait le blâmer pour ça !

Puis je souris, quand il me pause une nouvelle question.  Une question que j’attendais avec impatience.

-  J’ai envie de te donner le pouvoir.

@ Billy Lighter

Je haussai les sourcils puis ris d'un rire inégal. Alors comme ça, elle prétendait ne pas s'être exhibée les seins à l'air lors de notre dernière rencontre. Non... Non, bien évidemment. C'était elle la psy et moi le malade. Ce n'était pas elle la nymphomane, c'était moi qui avais des hallucinations.

-Ma pseudo pathologie comprend les hallucinations?

Je sifflai entre mes dents. La diagnostique du Dr. Storm était "sociopathe". Je ne savais pas exactement ce que c'était. Mais jamais il n'avait été question d'hallucinations.

-Je sais ce que j'ai vu.

Et j'avais vu ses seins en train de griller au soleil alors que j'étais resté à l'ombre pour m'en protéger. Du soleil comme de ses seins.

Je souris.

-Et je n'ai pas été abstinent...

Non, il y avait eu Kora, la jeune et gentille aide-soignante. Qu'il y aurait peut-être toujours si je n'étais pas enfermé en isolement.

Je fis bien comprendre à ma psy que dans le jeu que nous jouions, j'étais seul maître. J'étais celui qui déciderait de sa vie ou de sa mort. Elle prétendait que je devais lancer les dés... Je posai mon front contre la vitre et la regardai dans les yeux avec un air mauvais.

-Mauvaise métaphore. Je ne laisse rien au hasard.

A tel point que je n'avais jamais bu une goutte d'alcool, ni même touché à toutes ces drogues qui était pourtant à portée de main durant mon enfance et que ma mère et ses amis avec lesquels nous visions en communauté dans un camping hippie affectionnaient...

-Je ne jouerai pas aux dés.

Je la prendrai. Je lui prendrai tout. Mais surtout, je prendrais le contrôle total sur elle.

Elle disait que j'avais beaucoup d'imagination, moi aussi. Je levai un sourcil, sceptique. J'en avais pour l'acting, j'en avais pour les manières dont j'allais la faire taire, aussi.

-On peut dire ça.

Elle y alla ensuite de sa petite analyse et tout du long, je secouai négativement la tête. Pas du tout d'accord avec ce qu'elle disait puis je crachai.

-Arrête d'interpréter. Arrête. Tu as tout faux.

Ce n'était pas une impression de pouvoir. J'avais le pouvoir. Ma détention ici ne m'enlèverait pas cette sensation que j'avais eue. Liberté et pouvoir sont deux choses différentes. Je pouvais avoir le pouvoir ici même et entravé. Je le savais.

Et elle allait m'en donner l'occasion. C'est ce qu'elle me dit quand je lui demandai ce dont elle avait envie et je retrouvai le sourire... Un sourire de prédateur.

Je désignai son carnet d'un signe de tête.

-Ecris-le alors. Ecrit que je peux sortir.

Je passai ma langue sur mes lèvres alors qu'elle se tortillait sur sa chaise.

-Et peut-être que je te donnerai ici et maintenant de quoi calmer les fourmillements entre tes cuisses.

Il y avait une vitre entre nous... J'étais entravé dans une camisole de force. Mais ça ne m'empêcherait pas d'avoir le pouvoir.

@ Billy Lighter

Ce qui se passe en ce moment entre River et moi n’est rien de plus qu’un jeu à savoir lequel de nous deux aura le dernier moi et, pour dire vrai, c’est moi qui a le gros bout du bâton.  Il n’en serait pas ainsi si ce qui s’est passé entre nous aurais eu lieu ailleurs.  Je vois mal pourquoi je m’en priverais, surtout que je sais que ça l’amuse autant que moi.
Argumenter.

Vouloir se convaincre et convaincre qu’il a raison, et que j’ai tords.

- Ta pseudo pathologie n’est pas très bien défini River. Storm n’a pas statué et donc, pour le moment, elle a le dos bien large.

C’est pas chouette ? Moi je trouve cela vraiment très chouette !

- Ce que tu as vu… ce que j’ai vu… ce que tu as dit… ce que j’ai compris… ce que j’ai dis… ce que tu as compris, enfin tu vois où je veux en venir… Autant de façon de se méprendre. C’est très large d’interprétation, ne crois-tu pas ?

On appel ça jouer avec les mots.

Je fais la moue quand il dit qu’il n’a pas été abstinent. Il y a une autre nympho dans la place ? Je ferais mieux de surveiller ça de plus près et, pourquoi pas, recommander que River ne soit entouré d’hommes et d’hommes seulement.

- D’accord, mauvaise métaphore, je te l’accorde. Mais je suis encore vivante, River, et je doute que c’est ce que tu souhaitais, vraiment.

Il avait une telle fureur dans le regard, rien que d’y repenser et j’en mouille ma culotte, à force, elle va être à ce point trempé qu’on va croire que je me suis pissé dessus.

Je m’avance sur un terrain hasardeux, n’est-ce pas ironique, alors que nous venons d’établir qu’il ne laissait rien au hasard ? Je dois ramener des notes à Storm, lui faire un compte rendu de ma rencontre, puisque ça fait partie des conditions pour me permettre de reprendre le dossier de River.  Je balance donc la première théorie qui me viens à l’esprit, aussi erroné puisse t-elle être. Le but de toute manière est de le faire parler. Pour ce que ça vaut, je n’en ai rien à faire, j’ai déjà conclu qu’il était apte à sortir de se trou à rat.

- J’ai tout faux ? Tu en es à ce point certain ?

J’en doute.

C’est ce qu’il veut : avoir le dessus sur sa proie. Avec moi, il l’a perdu, il n’a pas eu ce qu’il voulait, il a perdu le contrôle et il s’est retrouvé enfermé ici alors que moi j’ai toute la liberté d’aller et venir à ma guise.

Je reste muette, le temps de l’observer, alors qu’il me demande de l’inscrire dans mon cahier de note. Inscrire qu’il est apte à retourner avec les autres patients, qu’il n’a pas besoin d’être autant entravé.

- Très bien.

J’inscris dans mon carnet, en plein centre de la page pour que ce soit encore plus visible.

Après une première rencontre avec River Moriarty, je peux déjà affirmer qu’il a fait de gros progrès d’introspection et qu’il a bien conscience de ses faits et gestes. La médication est adéquate et le patient ne nécessite plus un confinement en chambre de réclusion. Je recommande une réhabilitation avec les autres patients.

Je tournais ensuite mon cahier de notre pour qu’il puisse lui-même lire ce que j’y avais inscrit avant de le refermer et de me lever.

- T’en fait pas pour le reste. Tout vient à point qui sait attendre.  Je ne compte pas te laisser aller si facilement.

@ Billy Lighter

Je me demandais, à mesure qu’elle parlait, qui je haïssais le plus en elle… La psy ou la cinglée ? J’avais définitivement plus de sympathie pour la cinglée. La psy tordait quoi que je dise dans tous les sens pour… justement vider tout le sens de mes paroles et les réduire à néant en les noyant dans un flou artistique immonde.

J’étais malade ou pas ? Sociopathe ou pas ? Storm disait « oui ». Litrell disait « pas sûr ».

Tout ce qu’elle disait, tout ce que je disais. Autant de façon de se méprendre.

Non. Ce que je disais faisait sens. Pas ce qu’elle disait.

Tout ça n’était pas un jeu, elle avait tout faux.

J’ai raison, tu as tort et c’est comme ça que le monde doit tourner.

Je serrai les dents, tirai un peu sur ma camisole de force. Hurlant intérieurement mais tentant de garder contenance extérieurement. De sourire, même si je n’arrivais qu’à obtenir un rictus déformé.

Si elle était encore vivante, c’était parce qu’on m’avait stoppé dans mon élan. Parce que le règlement disait : « Tu ne tueras point. »

Parce qu’elle avait eu de la chance et pas moi. Non.

Parce que ce n’était pas son heure. Mais celle-ci viendrait.

Parce que si je m’en remettais à la chance ou à la malchance, c’était un lancer de dés.

Et elle aurait alors raison.

Elle n’a pas raison. Elle ne peut pas. Je suis le maître de mon monde.

Elle voulait me donner le contrôle. Après avoir brouillé tous mes repères, elle voulait me donner le contrôle.

Donne-le-moi alors.

Elle écrivit sur son carnet et même de là où j’étais, elle faisait en sorte que je puisse lire.

Je ricanai.

Puis la regardai dans les yeux.

Je la détruirai.

-Je te hais, tu sais ça.

@ Billy Lighter