Les derniers jours avaient été mouvementés. Moi qui ait la foutue habitude des imprévus et autres problèmes, ils commençaient à s’accumuler comme des mouches sur de la merde.

Il y avait déjà la guerre… C’était déjà un point assez tendu même si je devais avouer que, avec le temps, on s’y habituait. C’était toujours violent et sanglant mais c’était le prix à payer pour résister à Ward. Parce que je ne voulais en aucun cas perdre face à Ward. Il sait qu’on luttera jusqu’au bout.

Mais ses derniers temps, les choses s’étaient compliquées… Finan avait décidé de quitté le gang, chose que je pouvais comprendre bien que ça me laissait un goût amer dans la gorge. Un Finan qui avait approuvé que son ami, Ivar, nous retire Alvaro. Je n’étais pas contre cette idée. Alvaro avait lui-même voulu partir. Je ne pouvais pas forcer un enfant à vivre dans l’Eastside et à devenir un Los Diablos s’il n’en a pas envie. En réalité et, au fond de moi, je préférais largement ne plus avoir à me soucier chaque soir que ces gosses rentrent vivant. On en avait déjà perdu. Le dernier en date, c’était Paco. Je n’avais pas vraiment envie de voir encore une fois un corps sans vie d’un gamin…

Et si ça ne pouvait pas être plus compliqué, j’avais reçu un coup de fils du boss pour me dire de continuer à faire travailler les Pequeñas Manos… Je n’avais aucune idée du pourquoi… En fait, je ne l’ai compris que plus tard dans la journée quand Carlos est venu me voir pour me dire que Finan avait donné l’ordre aux Pequeñas Manos de ne pas travaillé ce soir. J’aime bien Finan. C’est comme un frère pour moi. Mais sur ce coups-là, il avait largement abusé. J’avais alors donné l’ordre aux Pequeñas Manos de ne pas prendre en compte l’ordre de Finan.

Ils avaient travaillé mais, le lendemain, tout s’est compliqués encore plus. Finan est venu me voir me raconter que la nuit d’Ernesto a été un Enfer. D’autres choses sont venues aussi sur le tapis… D’autres problèmes à régler… Mais savoir qu’un gamin avait encore failli se faire démolir parce que Carlos est un abruti, m’avait mis en colère… Sans compter que Finan n’a pas arrêter d’essayer de me convaincre que Reed ne pensait qu’à lui et son petit pouvoir. Je ne le croyais pas. Je connaissais mieux Reed que lui… On s’est disputé à ce sujet ça même si j’avais accepté de ne plus faire travailler les Pequeñas Manos.

Le soir même, ils n’avaient reçu aucune mission. L’ordre était qu’ils restent à la maison au grand désespoir de Carlos.

Et, le lendemain, j’ai reçu un coup de fils de Reed pour me dire qu’il allait passé.

Ça allait barder…

Et j’attendais dans mon salon en fumant cigarette sur cigarette alors que Carlotta venait d’accueillir les enfants qui rentraient de l’école. Elle les envoya à la cuisine pour s’occuper d’eux leur priant de ne pas me déranger.

Mais ma petite Sofia… La rebelle de ma troupe, se risqua quand même à venir au salon.

-Papa… Dis… Je peux aller chez Grant ce samedi ? Il me demande toutes les semaines et j’en ai marre de refuser !

Je levai le regard sur ma fille. Elle était jeune mais n’avait jamais manqué de cran comme sa mère. Et la voilà qui demandait pour la énième fois si elle pouvait aller jouer chez Grant Custer… Dès qu’elle m’a parlé de lui la première fois, j’ai pu replacé l’enfant. C’était le fils de Daisy Custer et d’un autre Los Diablos. Mais Daisy était morte, apparemment, parce que le petit résidait chez Jordan Keller, un flic. Raison pour laquelle j’avais refusé que Sofia y aille. Aucune envie qu’elle risque de dire quelque chose qui pourrait mettre en péril les Los Diablos. Ou que Keller l’interroge. Sans compter que Finan m’avait dit il y a peu que le gamin n’était, en fait, pas le fils biologique de Raoul mais de Ward Fleming.

-C’est « non ». Ça sera encore « non » la semaine prochaine. Arrête de demander, Sofia.

Elle fronça les sourcils.

-Je ne dirais rien à son tuteur, tu sais ! Je ne suis pas bête ! Je ne suis plus une gamine !

Si elle l’était, elle n’a que 11 ans ! Je fronçai les sourcils.

-C’est le fils de Ward Fleming, tu sais ça ? Il te l’as dit Grant ? Tu le savais, ça, Sofia ?

Sofia savait qui était Ward. Il est déjà venu ici sur ses 11 ans de vie, à la petite. Elle savait de quoi il était capable parce que je lui avais dit.

Mais elle soutins mon regard tout de même.

-Oui. Il me l’a dit ! Je le savais. Mais ça change quoi ? C’est pas parce qu’il est le fils de Ward qu’il est comme lui. Moi, je vais pas devenir dealeuse, hein ! Pourtant, je suis ta fille.

Elle disait ça sur un ton insolant. Les enfants sont chiant, parfois. Je les aimes tous, mes gosses, mais parfois, ils sont ingérables.

-Vas dans ta chambre et n’en sort plus avant demain ! Et tu n’ira JAMAIS chez Grant Custer. Jamais.

Je dis ça sur un ton sévère sachant très bien que, d’ici quelques minutes, c’est moi qui allait me prendre un savons de Jimmy Reed.

Elle s’en alla non sans me montrer sa désapprobation du regard. C’est là qu’on sonna à la porte.

Je me levai et Carlotta ferma la porte de la cuisine pour ne pas qu’on soit dérangé par les paroles des enfants qui goûtaient. Quant à Sofia, elle avait plutôt intérêt à ne pas descendre.

J’ouvris la porte sur Jimmy Reed :

-Bonjour, patron. Entrez.

Je l’avais fait entrer dans le salon, le laissant prendre ses aises. Depuis aussi loin que je me rappelle, j’avais toujours admirer Reed. Il avait la classe et, surtout et quoi qu’en pense Finan, je savais qu’il tenait à nous tous. Il avait toujours tout fait pour qu’on ne manque de rien et pour que notre métier nous amène le moins de perte possible au sein du gang grâce à une organisation bien rôdée mis en place par lui-même et exécuté par Finan et moi.

Je me raclai la gorge alors que je servis du whisky à Reed. Il prenait toujours du whisky si bien que j’avais acheté des bouteilles chères rien que pour les occasions où il venait ici aussi rares soient-elles.

-Vous vouliez me parler des Pequeñas Manos ?

Je savais que c’était ça… Mais je préférais ne pas m’avancer en me défendant tout de suite.

@ Billy Lighter

J’avais reçu un coup de fil de Carlos, ce qui était bien rare… Carlos n’avait pas peur de moi, mais si on respectait la hiérarchie, c’était surtout avec Alonso que j’avais contact. D’ailleurs, je n’avais eu contact avec Finan qu’il n’y avait de ça que très peu de temps. Avant ça, le chanteur de The Warriors ne savait même pas que je chapeautais les Los Diablos.

Finan… C’était justement lui le problème. Carlos ne le savait pas, mais moi si. Car j’avais eu une conversation avec lui il y avait peu de temps de ça et il était bien déterminé à ce que les Pequeñas Manos ne travaillent plus.

Et il n’avait pas tardé à mettre son plan à exécution !

Mais Alonso Vega là-dedans ? Normalement, tout devait passer par lui et j’avais bien peur que Finan ne soit passé par-dessus la tête d’Alonso pour ordonner aux petits de ne pas sortir.

Il fallait que j’en aie le cœur net et je ne voulais pas faire ça par téléphone.

Je pris la moins coûteuse de mes voitures, histoire de passer plus inaperçu… il y avait aussi le fait que je ne pouvais plus compter sur les Pequeñas Manos pour la surveiller pendant que je serais chez Alonso.

J’avais donc embrassé ma femme et mon fils, affirmant que je n’en avais pas pour longtemps. Et j’étais descendu du mont Olympe pour aller à la rencontre du simple citoyen. Je me garai non loin de chez Alonso et marchai, main dans les poche et cigarette au bec… Un vrai dandy en plein ghetto. Je m’étais pourtant habillé comme un voyou, jeans et veste de cuir, les cheveux plein de gel… Mes lunettes en moins me donnaient dix ans de moins.

Même si je n’y voyais plus grand-chose.

Je sonnai et n’eus pas à attendre avant qu’Alonso vienne m’ouvrir en me saluant respectueusement. J’entendais, en sourdine, sa marmaille et souris, me rendant compte que c’était l’heure du goûté pour eux et l’heure de la tétée pour J.R.

-Bonjour, Alonso. Je suis content de te voir.

C’était vrai, il n’y avait aucune ironie là-dedans. Alonso pouvait bien m’appeler « boss » ou « patron », il avait été et restait encore mon ami.

Je pris place dans son salon dans mon fauteuil habituel et il m’offrit un très bon whisky dont je le soupçonnais de ne garder les meilleures bouteilles que pour moi.

-Merci Alonso.

Je portai le breuvage à mes lèvres alors qu’Alonso entra dans le vif du sujet : les Pequeñas Manos.

-En effet… Je suis là pour voir si Finan est bien passé par toi avant de prendre cette décision… Ou s’il l’a fait tout seul, voulant à tout prix jouer les bons samaritains depuis que son ami Ivar fait partie de United For Youth.

Je marquai une pause.

-Tu peux me dire la vérité. Votre confort à vous, les Los Diablos, a toujours été ma priorité même si, pour des raisons plus égoïstes, j’ai du autoriser Ward Fleming à entrer en guerre.

@ Billy Lighter

A première vue, Jimmy ne semblait pas forcément en colère. Il faut dire que c’était le genre d’homme qui contrôlait totalement ses émotions. J’avais essayé de prendre exemple là-dessus au fur et à mesure des années ce qui, il est vrai, n’était pas simple mais m’avait donné une aura supérieur qui m’a permis de naturellement me faire passé pour le chef de l’organisation.

-Je suis content de vous voir aussi, boss.

J’hochai de la tête l’emmenant au salon pour lui servir, tout d’abord, un whisky que j’avais acheté spécialement pour ce genre d’occasion. Je savais que Jimmy n’aimait que la qualité et je détestais faire mauvaise impression devant lui. Il me remercia preuve que j’avais tapé dans le mille avec ce whisky et j’étais sûr qu’il valait mieux parce que cette histoire de Pequeñas Manos n’allait pas être une partie de plaisir.

D’ailleurs, j’entrai dans le vif du sujet directement tant qu’on y était. Il confirma qu’il était bien là pour ça et me parla directement de Finan. Il se demandait si mon meilleur ami était passé par au-dessus de moi pour prendre la décision de ne plus faire travailler les Pequeñas Manos ou s’il m’avait demandé. L’histoire était plus compliquée que ça et je comptais jouer franc-jeu avec Jimmy comme je l’avais toujours fait. Je savais, contrairement à Finan, qui serait enclin à comprendre.

Il me poussa, d’ailleurs, à dire la vérité avant de parler de notre confort et de mettre en avant sa responsabilité dans la guerre initiée par Ward Fleming.

-Ne vous excusez pas. Tout le monde aurait pris cette décision si sa famille avait été en danger. Votre fille a été enlevée, votre femme s’est fait tiré dessus. Ça serait arrivé à ma femme et à l’un de mes enfants et que je n’aurais pas eu la possibilité de descendre Fleming, j’aurais fait pareil. Finan comprendra ça, un jour, ne vous en faites pas.

Parce qu’il ne le comprenait pas. Pour lui, Reed nous avait abandonné à la guerre sans se soucier de tous les morts qu’il y aurait. Je savais que Jimmy s’en faisait plus que Finan ne l’imaginait. Mais j’avais confiance qu’il comprenne un jour que Jimmy n’est pas aussi mauvais qu’il ne le pense.

-C’est plutôt à moi que j’en veux. J’aurais dû éviter de rater Fleming quand j’avais l’ordre de le descendre. Maintenant, il ne pense qu’à se venger en faisant du mal à tout le monde.

Depuis ce jour, il n’y avait pas un jour où je n’y pensais pas. Et parlant de Fleming, j’entendis un peu de remu ménage et l’étage. Je levai les yeux mais ne dis rien. Je n’avais pas le temps de m’occuper de Sofia. Je reposai mon regard sur Jimmy.

-Finan n’est pas passé par moi. Il est allé dire aux Pequeñas Manos de ne pas travailler. Il a fait ça avant-hier. Le jour où il est allé vous voir. Carlos m’a appelé pour m’expliquer la situation et j’ai annulé l’ordre de Finan.

Je marquai une pause pour tirer ma cigarette.

-Ce soir-là, les petits ont travaillé… Mais ça a mal tourné. Carlos était en charge de former les équipes et il a merdé. Il a mis une dealeuse nouvelle recrue avec Ernesto à la frontière de South L.A.. La fille s’est fait tabassée et Ernesto a fui. Il était mort de trouille. S’il n’avait pas fuit il aurait eu le même sort que la fille. Il aurait pu ne pas survivre, qui sait. Il s’en veut. Il croit qu’il aurait dû la protéger. On a beau lui dire qu’il n’aurait rien pu faire, il s’en veut. Et je doute qu’il puisse retourner sur le terrain de sitôt après ça. J’avais plus vu un gosse dans cet état depuis que j’ai retrouvé Jesse dans une ruelle après la mort de Paco. Sauf que Jesse ne s’en voulait pas. Il savait qu’il aurait rien pu faire. Mais Ernesto, lui, il ne pense qu’à ça.

Je soupirai fixant Jimmy.

-Vous allez me dire que la faute revient à Carlos. C’est vrai. Mais Carlos a fait avec le manque d’effectif et Finan n’était pas là. Carlos n’est pas le plus malin, ça je le sais mais je voulais tester s’il pouvait remplacer Finan. C’est pas le cas. Personne ne peut remplacer Finan…

Je dis ça sur un ton amer avant de poursuivre.

-C’est pour cet événement et vu les conditions actuelles que j’ai décidé de ne pas faire dealer les Pequeñas Manos la nuit dernière. De toute façon, je n’en ai plus que deux opérationnels. Finan n’a pas eu besoin de me convaincre pour prendre cette décision. Désolé, boss, mais je vais maintenir cet ordre-là…

C’était probablement la première fois que j’allais à l’encontre d’un ordre de Jimmy et je n’aimais pas vraiment ça. Mais je n’avais pas encore envie d’aller ramasser des corps d’ados dans les rues. Nos ados.  

@ Billy Lighter

Contrairement à Finan, Alonso, peut-être parce qu’il avait une femme et des enfants bien à lui depuis longtemps, comprenait que j’aie choisi la guerre à une éternelle paranoïa de voir débarquer Ward Fleming pour éliminer ma famille, pour de bon cette fois. Il disait que Finan comprendrait, un jour…

Je soufflai une longue bouffée de fumée.

-C’est en partie pour son grand cœur que j’ai placé Finan si haut dans la hiérarchie, je savais qu’il allait prendre soin des Pequeñas Manos, faire en sorte de les mettre le moins possible en danger.

Je fis la moue.

-Mais je ne pensais pas qu’il irait jusque-là. Il s’est acheté une conscience, semble-t-il…

Alonso, lui, s’en voulait toujours d’avoir raté Fleming.

Je pris une gorgée de whisky.

-Ne t’en veut pas… J’en ai eu l’occasion aussi et je l’ai raté également.

Je grommelai.

-Fleming est un cafard.

Puis, Alonso me raconta tout ce qu’il s’était passé les deux derniers jours, comment Finan avait ordonné personnellement aux enfants de ne pas travailler, comment Alonso avait annulé cet ordre et s’en voulait maintenant parce qu’un des gosses était traumatisé et s’en voulait de n’avoir pu défendre une dealeuse.

Une chose était sûre et Alonso ne manqua pas de le souligner : le manque d’effectif. Je tiquai. Il nous fallait absolument recruter et, si possible, pas des enfants.

Bref, tout ça avait fait qu’Alonso ne voulait plus faire travailler les enfants… Je laissai passer un long silence ou presque, car il y avait du remue-ménage en haut. Mais je ne posai pas de question là-dessus. Je savais qu’Alonso avait beaucoup d’enfants et les enfants, parfois, n’en font qu’à leur tête.

Alonso allait donc maintenir son ordre.

J’écrasai mon mégot et me rallumai calmement une cigarette.

-Tu te rappelles quand j’ai éradiqué la prostitution de l’Eastside car je pensais que chacune de ces filles pouvaient être la mienne ? Ou ma femme ?

Je marquai une pause.

-Et bien j’ai un fils maintenant, un bébé qui deviendra en un clin d’œil un enfant aussi âgé que de potentiels Pequeñas Manos… Mais je ne voudrais pas que, comme Finan, s’il nous arrivait quelque chose à Maritza et moi, il finisse dans un orphelinat.

Nouvelle pause.

-Alors j’aimerais savoir ce que tu penses de United For Youth où Alvaro à trouver de l’aide. J’ai entendu dire qu’ils allaient se mettre en partenariat avec la mission St John. Penses-tu que ça leur donnerait un meilleur avenir que de grandir dans leur famille, les Los Diablos ?

@ Billy Lighter

Jimmy avait dit que c’était à cause du grand cœur de Finan s’il avait autorisé qu’il soit si haut dans la hiérarchie. Bien que, de mon avis, sa plus grande qualité c’est d’avoir la tête sur les épaules et de connaitre parfaitement chacun d’entre nous pour mieux utilisés nos forces pour ne pas se faire prendre par les flics ou par les gangs rivaux. Puis c’était sans doute le plus loyal des Los Diablos.

Et quant au fait qu’il se soit acheté une conscience, j’haussai des épaules.

-Il en a toujours eu une… Mais, jusqu’ici, il n’avait jamais dû élevé un enfant. Maintenant oui. C’est sans doute de là que vient le changement. Puis, il s’en veut pour Alvaro. Je crois qu’il essaye de se racheter vis-à-vis de ça. C’est toujours comme ça avec Finan. Il doit se racheter sinon il ne dort plus.

Je le connaissais par cœur. Ça faisait 13 ans que je le côtoyais.

Et moi aussi je m’en voulais. Mais pas pour la même chose. Moi, je m’en voulais d’avoir loupé de descendre Fleming. Mais Jimmy s’en voulait aussi et il conclut que Fleming n’était rien d’autre qu’un cafard. J’hochai de la tête soufflant la fumée de cigarette.

-Et il en est sûrement fier.

Mais pas le temps de discuter de Fleming. Ce n’était pas le point du jour. Ce qui l’était c’était les Pequeñas Manos. Et je racontais tout ce qu’il c’était passé depuis deux jours pour justifier ma décision finale que je donnai à Reed. Je n’allais plus envoyer les Pequeñas Manos qui me restait sur le terrain.

Après mes paroles il y eut un silence simplement troublé par le remue-ménage que faisait Sofia dans sa chambre. Carlotta serait déjà intervenue si elle ne devait pas s’occuper, à la cuisine, de tous les autres. Mais Sofia allait m’entendre une fois Reed partit.

J’étais, de toute façon, trop occupé à essayer de décrypter les expressions de Jimmy que pour prêter plus attention que ça aux états d’âmes de ma fille.

Et Jimmy finit par rouvrir la bouche et me parlé de la prostitution qu’il avait éradiqué dans l’Eastside après un plan judicieux qui avait, à la fois éradiqué ça mais, aussi, les South Panthers. Jimmy disait que s’il avait fait ça c’est parce que les prostituées auraient pu être sa fille ou sa femme. J’hochai de la tête.

-Oui, je m’en souviens.

Désormais il déclara avoir un fils et il fit le lien avec les Pequeñas Manos. Un fils qui, s’il devait lui arrivé quelque chose, sera mis à l’orphelinat. Mais il ne le voulait pas. Je pouvais le comprendre. Je n’avais pas été à l’orphelinat mais Finan m’en avait longuement parlé et pas en bien.

Je ne dis rien laissant Jimmy aller jusqu’au bout. Il me questionna alors sur United For Youth. C’est cette organisation qui s’était occupée d’Alvaro. Il me posa, ensuite, une question quant à l’avenir des Pequeñas Manos si jamais ils étaient remis à l’organisation.

-Un meilleur avenir ? Je n’en sais rien…

Je réfléchis quelques instants avant de reprendre.

-Finan m’a expliqué que United For Youth plaçaient les enfants en famille d’accueil et pas à l’orphelinat. Si j’ai bien compris, ils sont d’abord dans une sorte de foyer et mis à l’adoption mais United For Youth a une réserve de familles potentielles où les enfants sont placés très vite.

C’était ce que Finan m’avait expliqué et j’imagine que c’est son collègue, Ivar, qui lui avait fait de la pub.

-Maintenant est-ce que ça leur donnera un meilleur avenir ? Pas forcément. Tout dépend où ils tomberont. Tout dépend d’eux aussi. Mais, en attendant, l’avantage, c’est qu’ils ne risquent pas de crever dans un règlement de compte entre gang. C’est un fait.

J’haussai des épaules.

-Je ne sais pas ce qui est le mieux, boss… Si on les donnes à United For Youth, on ne les reverra peut-être jamais… Et ils partent avec nos secrets aussi. C’est un choix compliqué.

Mais c’était à Jimmy de prendre la décision. Moi, j’étais prêt à nourrir les gosses là où ils sont et les entrainer jusqu’à l’âge adulte sans les mettre sur le terrain tout en leur laissant le choix de pouvoir refusé la vie de Los Diablos s’ils trouvaient autre chose.

@ Billy Lighter

Alonso m’expliqua qu’une bonne conscience, Finan en avait toujours eu une. Mais qu’élever le petit Guillermo lui avait fait voir certaines choses autrement. Qu’il essayait de se racheter pour Alvaro.

-Je vois… La détresse d’Alvaro le fait culpabiliser et c’est là la limite de sa loyauté. Il parait qu’il a déjà envoyé tous les Pequeñas Manos restant chez United For Youth. Je tiens ça de Carlos. Tu es au courant ?

Je tirai sur ma cigarette alors que la conversation dévia sur Fleming, notre bête noire à tous. Le pire, comme le disait Alonso, c’était qu’il était fier d’être un cafard.

-De quoi d’autre pourrait-il être fier, de toute façon ? Sincèrement ?

Nous en vînmes au sujet du jour, les Pequeñas Manos, après cette petite digression. Alonso m’expliqua tout ce qui s’était passé ces deux derniers jours. Puis je laissai planer le silence… Un peu pour lui faire peur, mais surtout pour réfléchir.

Puis, je lui demandai s’il se rappelait quand j’avais éradiqué la prostitution de l’Eastside. Et évidemment, il s’en rappelait. Et maintenant que j’avais un fils, un peu comme Finan, je prenais conscience de certaines choses concernant les Pequeñas Manos.

Alors j’interrogeai mon second et ami concernant United For Youth.

Je l’écoutai m’en parler tout en sirotant mon whisky. Je l’écoutais très attentivement. Tout ce qu’il savait, il le tenait de Finan qui le tenait lui-même d’Ivar. Il n’était pas question d’orphelinat dans le système de United For Youth, ce qui était un avantage. Mieux valait être un Pequeñas Manos que de se retrouver entourés de nonnes frustrées et d’abbés adeptes de petits garçons.

Alonso continua en disant qu’il ne savait pas s’ils auraient un meilleur avenir.

-Oui, je vois… C’est un peu la loterie. Ils peuvent très bien tomber dans une famille où ils seront maltraités et je ne veux pas ça pour eux. Toi, tu as toujours été bienveillant avec eux et je sais que tu n’es pas le seul. Dans l’avion pour aller en Belgique, le petit Jesse m’a parlé d’un Sonny qui avait fait venir le père Noël pour leur apporter des jouets.

Et Alonso termina en disant qu’il ne savait pas si United For Youth était la solution… je sentis de la tristesse dans sa voix quand il dit qu’on ne les reverrait peut-être plus jamais. Mais aussi qu’ils emporteraient nos secrets avec eux.

Je tirai longuement sur ma cigarette puis répondis en laissant la fumée s’échapper de ma bouche au rythme de mes mots.

-J’ai appris une chose, récemment : Personne ne peut garder un secret à Los Angeles.

Je me penchai en avant, les coudes sur mes cuisses, mon whisky et ma cigarette dans une main et regardai Alonso droit dans les yeux.

-J’ai une idée… Les bébés, on les envoie directement chez United For Youth. Quant aux plus grands, on leur laisse le choix : United For Youth ou les Pequeñas Manos…

Je marquai une pause avant d’ajouter.

-Mais je te vois réfléchir Alonso. Vas-y, parle librement, mon ami.

@ Billy Lighter

Si Finan avait agit de la sorte c’était pour sa conscience. Je le savais. Je savais que s’il n’agissait pas, il n’en dormait plus la nuit et je savais qu’il avait pris conscience de tout ça à cause d’Alvaro mais, aussi, de Guillermo qu’il avait adopté. Par contre il ne m’avait pas dit avoir déjà remis les autres Pequeñas Manos à United For Youth. C’est Reed qui me l’appris. Je tiquai.

-Non. Il ne me l’a pas dit, ça… Vous êtes sûr que Carlos dit vrai ? Il peut parfois dire des conneries quand il est frustré. Et il l’est souvent, ces derniers temps. Mais ça m’étonnerais pas de Finan même si… D’habitude, il me dit tout.

Quant à Fleming, c’était un cafard et j’étais persuadé qu’il était fier de ça. Jimmy, lui, se demandait bien de quoi d’autre il pourrait être fier. J’haussai des épaules.

-Il ne pense pas comme nous, boss… Alors, il doit être fier de pas mal de choses qu’il fait.

Fleming avait toujours été comme ça aussi loin que je me rappelle. Même gamin, c’était un enfoiré de première. Déjà à 12 ans, il faisait des coups tordus. Très tordus. Mais même avant ça, je savais qu’il était cinglé. Il est né cinglé.

C’est après ça que j’avais expliqué ce qu’il s’était passé et qui avait conduit à ma décision. Et, après ça, Jimmy me demanda mon avis sur United For Youth. Si ça pouvait être la bonne alternative pour les Pequeñas Manos. Enfin, les prochains vu que, apparemment, Finan nous avait tous doublés sur ce coup-là… De mon avis, tout dépendait d’où les enfants allaient tombés. Certains sauront s’adapter à une nouvelle vie, d’autres non… Et puis tout dépend de la famille où ils tombent aussi. Reed confirma ma pensée avant de dire que, dans la maison des Pequeñas Manos, les enfants n’avaient jamais manqué de rien et pas mal d’adultes s’occupaient d’eux. Jesse avait même parlé de Sonny. J’hochai de la tête.

-Sonny Robson. C’est un ambulancier. Un gars de l’Eastside. C’est un gars bien. Mais il connait les Los Diablos parce qu’il a toujours trainé dans les rues de l’Eastside depuis tout petit. C’est le pote de Stone. Il veillait sur les enfants et on l’a jamais empêché de les approchés parce qu’il a des connaissance médicale et qu’il savait quand il était temps d’agir et quand il fallait emmener les gosses chez Carlotta, le médecin du coin. Mais ouais, on veillait sur eux. Moi, je leur donnait des missions… Finan, lui, s’occupait de les rappeler à l’ordre quand ils déconnaient. Bref, ils n’étaient jamais vraiment seul.

Du moins, je le croyais. Parce que si c’était réellement le cas, Alvaro n’aurait pas appelé United For Youth. Je soupirai.

-Je crois que si les choses ont changé c’est parce que Alvaro a vu Guillermo à la télé… Jesse aussi est dans les journaux… J’ai aussi autorisé à ce qu’ils puissent aller à une fête chez Jesse… Ça a dû éveiller des jalousies…

Tout ça pour dire que je ne savais pas si United For Youth était la solution et je crois que, quelque part, c’était parce que je tenais à ces gosses et que je n’avais pas vraiment envie de les voir disparaitre dans le système. Disparaitre avec nos secrets… Et je fus d’autant plus inquiet vis-à-vis de ça quand Jimmy m’assura que personne ne pouvait garder un secret à Los Angeles. Je tiquai.

-Ouais… C’est bien ça qui m’inquiète.

Jimmy avait une idée et elle n’était pas mauvaise. Laisser le choix aux gosses. Chose que Finan ne leur avait pas laissé et je doutais sincèrement que ce qu’il a fait a plu à Ugo et Alejandra. Alejandra sortait avec un Los Diablos… Ils étaient déjà quasi adultes étant donné qu’ils avaient déjà 16 ans, si je calculais bien.

-C’est une bonne idée. Mais à partir de quand ce n’est plus des bébés ? Personnellement, des gosses comme Jesse, c’est des bébés tout le temps… Guillermo, lui, c’était plus un bébé à 4 ans… Il savait déjà utilisé un foutu lance-pierre à 4 ans… Ça aurait fait un très bon Los Diablos…

Et je continuais de réfléchir chose qui a dû se voir parce que Jimmy le remarqua et me demanda de parler librement.

-J’avais l’idée que, nous, on veille sur eux. On les laisse dans la maison, on les nourris, on les éduques comme on peut. On ne les envois par sur le terrain mais on les gardes jusqu’à-ce qu’ils soient adultes. Là, ils auront le choix. Ils pourront devenir Los Diablos ou ils pourront faire ce qu’ils voudront. Adulte, ils seront assez grand pour garder les secrets… Enfin, aussi bien qu’on puisse garder un secret à Los Angeles.

J’haussai des épaules.

-C’est peut-être égoïste mais il nous faut un minimum de contrôle. Parce que, des orphelins, il y en aura d’autres. La guerre ne fait qu’augmenter en intensité chaque jour.

On entendait toujours du bruit en haut mais, aussi, des paroles qui venaient de la cuisines où Carlotta s’occupait des enfants. Et je frissonnai à l’idée que ça soit eux qui puisse un jour se retrouver sans parents… Mais je chassai rapidement cette idée-là de ma tête.

@ Billy Lighter

-Non, je pense que Carlos a dit vrai. J’ai tourné un peu autour du quartier des Pequeñas Manos avant de venir ici et je n’en ai vu aucun. D’habitude ils reconnaissent ma voiture et sortent pour la surveiller et gagner ainsi un peu d’argent.

On parla un peu de Fleming mais ce fut vraiment anecdotique. Ce n’était pas ce qui m’amenait aujourd’hui, mais bien le sort des Pequeñas Manos dont Finan avait scellé le destin dans notre dos. Je me demandais si United For Youth était la bonne alternative pour les petits orphelins du gang.

Parce qu’ils n’étaient pas mal, dans leur petite maison de l’Eastside… Un immeuble qui avait, dans l’un des appartements, autrefois caché mon histoire d’amour avec une fille de l’Eastside, Maritza, avec qui je vivais aujourd’hui au grand jour.

Et, preuve qu’ils n’étaient pas si mal, Alonso m’en dit plus sur un certain Sonny Robson, un gars de l’Eastside, ambulancier, qui faisait beaucoup de bien aux petits. Qui leur offrait des cadeaux et savait aussi quand il fallait les soigner.

Je souris et tendis mon verre vide vers Alonso pour qu’il le remplisse.

-Ainsi la vie n’est pas si mal pour eux au sein du gang… Seul Alvaro s’y sentait mal… Il aurait du venir t’en parler. Mais il en a choisi autrement.

Alonso pensait que le petit Alvaro était jaloux de voir que Guillermo et Jesse avaient une toute nouvelle vie… Des parents, une notoriété… Evidemment ça en ferait saliver plus d’un.

Bref, Alonso ne savait pas vraiment si United For Youth était LA solution. Mais c’était une alternative intéressante.

Je lui énonçai alors mon idée mais Alonso se demanda quand ce n’étaient plus des bébés.

Je fis la moue.

-A partir du moment où ils savent se débrouiller seul pour manger, pisser et chier tout seul. Il faudra qu’ils puissent se débrouiller seuls maintenant qu’Isabel travaille pour moi.

Mais je sentais qu’Alonso avait une autre idée en tête et je tirai sur ma cigarette en l’écoutant attentivement. Il voulait entraîner les enfants, sans les mettre sur le terrain jusqu’à ce qu’ils aient atteint l’âge adulte… Et là, ils pourraient choisir leur voie. Soit rester dans le gang, soit tracer leur propre chemin.

Je frottai mon menton.

-C’est une belle alternative. Mais tu oublies une chose, Alonso… Si on veut qu’ils puissent avoir un autre avenir que celui de Los Diablos, ils devront être éduqués, savoir lire, écrire et calculer… Tu connais quelqu’un capable de faire tout ça pour eux, de leur apprendre tout ça ?

Je tirai sur ma cigarette.

-Il y a bien la femme de Jack Perry. Après tout, c’est grâce à moi et à des faux papiers que je leur ai fourni qu’ils ont pu adopter Jesse… Ils me sont redevable…

Je soupirai.

-Mais saura-t-elle garder le secret ? Elle l’a fait jusqu’ici, mais voir les enfants dans leur environnement risque peut-être de la choquer.

@ Billy Lighter

Finan avait trafiqué la sortie des derniers Pequeñas Manos dans mon dos et j’étais quand même assez vexé qu’il n’ait pas eu le courage de me le dire quand on s’est parlé tout à l’heure. Sans doute avait-il entendu, dans ma voix, que je n’avais pas vraiment envie de tous les envoyer dans le système. C’était notre point de désaccord.

Je ne dis rien quand Reed confirma ça avant qu’on n’entre dans le vif du sujet alors que j’avais expliqué ce qu’il s’était passé ses derniers jours. On conclut tous les deux que les enfants étaient bien entourés même s’ils vivaient seuls dans la maison qui leur avait été attribué. Jimmy déclara que la vie n’était pas si mal au sein d’un gang et que seul Alvaro s’y sentait mal. Aucun autre ne c’était plein, c’est vrai. Si, Jesse de temps en temps mais il avait été tout aussi triste de partir. Alvaro était parti sans réellement d’état d’âme. Mais ça s’expliquait facilement.

-Alvaro est une grosse tête. Il est toujours plongé dans ses livres. Et la dernière fois que je l’ai vu, il lisait Oliver Twist. Ça a dû lui donner des idées. Je ne lui en veux pas. Et c’est sans doute pour un mieux qu’il soit parti, ses soucis de santé auraient pu lui être fatal lors de surveillances.

Alvaro est épileptique. Il a un traitement carabiné.

-Et je crois qu’il avait peur de vous. Il n’aurait jamais été vous en parlé.

Je dis ça en esquissant un sourire. Pour les rares qui savent que Reed est notre chef, peu étaient ceux qui n’en avaient pas peur. Moi, Jimmy Reed avait été mon ami avant d’être mon chef, donc, je n’en avais pas peur. Je l’admirais mais je n’en avais pas peur. Quant à Finan, il n’en avait pas peur non plus mais il avait l’art de parfois parler trop… Ou d’agir trop… Comme cette fois.

Je donnai mon avis sur United For Youth sans être certain que ça soit la bonne solution. Jimmy, lui, avait l’idée de laisser choisir les enfants dès qu’ils ne seraient plus des bébés. Restait à définir quand serait ce moment mais je fis une moue quand Reed donna une indication sur ce moment.

-Donc vers 3 ou 4 ans, environs ? Je peux vous assurez qu’à cet âge, boss, ils ne sauraient même pas choisir comment s’habiller le matin. Ils ne comprennent même pas ce qu’est un gang à cet âge… Je dirais qu’ils en prennent conscience vers 7 ou 8 ans… Tout dépend du gosse. Certains sont malin et d’autres ne comprennent les choses que très tard. Croyez-moi, j’ai plein de gosses de tout âge et je sais ce que c’est… Le choix, ouais, je leur laisserais à 7 ans. Enfin, si vous êtes d’accord, boss.

Quant au fait qu’ils se débrouillent seul, j’haussai des épaules. Ils n’étaient jamais toujours tellement seul même sans Isabel. Un membre des Los Diablos passaient au moins tout les jours. Personnellement j’y passais une fois tous les trois jours environs. Et un gosse, c’est plutôt débrouillard.

Mais j’avais une autre idée que ça… Une idée plus égoïste, en fait. Je n’avais pas envie d’envoyer les enfants dans les systèmes certaines parce que je savais que s’ils y entraient, on ne les reverrais jamais. Et certains étaient les enfants d’amis proches de moi. Des amis auxquels j’avais promis de faire attention à leurs gosses si jamais ils venaient à crever. Finan m’avait fait trahir cette promesse en envoyant Ernesto, Ugo et Alejandra chez United For Youth.

Alors, je balançai mon idée et Jimmy et il la considéra la trouvant même très bonne. Je voulais les garder jusqu’à l’âge adulte. Une fois adultes, ils seraient sous leur propre responsabilité. Mais il y avait un hic et je fis la moue réfléchissant à l’option que pourrait être la femme de Jack Perry. Je soupirai.

-Elle a gardé le secret, c’est vrai. Pourtant, je suis sûr que Jesse lui a absolument tout dit. Ce gamin ne sait pas garder des secrets. Sauf quand il est devant les flics. Et je sais qu’elle a vu plusieurs fois Alvaro et Alejandra en dehors du goûté où j’ai permis au Pequeñas Manos d’aller pour voir Jesse. Mais j’ai peur qu’elle ait un cas de conscience. Si Quinn en a eu un, c’est clair que la femme de Perry pourra en avoir un aussi… Surtout si les enfants sont jeunes.

Je réfléchis à nouveau.

-On peut utiliser cette option a petite dose. Le reste du temps, Carlotta, ma femme, pourra s’occuper d’eux pour leur éducation. Nos enfants vont à l’école, la journée, elle pourra éduquer les petits… En espérant que les prochains orphelins ne seront pas tous des enfants en bas-âges parce que, si c’est le cas, il faudra que quelque reste avec eux constamment… Une fille du gang, par exemple, qui serait payé pour ça.

Je fixai Reed droit dans les yeux.

-En espérant, tout de même, qu’il n’y ait plus d’orphelin… Mais j’en doute… La guerre monte en intensité et on manque d’effectif. J’ai du mal de recruter… Beaucoup de gens rejoignent les rangs des New Soldados parce que les salaires sont plus attractifs. Fleming a une stratégie bien rôdée. Il utilise les blacks et les latinos pour dealer, les femmes pour se prostituer et il envoie les ex-membres de la Confrérie Aryenne nous mener la vie dur. Ceux-là sont dirigés par le lieutenant de Fleming qui est loin d'être un abruti. Je n’arrive qu’à recruter ceux qui ne réussissent pas le test d’entré chez les New Soldados et qui veulent se venger mais c’est rare ceux que Fleming relâche après une échec. Parfois, il les tue. C’est les rumeurs, en tout cas.

Je regardai un instant dans le vide avant de fixer Reed droit dans les yeux.

-Boss… Je pense que, cette guerre, on va la perdre…

J’en étais même certain…

@ Billy Lighter

J’écrasai mon mégot et frottai mon menton.

-Oliver Twist, un bon choix. Et oui, j’ai cru comprendre que c’était un autodidacte malheureusement épileptique. Mieux vaut donc pour lui qu’il soit placé en famille d’accueil.

Et Alonso ajouta que le petit avait peur de moi, et qu’il n’avait pas osé me parler de ses problèmes.

-Oui, je sais que les Pequeñas Manos comprenaient vaguement qui j’étais. Mais il n’aurait pas pu facilement m’en parler, je suis quelque peu inaccessible.

Je tiquai… Pas si inaccessible que ça. Le mini Fleming était arrivé jusqu’au-dessus de ma tour, deux fois. Hormis la hauteur, je ne vois pas ce qui pourrait empêcher Ward Fleming de venir me buter pendant ma sieste.

Mais revenons-en au point du jour. Les Pequeñas Manos. A partir de quel âge pourraient-ils choisir leur voie ? Je laissai Alonso réfléchir tout haut. Après tout, il avait plus d’expérience que moi là-dedans. Et il fixa l’âge du choix à 7 ans.

-Vas pour 7 ans…

Mais tout ça, si on voulait laisser le choix aux enfants, ne se feraient pas s’ils avaient un retard scolaire trop grand. Ça poserait des questions, on se demanderait d’où ils venaient… Alors je proposai la femme de Perry qui, comme son fiancé, avait gardé le secret des origines de Jesse. Mais, comme le disait Alonso, on était pas à l’abri d’un cas de conscience.

Je me rallumai une cigarette et pris une gorgée de whisky, remplissant le verre de mon second en même temps.

Il proposa alors sa propre femme pour veiller à l’éducation des enfants et je savais qu’elle serait superbe dans ce rôle.

Je souris.

-Dis merci d’avance pour moi à Carlotta.

Mais Alonso s’inquiéta pour les enfants en bas-âge.

-Quant aux bébés, on les placera dans des familles à nous. Je sais que certaines latinas ont perdu leur moitié ou leur enfant. Et qui sait si finalement, l’enfant ne grandira pas là, avec le même choix à la clé ? Sinon, ils iront dans la maison des Pequeñas Manos dès l’âge de trois ans. Mais ton idée n’est pas mauvaise non plus. Reste à trouver la perle qui s’occuperait des bébés et qui viverait donc dans l’immeuble des Pequeñas Manos.

Ensuite, Alonso, l’air très inquiet voir déprimé, m’exprima ses inquiétudes face à la guerre qui faisait rage. Et je m’en sentais responsable. Il m’expliqua comment fonctionnait le gang d’El Lider et je pinçai les lèvres. C’était justement pour cette façon de fonctionner que j’avais rétrogradé Ward. Il ne vivait que par la violence.

Je repris la parole après un bref silence.

-Trouve une fille pour s’occuper des bébés. Parle à Carlotta de l’éducation des enfants. Dis aux Los Diablos que tu doubles leur salaire, comme prime de guerre… Et dis leur qu’il y aura une récompense pour quiconque tuera Ward Fleming ou l’enverra en prison.

Je regardai Alonso dans les yeux.

-Sauf si c’est moi qui le fait avant.

Je vidai mon whisky d’une traite puis me levai.

-Si tu n’as plus de questions, je vais te laisser profiter de ta famille. Tu l’as bien mérité.

@ Billy Lighter

Jimmy trouvait, tout comme moi, que le sort d’Alvaro n’était pas si mal. Son état de santé, son imagination débordante et son intelligence n’aurait pas fait en sorte qu’il se sente bien en tant que Los Diablos. La preuve, il avait lui-même trouvé sa porte de sortie. Tout ce que je pouvais espéré c’est qu’il tombe sur un bonne famille.

Quant à parlé à Reed de ses problèmes, j’expliquai que le petit avait certainement peur de Jimmy. Mais il aurait, de toute façon, eu du mal d’entrer en contact avec Reed étant donné qu’il était inaccessible. J’hochai de la tête mais ne manquai pas d’ajouter :

-Les gamins ont de la ressource…

De la ressource mais peut-être pas assez pour choisir de leur destin avant leur 7 ans. C’est ce que je proposai à Reed. Qu’ils choisissent une fois cet âge atteint. D’après moi, c’était l’âge où ils arrivaient à prendre conscience de leur situation. Ça dépendait toujours d’un gosse à l’autre mais on voit très vite ce que chacun peut potentiellement devenir dès qu’ils sont en âge de se débrouiller seuls.

Et comme on en venait doucement à l’idée de garder les gamins là où ils étaient, Jimmy déclara qu’il faudra les éduquer… Il y avait bien la femme de Perry mais ça restait un choix risqué. Je me disais, donc, que ma propre femme pourrait remplir ce rôle. Elle adore s’occuper des enfants et a l’habitude de les aider avec leurs devoirs. Elle n’aura pas de mal à apprendre à lire à des orphelins. Jimmy me dit de la remercier d’avance. J’hochai de la tête.

-Je lui dirais.

Mais il restait le problème des bébés mais Jimmy avait une solution simple à ça. Placé les bébés chez des femmes de Los Diablos en manque de maternité était une bonne chose et pourrait faire en sorte que, finalement, ils soient adopté au sein même du gang. Pour les autres, ils seront mis à partir de 3 ans dans la maison des Pequeñas Manos qui serait tenu par une femme payée pour s’en occupé.

-Je chercherais la perle. Bien que je pense que la femme de Rafael pourrait remplir ce rôle. Depuis la mort de Rafael, elle déprime. Ce nouveau rôle pourrait lui redonner une raison de vivre.

Rafael était mon ami d’enfant et avait été éliminé par Fleming il y a quelques mois. Il aurait fait un parfait remplaçant à Finan… Désormais, je ne savais pas qui pourrait réellement remplir ce rôle surtout en temps de guerre. Une guerre qui ne cessait d’augmenter en intensité. On arrivait, jusqu’ici, à éviter les pertes d’hommes… Mais ça devenait de plus en plus compliqué et j’avais l’impression que quand les pertes arriveront, elles arriveront en masse. Je savais que Fleming ne sera satisfait que quand il en aura tué assez et qu’il aura pu, aussi, m’éliminer moi et éliminer Finan. Finan m’avait d’ailleurs dit tout à l’heure qu’il était la cible principale actuelle de Fleming.

C’est toutes ces inquiétudes que je fis part à Reed ainsi que la stratégie qu’utilise Fleming afin de nous mettre à genoux. Il avait plus d’effectifs, il les payait mieux et, surtout, il n’avait pas le moindre remords quand il s’agissait de frapper fort. Jimmy me donna alors ses instructions. Trouver quelqu’un pour s’occuper des bébés, donner sa nouvelle mission à ma femme, dire aux Los Diablos que leur salaire va être doublé et mettre la tête de Ward à prix.

C’était satisfaisant. Bien que Reed me croyait bien capable d’envoyer Ward en enfer avant. Je le regardais d’un air très sérieux.

-C’est clair que s’il se retrouve face à moi, je ne le raterais pas. Je vérifierais dix fois s’il est mort, cette fois.

Il méritait de mourir. Même la prison, c’était une sanction trop douce pour lui.

-Quant au reste, je ferais tout ça, boss. Dès aujourd’hui. Et je rappellerais Finan à l’ordre, c’est promis.

Il ne me l’avait pas demandé mais je devais le faire. Il avait joué son propre petit jeu dans mon dos. Il doit se rappeler qu’il n’est pas en haut de la hiérarchie parce que c’est une rockstar à en devenir.

Reed était prêt à prendre congé et c’est là qu’on entendis à nouveau quelques armoires claquer à l’étage. Je roulai des yeux et me levai.

-Je n’ai plus de questions. Et, ouais, « profiter de ma famille » est un bien grand mot… Je vais surtout aller engueuler ma fille… Parce qu’il n’y a pas que Fleming qui me pourri la vie, il y a aussi sa foutue descendance.

Je raccompagnai Jimmy à la porte.

-Merci d’être venu, boss. En espérant que les choses s’arrangent.

C’est à peu près tout ce que je pouvais espérer.

@ Billy Lighter