Conrad était de retour !

Évidemment, je ne pouvais faire autrement que de regarder discrètement vers lui dès que j’en avais l’occasion. Heureusement pour moi, Jordan Keller n’était pas là aujourd’hui. Si ça avait été le cas, il n’aurait fait que de me taquiner d’un regard moqueur et j’en serais devenue rouge de honte. Il tentait de me faire avouer mes sentiments pour l’inspecteur Greenly mais malgré toutes ses tentatives, je tenais bon. Je n’étais pas prête à me dévoiler et puis je doutais que mes sentiments puissent être réciproque.

Je mourrais d’envie d’aller vers Conrad et de lui demander comment c’était l’Irlande et s’il avait eu beaucoup de plaisir. Je fantasmais même à l’idée qu’il puisse me dire qu’il aurait eu bien plus de plaisir si je l’avais accompagné et ensuite, toujours dans mes songes, il se levait et m’enlaçait d’un bras pour me ramener à lui avant de m’embrasser passionnément.

Conrad était plongé dans sa paperasse alors que moi, j’étais dérangé dans mes rêveries par le téléphone qui sonnait à tout bout de champ. C’était la pleine lune, j’aurais dû m’en douter en me préparant ce matin que la journée serait infernale. Les gens s’étaient passé le mot pour se plaindre de leur voisin, des chats errant, des enfants qui jouaient trop près des voitures stationnés ou de sans abris qui faisaient un peu de grabuge. Pleins de petits feux mais jamais rien de sérieux. Je passais mon temps à envoyer des patrouilles aux quatre coin de la ville ou à référer les gens aux services pertinents.

Une dame, par exemple, appela pas moins de trois fois pour se plaindre de son époux qu’elle soupçonnait d’être infidèle. J’étais triste pour elle et jamais de la vie je n’aurais songé banaliser sa souffrance mais son problème n’était pas de notre ressort. C’était difficile pour elle de comprendre que la police ne pouvait pas l’aider en suivant son mari dans ses déplacements.

- Vous pourriez peut-être demander à une amie en qui vous avez confiance de le suivre ? Je ne sais pas quoi vous suggérez d’autres madame mais s’il se montre violent ou que vous craignez pour votre sécurité, nous interviendrons rapidement, soyez en rassurée.

Je raccrochais puis je frottais mon visage d’une main en reprenant mon crayon de l’autre. Pauvre femme, tout de même ! C’était triste de l’entendre et je comprenais à quel point elle pouvait être blessée. Je ne m’en remettrais pas si Conrad m’était infidèle, bien que nous n’étions pas un couple et par conséquent, s’il se faisait une petite amie, il ne me serait pas infidèle. J’en serais tout de même très bouleversée et je détesterais cette femme de toutes mes forces !

Je soupirais avant de m’étirer et, heureuse qu’il soit enfin midi, je me levais et pris mon courage à deux mains, avant de prendre mon repas et j’allais voir Conrad pour lui proposer de manger avec moi. Il n’y avait rien d’engageant que de demander à un collègue de manger ensemble.

- Inspecteur Greenly, je me disais que ce serait plaisant de diner ensemble, si vous avez votre  lunch.

S’il avait prévu de sortir pour manger, je devrais trouver une autre façon de l’approcher et ça se ferait sans aucun doute sous le regard moqueur de Jordan Keller ! Il ne pouvait pas être absent du travail tous les jours.

@ Billy Lighter

Il fallait, bien sûr, que Jordan ait pris congé le jour même ou j’étais revenu d’Irlande… Pas que je refusais que Jordan prenne des congés. C’était son droit le plus strict d’en prendre surtout que, soyons honnête, prendre des congés n’était pas notre truc mais j’aurais bien voulu pouvoir le voir et lui raconter mon voyage tout en surveillants les rues de Los Angeles.

Mais bon, il avait congé et comme je détestais patrouiller avec quelqu’un d’autre que lui, j’avais demandé à rester au commissariat pour m’occuper de tout ce qu’il y avait à faire ici comme surveiller les personnes coincées en cellule et faire de la paperasse que j’avais négliger avant de partir en Irlande.

J’étais à mon bureau à m’amuser à signer des choses et à en remplir d’autres. C’était le côté le moins drôle du métier même si on était plus soulagé depuis que le commissariat avait eu la bonne idée d’engager une secrétaire. Katy était celle secrétaire. Un petit bout de femme qui en plus d’être gentille nous facilitait largement la tâche. C’était, d’ailleurs, elle que j’écoutais alors que le téléphone sonnait toutes les cinq minutes pour diverses raisons, la plupart du temps des raisons dont on ne pouvait, malheureusement, rien faire. Un peu comme quand des parents téléphonaient au commissariat rien que pour faire peur à leurs enfants. J’ai toujours trouvé ça débile et, surtout, ça nous faisait souvent perdre un temps précieux pour des conneries.

Et l’appel qu’avait, actuellement, Katy était aussi désolant que drôle… Une femme appelait, apparemment, parce qu’elle pensait que son mari était infidèle. Bordel, si on devait embarquer tous les maris et femmes infidèles de Los Angeles, autant enfermer presque tout le monde. Parce qu’il devait il y en avoir des tonnes.

La pauvre Katy proposa des solutions mais fit bien comprendre à la pauvre femme qu’on ne pourrait rien faire pour elle. Elle était encore gentille, la petite Katy. Elle aurait simplement pu dire qu’on ne pouvait rien faire sans perdre son temps. Mais elle avait de la patience. Ce que je n’aurais pas eu.

Après cet appel, j’avais jeté un œil à l’heure pour voir qu’il était temps de bouffer. J’avais pris mes tartines pour manger au cas où j’aurais eu un squatteur de cellule mais ce n’était pas le cas. Pas encore en tout cas. Mais j’allais tout de même sortir mes tartines après avoir écrasé ma cigarette quand Katy s’était approchée de moi pour me proposer qu’on dîne ensemble.

Je pris d’abord un air surpris avant de sourire.

-Avec plaisir ! C’est mieux que de manger seul avec moi-même.

Jordan me manque. Je ne peux pas le nier. Les journées de travail ne sont vraiment pas pareil sans lui.

Je m’étais levé.

-On peut aller manger en face ? Ils ont du bon bacon et ils font des Irish Coffee.

Elle semblait d’accord parce que, très vite, on fut assis dans le dinner d’en face à une table près de la fenêtre. C’était la première fois que je mangeais avec Katy qui, visiblement, se sentait aussi seule que moi, aujourd’hui.

-Alors ? Jordan s’est bien comporté pendant mon absence ? Je parie qu’il squatté le commissariat, lui aussi, pendant son temps de travail.

J’avais rigolé en disant ça. Je n’avais pas encore eu le temps de téléphoner à Jordan depuis mon retour mais ça ne servait à rien vu que, demain, il allait être de retour au boulot.

@ Billy Lighter

J’avais rassemblé mon courage pour demander à Conrad s’il avait envie de partager son heure de lunch avec moi. Jordan se serait moqué de moi à me voir aller mais d’un autre côté, s’il avait été là, je n’aurais pas fait cette demande à son binôme et puis ils auraient fort probablement été en patrouille tous les deux alors j’aurais mastiqué mon sandwich assise à mon bureau ou dans l’air de repos avec les autres présents au poste.

Conrad sembla surpris par ma demande mais il accepta et proposa même que nous allions manger en face. J’avais mon repas mais il serait encore bon demain. Je ne pouvais pas refuser une proposition contenant à la fois les mots bacon et café.

- Comment dire non à du bacon et un Irish Coffee ?

Le temps de placer le répondeur en fonction et nous étions prêt à traverser la rue pour nous remplis l’estomac. Je ne savais pas si j’arriverais à manger, j’anticipais de me sentir trop nerveuse et vouloir bien paraitre devant Conrad que pour me laisser à dévorer mon assiette à la hauteur de ma faim.

On nous apporta les cartes mais je savais ce que je voulais : des œufs et du bacon accompagné de la salade de fruit et d’un café noir. Rien de compliqué et qui ne risquerait pas de me rester sur l’estomac pour le reste de l’après-midi. On donna donc chacun nos commandes respectives et ensuite Conrad me demanda si Jordan s’était bien comporté pendant son absence. Sa question me fit rigoler.

- L’inspecteur Keller s’est très bien comporté, oui. Il avait plein de paperasse à vérifier et des rapports non signer à signer avant d’être classé. Il est très sympathique.

Évidemment, je ne parlais pas de la conversation que j’avais eu avec Jordan. Je ne voulais pas me dévoiler même si cela pourrait signifier une ouverture. Peut-être que je n’étais pas prête ou alors que je craignais d’être rejetée par Conrad ce qui, en plus d’être blessant, créerait un froid immense au commissariat.

- Il m’a raccompagné chez moi à la fin de notre soirée de boulot et vous avez dû en entendre parler ? Nous avons prêté mains fortes à Ward Fleming. L’inspecteur Keller devait en bouillir par en dedans mais nous n’avions pas le choix de l’aider.

Je me souviendrais longtemps de cette fin de soirée, en tous les cas !

- Je crois que l’inspecteur Keller aurait bien aimé vous avoir avec lui ce soir-là, ne serait-ce que pour l’évènement en tant que tel. En tous les cas, ça a fait jaser dans le commissariat. Je pense que plusieurs policiers auraient aimés être à notre place uniquement pour avoir le plaisir de voir Ward Fleming se vider de son sang. Mn chemisier n’y a pas survécu, malheureusement !

Je soupirais en soulevant les épaules. Ce n’était pas très grave, ce n’étais qu’un morceau de vêtement. Puis je réalisais que depuis que nous étions assit à cette table, je ne faisais que parler et que Conrad devait subir mes histoires.

- Je parles beaucoup trop, désolée ! Vous revenez de voyage ce qui est bien plus intéressant que l’hémoglobine de Fleming !

@ Billy Lighter

Je ne m’attendais pas à ce que Katy me propose de dîner avec elle. C’était probablement la première fois qu’elle me parlait d’autre chose que de papiers ou de choses qui concernaient le travail.

Ma surprise passée, j’avais accepté proposant d’aller dîner en face. C’était mieux que de manger au commissariat où, de toute façon, personne n’avait décidé de squatter la cellule. C’était rare alors autant en profiter le temps que ça durait et Katy était une fille sympathique alors j’étais sûr que ça sera bien mieux de manger avec elle qu’avec le mur…

Elle accepta d’aller en face et je souris.

-On ne peut pas dire « non » au bacon et encore moins à l’Irish Coffee, tu as raison !

On se prépara à partir avant de traverser la rue pour arriver au dinner d’en face. Rapidement on eut la carte mais aucun d’entre nous ne la lu car on semblait déjà savoir tous les deux ce qu’on allait prendre. D’ailleurs, notre commande fut fort similaire à la différence près que je ne pris pas de salade de fruit mais une mousse au chocolat et que je transformai le café noir en Irish Coffee.

Je commençai, alors, la conversation en parlant de Jordan. Katy et moi travaillons au commissariat alors c’est des derniers jours où je n’étais pas là et où Jordan avait été seul que je dirigeai, naturellement, la conversation.

Je rigolai quand elle déclara que Jordan s’était bien comporté. Elle avait rigolé aussi. Un joli rire que je n’avais, malheureusement, pas souvent l’occasion d’entendre. Donc, comme ça, Jordan avait bel et bien squatté le commissariat pendant mon absence.

-Ah les rapports à signer ! Lui et moi, on oublie souvent ce genre de chose… Désolé pour ça Kat’.

C’était à elle de tout vérifier et elle devait trouver ça fatiguant, à la longue, de devoir sans cesse courir après les signatures. Mais bon, les rapports, c’est pas ce qu’on préférait mon ami et moi.

Mais Katy n’en avait pas fini. Elle me parla du soir où Jordan l’avait raccompagné chez elle et où ils avaient aider Ward Fleming. J’entrouvris la bouche. J’avais bel et bien entendu de loin, ce matin, une conversation comme quoi Fleming s’était fait poignardé au plein cœur de South L.A. mais je ne pensais pas que c’était Jordan, le flic qui l’avait aidé… Maintenant, je le savais… Je me mordis la lèvre. Jordan et moi, on était pas du genre à laisser crever des gens comme ça. On en avait déjà vu assez crever au Vietnam. Même si le type en question était Ward Fleming, il fallait intervenir.

Pourtant, un Ward Fleming mort aurait aidé Jordan avec le petit Grant… Parce qu’il ne cessait de se casser la tête sur le dossier « Fleming » depuis que Ward avait demandé la garde du pauvre gosse.

Et Katy me parla du sang et de son chemisier ruiner. Elle ne semblait pas si secouée malgré cette expérience preuve qu’elle avait du cran, la charmante secrétaire.

Elle s’excusa de parler beaucoup trop et trouvait mon voyage en Irlande bien plus intéressante que son récit sur Fleming. Je rigolai. Elle était mignonne quand elle s’excusait.

-Moi, je trouve ton récit très intéressant ! Oh et tu peux me tutoyer aussi.

Je souris et poursuivis :

-J’avoue que Jordan a dû pas forcément bien le vivre. Il cherche à tout prix à coffrer Fleming pour éviter que son pupille ne finisse entre les mains de Ward. Mais toi ? Pas trop choqué par ça ? Tu n’as pas forcément l’habitude de ce genre de scène… Puis, faut du courage pour encaisser les remarques de Fleming, parce qu’il peut être très chiant.

Ouais… Personnellement, il faisait toujours mine qu’il ne me comprenait pas à cause de mon accent. Un vrai petit salop, le Fleming.

-Sinon, moi, en Irlande, c’était bien. Je suis aller voir ma famille. Enfin… Mes parents vivent à L.A. mais le reste de ma famille est en Irlande. On a surtout squatter les pubs, en fait. J’ai juste remarqué que j’ai pris un peu trop goût au soleil californien et que la pluie, je m’en lasse vite.

Je rigolai avant de sourire à Katy.

@ Billy Lighter

J’étais ravis que Conrad accepte de partager un coin de table avec moi pour le lunch. Nous n’étions que peu nombreux en cette heure du midi au commissariat et il me semblait que ce serait plus plaisant de manger nos sandwichs ensemble que chacun dans notre coin. Ça m’avait demandé une bonne dose de courage pour lui proposer de diner ensemble et si j’avais espéré qu’il accepte ma proposition, je n’avais pas prévu qu’il la transforme en sortie au restaurant d’en face. J’avais été ravie et j’avais évidement accepté sa proposition d’autant plus que je ne pouvais pas refuser du bacon et un café !

Nous avions donc fait le court chemin et prit une banquette avant de rapidement regarder la carte que nous proposais le restaurant. J’avais décidé pour un déjeuner et un café noir alors que Conrad lui, prenait un Irish Coffee. Il avait ensuite amorcé la conversation en me parlant de Jordan Keller et ça me fit sourire. J’appréciais tous mes collègues du commissariat mais je pouvais avouer avoir un faible pour le duo formé des Inspecteurs Greenly et Keller.

- En effet, vous oubliez souvent mais c’est mon travail de les vérifier, et ça me fait plaisir d’aller vous déranger pour une signature.

Ça me donnait une raison d’aller les voir et bavarder un peu. C’est comme ça que j’avais eu cette belle et amusante conversation avec Jordan l’autre soir et que j’avais pus obtenir réponses à mes questions concernant l’absence de Conrad mais ça, je n’allais pas l’avouer devant le principal intéressé.

Je lui racontais ensuite comment notre soirée s’était terminée. Ça avait été toute une aventure et pas des plus banales ! Secourir Ward Fleming qui venait de se faire poignarder, ça méritait d’être raconté. Conrad semblait surpris et trouvait l’histoire intéressante alors que moi, je m’excusais de monopoliser la conversation avec mes histoires. Il en profita aussi pour me demander de le tutoyer.

- Je tâcherai de te tutoyer alors.

J’avais dû rougir sur le coup.

Conrad en revenait pas de cette aventure alors qu’il disait que ça avait dû être un sacré combat de moral pour Jordan qui était justement en pleine tourmente juridique pour la garde de son pupille. Forcément, si Ward n’avait pas été secouru ce soir-là, ça lui aurait facilité la tâche mais son engagement envers les forces de l’ordre l’avait empêché d’ignorer Ward. Je trouvais ça très admirable de la part de Jordan, ça démontrait à quel point il était moralement bon.

- Oh moi, je n’ai fait qu’aider l’inspecteur Keller et j’ai comprimé la plaie de Fleming après l’avoir désarmé. Vous savez…

Je baissais les yeux doucement en rigolant timidement avant de regarder Conrad et de me reprendre.

- Tu sais… Il pouvait bien dire ce qu’il voulait Fleming, j’avais le loisir de comprimer sa plaie et de le faire grimacer de douleur. Mais pour son bien, évidement !

Ça sous entendait que j’avais un peu fait exprès de faire souffrir Ward en prétextant ne pas avoir le choix d’appuyer fermement sur sa blessure pour éviter qu’il y passe. À l’heure qu’il était, il ne devait même plus se souvenir de moi et des imbécilités qu’il m’avait dites.

La conversation se dirigea pour mon plus grand plaisir sur le voyage de Conrad. J’étais ravie de l’entendre me parler de son séjour et sans même faire d’effort, je parvenais à m’imaginer assise avec lui dans l’un des pubs qu’il avait visités. J’aurais aimé pouvoir l’accompagner mais n’étant que simple collègue, même dans mes rêves les plus fous, il n’y aurait jamais eu moyen qu’il ne songe à m’inviter.

- Ça doit être romantique quand même une belle pluie avec le paysage d’Irlande !

J’ouvris de grand yeux en réalisant que j’avais soufflé ça en le regardant presque amoureusement ! Il allait me croire complètement cinglée et il me placerait en cellule à notre retour de lunch pour m’avoir à l’œil plutôt que derrière lui à mon bureau !

- Je n’ai pas beaucoup voyagé, c’est pour ça que je rêve presque poétiquement à tous les paysages qu’on puisse voir ailleurs qu’à Malibu.

Le coucher de soleil sur la plage était certainement un des attraits le plus couru des touristes alors qu’il n’avait plus vraiment d’intérêt pour les Angelenos.

@ Billy Lighter

Je m’étais excusé à Katy pour tous les papiers qu’on oubliait de signer. Mais elle ne m’en tenait pas rigueur disant que c’était son travail de vérifier et que ça lui faisait plaisir d’aller en quête de signatures. Je rigolai à ça.

-Alors si tu es contente, on oubliera plus souvent.

J’imaginais que Katy était le genre de personne à détester être au travail et n’avoir rien n’à faire. Un peu comme moi et Jordan. On aimait pas la violence pour deux sous mais quand L.A. était calme (ce qui n’arrivait pas souvent), on s’ennuyait.

Elle me raconta, ensuite, ce qu’il lui était arrivé avec Jordan. Ils avaient sauvé la vie de Ward Fleming. Ce qui n’arrivait pas tous les jours, il fallait bien le dire. Je devais avouer que j’aurais voulu être là… Jordan avait dû se sentir bien mal ce jour-là. Il avait dû être tirailler entre faire ce qu’il fallait faire et laisser crever Ward Fleming qui était l’un des pires virus de Los Angeles.

Katy s’excusa de monopoliser la conversation mais, moi, je lui demandai simplement de me tutoyer. Elle n’était pas en dessous de moi. Elle avait simplement un autre job. Je lui souris quand elle déclara qu’elle allait tâcher de me tutoyer.

J’avais souligné que Katy avait été bien brave pendant son intervention. Si Jordan n’était pas à son premier rodéo, ça devait être nouveau pour la pauvre Katy. Mais elle minimisa son implication disant qu’elle avait simplement désarmé et comprimé la plaie de Fleming. J’esquissai un petit sourire.

-En gros, tu as fais le plus gros du travail. Il y en a qui serait tombé là de voir tant de sang.

Elle ajouta que Fleming avait pu dire tout ce qu’il voulait, Katy pouvait se venger en comprimant plus fort la plaie. Je rigolai à ça. Elle manquait pas de cran.

-Tu as bien fait. Il a parfois une trop grande gueule.

Après ça, Katy m’avait questionné sur mon voyage en Irlande. J’avais parlé des pubs et de la pluie et je vis que le regard de Katy était plus rêveur quand elle déclara que ça devait être romantique une belle pluie en Irlande. Je souris.

-C’est aussi très mouillé. Mais, ouais, ça a son charme.

Il y avait une drôle de lueur dans son regard entre le rêve et… Autre chose que je n’arrivais pas à décrire. Elle ajouta n’avoir jamais beaucoup voyagé et que, du coup, ça la faisait rêver.

-C’est vrai que Malibu, on s’en lasse vite. Mais voyager ça vaut le coup. Surtout quand on va voir sa famille. C’est bien d’aller en voyage en famille ou d’aller quelque part où on connait les gens. Mais tu as peut-être un petit ami pour t’accompagner quelque part, non ?

Je ne sais pas pourquoi mais je n’imaginais pas vraiment qu’une femme comme Katy puisse être célibataire. Elle était jolie et intelligente.

@ Billy Lighter

Conrad était mignon alors qu’il s’excusait pour toutes les signatures qu’il oubliait d’apposer en bas des documents. Ça ne me dérangeait pas, au contraire. Chaque fois, ça me donnait l’occasion d’aller le voir et de le regarder dans les yeux, de lui sourire même s’il ne me regardait pas vraiment, trop absorber par son travail. Il ajouta après que je lui ai répondu que ça ne me dérangeait pas du tout, qu’il en oublierait plus souvent alors.

- Je devrai vous dérangez plus souvent en ce cas.

C’est pendant que je lui racontais l’étrange soirée pendant laquelle Jordan Keller et moi avions secouru l’infâme Ward Fleming que Conrad me demanda de le tutoyer. Ça me fit rougir mais puisqu’il me le demandait, je ne pouvais qu’accéder à sa demande. Ce n’était pas pour être mignonne et bien paraitre si je vouvoyais les inspecteurs du poste mais parce que je trouvais que c’était plus correct et professionnel. Il y avait des inspecteurs qui avaient l’âge de mon père et que je ne me permettrais jamais de tutoyer mais tout comme Jordan, Conrad me demandait de laisser tomber cette formalité.

Je continuais donc mon récit qui impressionna Conrad en disant que bien des gens n’auraient pas supporté la vu du sang.

- En toute honnêteté, je n’aime pas beaucoup le sang mais l’adrénaline s’est emparée de moi et je n’ai fait qu’écouter les ordres de l’inspecteur Keller.

Et pour Fleming, il ne m’avait pas impressionné fort probablement parce que, justement, il était blessé et que Jordan était lui aussi dans la voiture. Autrement, j’aurais été beaucoup moins brave.

- Les grands parleurs sont monnaies courantes au commissariat. J’en entends de toutes les sortes des hurluberlus qui squattent nos cellules.

Je me faisais siffler, draguer, insulter, menacer. Il fallait apprendre à fermer les oreilles et rester la tête droite pour ne pas leur montrer que leurs paroles nous atteignaient. C’est la première chose qu’on m’avait dit après mon embauche et je m’étais efforcer de toujours appliquer ce conseil.

Mais nous avions suffisamment parlé de Ward et de cette soirée et je m’intéressais au voyage de Conrad. L’Irlande, raconté au travers ses mots me semblaient incroyablement romantique et cette pensée m’échappa. Je repris mes paroles en disant que parce que je n’avais jamais vraiment voyagé, tout me semblait bien plus beau qu’un couché de soleil à Malibu. Pour Conrad, voyager valait le coup et que comme il avait de la famille vivant loin, ça lui donnait l’occasion de le faire. J’allais lui dire que comme ma famille n’était pas vraiment loin et que donc, je n’avais pas sa chance mais il me demanda si j’avais un petit ami pour m’accompagner en voyage.

Je baissais les yeux, timide avant de faire non de la tête et de relever les yeux pour le regarder.

- Non, pas de petit ami.

Il n’y avait même pas d’ex petit ami, du moins, rien de significatif qui aurait pu mener à vivre une telle expérience.

- Ma famille est à Dayton en Ohio. J’ai quitté mon patelin pour m’installer ici parce que j’espérais rencontrer des célébrités en travaillant pour une maison de disque ou un journal mais finalement c’est le commissariat qui m’a donné ma chance. Je m’y plais, j’y suis bien.

Et j’y avais rencontrer l’amour de ma vie mais je n’avais pas le courage de le lui avouer alors qu’il était juste là, assit devant moi avec un Irish Coffee qu’une serveuse exagérément maquillée venait de déposer devant lui en lui offrant un clin d’œil sans équivoque.

@ Billy Lighter

La jeune Katy avait eu pas mal de cran pour passer un bout de chemin coincé dans une bagnole à devoir éviter que Ward Fleming ne se vide de son sang. C’était pas donné à tout le monde de garder son sang-froid dans ce genre de situation avec, en plus, cet emmerdeur de Fleming comme compagnie.

Mais Katy avait dit que l’adrénaline et Jordan l’avait aidé à surmonté ça. J’esquissai un sourire.

-C’est quand même pas donné à tout le monde.

Je l’avais aussi félicité pour avoir réussi à encaisser Fleming mais elle avait dit qu’elle avait l’habitude avec tous les gens qui passaient au commissariat. Ouais, ça, ça ne m’étonnait pas. Il y avait toute sorte de gens qui y passaient. Que ce soit des victime, de simple gens ou bien des criminels, ils pouvaient parfois être tous pénibles.

-Si ce n’était que les criminels… Leurs familles et parfois de simples gens qui passent, ils peuvent parfois être chiant. C’est clair qu’on en entend. Surtout toi, ces petits cons en cellules peuvent parfois t’en faire voir parce que tu es une femme.

Parce qu’en cellule, c’est souvent des hommes qui s’y retrouvait. Même s’il nous arrivait d’avoir des femmes. Souvent des prostituées prisent à se droguer ou à faire le tapin… J’avais mon top des branleurs qui se retrouvaient souvent chez nous. Je crois que le pire, c’est Carlos Martinez. Il peut être franchement chiant.

De Fleming, on passa à un tout autre sujet. C’est comme ça que j’en étais venu à parler de l’Irlande. C’était un beau pays même si j’y allais d’abord pour voir ma famille avant d’y aller pour les paysages. Je souris devant Katy qui semblait tout d’un coup bien rêveuse. Il faut dire qu’elle venait de m’avouer n’avoir jamais vraiment voyager.

Je demandai alors si elle n’avait pas l’intention de partir avec son possible petit ami. Ça le fit rougir alors qu’elle avoua ne pas avoir de petit ami.

-Sérieusement ? Wow… J’aurais cru que tu étais déjà casée.

Pour plein de raisons. Katy était gentille, jolie et intelligente. Elle avait tout ce qu’un homme pourrait vouloir chez une femme.

Elle déclara, ensuite, venir de l’Ohio. J’avais toujours cru qu’elle venait de Los Angeles mais ce n’était pas le cas. Son but, en venant ici, était de rencontrer des célébrités. J’en avais déjà rencontré dans le cadre de mon travail. Katy tardera pas à en faire de même.

-C’est clair que le commissariat ça doit pas être pareil que de bosser chez BSC ou MTI. Tu aurais travaillé là, tu en aurais vu des célébrités. Même si… Tu finiras par en voir dans nos cellules. Stone y est déjà venu plusieurs fois. C’est le pire conducteur de Los Angeles et il est bourré h24. Le mariage l’a même pas calmé. Il a perdu son permis il y a pas longtemps. On a déjà eu Finan Quinn aussi des tonnes de fois.

Et il y en avait eu d’autres. Katy tardera pas à les voir aussi.

-Les célébrités, ils sont comme nous… Pas plus malin, pas moins malin. Ils font des conneries… Le trucs c’est qu’ils pensent pouvoir avoir des passe-droit. Mais avec moi et Jordan, ça passe jamais.

J’avais rigolé à ça.

-En tout cas, je suis content que tu ais été engagé au commissariat. Sans toi, je sais pas ce qu’on ferais.

On croulerait sous la paperasse.

@ Billy Lighter

Conrad disait que j’avais assure lors du fameux soir où Jordan et moi avions sauvé la vie de Ward Fleming. Ça n’avait pas été simple de l’endurer envoyer des piques tout en se vidant de son sang et j’avais avoué avoir pressé un peu plus fort que nécessaire sur la plaie pour le faire grincer des dents. J’avouais n’avoir gardé mon sang froid uniquement sous le coup de l’adrénaline et parce que Jordan avait bien dirigé les choses.

- Peut-être qu’à force de côtoyer des policiers, je deviens un petit peu policier moi-même.

En tous les cas, j’en apprenais beaucoup et ce tous les jours en travaillant au commissariat. Je ne pouvais pas dire que je faisais un travail ennuyant et redondant. Avec tous les hurluberlus que je voyais défiler en cellule, j’apprenais à m’endurcir et à ne pas réagir promptement à toutes les âneries qu’ils pouvaient dire sous le coup de l’alcool, de la drogue ou de la stupidité la plus élémentaire.

- En effet, j’en vois de toutes les couleurs mais c’est tout de même moins pire pour moi que pour vous qui êtes dans le feu de l’action.

Je ne voudrais pas être dans leurs chaussures lors d’une décente ou bien une poursuite en voiture. Ils vivaient bien plus d’émotion que moi.

Nous laissions le commissariat et ses tracas de côté le temps de notre heure de lunch et la conversation dévia sur le voyage en Irlande de Conrad. Ça me faisait rêver que d’y penser et plus encore en imaginant le mignon inspecteur entrain de se délecter d’une bonne bière fraîche dans un pub !  Je nous voyais bien marcher sous la pluie et s’embrasser au tournant d’une rue juste avant d’entrer dans notre hôtel.

Je fus un peu surprise quand il me demanda si j’avais un petit ami pour m’accompagner en voyage. Conrad et moi n’avions jamais dépasser le degré de conversation de la politesse élémentaire alors de parler un peu plus intimement de soit était quelque peu inattendue.

- Et pourtant non. J’attends toujours mon prince charmant.

Il était assis tout juste devant moi mais il ne le savait pas encore.

Je confiais au passage que je ne venais pas de Los Angeles et que je m’y étais établie parce que je rêvais de travailler pour une maison de disque célèbre ou un grand magasine dans l’espoir de côtoyer des célébrités. Je ne regrettais cependant pas mon travail au commissariat, au contraire. Je m’y étais découvert une vocation, rien de moi !

- Effectivement, ils sont des humains comme n’importe qui et ne sont pas à l’abri du mauvais sort. J’ai vu passer le dossier de Stone dernièrement.

Je n’en parlais pas parce que je considérais que cela relevait de l’ordre du secret professionnel. Et puis ce qui se passait au poste devait y demeurer.

Conrad ensuite me fit le plus beau compliment qu’il ne pouvait me faire en ce moment. Je le regardais de longues secondes en souriant avant de secouer la tête comme si je réalisais que je le dévisageais.

- Je suis très heureuse aussi d’y travailler bien que si je n’y étais pas, vous prendriez votre café ici plutôt que de l’avoir servit directement à votre table de travail.

Je pris une gorgée de mon café en regardant Conrad et en me disant que cette nuit, j’allais certainement faire de très beaux rêves !

@ Billy Lighter