J’étais, donc, resté à New York. Après ma conversation avec Peyton, j’avais dit à David que tout allait bien et qu’il fallait juste que j’passe du temps avec Peyton pour qu’on puisse reconstruire notre couple. J’voulais pas que David parte, cela dit… Mais s’il voulait rentrer, j’l’obligeais pas à rester ici. Idem pour Collins. J’savais qu’elle avait un p’tit ami à L.A. mais que si elle voulait rester ou amener Abel ici, j’pouvais payer pour tout ça.

J’sentais que ce voyage allait me couper un pont mais ça importait peu. S’il fallait simplement qu’on reste un temps ensemble ici pour que les idées suicidaires s’en aille de la tête de Peyton alors c’était pas vraiment un problème. Et ça même si j’vivais chaque jour avec la peur qu’elle passe à l’acte en pleine nuit par exemple…

Et ça, même si mes nuits étaient méga courte. L’acouphène et le cauchemar continuaient à me torturer si bien que j’étais obligé de me relever la nuit, quand Peyton dormait, pour m’enfiler un cocktail d’anti-douleurs à la vodka… C’était efficace. J’dormais quelques p’tites heures avec ça. Mais j’avais l’impression que depuis ma discussion avec Peyton, les cauchemar étaient encore pires.

J’aurais voulu voir Lizzie mais l’était à L.A… New York, c’était la ville de Peyton. Un endroit où elle se sentait bien. J’comprenais maintenant ce que ça faisait d’être constamment déraciné comme elle l’avait été à L.A…

Bref, j’en venais à espérer que le p’tit naisse plus tôt rien que pour espérait qu’après ça, Peyton veuille bien rentrer à L.A… Parce que vivre à l’hôtel, j’aime pas spécialement ça, en plus.

Puis, y’avait mes parents. J’avais pas plaider pour qu’ils s’en aillent. J’savais que Peyton s’en voudrait de les chasser. Et eux semblaient pas déterminé à s’en aller. Alors, j’les évitais… Enfin, j’évitais surtout ma mère. Mon père, lui, l’a quand même réussi à venir me voir pour me dire que mon concert était génial. Et ça m’avait fait bizarre de l’entendre me dire un compliment.

Y’a p’t-être de l’espoir, finalement…

J’avais toujours pas dit la vérité sur mon agression à Peyton. J’essayais qu’elle se reconstruise alors j’avais peur que de lui expliquer ce qu’il m’était réellement arrivé ne l’angoisse et ne la fasse retomber encore plus bas.

Alors, j’m’étais abstenu.


Mais rester avec Peyton veut pas dire que j’restais inactif… Ok… J’faisais que passer du temps avec elle mais j’avais quand même pris le temps de téléphoné à Jake Snyder pour une interview… Fallait pas que j’laisse Jimmy Reed s’en sortir comme ça. M’avait attaquer avec Moriarty alors j’allais l’attaquer avec Snyder. L’avait utilisé la presse papier, j’allais utiliser la radio.

J’avais pas caché à Jake, au téléphone, que je l’appelais pour répliquer à Reed mais je l’avais aussi attisé avec des nouveautés que j’allais lui donner en exclusivité. J’crois que ça a suffit pour qu’il prenne son courage a deux mains pour venir à New York. Surtout que j’lui avais dit que j’payerais tout y compris une chambre pour lui au Plaza.

Je l’attendais, donc, dans la suite que j’partageais avec Peyton. Cette dernière était sortie avec ma mère, j’crois… A moins qu’elle fasse du yoga avec David, j’sais plus trop… Moi j’attendais Jake en zappant sur les quelques chaines qu’il y avait et qui diffusait rien d’intéressant.

Du coup, j’fus contant quand j’entendis qu’on toquait à la porte. J’ouvris celle-ci en souriant.

-Salut Jake…

J’avais cherché à pas avoir une trop sale gueule. Mais c’était pas simple étant donné que j’manquais de sommeil. Puis, j’avais encore des p’tit stigmates de mon agressions.

-Entre…

J’le fis entrer dans la suite et l’invitai à s’installer dans un des divan. Sur la table basse, j’avais préparer un verre pour lui qu’il pouvait remplir avec ce qu’il voulait. Y’avait de la vodka, du whisky, du gin et même de l’eau !

Je m’laissai tomber dans le fauteuil avant de prendre en main une des bouteille de vodka.

-Avant de commencer, j’voudrais savoir ce que tu pense de ma guerre avec Reed. J’veux savoir si t’as un camp ou non… J’veux lui mettre la misère alors j’veux être sûr que tu vas faire en sorte de pas couper les partie ou j’lui mettrais la misère.

@ Billy Lighter

Howard Stone m’avait téléphoné… Il voulait une interview, seulement… Et bien il était à New-York et moi à Los Angeles… Et il voulait absolument que je vienne. Il ne voulait pas faire ça par téléphone. Sa voix était pâteuse et rocailleuse tout à la fois. Sa respiration, sifflante. Il n’avait pas l’air bien.

Il m’avait dit s’entrée de jeu que son but était, plus que de parler musique, de parler de Jimmy Reed. J’avais suivi leur petite guerre médiatique et, à vrai dire, je pensais que Jimmy Reed avait fermé toutes les portes derrière lui avec ce qu’il avait confié à Moriarty.

Le magnat de BSC avait été intelligent. Il n’avait pas tout nié en bloc. Il avait plutôt tenté de nuancer les paroles d’Howard.

J’aimais bien Howard. C’était un type simple et vrai. Quelqu’un qui avait un amour profond pour la musique.

Je lui avais donc confié mes réticences en disant que je ne faisais pas vraiment dans le sensationnel… Et puis… Que je ne pouvais pas quitter L.A. comme ça. Il y avait Lynn qui allait bientôt partir en Italie et le petit Lucky Cort qu’il faudrait garder en nous relayant avec Eddy.

Mais Howard avait insisté et promettait de payer tous les frais…

J’avais soupiré… Puis avait accepté.

J’allais donc faire un petit aller-retour à New York.

Dans l’avion, j’avais réfléchi à ce qui ‘avait échappé… Apparemment Reed avait tenu des propos qui n’avaient pas plu à Howard et celui-ci avait menacé de retiré son groupe de la maison de disque. Mais bon… après… ce qu’Howard avait dit… Et bien ça ne datait pas d’hier.

Ce n’était pas comme si Jimmy Reed était devenu un enfoiré du jour au lendemain ou que ça avait été découvert par Howard.

Non…

Je n’avais pas dormi dans l’avion et j’avais juste pris le temps de déposer ma valise dans la chambre réservée pour moi au Plaza par Howard avant de me rendre vers la suite du batteur et de sa femme.

Je frappai doucement à la porte et ce fut un Howard au teint blême, légèrement jaune, et empestant la vodka, qui m’ouvrit et me salua.

-Salut Howard… Nom de Dieu… Qu’est-ce qu’il t’arrive ?

J’étais sidéré… Et les marques qu’il avait sur la figure n’embellissaient en rien le spectacle que j’avais devant moi. J’entrai et m’assis sur le fauteuil qu’il me désigna… Je sortis directement mon magnéto de ma poche et le posai sur la table basse, entre les bouteilles avant de m’allumer une cigarette.

J’allais parler mais il me devança, me demandant dans quel camp j’étais. Je le scrutai en tirant sur ma clope avant de répondre.

-Si je dois choisir entre toi et Reed, c’est toi sans hésiter. Je ne te censurerai pas, ce n’est pas mon genre… Quant à ce que j’en pense, et bien… Je ne comprends pas pourquoi tu t’acharnes mais peut-être que j’en saurai plus en t’interviewant. Mais… Howard… Faut que tu vois un médecin.

Je désignai la bouteille de vodka.

-Et que tu arrêtes de boire.

@ Billy Lighter

Jake était bien là et l’avait pas tardé à se planter devant la porte de la suite. J’lui avais ouvert en souriant un p’tit peu parce que j’étais content de le voir. Jake c’est le genre de journaliste que j’aime bien. L’est un p’tit peu hors des clous. Pas comme Moriarty qui, comme son cousin, est une gros enfoiré.

J’invitai à entrer même s’il s’exclama d’entrée de jeu en demandant ce qui m’arrivait. Ce qui m’arrive ? J’levai un sourcil. Il m’arrive rien… Qu’est-ce qu’il raconte.

-Hein ? Bah… Rien…

J’l’invitai à s’asseoir me demandant bien pourquoi, dès qu’il fut entré, j’avais eu le droit à ce genre de remarque. Ok… J’avais une sale tronche. Je m’étais vu, le matin, dans le mirroir… Mais j’m’étais habillé bien, j’avais pris un temps fou à faire ma coiffure rien que pour avoir l’air pas mal présentable alors ça me rendait un peu triste de recevoir cette remarque de Jake.

J’m’installai dans le fauteuil alors que le journaliste sortis son matos pour m’interviewer. Après qu’il eut fait ça, j’décidai, d’entrée de jeu, de lui demander où allait sa loyauté. J’savais que certains journalistes aimaient bien Jimmy Reed… J’savais que d’autre en avait sûrement peur et voulaient pas le froisser… Mais j’pensais pas que Jake faisait partie de ceux-là…

Il se sortit une cigarette avant de me répondre. Il disait qu’il me préférait à Reed et qu’il ne me censurera pas… Et ça même s’il comprenait pas mon acharnement sur le magnat de BSC… Ouais. Personne comprenait. Normal, personne avait toutes les informations. Bien que rien que pour ce qu’on sait déjà, je trouvais ça suffisant. Mais bon, Jake était ouvert à essayer de comprendre…

Ok. Cool !

J’allais répondre quand il s’exclama que j’devais voir un médecin et arrêter de boire. J’le fixai avec un regard mi-amer, mi-blasé.

-Des médecins, j’en ai vu assez, hein. J’viens de sortir de l’hôpital… Puis, si tu t’inquiétais réellement pour ma santé t’aurais pas sorti cette foutue cigarette.

Sur ce, j’me levai pour aller ouvrir un fenêtre avant de revenir.

-J’ai assez de genre pour me faire la morale, merci. Pas besoin d’un de plus.

Ouais, ce genre de remarque commençait à m’agacer. J’savais que j’abusais de l’alcool mais si j’étais sobre, j’savais que j’passerais au travers de rien.

J’fixai Jake.

-Cool, si tu reprends pour moi. Reed s’est amusé à arrondir les angles mais en réalité, la vérité est bien pire… J’peux rien dire… Enfin, j’peux pas dire toute la vérité sur lui quoi...

J’fis la moue sachant pas comment parler sans parler.

-Bref, j’peux hélas attaquer Reed uniquement sur ce que tout le monde sait. Sauf que ce que tout le monde sait c’est édulcoré. Si j’m’acharne sur Reed c’est parce que ça me tue qu’un type pareil soit autant respecté malgré tout ce que tout le monde sait… Des gens lui bouffe dans la main...

J’pris en main le Guitar&Pen où se trouvait l’interview de Reed et j’l’ouvris à la bonne page pour méthodiquement détruire ce qu’il avait dit. J’levai les yeux sur Jake.

-J’sais que c’est toi le journaliste… Mais j’vais te poser une question. Tu penses quoi de Jimmy Reed ? Tu penses qu’il a dit toute la vérité dans son interview ? Imaginons qu’un jour tu ai des dettes envers Jimmy Reed et que tu sais pas, payé, tu crois qu’il fera quoi ?

J’voulais voir l’image qu’il se faisait de Jimmy.

@ Billy Lighter

Howard affirma, sur le pas de sa porte, qu’il ne lui arrivait rien. Je le regardai d’un air torve. Ok, il était coiffé, lavé, bien habillé mais… C’était la couleur de sa peau et son odeur d’alcool qui m’inquiétaient. Je laissai d’abord couler, entrant dans la suite de luxe.

Une fois installé, je répondis à sa question sur qui je préférais entre lui et Jimmy Reed. La réponse était facile : entre un gros riche misogyne et un artiste au cœur d’or, il n’y avait pas à réfléchir longtemps.

Mais je ne sus pas m’empêcher de lui faire remarquer qu’il devait consulter. Et arrêter de boire. Son foie était apparemment en train d’en prendre un coup ! Mais Howard prit mal ma remarque, comme tout alcoolique qui se respectait et je regardai ma cigarette qu’il accusait de ne pas être meilleure pour sa santé.

-Ok… Un point pour toi…

J’écrasai ma cigarette à peine entamée dans un cendrier mis à disposition par l’hôtel.

Je haussai les épaules.

-T’as une sale gueule, c’est tout ce que je veux dire.

Howard me fixa alors, pour entrer dans le vif du sujet : Jimmy Reed. Je ne comprenais pas bien cette espèce de guerre qu’il y avait tout d’un coup entre eux. Mais j’ouvris de grands yeux quand Howard m’expliqua que c’était parce qu’il ne pouvait pas dire toute la vérité sur Reed.

Je finis par froncer les sourcils.

-C’est si grave que ça ?

Je me demandais bien ce que le magnat de BSC pouvait trainer de si grave comme casserole… Des détournements de fonds ? Un classique pour les gens aussi riche… Il traitait mal ses artistes ? Peut-être un peu de mépris mais je ne pensais pas qu’il les maltraitait vraiment…

Quoi alors ?

Apparemment, ce que voulais Howard, c’était que je montre, dans mon émission, le vrai visage de Jimmy Reed et non une version édulcorée.

-L’article de Sørensen n’a pas représenté vraiment ce que tu voulais dire, c’est ça ? Alors tu veux une interview pour pouvoir donner tous les détails.

Puis Howard me posa une série de questions, comme si c’était lui qui m’interviewait. Avant de commencer, il voulait vraiment savoir ce que je pensais de Reed.

-Et bien… Ce n’est pas ma personnalité préférée. Je n’aime pas son air suffisant et condescendant… Je n’aime pas sa vision des femmes et le fait qu’il ne les fait pas signer dans sa maison de disque…

Sans cigarette pour m’occuper les mains, je les enserrais l’une l’autre, fixant Howard.

-Et bien sûr que non, il ne dit pas toute la vérité dans ses interviews ! Bien sûr que c’est édulcoré et tourné pour lui donner une relativement bonne image…

La dernière question me laissa pensif. Qu’est-ce que je pense que Jimmy Reed ferait si j’avais une dette envers lui ?

-Il m’enverrait les huissiers et me trainerait en justice, je suppose. Il m’en ferait baver jusqu’à ce que je crache les thunes, quitte à me retrouver à la rue. Mais ça il en aurait rien à foutre.

Je secouai la tête, sourcils froncés.

-Pourquoi tu me poses toutes ces questions ? C’est Jimmy Reed qui t’a poussé dans les escaliers ou quoi ?

@ Billy Lighter

La première chose que Jake me fit en arrivant ce fut de me faire la morale sur mon état et ma consommation d’alcool. J’l’avais pas appelé pour ça aux dernières nouvelles et j’me permis tout de même de le tacler en retour alors qu’il venait de sortir une cigarette ce qui restait quand même le truc qui risquait de me tuer le plus vite.

Il me donna raison là-dessus et écrasa sa cigarette.

Il déclara alors que j’avais une sale gueule. J’fis la moue.

-J’sais. J’suis pas aveugle et j’ai un miroir, merci.

Mais j’l’avais pas appelé pour me parler de ma tronche mais pour parler de Reed. Il comprenait pas trop pourquoi j’m’acharnais sur Reed mais il était tout de même prêt à reprendre pour moi ce qui était une très bonne chose.

J’expliquai que j’pouvais pas dire toute la vérité sur Reed… J’allais pas dire à Jake que Reed était chef des Los Diablos parce que j’avais eu mon compte avec Fleming. Mais j’étais pas prêt d’abandonné ma quête de détruire le magnat de BSC avec mes armes. Jake se demanda alors il c’était si grave que ça. J’hochai de la tête.

-Ouais. Tout ce que tu peux imaginer, c’est bien pire que ça.

Même si j’savais pas ce qu’il imaginait. Mais moi, j’savais une chose c’était que Reed, en tant que chef des Los Diablos, a sûrement fait un tas de trucs horribles. On devient pas chef de gang avec de beaux sourires et des poignées de main. Non… L’avait dû faire ses preuves, j’imagine.

Mais j’pouvais pas attaquer Reed là-dessus alors j’allais le faire sur les aspects de sa merveilleuse personnalité. Jake se doutait que l’article d’Amon était pas suffisant.

-Ouais, c’est bien ça. Reed a répliqué avec une interview écrite. Moi, j’vais faire mieux en causant à la radio. Ça aura plus de poids que quelques lignes écrite par ce connard de Moriarty.

Mais avant, j’demandais ce que Jake pensait de Reed. Il disait qu’il l’aimait pas spécialement pour tout un tas de choses évidentes. L’était pas dupe, non plus, sur le fait que Reed avait menti dans son interview à Moriarty.

-Sauf sa fille… Parce que c’est sa fille… Mais, ouais, son interview est méga édulcorée.

Et j’avais posé une autre questions sur les dettes… Jake réfléchis avant de me dire ce que j’pensais bien qu’il me dirait. Il pensait que Reed lui enverrais des huissiers… Mouais, ça c’est au mieux. Moi, j’avais vu le pire.

Jake se demandait où j’voulais en venir avant de demander si c’était Reed qui m’avait poussé dans les escaliers. J’fis la moue.

-Non… Il m’a pas poussé dans les escaliers. Par contre, y’a quelques années, j’ai terminé à l’hosto parce que j’me suis fait tabassé dans l’Eastside. Je devais 100 000 dollars à Reed pour des paris et j’avais flirté avec sa fille… Résultat, l’a embaucher des hommes pour me refaire le portrait. J’aurais préféré le huissier j’t’assure. J’ai failli crever.

J’bus une gorgée de vodka avant de reprendre.

-Il a bien voulu lever ma dette quand j’ai signé avec Fireworks pour BSC…

Je fixai Jake.

-Ça c’est ce que Jimmy Reed est capable de faire pour montrer qu’il a le pouvoir de détruire n’importe qui en un claquement de doigt. J’ai un tas de raisons de lui en vouloir. Alors, vas-y… Pose-moi des questions sur cet enfoiré et j’me ferais un plaisir de le détruire avec de bonnes anecdotes.

@ Billy Lighter

Howard était au courant qu’il n’allait pas bien. Mais malgré tout, il picolait à mort. Est-ce que c’était bien intelligent tout ça ? Non, pas vraiment… Mais peut-être que si je lui permettais de dire ce qu’il avait à dire, peut-être que ça le soulagerait, que ça crèverais l’abcès et qu’après, il irait mieux.

J’aimais bien Howard, et j’étais prêt à l’aider… Même si je ne comprenais pas ce qu’il avait tout d’un coup contre Jimmy Reed… Pourquoi maintenant ? Jimmy Reed était un  enfoiré depuis toujours et Howard avait signé chez BSC en connaissance de cause…

J’allais probablement en savoir plus en l’interviewant. Mais avant, c’était à lui de me poser des questions, comme s’il voulait être sûr et certain que je n’allais pas le baiser en étant secrètement dans le camp de Reed.

Alors je lui dis ce que je pensais du magnat de BSC. Mais apparemment, ce que je pouvais penser était bien loin de la vérité. Je regardai Howard, en fronçant les sourcils.

Je conclus que si ce qu’il voulait faire, c’était détruire Reed, ce qu’Amon avait écrit était un peu faible et avait permis à Reed de répliquer facilement. Il était d’accord et c’était pourquoi il voulait parler à la radio. Il précisa quand même que Reed avait fait signer sa fille parce que c’était sa fille…

Mais ça aussi, tout le monde le savait, même si Livia méritait amplement la carrière qu’elle avait désormais.

Je demandai alors, un peu sarcastique, si c’était Reed qui avait poussé Howard dans l’escalier. Mais il ne se démonta pas. Non. Au lieu de ça, il me parla de quelque chose qui s’était passé il y avait quelques années.

-Reed t’a fait tabasser ? Comment tu sais que c’était lui ? Il était là ? Il t’a fait passer un message ?

J’étais sur le cul. Je croyais Howard, bien sûr…

-Non, ne réponds pas tout de suite… Sauf si tu ne veux pas en parler sur l’enregistrement. Mais putain, Howard… Il est commanditaire de coups et blessures volontaires !

Apparemment, Reed avait effacé la dette d’Howard quand il avait signé chez BSC.

-Il perd pas le nord.

Howard voulait ainsi prouver ce que Reed pouvait faire, jusqu’où il pouvait aller, pour détruire quelqu’un. Il voulait lancer l’interview maintenant. Je pris nerveusement mon enregistreur et appuyai sur le bouton pour lancer la cassette.

-Salut, vous êtes sur L.A.ROCKS avec Jake Snyder et il est 19 :00 ! J’ai eu l’occasion, à New-York, de rencontrer Howard Stone, batteur de The Burning Fire et batteur et chanteur de Fireworks, qui, après les déclarations de Jimmy Reed dans les lignes de Guitar&Pen, n’a pas dit son dernier mot. Il compte bien nous ouvrir les yeux sur la véritable personnalité du grand chef de BSC.

Bonjour, Howard. Tu as menacé récemment de retirer Fireworks de chez BSC et apparemment, la raison est bien loin d’être à cause de quelques mots déplacés de la part de Reed. Peux-tu nous en dire un peu plus ?

@ Billy Lighter

J’essayais, sans trop en dire, de montrer à Jake que Reed était bien pire que ce que tout le monde savait déjà. Bien que ce que tout le monde savait déjà c’était déjà pas mal, hein. Mais, apparemment, c’était relativement bien accepté ! Ou alors, c’est pas dépit ou impuissance que les gens se fichent complètement que Reed soit un enfoiré.

Mais, moi, j’pouvais plus me taire et le laisser vivre sa p’tite vie tranquille. Pas sachant tout ce que j’savais. C’était fini, ça.

J’demandai à Jake son avis sur Reed et j’fus relativement rassuré qu’il ne portait pas le boss de BSC dans son cœur. Le trouvait misogyne, entre autre. Et, pour cause, Reed assumait totalement ça en disant qu’il n’engagera jamais de femme artiste chez BSC. Enfin, sauf sa fille. Sa fille, ça, ça va. Et il a beau dire qu’elle a du talent, d’autres femmes en ont aussi. C’est pas faute que sa propre fille, Victoria Hunter, Savannah Prescott et ma propre femme le prouvent chaque jour. J’suis sûr qu’il y en a plein d’autres.

Bref… Reed était un connard mais il était pire que Jake le pensais et j’finis par avouer qu’il m’avait fait tabasser dans l’Eastside il y a quelques années d’ici. Je n’avais plus de trace de l’incident. Même mon genou s’était totalement rétabli. Ça n’empêchait que j’l’avais toujours mauvaise.

Et Jake sembla choqué. Il se demandait comment j’savais que c’était Reed qui avait envoyer des gens me tabasser. Parce que j’savais qu’il était le chef des Los Diablos et que c’est Alonso et sa p’tite troupe qui m’avait démoli. Mais ça, j’pouvais pas le dire.

J’allais répondre mais Jake me disait de ne pas le faire si j’voulais dire ça pendant l’interview. Il ajouta que ce que Reed avait fait été un crime. J’hochai de la tête.

-J’sais… Mais j’ai pas porté plainte parce que s’il est capable de me faire ça, il peut le faire à nouveau et j’avais aucune envie de crever. Puis aucune chance qu’on me croit… Jimmy Reed a du pouvoir. Bien plus que j’peux en avoir auprès des flics et de la justice. Moi, j’ai juste les fans. C’est déjà bien mais c’est pas assez pour faire condamner Reed.

J’étais pas stupide… Et puis, Reed avait fini par effacer ma dette. J’avais négocié ça et Jake déclara qu’il perdait pas le nord.

-Si je lui avais pas demandé, il l’aurait pas effacé. C’est moi qui ait dû aller le lui demander. J’imagine que ça lui a plus de me voir le demander. L’est comme ça le Reed.

Mais j’allais me venger aujourd’hui. Et j’voulais que Jake commence l’interview. Il le fit… J’bus une grosse gorgée de vodka.

C’était à moi de jouer.

-Salut Jake ! Salut à tous ! Ouais, les mots de Reed à l’hôpital n’étaient que la goutte qui a fait débordé le vase. En réalité, ça fait un moment qu’entre Reed et moi, rien ne va. A vrai dire, ça n’a jamais été. Déjà, toute le monde connait sa réputation. C’est un misogyne assumé, un homme d’affaire qui n’a de considération que pour lui-même et son petit pouvoir. Bref, loin de l’image que l’homme charitable qu’il essaye de se donner.

Je me raclai la gorge.

-Vous savez surement tous déjà tout ça. J’sais aussi que beaucoup d’entre vous savent que Reed a largement lissé son image dans sa dernière interview. Et j’ai plein d’anecdote pour prouver qu’il a une facette bien plus sombre que tout le monde ne l’imagine.

Et je balançai ma première histoire… Celle de Livia.

-Prenez, par exemple, sa fille. Elle a fait le voyage jusqu’à L.A. en quête d’identité. Elle a rapidement découvert qu’elle était la fille de Reed mais il a pris des années à la considéré comme telle. Pourtant, le fait qu’elle ait pu obtenir un contrat chez BSC prouve qu’il savait parfaitement qu’elle était sa fille. Mais il a attendu que Sørensen lâche l’info et que Livia se fasse enlever pour la confirmer. Et j’peux vous dire que Livia en a souffert de jamais arriver à avoir la reconnaissance de son père. Ce qu’il faisait, lui, c’était prendre l’argent que lui rapportait Livia sans lui rendre, en retour, la reconnaissance d’un père pour sa fille. Il avait même fait une interview avec Livia, pour démentir leur lien. Vous croyez que ça a dû lui faire quoi, à Livia, d’être contrainte de démentir quelque chose qu’elle a cherché pendant si longtemps ? Reed n’a aucun scrupule même quand il s’agit de sa famille. Il manipule tout le monde et se vente même à certains d’être un grand marionnettiste.

@ Billy Lighter

Howard n’avait pas porté plainte contre Jimmy Reed par peur de représailles. En même temps, si Reed l’avait vraiment fait tabasser une fois, comme il le disait, il pourrait le refaire… Et Howard était vraiment pas en état pour ça. Jimmy Reed avait du pouvoir, disait-il. Et je ne doutais pas qu’avec la fortune qu’il avait, il pouvait s’acheter n’importe quoi.

N’empêche que j’étais bouche bée… Que Reed fasse de la fraude, du blanchiment d’argent et tout ce qui était ce qu’on appelle « de la criminalité en col blanc », je n’en doutais pas.

Mais qu’il s’en prenne physiquement aux gens pour des dettes de jeu ?

Non, j’aurais jamais pensé ça.

Howard ajouta que s’il n’avait pas demandé à Reed d’effacer sa dette si son groupe signait chez BSC, il ne l’aurait probablement pas fait.

-Il a donc fallu que tu le supplie, en plus…

Je ne demandai pas comment Howard était allé si loin dans les dettes de jeu. Il m’avait bien fait comprendre qu’il n’était pas là pour qu’on lui fasse la morale… N’empêche que ce n’était pas très intelligent de sa part… 100 000$, ce n’était pas rien.

Je démarrai donc l’enregistreur et l’interview, annonçant la couleur.

Howard enchaîna directement sur ma question avec ce qui me semblait être un mélange de colère et de l’énergie du désespoir.

Il commença en disant ce que tout le monde savait mais assura qu’il avait en poche des anecdotes qui allait largement effriter l’image lisse que Reed avait voulu se donner dans son interview à Guitar&Pen…

Je le laissai parler, parce que c’était surtout de ça qu’il avait besoin : de parler… Est-ce qu’il dirait ferait tomber Jimmy Reed de son piédestal ? J’en doutais fort… On ne déloge pas un type comme Reed avec des déclarations à la presse…

Mais j’étais prêt à offrir ce défouloir à Howard. En espérant qu’il ne se ferait pas de nouveau tabasser pour ça.

Il raconta alors l’histoire de Livia et je me mordis la lèvre en l’écoutant. L’histoire en soi ne m’étonnait pas vraiment, c’était bien le genre de Reed de faire ça. Par contre, je me demandais si Howard n’allait pas se mettre Livia à dos en exposant sa vie privée sans le lui avoir demandé. A moins qu’il ne l’ai fait, je ne savais pas. Howard m’avait dit de ne pas le censurer et je ne le ferais pas.

Mais j’avais la nette impression que plutôt que de se hisser vers le haut, il s’enfonçait…

-En effet, apparemment, Roadtramp est au courant pour ce qui est de ce rôle de « marionnettiste » qu’il se donne. Eddy Cort n’a jamais caché que la chanson Master parlait de Reed.

Je marquai une petite pause. J’avais envie d’une cigarette.

-S’il est comme ça avec sa famille, je n’imagine pas comment il traite ses artistes. Mais Jimmy Reed, au-delà de ça, est-il vraiment dangereux ? Tu as parlé de liens avec la mafia…

@ Billy Lighter

Ouais, l’avait fallu que je le supplie. J’savais que le fait que j’me pointe chez lui et tout avait dû le faire triper. Mais ça m’avait acheter de la tranquillité en quelque sorte… A cette époque, j’crevais de trouille de lui après ce qu’il m’avait fait subir.

Maintenant, j’avais plus peur. Sans doute parce que j’avais pas l’impression qu’on pouvait me faire plus mal que ce que j’avais mal. Ou parce que j’étais tellement anesthésié par l’alcool et le manque de sommeil que j’manquais de jugement. J’savais pas. Quoi qu’il en soit, j’savais que j’allais mener ma guerre contre Reed jusqu’au bout. J’savais que ça allait pas le tuer, ni le mettre en prison. Mais l’allait quand même souffrir. C’était tout ce qui comptait, en fait.

Et j’commençai… J’avais rien préparé à l’avance. J’voulais juste dire ce que j’avais en tête au moment donné et en fonction des questions de Jake. Du coup, après un p’tit préambule, j’passai au sujet Livia. J’trouvais que Jimmy avait franchement manqué de respect envers sa propre fille. Elle avait cherché à attirer son attention poussant jusqu’à se faire engager par BSC… Mais malgré ça, Reed ne l’avait pas reconnu… Ni devant le public, ni en privé. J’savais que Livia avait chier pour que ça arrive et j’trouvais ça horrible de la part d’un père.

J’savais pas si Livia allait aimer ce que j’étais en train de dire… Quand j’lui avais parlé la dernière fois, j’l’avais trouvé un peu changée… Et puis, de toute façon, j’avais décidé de pas ménager les sensibilités de chacun.

Je traitais, ensuite, le magnat de BSC de marionnettiste ce qu’il se vantait d’être, d’ailleurs. Jake signala que Roadtramp en avait déjà parlé dans une de ses chansons.

-C’est parce que Roadtramp, ils sont pas con. Et ils ont pas la langue dans leur poche.

Jake enchaina ensuite me demandant si Reed était dangereux.

-Reed est un parieur. J’le sais parce que j’parie aussi. C’est pas un crime en soi mais chaque fois que j’l’ai vu faire des paris ou même à certains de ses galas, j’l’ai vu fraternisé avec des gens issus de la Famille de Los Angeles. C’est pas un crime en soi, non plus, mais ça en dit long. Surtout qu’on sait que Daniele Ricci fait de même.

Maintenant est-ce que Jimmy Reed est dangereux ? Ouais, c’est le chef des Los Diablos. Il est probablement aussi dangereux que Ward. Sauf qu’il se salit pas les mains.

-Jimmy Reed est dangereux, ouais. J’le sais d’expérience. Comme j’l’ai dis on fait des paris et ses paris m’ont fait m’endetter. J’devais pas moins de 100 000 dollars à Reed… Comme j’arrivais pas à payer, il a payer des hommes pour me faire faire tabasser dans l’Eastside. Les gens se rappellent sûrement de ça. C’était il y a quelques années… J’ai bien failli crevé, ce jour-là. Jimmy Reed a fini par effacé ma dette quand j’ai accepté de faire de Fireworks un groupe à part entière et pas un groupe éphémère pour BSC… J’ai dû accepté. J’estime que ça fait de lui un homme dangereux et un putain d’opportuniste sans âme.

@ Billy Lighter

Je me rappelais bien de la chanson de Roadtramp, Master… Mais est-ce que le groupe d’Eddy Cort en savait autant que Stone ? J’en doutais… Il dépeignait juste un homme avide de pouvoir. Pas quelqu’un de dangereux.

Or, Howard Stone décrivait quelqu’un de dangereux. Quelqu’un qui méritait la prison. J’étais de plus en plus nerveux à mesure qu’il parlait. Il parla alors des paris. Reed et Stone étaient des parieurs tous les deux. Et il répéta plus ou moins l’histoire qu’il m’avait racontée plus tôt.

Il avait aussi parlé des liens de Reed avec la mafia, mais pas en profondeur. Apparemment, Reed discutait avec des membres de la famille de Los Angeles quand ils pariaient… Mais ça ne faisait pas de lui un membre de cette mafia à part entière. Il était puissant, les mafias étaient puissantes et entre puissants, il leur arrivait de se rencontrer et de parler entre hypocrites.

C’était un peu léger comme accusation… Mais je supposais que soit Howard n’en savait pas plus, soit il avait peur d’en dire plus.

La voix d’Howard était pâteuse, ses paupières, lourdes… ça allait clairement s’entendre dans l’interview et ça risquait de le décrédibiliser.

Mais c’était lui qui avait voulu que les choses se déroulent comme ça.

Je le regardai avec inquiétude alors qu’il qualifiait Jimmy Reed de dangereux et d’opportuniste sans âme.

Je soupirai et frottai mon visage.

-S’il est aussi dangereux que ça, n’est-il pas dangereux pour toi de divulguer tout ça ? Est-ce que tu es vraiment tombé dans l’escalier, Howard ? Ou Jimmy Reed y est-il pour quelque chose ?

Si c’était le cas, ce qu’il faisait là était bien plus dangereux que d’aller voir la police. Au moins, s’il témoignait, il serait protégé par les forces de l’ordre.

Plus on avançait et plus je me disais qu’Howard était cinglé et trop déchiré par l’alcool pour s’en rendre compte.

Ou alors, il fabulait complètement… Son cerveau était détruit et il racontait n’importe quoi.

Cependant, je me rappelais quand même de son agression d’il y avait quelques années… Alors ? Vérité ou fabulation de celui qu’on disait être le plus grand mythomane de Los Angeles ?

@ Billy Lighter

L’interview avait commencé et j’essayais d’arranger mes idées pour essayer de passer à côté de rien. J’avais rien préparé. C’était pas mon genre de préparer les choses à l’avance.

Du coup, quand Jake me posa la question de savoir si Reed était un mec dangereux, j’ouvris les vannes. Je pouvais pas laisser Reed s’en tirer parce que j’crevais de trouille de balancer des choses compromettantes sur lui. Non… Ça pouvait plus durer ce genre de trucs. Alors, j’balançai ce qu’il m’avait fait dans l’Eastside, le jour où il avait envoyer ses Los Diablos me tabasser. J’citai pas le nom de ceux qui m’avaient fait ça. J’ai juste dit que Reed avait employer « des gens » pour me tabasser. Ce qui était vrai. Il employait les Los Diablos.

Jake soupira… Il se frotta le visage… J’savais pas ce qu’il lui traversait la tête. J’savais pas trop ce qu’il pensait de ça et du fait que j’le révélai au grand public. Enfin si… J’pouvais me faire une p’tite idée avant la question qu’il me posa ensuite. Il se demandait si c’était pas trop dangereux de divulguer tout ça.

Et il parla des escaliers aussi… J’avais dit, avant l’interview, que c’était pas Reed qui avait fait ça. Pour cause, c’était Ward Fleming… Même si, désormais, pour moi, y’avait plus aucune différence entre le boss des Los Diablos et celui des New Soldados. Y’a que le nom qui change. C’est tout les deux des enfoirés qui méritent la prison, pour moi.

-Jimmy Reed m’a pas poussé dans l’escaliers !

C’est ce que je dis sur un ton un peu brusque avant de me calmer et de boire une longue gorgée de vodka.

-J’suis tomber tout seul. Ça arrive. J’suis sûr que ça est arrivé à plein de gens… Bref…

J’osais toujours pas balancer Fleming… Même si j’savais qu’il était en taule, désormais.

-Et, si, c’est p’t-être dangereux que je révèle tout ça à la radio… Mais si vous apprenez, dans les jours qui suivent, que j’me suis fait agressé ou tué, bah, vous saurez qui c’est au moins…

J’haussais des épaules…

-L’était temps que quelqu’un l’ouvre, j’pense.  

Ouais… Tout comme quelqu’un l’avait ouvert pour Fleming. Fallait que quelqu’un l’ouvre pour Reed. Même si une p’tite voix en moi m’empêchait d’aller trop loin et de révéler toute la vérité.

-Et encore, j’peux pas tout dire… Mais j’laisse les gens se faire des films.

L’imagination faisait parfois pire. Même si j’doutais que quelqu’un se dise que Jimmy Reed est chef des Los Diablos…

@ Billy Lighter

Howard s’énerva à ma question suivante. Je savais qu’il m’avait déjà dit que ce n’était pas Reed qui l’avait poussé dans les escaliers mais les auditeurs, eux, ne le savaient pas. Et je ne voulais pas que les gens imaginent des choses qui n’étaient pas vraies.

Mais ça exaspérait Howard qui était à deux doigts de me faire une crise de boisson et en rajoutait en se prenant de grandes lampées de vodka entre chaque question.

Il était tombé tout seul. Bon, ça fermait déjà une porte.

Alors je me demandais si c’était pas un peu dangereux de dire tout ce qu’il disait à la radio. Il affirma que si mais que s’il se faisait agresser après que l’interview soit diffusée, on saurait pour quoi.

Je le regardai, plus qu’inquiet.

Et il continua en disant qu’il fallait que quelqu’un l’ouvre. Mais qu’il ne pouvait pas tout dire alors qu’il laisserait les gens se faire des films.

Je réfléchis, laissant la bande tourner à blanc un moment… Puis je pris le numéro de Guitar&Pen qui était censé servir de base à Howard…

Sur quoi je pouvais baser ma prochaine question ? A part dire que Jimmy Reed était un parieur et qu’il avait engagé des gens pour tabasser Howard… Ah ouais… Et qu’il avait fait languir sa fille avec sa reconnaissance de paternité aussi…

Bref, à part dire que Reed était un gros enfoiré plein de fric… Merde, ça allait mener nulle part tout ça… A part peut-être à ce qu’il arrive encore une tuile à Howard. Mais maintenant qu’il avait dit que les gens sauraient pourquoi il se ferait peut-être agressé ou tué à l’avenir, Jimmy Reed, s’il était bien intelligent, n’en ferait rien.

Je passai ma langue sur mes lèvres.

-Je sais que tu ne peux rien dire mais, selon toi, à quel point Jimmy Reed est-il peu recommandable… Prenons un exemple sur l’échelle de l’enfoiré… Edward Fleming, un grand criminel a été arrêté récemment... Est-ce que Jimmy est pire, ou mieux ?

C’était n’importe quoi comme question… Mais j’avais promis une tribune à Howard. Je devais l’aider à s’exprimer.

-Et vas-tu vraiment quitter BSC avec Fireworks ? Parce que rien d’officiel n’a été dit à ce propos. Pour les fans, vous êtes toujours sous le même label.

@ Billy Lighter

Je clamai, un peu fâché, que Reed m’avait pas poussé dans l’escalier. Je voulais pas parler de ça mais bien que Reed et rien d’autre. Ce que j’avais vécu y’a quelques semaines, avec Ward, j’voulais pas en parler et pas y penser.

J’expliquai, ensuite, que Reed était bel et bien dangereux et que s’il m’arrivait quelque chose après mes déclarations d’aujourd’hui, les gens sauront que Reed est le coupable. C’était, quelque part, une façon de me protéger. Ça fera hésiter Reed de me faire du mal physiquement. Même si j’étais sûr qu’il allait tout nier en bloc et dire que j’suis qu’un alcoolique qui part en vrille. Je m'en fiche. Certaines personnes douteront. D'autres me croiront. Il suffit d’un petit nombre de gens qui me croient pour que le doute s’infiltre partout.

J’expliquai, publiquement, que j’pouvais pas tout dire. Comme quoi, mon courage avait une certaine limite. J’étais un p’tit peu refroidi après ce qu’il s’était passé avec Ward Fleming.

J’voyais l’inquiétude sur le visage de Jake. L’était p’t-être inquiet que j’me fasse descendre. Ou alors, c’était pour tout autre chose, j’en sais rien…

Après quoi, Jake enchaina en demandant à quel point Jimmy Reed était pas recommandable. Il voulait un point de comparaison sur l’échelle « de l’enfoiré ». Et il me donna un exemple en la personne de Ward Fleming.

J’me sentis mal… J’eus la nausée tout à coup et j’déglutis pour pas vomir. J’me repris secouant la tête sans me rendre compte que j’étais devenu blanc.

-Heu…

Pourquoi il parlait de Fleming ? Ah ouais… L’a été arrêté… C’est juste… Les journaux en ont parlé. Ressaisis-toi, Howard.

-Pire que Ward Fleming ? Non. Pas pire… Mais Reed est autant un enfoiré que Ward. Et j’connais Ward. J’ai fait mes primaires avec lui. J’sais qu’il a été Los Diablos et tout. Reed est pareil. Tous les deux des manipulateurs. Ils ont tous les deux aucun cœur et aucun respect pour personne. C’est tous les deux le genre à écraser les autres pour concerner leur petit pouvoir. Donc, sur l’échelle des enfoiré, pour moi, Reed et au même niveau que Fleming.

M’avaient tous les deux tabassés, non ? Du coup, c’était les mêmes pour moi. Les New Soldados et les Los Diablos, c’était la même chose à mes yeux. Ward et Reed, c’était les plaies de Los Angeles.

Et j’crois pas jouer un jeu dangereux en les traitants tous les deux d’enfoirés.

Puis, Jake en vint à Fireworks et à ce que j’avais dit la dernière fois. Je le fixai avant de boire une gorgée de vodka et de reprendre après m’être racler la gorge.

-J’ai discuté avec Jack et David et après discussion, j’ai décidé de ne pas quitter BSC avec Fireworks. Pour Jack. Parce qu’il fait du bon boulot et qu’on forme une bonne équipe. J’ai essayé qu’il vienne chez MTI mais j’comprends que changer de maison de disques c’est pas aussi évident que ça pour un manager.

Je bus encore une gorgée de vodka avant de poursuivre.

-Un nouvel album est en cours de production et j’ai décidé que l’argent récolté avec cet album sera directement versé à l’association United For Youth. J’suis un gamin de l’Eastside. Un association pareille, c’est utile dans ce genre de quartier. J’trouve ça plus concret que de se pavaner à des gala et de donner quelques p’tit dollars juste pour avoir l’air charitable pour la forme.

@ Billy Lighter

Quand je mentionnai Edward Fleming, qui avait été arrêté récemment et était soupçonné d’être le fameux El Lider, l’un des plus grands criminels de L.A., Howard blêmi. Je m’étais semi-levé, prêt à le rattraper si jamais il s’écroulait là…

Mais finalement, il arriva à se reprendre et à articuler sa réponse à ma question. Apparemment, il connaissait Edward Fleming depuis son enfance… Et qui sait s’il n’avait pas été malmené à l’époque par le futur criminel en herbe. J’étais bien placé pour savoir que les enfants étaient très méchants quand ils le voulaient.

A mon époque, j’avais même menacé d’en tuer un.

Howard affirma qu’il n’y avait pas de grande différence entre Reed et celui qui tenait à ce qu’on le nomme Ward. Howard mettait le criminel et le magnat de BSC au même niveau sur l’échelle de la méchanceté.

-Je vois… Ward Fleming est peut-être un criminel mais Reed a assez de pouvoir pour faire mal dans les limites de la légalité… Et personne ne s’en prendra jamais à lui.

N’empêche, ça signifiait beaucoup. Parce que si Edward Fleming semblait être un psychopathe, ça voulait dire que Reed en était un aussi. Il parait que beaucoup de psychopathes savent se fondre dans la société en travaillant dans des jobs bien spécifiques. Souvent des postes où ils ont du pouvoir.

C’était exactement ce qu’était Reed.

C’était exactement ce que voulait dire Howard.

-Est-ce que tu essayes de nous dire que Jimmy Reed est un psychopathe ?

Ça, ça ferait un effet choc. Ça, les gens qui écoutaient l’entendraient.

Puis je lui demandai ce qu’il en était de Fireworks. Finalement, ils resteraient chez BSC, pour leur manager, Jack Perry. J’ouvris de grands yeux surpris. Il avait pourtant eu l’air bien déterminé à quitter BSC… Et avec ce qu’il venait de dire, pas sûr que Jimmy Reed veuille le garder, surtout qu’il déclara que les bénéfices de son prochain album irait à United For Youth…

-C’est une très bonne idée, ça, Howard !

Je marquai une pause puis ajoutai…

-Mais tu ne penses pas, et on finira là-dessus, que Jimmy Reed va vous jeter dehors après ces déclarations choc ?

@ Billy Lighter

Quand Jake m’avait demandé à quel point Reed était un connard en prenant Fleming comme point de comparaison, j’avais pas pu m’empêcher de blêmir… Y’avait rien n’à faire… Depuis ce qu’il m’était arrivé dans l’entrepôt des New Soldados, quelque chose n’allait pas… Comme si, j’étais cassé à l’intérieur. Et j’arrivais pas à faire en sorte que ce sentiment disparaisse.

Alors, Jake conclut que Ward était un criminel mais que Reed avait assez de pouvoir que pour faire mal dans les limites de la légalité. Ouais, il est protéger… Mais dans les limites de la légalité ? Nan. C’est un criminel au même titre que Ward. Du coup, je ricanai d’un ricanement désabusé.

-Ouais… Même si j’doute que faire tabasser quelqu’un soit dans les limites de la légalité. Nan. Reed et Ward sont des criminels tous les deux. J’le dis, la différence entre les deux c’est simplement que Reed est connu et riche et, donc, l’est intouchable. C’est tout.

Du coup, Jake demanda si je considérais Reed comme un psychopathe. Un serial killer ? Pour moi, c’était ça un psychopathe. Fleming, s’en était un. Après ce que j’avais vu au QG, j’étais vraiment méga sûr que tout ce qu’on disait sur lui était méga vrai. J’étais sûr qu’il avait tué des gens… Reed… Reed sûrement aussi mais pas tout seul. L’envoyait des gens le faire. Mais, bon, c’est pas beaucoup mieux en fait. Du coup, j’fixai Jake.

-Ouais. C’est ce que j’dis. Jimmy Reed est un psychopathe.

J’avouai, ensuite, que Fireworks ne quittera pas BSC pour Jack Perry. J’le faisais uniquement pour lui et David. Pour personne d’autre. Ça ne tiendrait qu’à moi, j’serais déjà parti. Mais j’pouvais pas continuer sans Jack et David non plus. Alors, j’avais décidé de suivre le plan et Jack et de détruire BSC de l’intérieur.

A commencer par les pousser à donner l’argent de mes albums à United For Youth. Si j’le faisais, BSC serait contraint de faire de même pour leur image. Sinon, j’me ferais un plaisir de souligner ça dans la presse. Que BSC a pas suivi ma volonté de donner l’argent à des associations.

Jake trouvait l’idée bonne. Et j’souris sincèrement. Même si… Bah l’idée venait de Jack.

Jake avait une dernière question et la question me fit lever un sourcil. Reed me virer ?

Heu…

Tiens, j’avais pas pensé à ça…

-Heu…

J’me grattai l’arrière de la tête le regard un peu dans le vide.

Y’eu un blanc.

Puis, j’regardai à nouveau Jake.

-S’il fait ça, bah, tant pis. J’ai pas besoin de Reed pour faire de la musique. J’en ferais quoi qu’il arrive et peu importe où. J’en ferais jusqu’à-ce que je crève. J’ai pas besoin de Jimmy Reed pour faire ça. J’ai mes fans. C’est tout ce qui compte.

C’était vraiment tout ce qui comptait.

J’me levai alors… Parce que Jake avait dit que c’était la dernière question. J’pris alors une cassette audio posée sur un meuble et j’la mis devant lui.

-Tiens… Pour toi… C’est une nouvelle chanson… Diffuse-là. J’suis sûr que tu vas aimer.

@ Billy Lighter

Howard osa parler sur antenne du tabassage en règle dont il avait été victime… Enfin, il ne se nommait pas vraiment mais affirmait que Jimmy Reed était capable de commanditer ce genre de chose… Un peu comme un chef mafieux en fait. Combien de mafieux avaient une belle place et étaient même des personnalités publiques, voire politique ?

Du coup, Reed était intouchable, comme le disait Howard.

Alors je posai une question qui impactera probablement plus nos auditeurs que tout ce que Howard avait dit jusque-là. Je savais que pour avoir l’attention, il fallait utiliser peu de mots, mais des mots forts.

Alors je demandai à Howard de me dire s’il pensait que Reed était un psychopathe, à l’instar du criminel récemment arrêté, Ward Fleming.

Howard me fixa dans les yeux… Et malgré qu’il soit complètement bourré, je vis cette petite étincelle de détermination qui signifiait qu’il savait parfaitement ce qu’il disait…

Même s’il n’avait peut-être pas conscience de ce qu’il provoquerait en disant ce qu’il avait à dire.

Reed était un psychopathe. Ça, c’était dit.

Je regardai Howard et hochai lentement la tête, signe que j’avais compris qu’il disait vrai.

J’en revins à quelque chose de plus basique. L’appartenance de Fireworks à BSC et il me déclara qu’après concertation avec David McAvoy et son manager Jack Perry, il n’allait pas quitter la maison de disque. Mais que tous l’argent récolté avec leur futur album serait reversé à United For Youth…

Mais alors une autre question me vint. Et si c’était Reed qui les virait après cette déclaration.

Et là, l’alcool repris le dessus un instant dans le regard d’Howard qui fut comme perdu. Apparemment, il n’avait pas pensé à cette éventualité.

Finalement, sa réponse me fit sourire. Howard était un vrai artiste… Il ferait de la musique jusqu’à en crever avec ou sans Jimmy Reed. De toute façon, il avait largement les moyens de se produire lui-même, avec David, s’il le voulait.

Enfin, je le pensais… Parce qu’il y avait quelques années, il était criblé de dettes… Mais comme il me l’avait expliqué hors interview, sa dette avait été effacée une fois Fireworks chez BSC.

Howard se leva alors et me donna une cassette.

-Merci Howard. Merci pour cette interview. Je laisse à nos auditeurs le loisir d’écouter ce nouveau petit bijou. Bonne soirée à tous. Schüss !

Et j’éteignis l’enregistreur pour en enlever la cassette et mettre à la place celle qu’Howard venait de me donner. J’appuyai sur play et le clavier de David résonna dans la suite.

♫

Puis les paroles me prirent aux tripes… Cette chanson était un véritable cri de guerre.

A la fin de la chanson, je regardai Howard.

-Ça, c’est la meilleure façon de s’exprimer !

@ Billy Lighter