Coca et dessin…

C’est ce que je faisais depuis que j’étais dans la salle de repos des studio ; boire du coca et dessiner… Je préférais ça à écouter Duncan enregistrer. Moi, ça m’ennuyais de l’écouter. Ils n’étaient pas The Burning Fire. Et j’aime QUE The Burning Fire.

Voilà.

Mais The Burning Fire enregistrait pas. Pas encore en tout cas. Peut-être, ils allaient venir bientôt. Moi, j’espérais. Parce que je suis venu pour ça ! Sinon, moi, j’aurais été avec Nell à Saint-John ou j’aurais demandé à Leia si je pouvais venir au Crazy Ginger avec elle.

Mais non… J’étais ici depuis le début d’après-midi… Et je dessinais. Jordan voulait toujours que je sois avec quelqu’un. Il voulait pas me laisser seul quand il travaillait et que Nell allait à Saint-John. Il voulait toujours que quelqu’un me surveille comme si j’étais un bébé.

Moi, je suis pas un bébé.

Quand j’étais chez mon père, je pouvais aller me promener seul et rester seul à la maison. Moi, je sais me débrouiller seul mais Jordan a peur que je me casse loin. Mais plus il m’enferme, moi, plus j’ai envie de me casser loin. Depuis que j’étais revenu vivre chez lui, j’avais envie de partir surtout que ça faisait un moment que j’avais plus vu Sky.

Elle était dans un endroit pour qu’on l’aide. C’est ce que Jordan avait dit. Elle était là-bas avec Heaven.

Et moi, j’étais revenu à la case « Jordan » avec tout ce que je pouvais faire chez mon père en moins.

Bref, ça m’énervait.

Et j’étais énervé que The Burning Fire soit pas là.

Alors, je dessinais. Je me dessinais sur la plage à Malibu à tirer sur des cannettes. On faisait ça avec mon père. J’aimais bien ça. Puis, je dessinais Sky, moi et Heaven chez nous. Mon chez moi d’avant… Enfin, celui de mon père… L’appartement petit que j’aimais pas trop. J’avais aussi dessiné Dylan, Guillermo et Jesse dans la cour tous morts avec des poignards dans la tête et dans le corps. Moi, je savais que j’allais les revoir en septembre parce que Jordan voulait que je retourne à l’école.

Puis, j’avais dessiné Sofia… Et c’est pendant que je dessinais ça qu’un roadie avait déposé des magazines et un journal sur la table avant de prendre une bière et de s’en aller me laissant, à nouveau, seul dans la salle de repos.

Je pris le magazines laissant mes dessins trainer tout autour de moi. Je pris le journal. Il y avait des nouvelles de mon père dedans. Je lisais. Il était en prison. Moi, je savais ça… Avec mon grand-père. C’est ce que disait l’article. Moi, je me demandais s’il allait sortir… Alors, je continuai à lire pour savoir s’il allait sortir de là et continuer à m’apprendre à tirer sur la plage à Malibu.  

Mais alors que j’étais distrait, je renversai mon coca sur la page du journal et m’exclamai d’un coup, très fâché :

-Putain !! Je saurais plus lire la fin !!

Moi, je voulais la fin ! Celle qui parlait de où était l'enquête et de combien de temps mon père pourrait être en prison.

@ Billy Lighter

Collins me semblait inquiète depuis son retour de New-York… En effet, la surprise qu’ils avaient préparée, avec Fireworks, pour Lola n’avait pas eu l’effet « coup de foudre » escompté… En fait, ni ma petite-amie, ni David n’étaient certains de l’issue de la chose. Lola ne s’était pas précipitée sur la scène pour embrasser fougueusement Howard après ses chansons…

Malgré tout, ils avaient quand même laissé le batteur à New-York, le temps qu’il répare les pots cassés… Et le suspens jouait sur le moral de Collins qui devait s’occuper en plus des inquiétudes de David que ça bouleversait totalement et qui, en attendant, n’avait pour compagnie que le chien du couple Stone et Collins elle-même qui passait le voir tous les jours.

En ce qui concernait notre couple à nous, nous étions toujours en mode découverte… On ne s’était pas installés l’un chez l’autre… bref, on sortait ensemble comme deux adolescents, mais c’était bien ! On s’amusait vraiment bien… Et quelque part, je pensais bien que c’était parti pour devenir du sérieux.

Jamais je n’avais connu une femme comme elle… Enfin… Pour le peu que j’en avais connu. Mais disons que je prenais plus de temps libre pour pouvoir le passer avec elle.

Mais aujourd’hui, j’étais aux studios de MTI à m’occuper du matériel… On nous avait demandé, à nous, roadies, de nous tenir prêt au cas où The Lightening déciderait que leur album est bon à être sorti et qu’il était temps de partir en tournée…

Alors je faisais des réparations, voyais avec le groupe ce qu’ils voulaient comme type de scène… Il voulait quelque chose de grand, avec différents niveau pour courir et sauter pendant le concert comme si la scène était un genre de grand skate park similaire à celui de Santa Monica.

Bref, il y avait du boulot.

Je traversai le couloir pour prendre une petite pause et un bon café. Je pouvais entendre BleedingHeart et ça me fit sourire. C’était un très bon groupe ! Dommage que Timmy Evans le considère comme secondaire… Ils méritaient d’être sous les feux des projecteurs.

En entrant dans la salle de repos, j’entendis une voix d’enfant jurer…

Je restai interdit, la poignée de porte dans la main, surpris par ce juron qui venait du cœur.

-Heu… Tout va bien ?

Il me fallut quelques secondes mais… finalement… Je reconnus ce petit gars.

-Hey mais tu es Grant !

Je le connaissais parce que je l’avais chopé en pleine rue une nuit… je lui avais offert un McDo mais quand il avait compris que j’allais le ramener à son père, il avait fuis sur le toit d’un immeuble. C’était finalement la police qui l’avait récupéré.

-Qu’est-ce que tu fais là ? Attends… on va nettoyer ça…

J’allai vers l’évier de la petite cuisine et y pris une loque légèrement humide puis vint éponger le coca qu’il avait renversé…

-C’est intéressant, le journal ?

@ Billy Lighter

Le coca était partout sur les mots que j’étais en train de lire. Ils étaient en train de disparaitre et je pouvais plus rien comprendre de la fin. Ça m’énervait ! Tout ce qu’il restait de bien visible, c’était la photo de mon père.

Je m’exclamai. Je m’énervais. Je saurais jamais la fin. J’aimais pas ça. Moi, j’allais devoir trouver un autre journal. Moi, j’en avais marre de tout ça.

J’entendis alors la voix d’un homme. Il me demandait si ça allait bien. Je me retournai d’un coup et je vis Abel. Moi, je me rappelle de lui. Il m’avait payé un McDo mais n’avait pas voulu m’emmener dans le Maine. C’était il y a longtemps. Puis, je l’avais revu ici avec Sky quand j’avais fait péter des pétards avec Howard Stone. Mais c’était il y a longtemps aussi.

-Non ! Moi, j’ai renversé ! Moi, je peux plus lire maintenant !

Il déclara que j’étais Grant. Il m’avait reconnu. Moi, ça faisait longtemps que je l’avais plus vu mais il m’a reconnu quand même.

-Oui. Grant.

Il se demandait ce que je faisais là. Moi j’étais là parce que je pouvais être là ! Il voulait m’aider. Il y avait plus rien n’à faire. L’article est foutu maintenant !

-Moi, je suis ici parce que Duncan est ici. Tu as oublié ? Moi, Duncan c’est le frère de mon tuteur. Moi, je suis venu ici parce que je pensais que The Burning Fire allait venir mais ils sont pas là. Ça m’énerve ! J’en ai marre de tout !

Oui. De tout ! Moi, tout m’énervait tout le temps !

Abel commença à nettoyer pendant que, moi, je rassemblait mes dessins en tas. Ils avaient pas été touchés par le coca. Je les mis sur le côtés regardant Abel éponger. Il demanda si le journal était intéressant.

-Oui ! Moi, je voulais savoir quand mon père allait sortir de prison. Moi, je dois lui dire que c’est pas bien de faire mal à Sky et j’aimerais qu’il m’entraine à nouveau à tirer. Mais les mots sont parti et je peux plus lire combien de temps il va être en prison.

Je me renfrognai les bras croisés. Je saurais jamais la suite.

@ Billy Lighter

Le garçon était furieux parce qu’il avait renversé sur le journal qu’il lisait. Ça paraissait vraiment important pour lui, pas comme un caprice.

Puis je l’avais reconnu. C’était le jeune Grant, le petit fugueur. J’étais étonné de le voir là mais il devait être venu avec quelqu’un… On ne s’introduisait pas comme ça ici ! On était pas chez BSC où il paraissait qu’un jour, Julian Hughes avait réussi à entrer pour aller retrouver sa Livia…

C’était des rumeurs mais je trouvais l’histoire assez romantique. Ce n’était sûrement pas le fils du grand patron qui allait faire du vandalisme chez la concurrence.

Bref, Grant était bien Grant et il me dit d’un ton sec qu’il était là parce que le frère de son tuteur, Duncan, était là.

Tout en mouillant une loque, j’avais dit d’un air pensif…

-Ah ouais, c’est vrai…

Il râlait parce que The Burning Fire n’était pas là…

-Pourquoi tu ne vas pas voir BleedingHeart ? Ils sont très bons aussi…

Je commençai à nettoyer, faisant attention aux dessins de Grant. Il y en avait toute une pile, mais celui du dessus représentait une belle enfant, avec des traits latinos et aux cheveux bruns tressés. C’était un très beau dessin.

-vraiment pas mal, ton dessin… C’est une fille que tu connais ?

J’avais pas envie de faire le gros con en disant direct « c’est ton amoureuse ? »… Je trouvais que ça ne se faisait pas, surtout à un garçon de dix ans.

Je soupirai…

-The Burning Fire n’enregistre pas pour l’instant : Savannah Prescott est souffrante et Howard Stone est à New-York… Mais je suis sûr que tu auras l’occasion de les voir un jour. Après tout, si tu es avec Duncan, il pourrait t’amener ici une fois qu’ils seront là.

Puis je portai mon attention sur le journal dont l’encre était en train de dégouliner… j’achevai de nettoyer le coca et lançai la loque dans l’évier une fois terminé.

Grant voulait des nouvelles de son père et je fis tilt ! Au tournoi de boxe, on avait présenté Grant comme s’appelant Grant Fleming… Et pour le moment, la presse ne parlait que de Ward Fleming qui avait de quoi faire pâlir le boucher de Los Angeles, son propre père.

Je vis la photo de Ward… Et puis regardait Grant. Ouais… Il y avait plus qu’un air de famille.

Je m’assis sur la chaise à côté de lui alors qu’il se renfrognait et croisait les bras.

-L’article dit certainement que ton père restera en prison jusqu’à son procès où il sera jugé et, peut-être, condamné.

Je fronçai les sourcils.

-Mais… Tu as un tuteur depuis longtemps, non ? Depuis au moins la fois où on s’est rencontrés la première fois… Tu as quand même le droit de voir ton père ?

@ Billy Lighter

Moi, après que j’avais renversé le coca, Abel était entré dans la pièce. Il me reconnu et je le reconnu aussi. Je râlais. Je râlais très fort à cause du coca et aussi parce que The Burning Fire n’était pas là. Moi, j’aurais dû aller à Saint-John à la place.

Abel disait que BleedingHeart c’était bien aussi et je roulai des yeux.

-Non. J’aime The Burning Fire.

Rien d’autre. Voilà. Pourquoi les gens essayaient toujours que j’aime BleedingHeart. C’est pas parce que Jordan est mon tuteur que je dois aimer la musique de son frère. Moi, je comprends pas ça. Moi, j’aime The Burning Fire. C’est tout. Point à la ligne.

Abel nettoya le coca. Il regarda mon dessin. Celui qui était au-dessus de la pile. Il disait que le dessin était beau. Il se demandait si c’était une fille que je connaissais sur le dessin. J’hochai de la tête.

-Oui. C’est mon amie Sofia. Elle est dans ma classe. Moi, j’aimerais la voir mais elle a toujours quelque chose à faire quand je l’invite.

Et ça aussi ça m’énerve. Surtout que je savais qu’elle allait parfois chez Jesse et chez Dylan. Mais chez moi c’est toujours « non ». Moi, je comprends pas pourquoi. J’aime pas ça.

Abel disait que The Burning Fire enregistrait pas parce que Savannah était malade et que Howard était à New York. Je pris mon air le plus contrarié qui soit. Moi, ça m’énervait que quand je venais ici, ils étaient jamais là. Moi, je voulais les voir faire de la musique. C’est tout. Moi, je demande rien de plus.

-Et bien, ils devraient venir pour moi. Moi, je dois vraiment envoyer une lettre à Howard. Moi, je dois lui demander qu’il vienne ici et qu’il fasse des concerts. Jimmy Reed doit me payer des billets pour les voir.

Oui. Il doit. Il me l’a dit.

Abel demanda si le journal était intéressant et je disais que oui parce que je voulais savoir pour combien de temps mon père allait encore rester en prison. Moi, je voulais qu’il sorte. Et y repenser me fit râler d’autant plus parce que les mots étaient maintenant tout effacés. Mais Abel disait que mon père restera en prison jusqu’au procès. Je fronçai fort les sourcils croisant les bras à nouveau et me refrognant sur ma chaise.

-Moi ça me dit pas quand est le procès. Ni combien de temps il restera s’il est condamné. Moi, je veux savoir tout ça.

Abel disait que j’avais un tuteur depuis longtemps. Il demanda si j’avais le droit de voir mon père.

-Moi, j’étais chez Jordan avant. Puis, j’ai été vivre chez mon père avec Sky. Moi, je vivais là puis mon père est allé en prison alors je suis retourné chez Jordan.

Oui. Et j’avais rien choisi de tout ça.

-Mais je peux pas voir mon père. Le juge veut pas. Moi, le juge il choisit toujours tout pour moi. De toute façon, même si je pouvais, Jordan voudrait pas que j’aille le voir. Il choisit tout pour moi aussi. Moi, j’en ai marre qu’on choisisse pour moi. On choisit où je vis et ce que je dois faire. Ça m’énerve. Tout le monde m’énerve. Je déteste tout le monde.

Et je dis ça en faisant un geste de mauvaise humeur et en balançant le journal à terre d’un revers du bras.

@ Billy Lighter

Le garçon râlait et rien ne semblait pouvoir le faire sourire. Il avait la chance de pouvoir voir un groupe, BleedingHeart, en action, mais il ne jurait que par The Burning Fire. Malheureusement, je ne pouvais rien faire pour lui à ce niveau-là.

Tout ce que je pouvais faire pour le moment, c’était nettoyer le coca avant que ça ne colle partout. Je pus alors voir que Grant avait un grand talent de dessinateur. La petite fille qu’il avait dessinée était très réaliste. Je lui demandai qui elle était et il me déclara qu’il s’agissait de son amie… Une amie qui était toujours occupée quand elle l’invitait chez lui.

Le coca nettoyé, je me laissai tomber sur une chaise à côté de lui.

-C’est bien dommage… Je comprends que ça te frustre. Mais peut-être qu’elle n’y est pour rien et que ce sont ses parents qui lui interdisent de te voir…

Je haussai les épaules.

-Même si je ne vois aucune bonne raison pour empêcher des amis de se voir. C’est juste con.

Quant à The Burning Fire… Le petit voulait envoyer une lettre à Howard Stone pour lui dire sa façon de penser. Il affirma avec détermination que Jimmy Reed lui avait promis des tickets de concert. Je fus surpris.

-Tu connais Jimmy Reed ? Même moi je l’ai jamais vu en vrai.

Et je ne savais pas comment ce gamin, le fils biologique du plus grand criminel actuel de L.A. et le pupille d’un flic, pouvait avoir des liens avec le magnat de BSC…

Il était en colère parce qu’il ne pouvait plus lire la fin de l’article et savoir ce qu’il adviendrait de son père… Personne ne le savait encore… Il était incarcéré dans l’attente de son procès, mais les pronostics à son sujet n’étaient pas très bons… Je me gardai bien de dire à Grant que son père allait probablement écoper de la prison à vie, voire de la peine de mort. Tout du moins, c’était ce qui se disait dans la presse.

Je soupirai et posai une main sur son épaule.

-Je suis désolé… Pour l’instant personne n’a de réponse à tes questions.

Je lui demandai alors de clarifier un peu les choses pour moi, parce que j’avais l’impression qu’il me manquait d’énormes parties dans le parcours de ce petit gars. En même temps, on ne se connaissait pas vraiment, mais s’il était souvent avec Duncan Keller, alors on risquait de se croiser souvent. Alors autant faire connaissance.

Il pesta sur le juge qui choisissait toujours pour lui… ça lui avait fait faire des allers-retours entre son père et son tuteur. Résultat, il détestait tout le monde.

Je le regardai dans les yeux.

-Alors, dis-moi… Toi, tu voudrais quoi ? Je ne peux pas vraiment faire quelque chose pour toi, mais je peux au moins t’écouter.

@ Billy Lighter

Moi, j’expliquais que la fille sur mon dessin était Sofia, mon amie qui n’avait jamais le temps de venir chez moi. Abel trouvait ça dommage… Mais il disait que, peut-être, Sofia y était pour rien et que c’est ses parents qui voulaient pas même s’il trouvait ça con.

-Oui ! Très con ! Et pourquoi ses parents voudraient bien qu’elle aille chez Jesse ou chez Dylan et pas chez moi ? Moi, je comprends pas ça. Je suis son MEILLEUR ami. Pas eux.

Oui. Pas eux. Pourquoi ses parents voudraient pas ? Moi, je devrais demander à Jordan de convaincre ses parents ! Moi, je ferais ça.

Moi, j’allais envoyer une lettre à The Burning Fire pour qu’ils viennent ici quand j’y suis. Et pour qu’ils fassent des concerts aussi. Moi, Jimmy doit me payer une place pour que j’aille voir le concert. Abel s’étonnait que je connaissais Jimmy. Je le regardai dans les yeux.

-Oui. Moi, je travaille pour lui. Je suis son garde du corps dans la grande tour. Je surveille sa porte et son parking. J’ai même un badge, moi. Si je travaille pour lui c’est parce qu’il m’a vu à la boxe et m’a trouvé fort.

Et que j’ai cassé la fenêtre chez BSC aussi mais ça, pas besoin de le dire à Abel. Ah et j’ai brûlé l’escalier aussi.

Mais moi, j’étais surtout en colère parce que j’arrivais plus à lire la fin de l’article dans le journal. Moi, j’expliquais à Abel que je voulais savoir combien de temps mon père allait rester en prison. Moi, j’en avais marrer que les juges choisissent toujours ma vie pour moi. Mais Abel disait qu’on savait pas encore combien de temps mon père allait rester en prison. Il disait que personne le savait. Je pris un air très contrarié.

-Moi je DOIS savoir ! Moi, j’en ai marre !

Abel posa des questions et je répondis que j’avais été chez mon père et que, maintenant, j’étais revenu chez Jordan. Que moi, on me permettait JAMAIS de choisir. Alors, Abel demanda ce que je voulais moi.

Je le fixai, un moment, en silence, le regard neutre.

Il disait qu’il pourra rien faire mais qu’il pourra m’écouter. Moi, je savais pas trop à quoi ça servait de lui dire du coup.

Mais je répondis quand même.

-Moi, je voulais vivre à moitié chez Jordan et à moitié chez mon père. Au début, je voulais ça. Mais chez mon père, il y a Sky et j’aime bien Sky. Puis, je peux aller dormir quand je veux et me promener dans la rue et le parc… Avec Jordan, je peux pas. Mais j’aime bien quand même aller chez lui.

Mon air était toujours contrarié parce que je savais moi-même pas choisir. Mon père m’avait dit que, dans la vie, on peut pas faire moitié-moitié.

Tout ou rien.

Alors, je regardais Abel dans les yeux.

-Je veux être chez mon père tout le temps avec Sky et Heaven. Je veux ça. Mais si mon père est en prison, j’aurais plus ça. Moi, j’irais vivre chez Jordan tout le temps… Je pourrais voir Sky et Heaven mais plus comme avant… Alors, je crois que le mieux, moi, c’est que je vive seul. Voilà.

Je croisai les bras. Voilà. Seul. Ainsi on m’ennuiera plus.

-Je serais mieux seul. J’irais plus à l’école, j’irais dormir quand je veux et je pourrais voir qui je veux quand je le veux. Mais le juge voudra pas. Il s’en fiche de moi, le juge. Il écoute que les avocats.

Oui. Que eux.

@ Billy Lighter

Grant était furieux, mais pas seulement pour le coca sur son journal, pas seulement sur l’absence de The Burning Fire. Non. Grant était une boule de colère. Il était complètement tendu. C’était horrible de voir un enfant dans cet état-là, comme s’il était perpétuellement en proie à un combat intérieur… Et ça le mettait en rogne contre tout et n’importe quoi.

Enfin, je comprenais quand même que ça devait être frustrant que sa meilleure amie puisse aller chez les autres et pas chez lui.

Je le regardai, perplexe…

-Pourquoi ses parents veulent pas qu’elle vienne chez toi ?

Mais ce qui m’étonna, c’était qu’il connaissait Jimmy Reed… Rien ne le prédisposait à avoir un lien, pour le peu que je savais sur lui, avec le grand patron de BSC. Et pourtant, quand il me raconta qu’il était en quelque sorte le garde du corps de Reed, j’en restai bouche bée.

-Oh ben… C’est impressionnant d’avoir déjà un tel travail à ton âge… T’as pas peur des fois ?

Quelque chose me disait que non.

Quelque chose me disait que la peur ne faisait pas partie du maigre panel d’émotion de Grant qui ne semblait vivre pleinement que la colère et la frustration.

Il voulait absolument savoir ce qu’il adviendrait de son père, Ward Fleming, actuellement incarcéré à Saint Quentin… Je lui dis alors ce que je savais, c’est-à-dire pas grand-chose, si ce n’était qu’il fallait attendre le procès. Et il explosa en disant qu’il en avait marre.

On pouvait dire tout ce qu’on voulait sur Ward Fleming, c’était triste de voir un enfant laissé comme ça dans l’ignorance.

-Mais… Ton tuteur est policier… Il n’en sait pas plus ?

Probablement pas… En tant que tuteur du petit, on le laissait certainement à l’écart de toute information sensible comme n’importe quel membre de la partie civile.

Alors je demandai au petit ce qu’il voulait vraiment. Il commença par me dire qu’il voulait vivre à moitié chez son tuteur et à moitié chez son père, pour voir la femme de son père (qui avait porté plainte contre lui si j’avais bien suivi la presse) et avoir plus de liberté.

Puis il changea d’avis pour me dire qu’il voulait être chez son père tout le temps.

Pour finalement conclure qu’il voulait vivre seul.

Je pinçai les lèvres.

-Tu sais… J’ai vécu seul longtemps. Ma mère est partie et mon père est mort… Ce n’est pas facile de vivre seul… ça n’a rien de marrant. Mais je comprends ton sentiment. Ce n’est pas marrant non plus d’être balloté d’un endroit à l’autre, de changer toujours de vie.

Je soupirai…

-je peux voir tes autres dessins ?

@ Billy Lighter

J’haussai des épaules toujours très frustrés quand Abel demanda pourquoi les parents de Sofia ne voulaient pas qu’elle vienne chez moi. Je n’en savais rien. Je comprenais pas pourquoi.

-Je sais pas ! Moi, je comprends pas…

Il se demandait comment je connaissais Jimmy Reed. C’était simple. J’étais monté dans sa tour, il m’a viré, moi j’ai cassé sa fenêtre. C’est tout. Ah et il a m’a vu à la boxe aussi. C’est ça que j’expliquais à Abel qui était étonné que j’arrive à devenir garde du corps si jeune. Je levai un peu la tête comme le faisais Jimmy en regardant Abel.

-Non, moi, j’ai jamais peur. Moi, je suis le meilleur garde du corps de BSC.

On parla de mon père qui était en prison. Moi, je voulais savoir quand il sortait mais personne semblait savoir. Ni les journaux, ni Abel, ni personne. Et je n’aimais pas ça car je voulais savoir. C’était important que je sache. Je comprenais pas pourquoi on ne me disait pas tout de suite combien de temps il y restera.

Abel pensait que mon tuteur, Jordan, pourrait peut-être savoir. Je grommelai :

-Non… Il sait rien. Enfin, je crois. Moi, je lui parle pas de mon père parce qu’il l’aime pas.

Oui. Je préférais pas parler à Jordan de mon père parce qu’on était jamais d’accord. Il disait que mon père est un tueur… Point à la ligne. Moi, je crois qu’il veut rien entendre de ce que je veux savoir sur mon père. Alors, je demande pas. De toute façon, les flics, ils savent jamais rien.

Abel me demanda ce que, moi, je voulais. Mais je savais plus trop… Alors, moi, je finis par dire que je voulais vivre seul. Moi, c’était mon idée au début mais Jordan avait dit que je pouvais pas vivre seul.

Abel disait que, lui, il avait vécu longtemps seul. Son père est mort comme ma Maman et sa mère était partie. Il disait que c’était pas cool de vivre seul. Mais il disait aussi que c’était pas drôle de changer tout le temps.

-Moi, je préfère vivre seul. On me fout la paix au moins. Moi, j’aime pas changer tout le temps de chambre. Puis, j’aimais pas changer tout le temps de gens autour de moi. Plus il y a de gens, plus c’est chiant.

Il demanda pour voir mes dessins. Je le fixai deux secondes avant d’hocher de la tête.

-Oui.

J’éparpillai les dessins devant nous et je les montrai un par un. Il avait déjà vu celui de Sofia. Je pointais du doigt chaque dessin un par un.

-Ça c’est Sky et ma petite sœur, Heaven.

Je montrai un autre.

-Ça c’est moi sur la plage quand je tire sur les cannettes avec le fusil.

Je montrai, ensuite, le dernier.

-Ça c’est Jesse, Guillermo et Dylan… C’est des gens de l’école. Je les aiment pas. Je les ais dessiné mort avec plein de poignards et de sang.

Je relevai le regard sur Abel.

-Ils sont bien, hein ? Je suis le meilleur dessinateur du monde.

Oui. Je l’étais.

@ Billy Lighter

Je décidai d’abandonner la conversation au sujet de son amie Sofia. Pas que ça ne m’intéressait pas, mais je le sentais tout tendu et tout raide rien que d’y penser. J’avais l’impression que ce gosse allait me faire une crise cardiaque entre les doigts.

Alors il me parla de Jimmy Reed, de la tour BSC, etc. C’était un travail bizarre pour un petit gars si jeune, mais Grant, en me regardant d’aussi haut qu’il pouvait, déclara n’avoir jamais peur et être le meilleur garde du corps de BSC.

Je lui souris.

-Je te crois. Jimmy Reed n’est pas du genre à garder des gens incompétents, je pense.

Quant à son père, Ward Fleming, qui était en prison, je ne pouvais pas vraiment l’aider. Je n’en savais pas plus que la plupart des gens. Alors je pensais que son tuteur pouvait lui en dire plus… Mais Grant se renfrogna. Lui et Jordan ne parlaient jamais de son père parce que son tuteur le détestait.

Je pinçai les lèvres.

-Je crois que tu devrais essayer d’en parler avec lui… Je suis sûr qu’il ne veut pas te cacher des choses. Et puis même s’il déteste ton père, toi, tu as le droit de savoir.

Je haussai les épaules.

-Tu devrais essayer de poser poliment des questions.

Il râlait aussi parce que personne n’avait jamais voulu l’écouter, au sujet de ses choix de vie. Ni Jordan, ni son père, ni le juge. Alors avec tout ça, il en venait à la conclusion qu’il voulait vivre seul. Mais je me servis de ma propre expérience pour lui dire combien c’était dur… et très ennuyeux, de vivre seul.

Mais voilà, apparemment, Grant n’aimait pas beaucoup les gens.

-A part Sofia, tu n’as pas d’amis ?

Je savais pour l’avoir déjà rencontré que Grant était un peu spécial… Mais tout enfant devrait avoir des amis sur lesquels il pouvait compter.

Gentiment, je lui demandai si je pouvais voir ses dessins et il me les montra en les décrivant. Je pris d’abord le dessin de Sky et Heaven.

-Je ne savais pas que tu avais une petite sœur. C’est un tout petit bébé, vu ton dessin. Tu dois être un super grand frère.

Il m’en donna un autre, où il s’était dessiné lui-même en train de tirer sur des canettes. Je souris. Ça ne me choquait par parce que :

-Mon père aussi me faisait tirer sur des boîtes de conserve avec une carabine. C’était un bon moment passé ensemble.

Puis enfin, il me tendit le dernier dessin… Et celui-là était inquiétant… Des poignards, d sang, le tout sur des camarades de classe.

Mais je ne me démontai pas et demandai presque innocemment…

-Tu ne les aimes pas au point de vouloir qu’ils meurent ? Ils te font du mal ?

Parce que si c’était le cas, le mieux était qu’il en parle à son prof ou à son tuteur…

-Mais c’est vrai que tu es un très bon dessinateur… C’est très… réaliste…

Presque trop.

@ Billy Lighter

J’hochai de la tête quand Abel disait que Jimmy Reed ne gardait pas des gens incompétents. Non. Il fait pas ça. Moi, je suis fort !

-Je suis fort.

Moi, j’avais plus trop de nouvelles de mon père et je voulais pas en parler à Jordan parce que je savais que quand je parlais de mon père, il aimait pas ça. Il pensait que mon père méritait d’être en prison. Mais je crois pas qu’il sera très utiles pour me dire des nouvelles. Et il ne voudra pas que je rende visite à mon père. Il disait que je pouvais pas l’approcher. Encore une preuve que je ne peux RIEN choisir pour moi.

Mais Abel disait que je devais essayer de parler avec lui. Je roulai des yeux. J’hochai de la tête.

-Oui. J’ai le droit de savoir. Mais Jordan va dire ce qu’il veut qu’il arrive à mon père pas ce qu’il va lui arriver. Moi, je suis sûr de ça !

Abel disait que le mieux était que je demande poliment. Je fixai Abel droit dans les yeux.

-Les adultes ne sont jamais polis… Pourquoi je serais poli ?

Je finis par expliquer à Abel que les mieux pour moi était de vivre seul. Lui, il n’avait pas aimé mais, moi, je pense que c’était le mieux. Je pourrais faire ce que je veux. Abel se demanda alors si en dehors de Sofia, j’avais des amis. J’hochai négativement de la tête.

-Non. Pourquoi faire ? A l’école, en dehors de Sofia, se sont tous des loosers.

Abel voulait voir mes dessins alors je lui montrai. Depuis que Jordan et Nell avaient vu mes dessins, je les montrais à tout le monde quand les gens demandaient. Mes dessins étaient beaux. Je les aimais beaucoup.

J’expliquai chaque dessins à Abel et il s’arrêta sur celui avec Sky et Heaven. Il savait pas que j’avais une sœur.

-C’est ma demi-sœur. C’est la fille de Sky et mon père. Elle est petit, oui. Je la protège.

Je montrai celui où je tirais sur des cannettes. Abel aussi, il allait tirer sur des cannettes avec son père. Je lui souris sincèrement cette fois.

-Oui. J’aime bien aussi. Mon père m’a appris à tirer.

Je montrai aussi le dessin avec Guillermo, Jesse et Dylan. Abel se demanda si je les détestaient au point que je voulais qu’il meurt. Mon regard se perdis dans le vide.

-Oui. Je veux qu’ils meurent.

Je secouai la tête avant de regarder à nouveau Abel dans les yeux.

-Mais je peux pas les tuer. Sinon, je vais en prison. Ils ne me font pas mal mais je n’aime pas qu’ils jouent avec Sofia. Elle est mon amie. Ils me la volent.

Abel aimait bien mes dessins. Il les trouvait réaliste.

-Oui. Ils sont beaux. Jordan dit que je devrais faire une école d’art mais je veux devenir Batman. Je veux combattre les méchants. Et puis, j’aime pas l’école. Moi, je suis content quand je n’y vais pas. Je préfère aller chez BSC, faire de la boxe et dessiner. Ou aller à Saint-John avec Nell. C’est la femme de Jordan.

@ Billy Lighter

Je souris quand il déclara qu’il était fort…

-Je sais. Je sais que tu as gagné le tournoi de boxe.

Mais ça ne suffisait pas à le rendre heureux et pour cause : son père était en prison. Peu importait ce que Fleming avait fait, finalement, du point de vue du petit. C’était son père et ça devait être très difficile à vivre. Je pensais qu’il avait le droit de savoir et qu’il devrait questionner son tuteur à ce sujet.

Mais apparemment, Jordan, son tuteur, était plus enclin à lui dire ce qu’il voulait qui arrive plutôt que ce qui allait arriver vraiment. C’était une situation complexe. Tout ce que je pouvais lui conseiller, c’était de demander poliment.

Cependant, il ne voyait pas pourquoi il devrait être poli alors que les adultes ne l’étaient pas.

-Heu… J’ai été malpoli, moi ? Avec toi ? Je ne pense pas.

Je lui demandai alors s’il avait des amis, en dehors de la fille qu’il semblait idéaliser à mort. Et la réponse ne me surpris pas vraiment. Grant n’avait pas d’amis, parce qu’il pensait que les autres étaient tous des losers…

Je frottai mon menton…

-Mmm… Pourtant c’est sympa d’avoir des amis. Pour s’entraider et tout ça.

Je lui proposai de me montrer ses dessins et il s’exécuta avec un plaisir évident, m’expliquant que sa petite sœur était en fait sa demi-sœur. Ils avaient le même père, mais pas la même mère. Et la Heaven en question était un tout petit bébé.

-Et ta sœur, elle vit avec toi chez Jordan ?

Séparer une fratrie, c’était un peu con, non ? Mais là-dedans, je ne savais pas vraiment où se trouvait cette Sky. Peut-être que c’était elle qui avait la garde de la petite.

Ensuite, je vis un premier vrai beau sourire sur le visage de Grant quand je lui dis avoir tiré sur des boîtes de conserve avec mon père, moi aussi… Tout comme lui.

-Mon père aussi m’a appris à tirer, mais ce n’était pas au bord d’une plage… C’était à l’orée d’une forêt, au Kansas.

Quant au dernier dessin, bien plus inquiétant… Et bien c’était simple : Grant voulait que des gens de sa classe meurent. J’allais dire quelque chose, mais Grant me devança. Il savait que tuer menait à la prison, c’était déjà ça. Surtout que ce n’était qu’une question de jalousie parce que la fameuse Sofia jouait avec les autres et pas seulement avec lui…

Je me levai pour aller me servir un café puis m’appuyai contre le plan de travail de la petite cuisine.

Je ne savais pas quoi dire, en fait… Sauf peut-être :

-Mon père m’a toujours dit que c’était mal de souhaiter la mort des gens…

Mais il avait du talent, ça c’était certain. Au point que son tuteur voulait qu’il fasse une école d’art, mais ce n’était pas dans les plans de Grant. Je souris quand il parla de la mission.

-Tu es un petit garçon bien complexe pour ton âge. A la fois tu voue une haine incroyable pour les gens… Et en même temps tu en aide plein d’autres à la mission ou en voulant être Batman.

Je haussai les épaules.

-Tu veux continuer à dessiner ? Ou ça te botte de venir voir dans quoi je travaille.

@ Billy Lighter

Oui. J’avais gagné le tournoi de boxe. Normal, j’étais fort. Abel le savait. Jimmy le savait. Jordan le savait. Nell le savait. Sky le savait et mon père le savait.

En parlant de mon père, il était en prison et j’avais pas envie de parler de ça avec Jordan parce que je savais qu’il m’aidera pas à apprendre plus. Il dira simplement qu’il espère que le juge mettra mon père en prison pour toujours. Moi, je commençais à connaitre Jordan. Mais Abel me disait que si je demandais poliment, ça devrait passer. Mais je disais que les adultes étaient jamais promis. Mais, lui, il se trouvait poli. Je roulai des yeux.

-Non. Tu as pas été malpoli. Mais les adultes ils disent toujours aux enfants de faire des choses qu’ils ne font pas. Comme ne pas dire de gros mots. Alors, je trouve ça injuste.

Moi, je disais pas avoir d’amis en dehors de Sofia. Abel trouvait ça dommage parce qu’il disait que les amis servaient à s’entraider. Je roulai des yeux.

-Non. J’ai pas besoin d’aide.

Je lui montrai, ensuite, mes dessins. Abel appris que j’avais une sœur. J’expliquai que c’était que ma demi-sœur parce que c’était la fille de Sky et de mon père. Abel se demandait si ma sœur vivait avec moi chez Jordan.

-Non. Elle est avec Sky. Moi, je sais pas trop où est Sky. Dans un centre, si j’ai bien compris. Mais je l’ai plus vu depuis un moment. Moi, j’aimerais la revoir. Moi, on m’a expliqué que je peux pas aller avec Sky parce que c’est pas ma mère.

Moi, je préférais finalement parler des cannettes et des tirs. Parce qu’Abel avait fait la même chose avec son père. Il disait qu’il faisait ça près d’une forêt au Kansas.

-Une forêt c’est mieux qu’une plage. Moi, je dirais ça à mon père quand il sortira.

Puis, Abel parla du dessins où Guillermo, Jesse et Dylan étaient morts. Moi, je disais que j’aimerais les voir mort mais que je pouvais pas les tuer parce que, sinon, j’allais aller en prison. Mais Abel disait que c’était mal de vouloir la mort des gens. Je le fixai d’un air neutre.

-Moi, j’y peux rien. Je les aime pas. Moi, je préférerais qu’ils existent pas.

Puis, j’expliquai que Jordan voudrait que je fasse une école d’art mais que, moi, j’aimais pas l’école et je voulais être Batman. Abel me trouvait complexe.

Non. J’étais simple. Je pris un air de réflexion.

-Moi j’aime aider les gens à la mission parce qu’ils me disent des compliments. Mais les gens à l’école, je les aimes pas.

Simple.

Il demanda si je voulais continuer à dessiner ou aller voir son travail. Je me retournai vers mes dessins.

-Moi, je continue de dessiner. Moi, je dois dessiner pour enlever les images dans ma tête. Moi, j’en ai beaucoup tous les jours.

Oui. Je dois les enlever. Alors, je laissai Abel partir travailler et je me remis à dessiner.

@ Billy Lighter

Grant trouvait injuste que les adultes demandent aux enfants de faire des choses qu’eux-mêmes ne respectaient pas. Il n’avait pas tort. Et je pinçai les lèvres, ne trouvant rien à redire face à cette vérité.

Je lui expliquai aussi qu’avoir des amis pouvait être important, utile et amusant mais l’enfant répondit qu'il n'avait pas besoin d’aide.

-Parfois, ce n’est pas vraiment de l’aide qu’on a besoin… juste quelqu’un à qui parler.

Il me montra alors ses dessins à ma demande et il m’expliqua que sa sœur ne vivait pas avec lui, mais avec Sky, la femme de Ward, donc. Qui était dans un centre… J’avais lu quelque part qu’elle avait porté plainte pour violence conjugale donc j’imaginais que le centre en question était un centre pour femmes battues.

Je soupirai, triste pour Grant.

-Pour l’instant, c’est vraiment pas un moment sympa à passer pour toi. Je peux imaginer ça. Mais tu verras, ça finira par s’arranger, d’une façon ou d’une autre.

Personnellement, je faisais confiance à la justice. Peut-être avais-je tort de le faire, mais si on ne pouvait pas se fier à l’un des piliers de notre civilisation, je pense qu’on allait droit dans le mur.

L’autre dessin le montrait en train de tirer sur des cannettes de coca et de bières. Je lui expliquai que j’avais vécu ce genre de moment avec mon père aussi mais près d’une forêt… Et ça sembla intéresser Grant qui trouvait qu’une forêt, c’était mieux que la plage.

Je rigolai.

-Il faudrait encore pouvoir trouver une forêt à L.A.

Le climat était plutôt aride et le paysage désertique…

Quant au dernier dessin qui montrait ses camarades de classe morts… ça m’interpella. Mais je n’étais pas psy… Je n’étais pas non plus responsable de Grant. Tout ce que je pouvais faire, c’était essayer de le comprendre.

Mais apparemment, c’était juste plus fort que lui. Je me mordis la lèvre… Que dire ? Rien d’intelligent ne me vint à l’esprit, si ce n’était qu’il avait une personnalité complexe puisque d’un autre côté, il aimait aider les gens à la mission où il faisait du bénévolat.

-Tu sais, si tu es gentil avec tes camarades de classe, ils te feront des compliments aussi.

Je lui proposai ensuite de venir voir ce dans quoi je travaillais, mais il préférait dessiner. Parce qu’il avait trop d’images dans la tête.

-D’accord… Si un jour, tu as besoin de parler à quelqu’un… De tout ce que tu veux… Et que tu es aux studios… Bah, je suis là.

Je lui fis signe mais il ne me répondit pas, déjà plongé dans son dessin…

@ Billy Lighter