Quand il fut temps de sortir de l’église, à la suite du cercueil de Peyton qui allait parcourir dans un corbillard blanc les quelques kilomètres qui la séparait du crématorium, un bel embouteillage se créa dans l’église. En effet, il fallait d’abord attendre que le flux de fans qui avaient réussi à se masser dans le fond de l’église sorte…

Ce n’était pas très grave. Bailey et moi n’étions pas pressés : nous n’allions pas assister à la crémation, mais bien à la cérémonie beaucoup plus intime qui allait se jouer à la villa d’Howard, dans son jardin. En tant que parrain et marraine de Phénix, c’était la moindre des choses.

Et comme on avait le temps, on en profita pour serrer quelques mains et échanger quelques mots… Surtout avec Livia et celui que je considérais toujours comme mon beau-fils, Julian. Livia avait l’air triste mais Julian semblait plus agacé d’être là qu’autre chose.

Au bout d’un moment, je repérai Ian, un peu plus loin dans la foule, non loin de sa mère et de son oncle.

Si Livia avait l’air un peu triste, mon fils illégitime, lui, avait l’air littéralement effondré.

Je posai ma main sur l’épaule de Bailey et lui signalai que j’allais voir Ian, la laissant discuter avec le jeune couple Hughes.

Je me faufilai ensuite dans la foule jusqu’à aller voir Ian.

Je savais qu’il était mon fils, mais l’inverse n’était pas vrai. Pour lui, j’étais tout simplement un partenaire de tournage. Et ensemble, on pouvait dire qu’on faisait du bon travail.

C’était un adolescent, désormais… Avec quelques boutons par-ci par-là… Mais j’étais sûr qu’il était amené à devenir un très grand acteur et un très bel homme.

Après tout, il tenait beaucoup de Vicky.

Je serrai la main à Victor, embrassai Vicky sur la joue puis tendis la main à mon fils.

-Ça va, Ian ?

Je savais qu’il était un très grand fan de Lola… ça devait être dur pour lui.

-Elle a eu droit à une belle cérémonie, non ? Elle peut reposer en paix maintenant.

Je lui souris.

-Sa musique sera éternelle, de toute façon. C’est ce qu’il faut te dire.

Victor était revenu près de nous après que le cercueil ait été mis dans le corbillard. Je passai, de temps en temps, ma manche sur mes yeux pour sécher mes larmes. Je fixai le corbillard toujours dévaster par ce qui était arrivé à la femme que j’admirais le plus avec ma mère.

-Je ne suis même pas invité chez Stone, tu te rends compte ?

Victor s’énervait parce qu’il n’était pas invité à la cérémonie chez Howard Stone. Moi, quelque part, je pensais que c’était bien fait pour lui ! Ça lui apprendra à être le pire oncle de l’univers ! Mais si j’avais été le meilleur ami de Lola, j’aurais été fâché, aussi, qu’Howard m’invite pas.

-Je sais… Mais vu ta relation avec Lola, j’imagine que c’est mieux pour tout le monde… J’ai entendu ton discours… Je te connais… Je crois, sincèrement, que c’est mieux.

Il grommela. Se renfrogna. Moi, je m’en fichais. Quand Victor était contrarié, ça me plaisait.

Même si tout ça ne passait pas au-dessus de ma tristesse. Je n’arrivais pas à ce que mes larmes ne coulent plus. Et elles coulaient toujours quand Hank s’approcha de moi. Je cherchais à reprendre contenance mais je n’y arrivais pas. Il serra la main de Victor, fit la bise à Maman et j’essuyai mes larmes pour reprendre un air digne en levant mon menton. Hank était un collègue et je ne voulais pas qu’il me voit pleurer !

Je lui serrai la main. Il demanda si j’allais bien.

-Non. Lola est morte. J’étais fan. C’était la meilleure chanteuse de l’univers.

Ma voix était teinté de tristesse et de colère. De colère contre personne parce que personne, en fait, n’avait tué Lola. Elle était morte comme ça. D’un coup.

Hank constata que la cérémonie était belle. C’était vrai. Tout avait été bien fait. J’aurais voulu encore plus de musique de Lola. J’hochai de la tête.

-Oui…

Et quand Hank déclara que sa musique sera éternelle, mes larmes se remirent à couler. Victor s’en alla ailleurs après avoir rouler des yeux. Maman, elle, prit un air triste. Et je lançai à Hank la voix teintée de sanglot :

-Oui… Mais… Je n’ai jamais pu la rencontré. J’avais plein de chose à lui dire et lui demander. Elle a été enfant star… Elle était critiqué comme moi.

Oui ! Je lisais la presse ! Je n’étais pas débile. On me voyait comme une diva. Mais voir que Peyton subissait la même chose me faisait dire que ce n’était pas un défaut. Juste une façon de gérer parfaitement sa carrière. Je suis exigeant ! Mais je suis une star ! C’est moi le talent ! C’est normale que les gens doivent faire en sorte que tout se passe bien pour moi !

-Je voulais lui parlé de nos carrières ! Je voulais voir ce qu’elle pensait de la mienne ! Et je n’ai pas eu le temps…

Je regrettais de ne pas avoir pris le temps de lui parler aux AMA l’an dernier.

Quand j’approchai, je vis clairement que Ian se redressa, plein d’une dignité feinte. Il était très triste et ça se voyait. Mais il était aussi à l’âge où les garçons veulent prouver qu’ils sont des hommes. Il me serra la main après que j’ai salué sa mère et son oncle.

Ce ne fut pas pour autant qu’il affirma aller bien. Il ne cacha pas que la mort de Lola était une grande tragédie pour lui.

Je lui souris.

-Ouais, c’était une très grande artiste. Je n’étais pas un fan comme toi, mais je sais reconnaître le talent.

Ce qu’on ne pouvait pas enlever à Lola même si celle-ci pouvait être vraiment détestable hors scène. Je ne lui pardonnerais jamais les attouchements qu’elle avait eus envers moi à Vegas, alors que j’étais déjà marié. Ça ne se faisait pas et ce n’était pas parce qu’on s’appelait Lola qu’on pouvait tout avoir.

Je soulignai la beauté de la cérémonie…

Et sentis clairement Ian craquer. Je lui posai la main sur l’épaule alors qu’il se mettait à sangloter… Du coin de l’œil, je vis Victor rouler des yeux et s’en aller voir ailleurs pendant que Victoria, elle, nous observait avec une tristesse bienveillante.

Ian regrettait de n’avoir jamais pu rencontrer son idole. Je fronçai les sourcils, ne comprenant d’abord pas bien pourquoi Ian en était tellement fan. Parce que j’avais bien l’impression que ça allait au-delà de la musique.

Mais il m’expliqua d’emblée : Lola avait été une enfant star assez critiquée.

Comme Ian.

Tout s’éclairait.

-Ecoute… Ian… Tu es quelqu’un de bien. Il ne faut pas que tu oublies ça. Malgré ce que les gens pensent.

Je soupirai.

-Je n’aimais pas beaucoup Lola parce que je la trouvais détestable. Mais Howard, lui, connaissait une autre Peyton. Celle dont il était amoureux. Donc si je critique Lola, c’est certainement que je ne la connaissais pas bien.

Je souris à Ian.

-Les gens ne te connaissent juste pas assez bien.


Ian aurait voulu avoir un feedback sur ce que la diva pensait de sa carrière. Il avait clairement besoin d’un guide et de conseils.

-Moi je veux bien parler carrière avec toi. Je n’ai pas été un enfant star. Mais je suis moi aussi fort critiqué pour mon comportement. Qu’est-ce que tu voudrais savoir ?

Hank s’était approché de moi pour demander si ça allait. Moi, j’avais dit que « non ». Mon idole était morte et je ne pourrais jamais la rencontrer. Hank disait ne pas être fan de Lola mais qu’il savait reconnaitre son talent. J’hochai de la tête.

-Oui. C’était LA plus grande artiste.

Pour moi, ça l’était. Et quand Hank parla de la cérémonie, les larmes commencèrent, à nouveau, à couler sur mes joues. Je m’étais retenu en sortant de l’église mais c’était beaucoup trop dur. Hank mis sa main sur mon épaule et j’expliquai que jamais je ne pourrais rencontrer Lola. Que j’avais, pourtant, un tas de question à lui poser. Elle savait ce que c’était d’être critiqué. Moi, je l’étais aussi. Au début, ma mère ne me laissait pas lire les critique mais depuis deux ans, je ne ratais pas un article sur moi.

Lola vivait ça aussi ! J’aurais voulu savoir ce qu’elle faisait avec ça ! Moi, si j’étais comme ça c’est parce que je voulais que ce que je fais soit le mieux fait possible !

Hank disait que j’étais quelqu’un de bien. J’hochai de la tête.

-Je le sais… Mais…

Mais je voulais que les gens comprennent ! Maman disait aussi de ne pas faire attention à ce que les gens disent. Qu’ils aiment critiquer ce qu’ils ne connaissent pas ! Mais ils n’en ont pas le droit !

Hank disait qu’il n’aimait pas Lola mais que Howard, il l’aimait. Il disait que s’il critiquait Lola c’est parce qu’il ne la connaissait pas. Il disait, donc, que les gens ne me connaissaient pas. Je fixai alors Hank droit dans les yeux. Des yeux rouges de larmes.

-Alors ils ne doivent pas me critiquer. S’ils ne me connaissent pas, ils ne doivent pas me critiquer.

Je disais ça sachant très bien que je ne prenais pas mon conseil pour moi. Je critiquais des gens aussi que je ne connaissais pas. Mais j’étais trop triste pour me rendre compte de ma contradiction.

Sans Lola, je ne pourrais plus avoir de conseils. Elle avait été enfant star… Robin aussi mais il était rarement critiqué. Il était aimé par tout le monde ! Ce n’est pas juste !

Hank disait qu’il voulait bien parler carrière avec moi. Je le fixai après avoir essuyer mes yeux. Il disait qu’il était aussi critiqué et était prêt à répondre à mes questions. Je réfléchis quelques secondes avant de me lancer :

-Comme on peut faire pour qu’ils arrêtent ? Tu fais quoi quand tu lis ces critiques ? Moi, ça m’énerve et je pique une crise. Ils ne peuvent pas dire ça !

Je regardai autour de nous avant de froncer les sourcils.

-On dirait qu’il faut être mort pour ne plus être critiqué.

Maman était toujours près de nous mais restait silencieuse écoutant notre conversation.

La mort de Lola était une grande perte pour Ian. Au début, je n’avais pas bien compris pour quoi. Il était fan, ouais, mais comme bien des gens présents aujourd’hui à cette cérémonie, dans ou en dehors de l’église.

Mais quand il s’épancha un peu plus, je compris ce qui l’emmerdait : il aurait voulu rencontrer Lola. Pas seulement parce qu’il adorait sa musique, mais parce que leurs parcours étaient similaires. Il était critiqué, tout comme Lola, alors que ce n’était encore qu’un enfant.

Je lui assurai qu’il était quelqu’un de bien. J’avais travaillé avec lui. Et ok, il piquait des crises. Mais moi aussi. Mettez-moi avec un acteur qui vient de débuter, que je ne connais pas ou pas bien, et je commence déjà à râler… avant même de savoir si cet acteur a du talent ou non.

Ce qui limitait ma carrière en fait… Parce que du coup, je travaillais toujours avec les mêmes réalisateurs, surtout mon frère, et avec les mêmes acteurs : Ian et Robin.

J’affirmai à Ian que s’il était critiqué, c’était parce que les gens ne le connaissaient pas.

Mais du coup, Ian pensait qu’il ne devait pas être critiqué.

-C’est ce que je pense aussi, mais c’est ça être une star.

Je cherchai son regard.

-Les gens pensent que parce que tu es connu, ils ont le droit d’entrer dans ta vie… Et aussi de tout savoir sur toi. Alors que ce n’est pas vrai. Tu as droit à ta vie privée.

Ian avait du mal à s’arrêter de pleurer. Il ne sanglotait plus, mais de grosses larmes lui coulaient sur les joues à mesure qu’il les essuyait sur la manche de son costume.

Je comprenais ce qu’il ressentait. J’étais souvent critiqué aussi. Et il se demandait bien ce que je faisais quand je lisais les critiques des gens.

-Tout dépend… Quand c’est vraiment de la merde… Genre, sur ma vie privée ou sur Bailey ou des choses comme ça… je prends le magazine et je le brûle sur le barbecue. Quand c’est à la télé, j’éteins ou je change de chaîne.

Je haussai les épaules.

-A partir du moment où toi-même et tes proches savent que c’est du grand n’importe quoi, c’est tout ce qui importe. Ces gens-là n’en valent pas la peine.

Je réfléchis deux secondes…

-Et après ça… Le mieux est de leur rappeler, dans tes films, que si tu es connu, c’est pour ton talent et pas autre chose.

Ian pensait, à raison, qu’il fallait être mort pour ne plus être critiqué.

-T’as raison… Les gens morts sont toujours des gens bien. Et les vautours vont ses jeter sur les albums de Lola maintenant. C’est injuste… Elle aurait sûrement mérité cette reconnaissance de son vivant mais… C’est comme ça. Les gens aiment l’odeur du sang.

Je regardai Ian.

-C’est du voyeurisme morbide.

Hank disait que c’était ça être une star… Je fis la moue. Une moue triste et contrariée. Pourquoi, parce que je suis une star, les gens peuvent penser et dire ce qu’ils veulent de moi ? Ce n’est pas juste ! Hank expliqua que c’est parce qu’ils pensaient que, parce que j’étais connu, ils ont le droit d’entrer dans ma vie.

-Les paparazzi… Les journalistes… Les fans… J’ai l’habitude. Je m’en fiche qu’ils suivent tout ce que je fais. Mais ils ne peuvent pas me critiquer sans me connaitre.

Hank disait être aussi très critiqué. J’avais aussi lu des choses horribles sur lui. Mais Maman m’avait dit de ne pas écouter ce que les journalistes disent. Qu’elle connaissait Hank et Kate et qu’elle savait que Kate exagérait largement. Alors, je lui demandais comment il faisait pour ne pas subir toutes ces critiques. Il disait qu’il brûlait les journaux ou changeait de chaine.

J’hochai de la tête.

-Je ferais ça…

Maman me disait toujours de ne pas lire mais je ne pouvais pas m’en empêcher… Je devais faire comme Hank a dit. Peut-être que ça ira mieux.

Il disait que ce qui comptait, c’était ce que pensais nos proches. Maman ne me critiquait jamais. Elle disait que j’étais un bon acteur et que j’étais quelqu’un de gentil. Robin et Sloan m’aimait bien aussi et j’aimais travailler avec eux. Mes grands-parents me vénéraient. Il n’y avait que mon oncle qui est un gros trou du cul.

-Mes proches m’aiment… Enfin… Presque tout.

Ma Maman posa une main sur mon épaule.

-Il ne faut pas écouter Victor, Ian… Il est simplement jaloux.

J’hochai de la tête. Il y avait de quoi. Il n’avait aucun talent pour rien sauf pour parler le plus longtemps possible !

Hank disait que le mieux, après les critiques, était de me rappeler de mes films et que tout ça était le fruit de mon talent.

-Je sais… Je ne doute pas de mon talent. Mais j’aimerais que les gens le voient au lieu de parler de ce que je fais hors de mes films.

Surtout que je ne fais pas grand-chose ! Je suis juste exigeant sur les plateaux de tournage parce que je veux donner le mieux que je peux !

Et je râlais qu’il fallait être mort pour que les gens voient le talent des autres. Hank confirma. Il trouvait ça aussi injuste et disait que Lola aurait mérité plus de reconnaissance de son vivant. Mais que les gens étaient comme ça. Je soupirai.

-Moi, de son vivant, je la comprenais… J’aurais voulu lui dire…

Mais je ne pouvais plus. Je relevai le regard sur Hank. Mes larmes ne coulaient plus même si j’étais toujours triste.

-Merci… J’espère qu’on pourra faire d’autres films ensemble.

Je lui tendis la main pour qu’il la serre. Il m’avait bien aidé aujourd’hui. J’allais pouvoir rentrer et me refaire tous les albums de Lola.

Ian ne supportait pas d’être critiqué… Et comme je le comprenais ! D’autant que ça devait être encore plus dur d’avoir du recul du fait de son jeune âge. Je le regardai dans les yeux pour bien lui faire comprendre que je savais ce qu’il vivait.

-Je suis sûr qu’un jour, tu seras reconnu uniquement pour ton talent.

En attendant, je lui expliquai ce que je faisais des critiques, moi ! Je les passais au barbecue et basta ! Ça me permettait de passer mes nerfs… Et après, je ne pouvais plus les relire pour me faire du mal.

Je souris quand Ian affirma qu’il écouterait mon conseil.

Je lui expliquai ensuite que ce qui comptait vraiment, c’était ce que pensaient ses proches. Et je savais Ian bien entouré. Apparemment, il s’en rendait compte aussi… à une exception près : Victor…

Vicky intervint en disant qu’il ne fallait pas écouter son oncle, que celui-ci était jaloux.

-Ouais, écoute ta mère, elle a raison. Je connais Victor depuis longtemps et à part parler, il ne sait pas faire grand-chose, contrairement à toi.

Ian voulait qu’on parle de ce talent que je soulignais, plutôt que de ses crises dans la vie de tous les jours. Les crises de colère, je savais ce que c’était, même si j’étais un peu apaisé depuis que j’avais une famille qui comptait sur moi. Mais ça m’arrivait encore.

Je souris à Ian.

-Tu sais, on dit que l’exigence est la marque d’une intelligence supérieure. Quand quelqu’un t’emmerdera encore avec ça, tu n’auras qu’à lui dire ça.

Etait-ce un bon conseil ? Je n’en savais rien. Mais c’était un conseil.

Ian ne pleurait plus, mais on sentait toujours la tristesse dans sa voix. Il aurait voulu dire à Lola qu’il la comprenait…

-Je dois aller chez Howard, maintenant… Pour enterrer les cendres de Lola. Je lui dirai un mot pour toi.

Ian me remercia, espérant qu’on ferait d’autres films ensemble. Je lui serrai la main.

-On en fera, ne t’en fais pas. Nos carrières sont loin d’être finies.

J’embrassai Vicky et allai retrouver Bailey pour nous rendre chez Howard, où nous avions notre place en tant que parrain et marraine de Phénix.