-Merci d’avoir prévenu… Au revoir…

Je raccrochai le combiné du téléphone.

J’étais blême…. Pire que ça… J’étais blanc comme un mort. J’avais blanchi au fur et à mesure de la conversation que j’avais eue avec les autorités Angolaises… Je croyais bien même que j’avais commencé à blêmir directement en entendant l’accent tellement particulier du chef de la police Angolaise.

Je frottai mon visage à deux mains…

Puis me rendis compte, en regardant ces deux mains, que je tremblais.

J’avais la tête qui tournai et de la sueur froide coulai le long de mon dos, sous mes vêtements.

Comment était-ce possible ? Pourquoi est-ce que ça arrivait ?

Pire comme question : Qu’est-ce que j’allais faire, maintenant ?

Je me levai et gémis en sentant mes jambes presque se dérober sous moi. Je me rattrapai au coin de mon bureau de justesse.

-Merde…

C’était une bien piètre exclamation… Et pas assez forte pour ce que je ressentais. J’avais l’impression d’être au bord d’un gouffre infranchissable. Et ce n’était pas une sensation que je connaissais. Encore moins une sensation que je pouvais gérer.

Et je n’aimais vraiment pas ça.

J’arrivai, je ne sus comment, à me trainer jusqu’à l’ascenseur. Mon cerveau me jouait des tours, imaginant le pire. L’Angola, je ne savais pas à quoi ça ressemblait. Je n’étais jamais allé dans les pays que je considérais comme faisant partie du tiers monde. Mais j’avais vu des films et des documentaires.

Rien pour me rassurer. La guerre… Les enlèvements par les rebelles… Les bêtes sauvages.

Je croisai Frances dans le couloir de l’étage en dessous du mien… Elle me regarda avec les yeux écarquillés.

-Vous allez bien, Monsieur Reed ?

Je hochai la tête.

-Oui. Merci Frances. Je… vais juste voir Daniele.

Mais inquiète, elle me suivit jusqu’au bureau de mon ami. Je n’avais pas frappé avant d’entrer et Frances avait retenu la porte que j’avais essayé de refermer derrière moi, sans aucune force.

-Monsieur Reed…

-FERME CETTE FOUTUE PORTE, FRANCES !

Elle sursauta et ne demanda pas son reste alors que moi, je tournai le siège devant le bureau de mon ami pour m’y asseoir mais, à la place tombai complètement à côté, me retrouvant lamentablement le cul à terre. Dépassé, je cachai mon visage entre mes mains avant de dire, à bout de souffle tellement mon cœur pompait.

-Olivia… Olivia a disparu… Dans un crash d’avion.

Livia était partie en Afrique et j’étais en train de booker des concerts pour Sniper. Il ne voulait pas encore faire de tournée alors je lui trouvais des concerts dans des grandes salles aux alentours de Los Angeles. C’était assez simple – tout le monde voulait s’arracher Evan, de toute façon. Ce n’est pas comme si je devais pousser pour essayer à un nouveau poulain de percer. Sniper est une légende après tout.

Je passais – donc – coups de fils sur coups de fils m’attardant parfois au téléphone quand je tombais sur un promoteur que je connaissais. Depuis le temps que j’étais dans le business, j’avais eu l’occasion de connaitre un tas de monde.

Après tout ça, je pourrais à nouveau contacter les réalisateurs du film. Celui où ils veulent Livia. Il fallait que je négocie les clauses du contrat et toutes ces conneries là. En gros, j’avais encore du boulot aujourd’hui ! C’est ce qui arrive quand on a tant de poulains à gérer. Mais j’aimais ça ! J’adorais ça même ! Je suis le meilleur manager du monde, après tout !

Je venais de finir un coup de fils quand, soudain, Jim entra dans mon bureau. Il n’avait même pas frappé.

-Jim ?, dis-je surpris.

Frances le suivi de très près et bloqua la porte avant que celle-ci ne se referme mollement sur Jim. Mais Jim se mit alors à crier sur Frances lui sommant de fermer la porte. J’écarquillai les yeux. Je crois que je n’avais jamais vu Jim crier ainsi. Pas récemment en tout cas et encore moins sur Frances. J’étais choqué alors que Frances ne demanda pas son reste et ferma la porte.

-Jim… Qu’est-ce qu’il se passe ?, demandais-je vraiment troublé par son comportement.

Il était pâle. Très pâle. Son regard semblait comme éteint et quand il tenta de s’asseoir sur le siège face à mon bureau, il rata la cible et se retrouva au sol.

-Jim !, dis-je comprenant, là, qu’il y avait vraiment quelque chose qui n’allait pas.

Je me levai de mon siège pour me mettre à la hauteur de Jim qui était littéralement le cul au sol. Son visage était caché dans ses mains. Il était effondré – littéralement !

Je mis ma main sur son dos alors qu’il articula que Livia avait disparu dans un cash d’avion…

Ce fut mon cœur à moi qui se mit à battre plus vite alors que je tentais d’assimilé l’information.

-Que… Quoi ? Un crash d’avion ?, dis-je choqué par ce que je venais d’entendre.

Jim avait dit « disparu » pas « morte »… Mais ça n’en restait pas moins très inquiétait et ça n’annonçait strictement rien de bon. Je connaissais très mal l’Afrique… Mais je savais que l’endroit où Livia était allé était un pays plongé dans la guerre civile. J’avais fait mes devoirs avant qu’elle ne parte parce qu’elle faisait partie de mes poulains et que – de ce fait – je voulais savoir vers quel danger elle allait. Mais United For Youth avait assuré que la sécurité de Livia serait une priorité.

Et voilà qu’elle s’est crashé en avions ?! Tu parles de sécurité !

-Elle… Elle n’est quand même pas…, dis-je incapable de finir ma phrase. Tu as dit « disparu »… Qu’est-ce qu’on t’as dit précisément, Jim ?

On pouvait entendre le choc dans ma voix alors que j’étais toujours à hauteur de Jim. Je crois que je ne l’avais jamais vu dans un tel état. Mais je savais qu’il aimait sa fille même s’il le montrait mal. Un peu comme moi j’aimais Tony malgré que j’étais souvent très dur avec lui.

Frances avait refermé la porte avec les yeux écarquillés et clairement inquiète. Et je n’avais pas eu le temps de poser les yeux sur mon meilleur ami que je le perdais de vue en tombant à terre… J’avsi raté la chaise. Pourquoi j’avais raté la chaise.

Je tremblais toujours. De plus en plus, même. Et j’avais toujours ces images en tête. Olivia, blessée, seule dans la jungle. Ou avec Howard, ce qui revenait au même. De temps en temps, je la voyais mourant de soif dans un désert.

Décidément, je ne savais vraiment pas à quoi ressemblait ce foutu pays !

Un foutu pays qui avait englouti ma fille.  

Je n’avais pas pu répondre à la question de Daniele. J’étais tombé avant. J’avais caché mon visage dans mes mains. Je ne pleurais pas. J’étais au-delà de la tristesse, j’étais terrifié.

Encore plus terrifié que ce jour de 65 o j’avais reçu les menaces de South Panthers au sujet de Maritza.

Parce que ce n’était pas pareil. Ce n’était définitivement pas pareil.

Daniele vint à ma hauteur. Je sentis sa présence plus que je ne le voyais. Je sursautai légèrement quand il posa sa main dans mon dos puis réalisant que c’était lui, je pris une grande inspiration parce que j’avais cessé de respirer sans m’en rendre compte.

Et ma tête tournait. Ce n’était pas le moment de me lever.

Je hochai la tête quand Daniele demanda confirmation pour le crash de l’avion.

Puis, il me demanda de lui dire ce qu’on m’avait dit précisément.

Il me fallut quelques secondes pour rassembler mes neurones et je laissai retomber mes mains entre mes cuisses écartées d’une manière grotesque.

-Les autorités angolaises viennent de m’appeler… Ils ont retrouvé la carcasse de l’avion. Les corps des pilotes… Mais aucune trace d’Olivia…

J’appuyai d’une main sur mes deux globes oculaires comme si je cherchais à la faire entrer dans mon crâne…

-Ni d’Howard… J’espère qu’Olivia vit toujours. Mais ils ne garantissent rien. Elle a très bien pu être projetée à un kilomètre de l’avion…

Je repris une grande inspiration qui me fit mal au cœur.

-Je peux protéger Olivia de beaucoup de choses. Des gangs, de la jet-set, de la mafia…

Pour la première fois depuis que j’étais arrivé, je regardai Daniele dans les yeux. Et j’étais clairement en détresse.

-Mais je ne peux rien faire contre un coup du sort.

Jim était dans un état pas possible. Je ne crois pas l’avoir déjà vu dans un tel état si bien que je n’avais pas tardé à le rejoindre à terre où il était tombé après avoir complètement raté la chaise. Je pensais qu’il faisait un malaise ou quelque chose comme ça vu son teint blafard mais le fait est que son état venait de tout autre chose que d’un ennui physique.

Je posai ma main sur son dos ce qui le fit sursauté et il finit par lâché que sa fille, Livia, avait disparu suite à un accident d’avion. Ce fut à moi de blêmir devant une telle information auquel je ne m’attendais pas. Je savais que l’Afrique n’était pas l’endroit le plus sûr mais United For Youth m’avait mainte fois répété qu’ils faisaient tout pour assurer la sécurité de mon artiste ! Tout ! Sauf que personne n’était à l’abri d’un foutu accident d’avion !

J’étais choqué mais j’arrivai tout de même à articuler quelques questions. Jim n’avait pas annoncé que Livia était morte. Il avait simplement dit qu’elle était « disparue ». Si elle était morte dans le crash, ils auraient retrouvé le corps, non ? Je demandai des précisions. Il me fallait des précisions ! Livia était mon artiste mais c’était aussi quelqu’un dont j’étais proche. Je l’avais pris sous mon aile il y a un moment maintenant et je m’y étais, inévitablement, attaché.

Jim était totalement effondré. Il confirma pour le crash avant de trouver les mots pour m’expliquer ce qu’on lui avait dit. L’avion avait été retrouvé. Les deux pilotes étaient morts mais autant Livia que Stone étaient portés disparus. La morts des deux n’étaient pas confirmé mais quand Jim déclara qu’elle pouvait très bien avoir été projeté à un kilomètre de l’avion, je déglutis.

-Mamma mia…, soufflais-je.

En l’absence de véritable image, mon cerveau s’en imaginait et ce n’était pas très beau à voir. Ce genre d’accident n’est jamais beau à voir, de toute façon.

Je frottai le dos de Jim ne trouvant pas les mots. Il disait qu’il pouvait protéger sa fille des biens des choses – il l’avait, d’ailleurs, déjà prouvé – mais il ne pouvait rien contre un coup du sort. Personne n’y pouvait rien.

-Aussi puissant soit-on, personne ne peut rien contre un coup du sort, dis-je toujours un peu sous le choc.

Jim était puissant. J’étais puissant. Mais on ne pouvait pas encore empêcher les avions de s’écraser. Tout comme on ne pouvait pas enfermer notre famille dans du papier bulle pour qu’il ne leur arrive rien.

Je soupirai restant à terre avec Jim. J’essayais de le réconforté mais je ne crois pas qu’il y avait de mots pour ça… Et je n’étais pas très doué pour la chose. Mais il fallait tout de même que je tente le coup.

-Jim… Tant qu’ils ne retrouvent aucun corps, il y a toujours un espoir qu’elle soit en vie. Ils sont peut-être tous les deux dans la forêt à trouver un moyen de survivre en attendant les secours. Livia n’est pas stupide. Elle a déjà survécu à des choses horribles. Elle a la force pour survivre même dans une jungle, dis-je pour essayant de réconforté Jim – et me réconforté en même temps.

Livia avait de la ressource.  Elle l'avait prouvé en survivant à son enlèvement, il y a quelques années d'ici.

-Est-ce qu’une équipe de recherche américaine va aider les autorités angolaise ?, demandais-je doucement.

Parce que si c’était le cas, ils avaient intérêt à y aller très vite !

On devait avoir l’air fin, tous les deux à terre… Je tremblais comme une feuille, incapable de me contrôler. Je n’avais jamais ressentis une émotion pareille… Ou était-ce un maelstrom d’émotions ? Quelque chose comme ça. J’avais toujours essayé de réprimer mes émotions, de les dompter, au point de paraître froid, distant… Et finalement, cruel.

Beaucoup me pensaient sans cœur… Et vu l’état dans lequel j’étais maintenant, je tenais à ce que ça reste comme ça.

Je préférais être considéré comme sans cœur que de laisser voir mes faiblesses.

Sauf à Daniele… A Daniele, je pouvais me le permettre. Parce que ce qui nous liait était indéfinissable. Et je savais qu’il ne trahirait jamais mon secret.

Sa main dans mon dos était comme une bouée de secours. Une sensation qui me reliait à la réalité et faisait en sorte que mon cerveau ne parte pas dans tous les sens.

Cela dit, Daniele était aussi choqué que moi par la nouvelle. Il n’y avait rien à faire… On pouvait être des hommes d’affaire que ne faisions que calculer à longueur de temps, tels des joueurs d’échec… il y avait des choses qu’on ne pouvait éviter.

L’attachement à certaines personnes était l’une de ces choses. Même si on se mentait souvent à nous-mêmes en niant cet attachement. Moi encore bien plus que Daniele.

J’avouai à Daniele que, contre la malchance, je ne pouvais rien faire. Mon pouvoir n’allait pas jusque-là. J’aurais bien aimé, pourtant, surtout au vu des circonstances. Daniele souligna cette évidence. Ni lui, ni moi, ne pouvions rien.

Sauf quoi ? Attendre ?

-Je ne peux pas… Je ne vais pas pouvoir. Il faut que je fasse quelque chose.

Quoi, aller sur place ? Non… J’avais peut-être mieux. L’idée se formait tout doucement dans ma tête.

Daniele affirma que, tant qu’il n’y avait pas de corps retrouvé, il y avait de l’espoir. Je m’accrochai à ça comme à sa main dans mon dos.

-Je sais qu’Olivia n’est pas stupide…

Contrairement à Stone…

Je soupirai, puis respirai deux ou trois fois, essayant de reprendre le contrôle sur mes tremblements, sans grand succès.

-Le pire… C’est que c’est la dernière chose que je lui ai dite. Qu’elle était stupide. Alors que je sais que ce n’est pas le cas. Je voulais juste…

Je déglutis.

-Enfin, bref… Ce qui est fait est fait.

Je hochai la tête quand Daniele demanda si une équipe américaine allait aller en renfort des équipes de recherches angolaises.

-Oui. Et je pense financer ma propre équipe de recherche aussi.

J’avais de l’argent. Autant l’utiliser à bon escient.

Puis une nouvelle bouffée d’angoisse me pris à la gorge.

-Qu’est-ce que je vais dire à Maritza ? Tu as du whisky ?

Jim semblait véritablement dévasté par la disparition d’Olivia. Mon meilleur ami n’avait jamais flanché à aucun moment. Dés qu’une difficulté se présentait il les affrontait avec un pragmatisme froid. Il avait toujours un coup d’avance – de toute façon. Même quand nos vies étaient menacées par Ward, il semblait absolument capable de gérer les choses.

Mais pas ici. Parce qu’ici, il n’avait pas de prise sur les choses – aussi puissant soit-il. L’avion c’était crashé… Livia était portée disparue… Que pouvait bien faire Jim hormis espéré qu’on la retrouve en vie ? Rien ! Et moi non plus d’ailleurs ! Pourtant Dieu sait que si j’avais pu faire quelque chose, je l’aurais fait.

Sauf que Jim ne pouvait pas rester sans rien faire. Il voulait agir. Il voulait faire quelque chose.

-Je sais, amico mio, soufflais-je.

Mais quoi ? Je ne voyais pas bien ce qu’il pourrait faire… Hormis attendre et espérer on ne pouvait pas faire grand-chose. On allait quand même pas aller là-bas chercher Livia nous-même ? On risquerait de se perdre !

La nouvelle était encore trop fraiche dans mon esprit pour que je puisse réellement réfléchir convenablement. J’essayais déjà que Jim ne s’écroule pas totalement au sol. Pour ça, j’essayais de le rassurer en disant que tant que le corps de Livia ne sera pas retrouvé, il y aura toujours espoir qu’elle soit en vie. La gamine n’était pas stupide. J’étais certain qu’elle pourra survivre jusqu’à l’arrivée des secours. Jim confirma qu’il savait que sa fille n’était pas stupide… Et il regrettait de lui avoir dit le contraire la dernière fois qu’il l’avait vue. C’était à la fête au yacht. J’avais été témoin de ça. J’avais aussi vu que Livia avait très peu apprécié ça au point – visiblement – de ne plus vouloir parler à son père. Donc, la dernière qu’ils s’étaient vu ils s’étaient quitté en mauvais terme. C’était extrêmement rare de voir Jim exprimé des regrets. Mais la situation poussait aux regrets.

N'empêche que le voir ainsi me déstabilisait.

-Ouais… Je sais, Jim, dis-je en soupirant. Je sais aussi qu’elle ne l’avait pas spécialement bien pris. Tu ne peux pas revenir en arrière. Ça non plus c’est quelque chose qu’on ne sait pas encore faire…

Notre pouvoir était plus limité qu’on ne l’imaginais en fait. Il confirma d’ailleurs que ce qui est fait est fait. Le tout, maintenant, c’était d’espéré que Livia soit retrouvée très rapidement. Je demandai à Jim si une équipe américaine allait venir aider les autorités angolaises pour les recherches et il confirma. Je me doutais bien que les Etats-Unis n’auraient pas laissé deux de ses stars dans la brousse sans lever le petit doigt. Quant à Jim, il comptait financer sa propre équipe de recherche. C’était, limite, tout ce qu’il pouvait faire.

-C’est une bonne idée, lançais-je sûr de ça. Je vais voir du côté de l’Italie si je ne peux pas tirer quelques ficelles…

J’avais une certaine influence dans mon propre pays, après tout. Je pouvais toujours tenter le coup.

Restait qu’il allait falloir annoncer tout ça à la mère de Livia… Je m’étais levé pour aller nous servir un whisky tout en soupirant. Je revins avec deux verres et m’assis à terre à côté de Jim lui tendant un des deux verres.

-Tu vas devoir lui dire la vérité, dis-je avant de boire une grosse gorgée de whisky. Et je doute qu’il y ait une bonne manière pour annoncer ça.

Je soupirai.

-Elle est forte mais je crois que, pour une mère, perdre son enfant est la pire chose qui puisse arriver. Mais Maritza est déjà passée par là une fois, dis-je comme si ça pouvait réellement aider.

Olivia avait déjà été enlevée… Maritza avait déjà vécu une fois ce genre d’inquiétude.

-Il va falloir que tu tiennes le coup…, dis-je un peu inquiet vu l’état dans lequel était Jim. Tu tiendras ?

Parce qu’en le voyant comme ça, je n’en étais pas sûr. Il était vraiment effondré et pas forcément en état pour aller annoncer la mauvaise nouvelle à sa femme.

Je n’étais pas fort pour gérer mes émotions, tout simplement parce que la plupart du temps, je les refoulais, les niais, pour pouvoir calculer plus facilement sans me soucier de faire mal aux autres… Sans me soucier de ce que, même à moi, ça me ferait. Quant à Daniele, il n’avait jamais été fort pour montrer de la compassion…

Et pourtant, voilà où on en était… Par terre au milieu du bureau, moi à trembler sous l’effet d’un mauvais reflux d’émotions et Daniele à essayer de faire en sorte que je ne tombe pas encore plus bas que je n’étais et de ne pas succomber lui-même à sa propre panique.

Je ressentais, notamment, quelque chose que je n’aimais vraiment pas. Des regrets, voire même des remords, pour ce que j’avais dit à ma fille la dernière fois que je l’avais vue, à l’inauguration du yacht. Je lui avais dit qu’elle était stupide de suivre Stone, de lui faire confiance.

Et comme le souligna Daniele, elle ne l’avait pas bien pris… Mais c’était inutile de penser au passé, le passé, c’était le passé.

Je frottai mon visage à deux mains, essayant de me reprendre.

-Tout ce que j’espère, c’est que s’ils sont seul dans cette jungle, ou dans le désert, ou je ne sais pas où dans ce foutu pays, je n’ai pas brisé sa confiance au point qu’elle ne se fie pas à elle-même. Elle aura besoin de tout le cran dont je sais qu’elle peut faire preuve.

Elle ne tenait pas que de Maritza, après tout… Et l’éducation d’Enrique, qui avait été très bonne, ne faisait quand même pas tout.

On en revint tout doucement à des questions plus pragmatiques. Tous les deux, nous n’étions pas du genre à pleurer bien longtemps sur notre sort. Non. Nous étions des hommes d’action, des hommes de pouvoir.

Et il fallait voir cela comme un challenge de plus.

Je comptais bien envoyer mes propres hommes sur place. En partie des américains et en partie des autochtones qui auraient connaissance du terrain. Daniele trouva l’idée bonne et affirma qu’il allait voir ce qu’il pourrait faire du côté de l’Italie.

-Bien. Merci, Dany.

Daniele nous servi des verres. Je crus qu’il allait m’aider à me relever, mais à la place, il s’installa à terre avec moi. C’était une belle métaphore, finalement, d’être au sol. Car nous étions un peu comme un boxeur durant le décompte, espérant se relever avant la fin.

Restait Maritza… Vu l’état dans lequel la nouvelle m’avait mis, je n’osais imaginer sa réaction. Daniele déclara que ce n’était pas le premier rodéo de Ritza. Et je savais qu’il faisait référence à l’enlèvement d’Olivia par Ward Fleming…

Je soupirai.

-Oui… Sauf que Maritza savait très bien que j’avais alors le pouvoir de faire quelque chose. Et elle saura que dans ce cas-ci, mes moyens sont limités… Mais…

Je pinçai les lèvres.

-Elle est forte. De toute façon, elle n’aura pas le choix que de l’être.

Et moi aussi.

Je bus mon whisky d’une traite.

-Je tiendrai.

Et je réussi même à sourire. C’était une façade, mais une façade nécessaire.

-Tu sais comment je suis quand quelque chose de grave arrive.

Je le regardai dans les yeux.

-Tout ce qui ne me tue pas… Me rends encore pire.