J’étais passé aux studios pour travailler un peu avec les roadies qui s’occupaient de tout préparer pour notre prochain concert au Hollywood Bowl. J’avais hâte. Je savais que le plus gros du travail était fait. J’étais juste allé sélectionner les guitares que je voulais pour ce soir-là et j’avais passé mon temps à les accorder, jouant de temps en temps l’une ou l’autre mélodie pour me reconnecter à mon Désert intérieur.

Car j’étais le Shaman, le Roi Serpent… Et je le restais même si, étant dans une période clean, sans héroïne, pour accompagner Savannah dans ce qui lui restait de vie, le lien était plus ténu… plus flou.

J’aimais aussi me dire que je restais clean pour Billy, plus encore que pour Savannah. Billy qui détestait cette addiction dont j’étais affublé. Pour lui, ne pas prendre de drogues dures était une condition sine qua non à un nouveau départ sur les routes.

Or, je voulais partir. Je voulais qu’on envoûte à nouveau les foules. Qu’on les rende fous et voir les gens se déchaîner dans les fosses, pris dans une transe dans laquelle seul The Lightening pouvait les plonger.

Même si cette transe était souvent teintée de violence.

Quand je sortis, vers 22 :00, du studio, j’étais content. Parce que Billy était dans une bonne passe et on avait décidé de se rejoindre au Canter’s Deli, qui était ouvert 24h/24. En plus, c’était un de mes endroits préférés de la ville puisque j’étais très ami avec le fils des gérants, Marc Canter, qui prenait aussi souvent des photos de The Lightening, en concert ou même en dehors.

Alors que je traversais le grand hall du studio, je vis qu’un autre artiste, que je ne connaissais pas, passait par là aussi. Il avait les cheveux noirs en bataille et de grands yeux verts. Quand il échangea quelques mots sympathiques avec Margaret, la femme de ménage qui faisait des heures supplémentaires, je reconnus sa voix.

Je ne l’avais entendue qu’une fois, brièvement, et dans le brouhaha du Dizzy Warhol… Mais comme n’importe quelle mélodie, car il avait la voix naturellement mélodieuse, elle s’était ancrée dans ma mémoire.

Nameless. Je découvrais enfin le visage du démon masqué.

Je m’approchai de lui, qui était apparemment aussi sur le départ.

-Hey ! Attends !

Je soufflai sur les boucles de cheveux qui retombaient devant mes yeux et le rattrapai.

-Nameless, je ne me trompe pas ?

Je souris.

-J’ai rendez-vous avec Billy Lighter au Canter’s Deli… Si tu as faim, tu es le bienvenu. J’ai parlé de toi à Billy, déjà.

Il était 22 heures et je sors du studio. J'étais resté un peu plus longtemps, j'ai continué à composer pendant que les autres étaient rentrés chez eux. De mon côté, je me suis pris la tête une bonne partie de la soirée et je n'ai rien trouvé. En sortant, je voyais Margaret, la femme de ménage. Je m'approche et lui souris.

Bonjour Margaret ! Vous faites des heures supplémentaires ? Vous avez beaucoup de courage !

Je lui souris, il est vrai qu'il n'était pas rare de la voir à ces heures-là ! Elle me répond que oui, mais que ça ne la dérange pas. Je la regarde en souriant.

Tant mieux, tant qu'on aime ce que l'on fait, tout va bien ! Je ne vais pas vous déranger plus longtemps, bonne soirée !

Je lui souris et commence à partir avant de me faire arrêter. Je me tourne et souris, c'est Cash Izbel ! Il me salue.

Salut ! En effet, je suis Nameless mais sans masque !

Je le regarde en riant, il me propose d'aller manger. Il va rejoindre Billy Lighter. Je le regarde avec de grands yeux, surtout quand il me dit qu'il a parlé de moi. J'en rougis presque.

Euh... Si ça ne dérange pas, je veux bien venir... Mais je ne veux pas m'imposer ! Vraiment pas !

Il est vrai que j'ai toujours peur de faire tache au milieu de ces gens-là !

L’homme que j’avais arrêté me confirma qu’il était Nameless. Je souris, ravi de constater que j’avais l’oreille ! Sans son masque, il était forcément un peu moins impressionnant, mais je découvrais un gars qui devait avoir plus ou moins mon âge…

-J’avais reconnu ta voix.

C’était un très bon point pour lui et pour sa carrière, si les gens pouvaient reconnaître sa voix d’une chanson à l’autre. Même dans tous les styles différents qu’il avait proposés au Dizzy Warhol.

Je lui proposai, puisqu’il était tard et que, personnellement, je crevais de faim, de se joindre à nous au Canter’s Deli. Il sembla hésiter avant d’accepter.

-Tu ne déranges pas et tu ne t’imposes pas, vu que c’est moi qui propose. Allez, viens !

Je l’entraînai avec moi sur le parking où on monta dans ma Honda CRX noire. Je sortis du parking avec mon habituelle conduite un peu brusque, une cigarette entre les lèvres et les cheveux devant les yeux.

-Et sinon, Nameless… Tu as un nom et un prénom qu’on peut connaître ? Ou c’est un secret ?

Moi, ça ne me dérangeait pas de l’appeler Nameless s’il y tenait, mais bon…

En quelques minutes, on fut au Canter’s Deli qui n’était pas si loin des studios. On entra dans le restaurant et Billy, alors qu’il avait pour habitude d’être très souvent en retard, était déjà attablé sur une des banquette rouge en demi-cercle du Canter’s Deli.

Je souris et m’approchai, faisant signe à Nameless de me suivre. Quand j’arrivai à la table du rouquin, j’écrasai ma énième cigarette dans le cendrier au centre de la table.

-Salut, Billy ! Tu es déjà là ?

Puis, avec un geste vers le chanteur qui m’accompagnait.

-Je te présente Nameless, tu sais ? Le chanteur et guitariste dont je t’ai parlé ! J’espère que ça ne dérange pas qu’il se joigne à nous…

Parce que The Lightening était The Lightening et qu’on ne laissait que peu de gens nous approcher vraiment. C’était comme une règle tacite entre nous que je rechignais un peu à transgresser.

Mais Nameless m’intriguait.

Après cette grosse journée de travail de mon côté, je finis par sortir du studio. Je croise la femme de ménage  Margaret, puis Cash est venu m'aborder. Il me dit qu'il m'avait reconnu par ma voix.

Rien qu'à la voix ? Je ne suis même pas étonner venant d'un artiste !

Puis, il me propose de venir manger avec lui et Billy Lighter. Je le regarde un peu surpris. J'avais peur de faire tache, mais il me rassure et me dit que vu que ça vient de lui, ce n'est pas moi qui m'impose. Je le suis et monte dans sa superbe Honda CRX noir. Je m'assois doucement sur le siège passager. Je profite à fond du moment, j'adore les voitures et poser mon derrière là-dedans... C'est incroyable. Et en plus, Cash à une conduite vraiment sportive, ce que j'adore. Je le regarde en souriant.

J'adore, c'est vraiment une bonne voiture. Tu peux pousser un peu plus si tu veux, je n'ai pas peur de la vitesse ! D'ailleurs, il y a des circuits dans le coin ? J'ai toujours rêvé d'en faire !

Puis, il me demande comment je m'appelle, je le regarde en riant.

Entre nous, c'est Johnatan, Johnatan Silverwood, mais sinon, sur scène, c'est Nameless !

Puis, il me fait  entrer dans un bâtiment, le Canter's Deli. L'ambiance est sympa. Je regarde partout autour de moi, j'adore ! Puis Cash se rapproche d'une table, Billy Lighter était là, en face de moi. Je me mets en retrait et laisse Cash parler et j'attends mon tour.

Notre concert au Hollywood Bowl approchait mais tout n’était pas encore parfait. Il y avait encore un peu de travail à faire avant que tout ce qu’on avait prévu pour le concert soit parfaitement exécuté sur place. Moi, j’étais prêt ! Prêt à montrer au monde que The Lightening EST le meilleur groupe du moment de Los Angeles. Ces dernières années, les diverses critiques et classements essayaient de mettre en avant que nous étions mort. Je comptais bien prouver que ce n’était pas le cas en commençant par un gros coup d’éclat au Hollywood Bowl.

Pour le moment, je me sentais incroyablement bien. Shiri venait, de temps en temps, me tenir compagnie et on pouvait parler musique sans s’arrêter. J’avais hâte de prendre les routes avec elle étant donné qu’elle allait être notre première partie.

Ce soir, j’avais accepté d’aller au Canter’s Deli avec Cash. J’avais besoin de sentir notre symbiose se reconstituer à l’aube de cette tournée. Pour ça, le mieux était de se voir dans des lieux qui avaient été à la base de la conception de The Lightening. Le Canter’s Deli faisait partie de ces lieux. Il me fallait être dans cette ambiance avec Cash pour nous retrouver complètement. Et je devais y aller seul. Sans garde du corps. Tout ça pour retrouver l’authenticité de nos débuts.

C’est, donc, à bord de ma Lamborghini que je m’étais déplacé de Malibu jusqu’à Hollywood. C’est The Lightening que j’avais mis à fond dans ma voiture pendant le trajet. C’est de notre propre musique dont je voulais m’imprégner avant d’atteindre le Canter’s Deli. Et, une fois arrivé, j’étais remonté à bloc.

J’entrain dans l’établissement. J’étais un peu en avance. Preuve que tout allait bien. Que les astres étaient alignés. Que rien ne pouvait nous arrêter. Marc me salua et je lui rendis son salut avant de me diriger à LA table. Celle où j’avais l’habitude d’aller avec Cash alors que notre amitié débutait.

Je m’installai et, directement, on m’amena un Long Island Iced Tea. C’était toujours ce que je commandais quand je venais ici. Je bus deux gorgées avant que Cash n’arrive. J’esquissai un sourire avant de remarquer qu’il n’était pas seul. Les deux hommes s’approchèrent de ma table. Je ne connaissais pas l’autre type. Je ne l’avais encore jamais vu.

Cash s’étonna que je sois déjà là.

-Salut Cash. C’est une très bonne journée.

Voilà l’explication à ma présence si tôt.

Je m’allumai une cigarette alors que Cash me présenta l’homme aux cheveux noirs qui s’était mis légèrement en retrait. Il s’agissait, en fait, de Nameless. Cash m’en avait parlé. C’était un nouvel artiste signé par MTI. Je savais que Cash l’avait vu en live et qu’il avait aimé sa prestation. J’avais lu la critique du concert dans Guitar&Pen et, comme d’habitude, Moriarty avait descendu ce qui provenait de chez MTI. De toute façon, les journalistes, aussi spécialisés soient-ils, n’y connaissaient rien en musique, de mon avis. J’esquissai un sourire.

-Bonsoir, Nameless. Non, ça ne me dérange pas qu’il se joigne à nous. Installez-vous, tous les deux.

Je les laissais s’asseoir. Quand Cash m’en avait parlé, j’avais été intrigué par Nameless. Notamment de son idée de chanter masqué. Ça donnait une certaine dimension au personnage.

-Se cacher derrière un masque et un nom de scène est devenu tout un concept à Los Angeles ces derniers temps.

Il y avait Nameless mais, aussi, VOX. Sauf que Nameless, même sans masque, m’était inconnu. Donc, il ne cachait pas son identité mais semblait plutôt vouloir, à travers ses masques, faire quelque chose d’artistique.

-Cash m’a dit que ton concert valaient le coup. Je le crois plus que je ne crois Moriarty. Les journalistes n’y connaissent rien en musique. Surtout Moriarty.

Je fixai Cash avant d’esquisser un petit sourire.

-Si tu l’as amené ici c’est que tu as eu une coup de cœur, je me trompe ?

Nameless n’était pas étonné qu’en tant qu’artiste, j’aie pu le reconnaître à sa voix. C’était un don que j’avais. La plupart du temps, je ne retenais pas vraiment les visages, mais les voix, si. C’était comme ça que j’avais identifié Nameless.

Je lui proposai de m’accompagner au Canter’s Deli où j’avais rendez-vous avec Billy. Je ne pensais pas que ça poserait problème, même si le but était de revenir à la genèse de The Lightening. Après tout, cela s’était fait aussi dans un environnement plein de jeunes artistes en quête de gloire à Los Angeles.

Autant nous replonger complètement dans cette ambiance !

On monta dans ma CRX. C’était une voiture toute simple, bien loin de la tapageuse Lamborghini de Billy. Mais je l’aimais bien. Elle avait un gros moteur, dans une voiture relativement légère, ce qui en faisait, comme le disait ma mère, un cercueil sur roue.

Nameless voulais que j’aille plus vite, mais je roulais déjà assez vite et surtout, je ne faisais jamais ce qu’on me disait. J’étais un contrariant de nature. Plus on m’enjoignait de faire des trucs, moins je les faisais. Parce que sinon, j’avais l’impression d’être sous le contrôle des autres et je détestais ça.

Nameless voulait savoir, alors que ma cigarette se consumait dans ma bouche, s’il y avait un circuit dans le coin.

-Ouais, il y a le Circuit de Laguna Seca… Mais c’est près de Monterey…

Je voulus alors savoir quel était son véritable nom, si toutefois, il voulait bien me le révélé. J’aurais compris qu’il ne le fasse pas mais il n’en fit pas grand secret.

-Ravi de te rencontrer, Johnatan.

Une fois au Canter’s Deli, on retrouva vite Billy qui était assis à l’endroit même où la fusion de The Lightening avait eu lieu. Le Big Bang qui avait tout créé. Il salua Johnatan, que j’avais présenté par son nom de scène. Je souris, ravi que Billy accepte la présence du jeune chanteur. Je m’installai et fit signe à Marc de m’apporter du Jack Daniel’s. Mon ami connaissait nos habitudes.

Je me rallumai une cigarette et regardai Billy échanger avec Johnatan.

-Son vrai nom, c’est Johnatan…

Billy souligna que pour l’instant, se cacher derrière un masque ou un nom de scène était à la mode. Je rigolai.

-Je me cache bien derrière mes cheveux et toi derrière tes lunettes de soleil…

Ça revenait plus ou moins au même… On avait besoin de ça pour nous protéger… Pour mettre une distance entre notre public, qui était violent, et nous.

Billy déclara que je lui avais parlé du concert, que Moriarty avait critiqué de façon assez acerbe.

-Moriarty critique mal tout ce qui sort de chez MTI…

Puis ce fut moi que Billy regarda, me demandant si j’avais eu un coup de cœur. Au même moment, Marc me déposa ma bouteille et demanda à Johnatan ce qu’il voulait boire. Quand il fut parti, je répondis à Billy.

-Ouais, vraiment… Sa musique va un peu dans tous les sens alors tout le monde peut y trouver son bonheur… Mais même dans la diversité, je trouve que tu as un style bien à toi,  Johnatan. Sinon, je n’aurais pas pu reconnaître ta voix.

On était dans la voiture de Cash et ce dernier m'emmenait dans un restaurant nommé Canter's Deli. On a un peu fait connaissance et il m'a l'air sympathique. On entre et on rejoint Billy Lighter. Ce dernier nous invite à nous asseoir. Je laisse Cash s'asseoir et je m'assieds à l'opposé des deux. Ils commencent à discuter et je les laisse parler. Soudain, Billy porte son attention sur moi et il commence à me parler. Il commence à me parler du fait de me cacher derrière un masque et un faux nom. Je n'ai pas le temps de dire quelque chose que Cash lui répond que, eux aussi, se cachent certes avec des lunettes de soleil et leurs cheveux. Je souris.

Disons que ce masque est là pour plusieurs raisons .

Je souris et garde un petit peu de mystère sur tout ça. Puis, on vient à parler du torchon de Moriaty, je rigole puis soupire.

Tu as posé tes yeux sur ce torchon remplis de connerie ? Perso si Brent ne m'avait pas tapé sur les doigts, je m'en serais servi comme papier toilette. Heureusement qu'il n'est pas là, il m'aurait tapé à nouveau sur les doigts. De toute façon, ce mec n'a pas l'air d'aimer Brent et MTI, donc ça me passe au-dessus !

Puis Billy vient à dire que j'ai tapé dans l'œil de Cash. Vraiment ? C'est un honneur si c'est le cas. Et c'est le cas, Cash confirme qu'il a aimé ce que j'ai produit et qu'il y en a pour tous les gouts. Mais que j'avais quand même ma pâte. Je lui souris.

Disons que je transmets du mieux que je peux mes émotions. C'est un vrai défi avec le masque, mais ma voix suffit à elle-même.

Puis je viens à me gratter les cheveux.

Nameless est la fusion entre le chanteur Johnatan Silverwood et le Guitariste Alexander Silverwood, mon défunt père... J'ai perdu mes deux parents en l'espace de trois mois... Et mon père a toujours voulu être un artiste. Mais bon, il a rencontré ma mère et je suis arrivé. Du coup, c'est un rêve que j'ai voulu réaliser aussi et mon père m'avait offert ce masque à mes débuts, du coup, on est lié tous les deux par ça, c'est aussi pour ça que je le porte.

Cash avait amené, avec lui, Nameless. Il m’en avait déjà parlé. C’était le nouvel artiste de MTI. Celui qui s’était produit, il y a peu, au Dizzy Warhol. Celui que Moriarty avait en partie descendu dans un de ses articles. Celui que j’avais pu voir en photo, masqué et que je voyais, ici, à visage découvert.

Nameless alias Johnatan. Cash me donna son vrai nom. Je souris.

-Enchanté, Johnatan.

J’avais souligné que, dernièrement à L.A., jouer les artiste masqué était devenu une mode. En réalité, il n’y avait que deux artistes qui avaient opté pour un relatif anonymat. Nameless et VOX. Si le premier ne semblait pas faire grand cas qu’on sache qui il est réellement, le second était toujours un mystère pour Los Angeles. Je plaignais VOX… Il n’y avait rien de pire pour avoir les journalistes à son cul que de jouer la carte du mystère. A cet instant, plein d’entre eux devaient chercher à découvrir l’identité de VOX.

Cash, lui, affirma qu’on se cachait bien nous aussi. Lui derrière ses cheveux et, moi, derrière des lunettes de soleil.

-Ce n’est pas vraiment la même chose. Nous on sait qui on est. Johnatan, lui, aux yeux du public, est Nameless. L’homme au visage de démon.

C’était un concept. Nous, nous étions Cash Izbel et Billy Lighter. Dehors et sur scène. Johnatan était deux personnes. Une sur scène et une en dehors.

Le musicien avoua alors que ce masque était là pour plusieurs raisons. Il ne développa pas tout de suite. Je souris un peu.

-J’ai hâte de pouvoir connaitre ces raisons.

Mais avant toute chose j’avais mis en avant la critique de Moriarty et la méconnaissance des journalistes de la musique. Ils étaient, de mon avis, bien mal placer pour critiquer. Seuls les fans ou d’autres artistes pouvaient comprendre l’essence de ce qu’on faisait. Puis, il était clair que Moriarty avait une dent contre MTI pour des raisons qui m’échappaient. Sans doute une histoire d’argent. Ce genre de connerie, ça ne peut être qu’une histoire d’argent. Et à Cash de confirmé que Moriarty était anti-MTI. Mais il était clair que la critique avait touché Nameless. Je ne pouvais que le comprendre. Les critiques, je me torchais le cul avec aussi. Sauf quand elles étaient constructives mais je devais avouer que peu de journalistes savaient faire des critiques constructives. Il affirma que son manager, Brent Hughes, lui aurait tapé sur les doigts pour les paroles qu’il venait de dire.

-Guitar&Pen a de bons articles. C’est un plutôt bon magazine. Mais ceux de Moriarty n’en valent pas la peine. Il ne vaut pas mieux que ce foutu Sørensen qui fait dans le people. Ce sont des vautours. Il faudra te méfier des vautours, Johnatan.

J’avais donné le même conseil à Shiri. Même si Shiri semblait imperméable à la critique. Je ne savais pas comment elle faisait pour s’en foutre à ce point. Pour elle, chacun avait le droit d’avoir son avis.

C’est vers Cash que je m’étais tourné déclarant qu’il avait eu un coup de cœur pour Nameless. Je le sentais. Je le voyais. Je savais quand Cash avait été touché. Si ça n’avait pas été le cas, il n’aurait pas amené Nameless ici où toutes les belles histoires commencent. Il n’aurait pas pris le temps de faire connaissance avec lui. Mon guitariste confirma alors avoir eu un coup de cœur. Nameless était diversifié tout en ayant bien son style. Un difficile travail d’équilibriste. Le musicien affirma qu’il essayait de transmettre au mieux ses émotions ce qui n’était pas simple avec un masque.

-Il faudra que je vienne t’écouter jouer, un jour. Je veux voir ce qui a tant plu à Cash.

Je me tournai à nouveau vers mon guitariste.

-Après tout, ce n’est pas tous les jours que tu viens me présenter de nouveaux artistes.

C’était souvent moi qui venaient à me lier à mes coups de cœur. Bien que ça n’était pas une première, non plus, pour Cash. C’était simplement plus rare.

Johnatan expliqua alors un peu plus l’origine de son nom et de son masque. Derrière chaque idée se trouvait une histoire et c’était souvent ses histoires qui sublimaient l’idée. On sentait toute l’émotion de l’artiste dans son récit. Il était fort lié à son père. Je ne savais pas ce que c’était d’avoir un bonne relation père-fils. Le mien me battait. Je n’avais pas une meilleure relation avec ma mère. C’est Los Angeles qui m’avait sauvé du cauchemar familiale. Mon histoire était bien différente de celle de Johnatan.

-Donc, ton personnage est le résultat de la complicité que tu avais avec ton père. C’est sans doute parce que Nameless est issu d’émotions fortes que tu arrives à communiquer avec le public même masqué. Parce que le masque est, en soi, un visage. J’aime bien le concept, en tout cas.

Et je savais que Cash avait eu un coup de cœur pour ça aussi. Parce que, je l’imaginais, on pouvait entendre l’histoire de Nameless à travers son masque et à travers sa musique. Je me tournai vers Cash.

-Johnatan, lui aussi, n’est pas un enfant de L.A., n’est-ce pas ?

Cash pouvait comprendre le sens profond de la question. Je n’en étais pas un non plus. Mais L.A. m’avait adopté. Adoptera-t-elle Johnatan ?

Billy n’avait rien contre la présence de Johnatan. Au contraire, il se montra plutôt curieux. Surtout qu’il savait que l’artiste jouait masqué sur scène. Je lui avais décrit le masque de démon. J’expliquai que nous aussi, quelque part, on se cachait. Sauf que ce n’était pas tout à fiat la même chose comme le disait Billy. Les gens connaissaient notre identité, contrairement à Nameless.

Je tirai sur ma nouvelle cigarette.

-C’est vrai.

Puis j’expliquai à Johnatan…

-Personnellement, je me cache derrière mes cheveux et mes lunettes pour mettre une distance entre moi et le public… Pour me protéger. Mais je n’ai pas ressenti ça avec Nameless. C’est vraiment un personnage.

Notre public était spécial, violent, envahissant. Il ne fallait pas qu’on se laisse bouffer par eux. Johnatan, lui, m’avait semblé communier avec le public du Dizzy.

Nos boissons arrivèrent et j’ouvris ma bouteille de Jack Daniel’s pour y boire au goulot. Billy se disait impatient de connaître les raisons qui poussaient Nameless à jouer masqué. Puis on parla du Guitar&Pen qui avait critiqué son concert et son manager. Il affirma que le magazine était un torchon, ce qui me fit tiquer. Mais Brent l’avait déjà rappelé à l’ordre.

Billy disait que Guitar&Pen était un bon magazine, que c’était Moriarty le problème. Et Sørensen, aussi, dans un autre style. Les vautours, ce n’était pas ce qui manquait à L.A.

-Mais Moriarty est là depuis bien avant Johnatan. Il a le droit de dire ce qu’il dit.

Je regardai Nameless.

-Toi, tu vas devoir attendre d’être adopté avant de pouvoir insulter des monuments de L.A.

Parce qu’il n’était pas d’ici. Il n’avait encore aucun droit dans notre ville mère. Il fallait d’abord voir si elle allait le prendre sous son aile bienveillante ou le rejeter comme un vulgaire déchet. Je voulais bien l’aider, mais rien n’était fait. Et au final, c’était quand même L.A. qui décidait. Et apparemment, Brent l’avait compris, puisqu’il l’avait mis en garde.

Je repris une longue gorgée de bourbon et essuyai ma bouche du revers de la main.

Billy avait hâte de pouvoir écouter Nameless, ce qui me fit sourire. Il disait que c’était rare que je m’attache à de nouveaux artistes, ce qui était vrai.

-Mais tu aurais dû voir le Dizzy ce soir-là. Il s’est passé quelque chose.

Johnatan nous expliqua que son personnage était le résultat d’une fusion entre son père et lui. Je comprenais l’image, la métaphore. Le masque était un cadeau de son père. C’était à la fois triste et… comme si le Destin de Nameless avait été tout tracé depuis le début, le menant sur la route conduisant à L.A., là où les rêves se réalisent.

Billy aussi, comprenait le concept et comprenait donc que ce n’était pas dans le but de se cacher que Johnatan se masquait, mais pour faire vivre ce personnage qui était à la fois son père et lui-même.

-Les gens vont adorer cette histoire… Même si elle est triste.

Billy se tourna alors vers moi et je me tournai vers lui dans le même mouvement, ce qui créait un effet de synchronisation dont seul the Lightening était capable. Quand Billy demanda si Johnatan était un enfant de L.A., je fis non de la tête.

-Non… Il vient d’arriver… C’est pour ça que je lui dis de ne pas insulter tout ce qui fait notre Mère à tous.

Je regardai Johnatan.

-L.A. te donne une chance… Ne la gâche pas en parlant à tort et à travers. Car ce qu’elle te donne aujourd’hui, elle peut te le reprendre demain.

Nous étions installés et on commençait à discuter. Et faire connaissance de mon coté. Cash me présente à Billy.

Enchanter de même, c'est un honneur !

Il est vrai que pour moi, rencontrer une partie de "The Lightening"  était exceptionnel, je les écoutais il y a peu dans le bar où je bossais. Et là, ils sont en face de moi. Je m'allume une clope moi aussi et commence à boire ma bière. Puis, on vient à parler du personnage de Nameless. Cash m'explique qu'il ce cache derrière ces cheveux et ces lunettes pour mettre de la distance avec le public.

Nameless est un personnage énigmatique. Le premier album, ce ne sera que des chansons que j'ai écrites dans mon coin avant d'arriver ici. Et le deuxième album, lui...Ce sera le vrai départ pour Nameless !

Oui, je balance mes plans comme ça. En même temps, je sais à qui j'en parle, ils sont tous les deux dans le business et s'ils ont des conseils à me fournir, je les prendrais à bras ouverts. Puis, on vient à parler de Guitar&Pen. Évidement, je ne peux pas m'empêcher de dire que ça ne me plait pas. Puis Billy et Cash me remettent dans le bon chemin. En effet, j'ai critiqué un peu vite. Ce n'est pas Guitar&Pen en lui-même qui est un torchon, mais plutôt la critique de Morarty qui doit finir au chiotte. Mais Cash me rappelle ce que Brent m'a dit. Lui a le droit de me cracher à la gueule, mais moi non. Je tire un grand coup sur ma clope et soupire.

J'ai hâte de lui faire fermer son clapet quand j'aurai mis le feu sur scène avec les gars et qu'il passera pour un con avec ces critiques à deux balles.

Puis Billy me dit de faire attention. Les journalistes sont des vautours. Je le regarde en souriant.

Si je suis de bonne humeur, je les ignore, sinon je leur coupe les ailes !

Mais je suis rarement de mauvaise humeur. Donc, je les ignore. Et je réfléchis aussi. Puis je viens parler de mon histoire et cela semble plaire à Billy. Et mon histoire plait à Cash, même si c'est triste. Mon visage s'illumine.

Je vous remercie tous les deux. C'est un honneur pour moi de recevoir des compliments venant de vous.

Puis Billy demande à Cash si je suis de L.A, ce dernier lui réponds que non et je les regarde.

En effet, je viens de Blackpool en Angleterre.

Puis Cash me rappelle que L.A me donnait ma chance.

Tu as raison Cash. Je vais m'écraser pour l'instant et attendre d'être reconnus.

Il y avait une différence entre se cacher et être un personnage créé de toute pièce. Cash se cachait derrière ses cheveux pour se protéger du public… Pour Nameless c’était un processus réfléchi. Une façon d’être quelqu’un d’autre pour communier différemment avec le public. C’était sans doute un genre de protection aussi mais il y avait une dimension artistique voulue dans la volonté de prendre un autre nom et d’utiliser un masque.

-Oui. Un personnage. C’est lui qui monte sur scène. C’est Johnatan qui en descend.

Deux personnes différentes. Complémentaires mais différentes.

Johnatan qui semblait déborder d’idée. Il avait déjà des idées pour deux albums. Ça me rappelait les débuts de The Lightening quand il en fallait peu pour que la magie opère. Puis s’en est mêlé les médias, les fans, les managers, les maison de disques, la drogue… Tant de choses qui parasitent la vie d’un groupe.

-Tu as l’air d’avoir une vision claire de ce que tu veux faire. Quand l’inspiration est là, il faut en profiter. Rien de dure jamais.

Je ne voulais pas être négatif. Juste lancer une réalité. Rien ne dure jamais. Tout se transforme à chaque fois. Le changement est quelque chose de difficile à encaisser même si c’est parfois pour un mieux. J’étais l’incarnation du changement. Le Billy que je suis peut être différent dans les dix prochaines minutes.

J’avais parlé de la critique de Moriarty et il ne me fallut pas longtemps avant de comprendre que ça remuait quelque chose chez le jeunes artistes. Il n’avait pas bien encaisser les mots vides de sens de Moriarty. Il insulta Guitar&Pen preuve que tout ça le touchait bien plus qu’il ne voulait l’avouer. J’affirmai que si Guitar&Pen était un bon magazine, l’avis de Moriarty, lui ne valait rien. Du moins, pour les artistes qu’on est. Parce que, certains, dehors, buvaient les paroles de journalistes comme lui. Tout comme beaucoup gobent les mensonges de Sørensen. Et le soucis, à L.A. , c’est que c’est ça qui compte.

Cash déclara que Moriarty avait le droit de dire ce qu’il voulait car il était là depuis plus longtemps que Johnatan et que, avant toute chose, Johnatan devra être adopté avant d’insulter les monuments de L.A.. Si j’étais d’accord sur le fait qu’il fallait d’abord faire ses preuves avant d’insulter la critique, je ne considérais pas les critiques de Moriarty légitime juste parce qu’il crachait son venin dans les colonnes de Guitar&Pen depuis longtemps et qu’il faisait partie intégrante de Los Angeles. Si j’étais l’incarnation du changement, je savais que Cash était l’incarnation de la permanence.

Les opposés s’attirent.

-Moriarty a le droit de dire ce qu’il dit. Et tout le monde a le droit de dire que ce qu’il dit c’est des conneries.

Cash et moi n’avions pas toujours la même façon de voir les choses.

-Mais Cash a raison sur une chose : pour l’instant, pour les gens, la parole de Moriarty va valoir mieux que la tienne parce que tu n’as pas encore percé. Mais viendra un moment, à force de travail, où tu pourras lui envoyer ton poing dans sa figure.

Comme je l’avais fait avec Sørensen. Littéralement.

Et, visiblement, Johnatan avait hâte que ce moment arrive. Et c’est à travers ses performance que le jeune musicien voulait faire taire le journaliste.

-Il ne la fermera jamais. Mais en étant bon en live, tu finiras par avoir des adeptes qui seront sourds à ce que dit Moriarty.

Le jeune homme avait de la fougue. Assez pour se dire que, ces vautours, il les ignorait quand il était de bonne humeur et coupait leurs ailes quand il était de mauvaise. Il y avait quelque chose de brut et d’impulsif chez Johnatan qui venait sûrement de sa jeunesse. Il ne devait pas être beaucoup plus jeune que moi, en réalité, mais il était jeune artiste.

-Les ignorer. C’est ce que je n’arrive pas à faire…

D’où le poing dans la figure d’Amon.

-Mais leurs ailes ne se coupent pas facilement. Elles repoussent. Ce sont d’immortel charognards.

Des ennemis. Ils sont fourbes. Mais je savais que, lors de notre prochaine tournée, ils n’arriveront pas à nous atteindre.

Quoi qu’il en soit, Cash avait beaucoup aimé le style de Nameless au niveau musical. Il disait que j’aurais dû être au Dizzy, ce soir-là.

-Je ne raterais pas le prochain concert.

Johnatan nous remercia pour les compliments. Il disait que c’était un honneur. Je souris en hochant de la tête.

Il expliqua, ensuite, les origines de son nom et de son masque. Une histoire triste. Le genre d’histoire dont L.A. aimait se nourrir. Si L.A. aime l’histoire, elle aidera Johnatan à avancer. Parce qu’elle voudra en connaitre la suite. Cash confirma que les gens allaient adoré cette histoire. Il n’y avait pas de doute là-dessus. Et Nameless allait sûrement la raconter à travers ses chansons.

J’avais bien compris que Johnatan était sûrement nouveau en ville et Cash confirma disant qu’il venait d’arriver. Johnatan affirma venir de Blackpool en Angleterre.

-Moi aussi, je n’étais pas un enfant de L.A.. Je viens de l’Indiana. Si L.A. t’adopte, tu pourras écrire une belle histoire, ici.

Cash déclara que L.A. lui donnait une chance. Il ne fallait pas qu’il la gâche. Le jeune homme donna raison au guitariste déclarant qu’il allait s’écraser pour le moment. Je le fixai.

-En grimpant sur scène et en donnant tout ce que tu as, tu réponds de la bonne façon à toutes ces critiques. Et c’est la meilleur façon d’être reconnu. Il faut que tu t’entoures des meilleurs personnes et ne pas laisser les charognards te faire croire que ce que tu fais ne vaut pas le coup. Ils vont essayer de te pousser à l’erreur. Il ne faut pas entrer dans leurs pièges.

Je bus une longue gorgée de mon cocktail avant de sourire. Je me sentais puissant et capable de conseiller les autres.

-Tu as déjà deux alliés, ici.

Moi et Cash.

Je fumais et je buvais, essayant de jauger Johnatan, de savoir qui il était, derrière le masque, derrière l’artiste. Il nous expliqua pourquoi il faisait ça, avec son masque et alla même jusqu’à nous exposer ses plans pour ses deux premiers albums. Apparemment, il avait déjà une vision assez claire de ce qu’il voulait faire.

J’étais content pour lui.

Billy était d’accord bien qu’il le mit en garde… Rien ne dure jamais.

-Nothing Lasts Forever… Notre premier album.

Johnatan en voulait à Moriarty pour sa critique. Mais si on allait par là, tout le monde pouvait critiquer Moriarty qui faisait pourtant partie intégrante de la vie culturelle et musicale de L.A. On avait Moriarty… On savait ce qu’on avait. On ne saurait pas ce qu’on aurait s’il disparaissait. Peut-être pire.

Et je n’aimais pas le changement. Les critiques de Moriarty faisaient partie du paysage et je tenais à ce que ça reste comme ça.

Nos regards, à Billy et moi, se croisèrent quand il déclara qu’effectivement, Moriarty avait le droit de dire ce qu’il voulait… mais que les gens pouvaient dire que ce qu’il disait était des conneries.

-Si ça vous fait réagir en l’insultant sans être plus intelligent que ça, alors c’est qu’il a gagné. Sauf si vous réagissez sur scène, en chanson.

Cela dit, Billy admettait que j’avais raison : la parole de Moriarty, pour l’instant, valait mieux que celle de Johnatan. Je hochai lentement la tête avant de faire la moue quand Billy parla de mettre un poing dans la gueule de Moriarty. Je savais qu’il l’avait fait avec Amon Sørensen… Et ça n’avait pas été intelligent.

Johnatan voulait faire taire le journaliste. Je savais, comme Billy, que le faire taire était impossible.

-Billy a raison. C’est le public que tu dois gagner. Pas les journalistes. Si tu te lances dans cette quête-là, c’est perdu d’avance. Et tu vas te fatiguer pour rien.

Les journalistes, ces charognards que Johnatan prétendait ignorer. Il venait d’insulter Moriarty alors j’en déduis que…

-Désolé que tu sois de mauvaise humeur maintenant.

Billy, lui, voyait ces charognards immortels. Et il avait raison. Il promit aussi de ne pas rater le prochain concert de Johnatan. Je tirai sur ma cigarette et envoyai la fumée au plafond.

Il me demanda ensuite si Nameless était un enfant de L.A. et j’affirmai que ce n’était pas le cas, ce que confirma l’intéressé qui était né en Angleterre. Billy lui donna alors sa propre origine.

-Mais Billy a été adopté, maintenant. Ce qui ne veux pas dire que L.A. ne le met pas à l’épreuve…

Billy mit une nouvelle fois Johnatan en garde contre les médias qui allaient le pousser à l’erreur.

-Il y a une grande différence entre s’écraser et être humble et intelligent. Mais une chose est sûre : les insultes…

Je regardai Billy.

-… ou les poings dans la figure… ne te mèneront nulle part.

Je pris une longue gorgée de bourbon tandis que Billy disait à Johnatan qu’il avait deux alliés en nous. C’était vrai… Je me voyais bien l’aider, le guider à L.A.

-Pourquoi avoir choisi L.A. ? Entre toutes les villes où tu aurais pu percer ? Elle t’a envoûté ?

Je connaissais le pouvoir de L.A…. Elle pouvait très bien avoir charmé Nameless, pour le faire sien.  

On discutait du cas "Nameless" avec Billy. Il comprend un peu le principe, mais pas tout à fait. Je le regarde toujours avec un grand sourire, clope au bec.

C'est pratiquement ça. Disons qu'à partir du moment où je mets mon masque jusqu'au moment où je l'enlève, Nameless prend la place de Johnatan. Et du moment que je n'ai plus le masque, je suis Johnatan Silverwood .

En effet, quand j'ai le masque sur la tête, je joue le personnage à fond. Tout cela fait partie de mon idée commerciale. Puis je viens à exposer ce que je prépare pour le groupe. Bien sûr, Billy et Cash semblent très contents que j'aie des idées, mais me préviennent que ça peut vite s'essouffler et qu'il fallait profiter pendant que j'avais des idées. Je bois une gorgée de ma bière puis ris.

J'aimerais tellement avoir 50 heures par jour pour pouvoir poser toutes mes idées sur un bout de papier. Malheureusement, je n'ai que 24 heures .

En effet, si je passe la plupart de mon temps au studio, ce n'est pas pour rien. Je pose tout ce que je peux poser et ça a l'air de marcher puisque l'on est plus que productif.

Puis, on vient à parler de ce connard de Moriarty. Sujet pas ouf pour moi parce que je suis vexé de la façon dont l'article a été écrit et surtout...

En soi, ce n'est pas l'article en lui-même qui me gêne... C'est que ce mec n'a jamais fait de musique et se permet de critiquer ce que je fais. C'est surtout ça qui m'ennuie... Et qu'on s'attaque à Brent aussi. Je lui dois beaucoup et je vais essayer de le défendre comme je peux. Mais il est vrai que l'insulter, c'est se mettre à son niveau, ce qui est complètement con après réflexion...

Je me gratte le menton et continue de boire ma bière. Billy vient à me dire de devenir connu pour pouvoir mettre littéralement mon poing dans la tronche de Moriarty. Je suis à deux doigts de cracher ma bière, j'avale et j'éclate de rire.

Il faudra m'appeler le jour où je me bats ! Je ne me suis jamais battu.

Puis Billy vient à me parler de mon prochain concert. Je lui souris.

Je veux bien si tu ne me voles pas la vedette !

Je le taquine évidemment que je veux être la star, mais en ville, il est la star. Moi, je suis le rookie et j'ai encore mes preuves à faire. Puis Cash me parle du fait d'être adopté par L.A, c'est ce dont j'ai envie, évidement. Et Cash me demande pourquoi L.A. Je lui souris en finissant ma clope.

Pourquoi L.A. Encore une fois c'est en rapport à mon père. C'était son rêve et je l'ai entendu parler de cette ville depuis que je suis enfant. Et du coup, il m'a fait rêver aussi et je me suis mis cet objectif dans ma tête. Et quand il est parti. Son patron et meilleur ami m'a dit de foncer, réaliser notre rêve en commun, et ma meilleure amie qui était barmaid aussi m'a poussé, je me souviendrai toujours... "Vas-y John, qu'à tu as perdre ? Rien alors vas-y saute dans le premier avion et va vivre ton rêve ! Pense à ceux qui ont un rêve impossible à réaliser !" Et c'est comme ça qu'elle m'a convaincu de sauter dans le premier avion pour L.A .

Johnatan m’expliqua un peu mieux les subtilités du personnage de Nameless. Ainsi, il ne devenait pas Nameless en grimpant sur scène mais en mettant son masque. Ce n’était pas la scène qui le transformait mais le symbole qu’il portait sur son visage. C’était un preuve que tout ça relevait de la grand symbolique. Et Dieu sait que j’aime les symboles. Je les trouve puissant.

-Je comprends. C’est très symbolique.

Cash et moi, on mit quand même en garde Johnatan concernant la permanence des choses. Ce qu’on avait, on pouvait facilement le perdre. Nameless mit alors en avant qu’il bossait afin de pouvoir obtenir et puis garder ce qu’il souhaitait avoir. La seule chose qui l’empêchait de faire plus était la durée immuable des journées. J’esquissai un sourire.

-Le temps. C’est le pire ennemi de tout le monde.

C’était le mien. Le temps et l’heure semblait si important pour le commun des mortels au point que ça régissait leur vie. C’est pour ça qu’on m’en voulait, souvent, de monter en retard sur scène alors que ces retards servent simplement à ce que je leur donne le meilleur concert. Nos fans sont parfois ingrat…

Mais on a besoin d’eux. Sans eux, nous n’existons pas. C’est eux qui comptent. Pas forcément les journalistes comme Moriarty. Je pouvais comprendre la haine que vouait Johnatan à Moriarty. Mais je savais aussi que le musicien devra faire ses preuves avant de pouvoir légitimement frapper sur le journaliste de Guitar&Pen. Cash, lui, se disait que frapper et que d’insulter n’était pas intelligent.

-Ça ne l’est pas. Mais ça passe les nerfs.

Comme quand j’avais frappé Sørensen. Ça avait été aussi stupide qu’impulsif mais ça avait, aussi, permis de libérer mes tensions.

Cash confirma mes dires en disant que Johnatan devra convaincre le public et non les journalistes. C’est le public qui déterminera le degré de notoriété de Nameless. Johnatan devait se concentrer là-dessus et pas sur le reste.

-C’est eux qui décident. Pas Moriarty.

Quant à l’humeur de Johnatan, conformément à ses propres dires, il semblait être de mauvaise humeur étant donné qu’il avait insulté le journaliste de Guitar&Pen. Nameless s’expliqua disant que ce qui l’ennuyait était que Moriarty ne faisait pas de musique et se permettait tout de même de critiquer. Ça soulève la grande question qui se demande s’il faut être expert en une matière pour pouvoir émettre une critique. Moi, j’étais partisan du fait qu’il faut un minimum s’y connaitre avant de critiquer alors je comprenais le sentiment de Johnatan. Il mit aussi en avant la loyauté envers son manager avant de confirmer qu’insulter était stupide.

-Des non-musicien qui se permettront d’émettre un avis sur ton travail seront légions. Les gens aimaient parler et critiquer.

Et pour en revenir aux poings dans la figure, Johnatan éclata de rire à ma réflexion. Visiblement, la violence, ce n’était pas son premier réflexe.

-Parait que ce n’est pas plus mal. J’ai eu plein d’ennuis à cause de ça.

Mais j’étais parfois mu par des forces qui me poussaient à frapper. Je perdais parfois le contrôle. Pas comme maintenant. Maintenant, j’étais en contrôle. J’étais imperturbable. Je me sentais confiant et puissant.

J’affirmai, ensuite, que j’allais venir au prochain concert de Nameless. Le jeune chanteur semblait content tant que je ne lui volais pas la vedette. Je rigolai un peu.

-Je ferais en sorte de passer inaperçu.

Tout ça pour en venir au fait que Nameless n’était pas un enfant de L.A.. Il devra faire en sorte de se faire adopter. Comme moi. L.A. qui mettra à l’épreuve le jeune chanteur comme elle l’avait fait et comme elle le faisait avec moi.

-L.A. n’épargne personne. Même pas ses enfants.

Cash affirma alors que le tout n’était pas de s’écraser mais de rester humble et intelligent sans avoir recours aux insultes et à la violence. Cash était du genre à souvent se taire et à ne parler qu’à travers sa guitare. Moi, j’étais celui qui parlait. Ainsi, je fixai mon guitariste.

-Tu sais que c’est plus simple à dire qu’à faire…

Il le savait. Il savait que, pour moi, tout ça était difficile.

Cash se demanda alors pourquoi Johnatan avait choisi L.A. comme ville où percé. L’artiste parla alors de son rêve commun avec son père et des gens qui l’avaient poussé à tenter sa chance. C’est la puissance de l’amour qu’il a pour son père et la confiance que lui porte ses amis qui l’avait amené ici. Une énergie positive. Tout l’inverse de ce qui m’avait amené ici.

-De là-haut, ton père est sûrement déjà fier de ce que tu as accompli. Los Angeles est rempli de pièges mais tu sembles avoir l’envie d’aller loin. Comme moi. Sauf que moi, c’est pour ne plus jamais entendre parler de mon père que j’ai trouvé la force de venir ici et de devenir chanteur.

Johnatan nous parla de ce que son masque, son personnage, représentait. Et j’étais assez admiratif de l’idée. En fait, quand il le revêtait, il racontait déjà une histoire, si je comprenais bien… Une histoire qu’il agrémentait par sa musique, comme j’avais pu le voir au Dizzy.

Billy aimait cette histoire de symbole et je devais dire que moi aussi.

-Les symboles sont ce qu’il y a de plus puissant. Et je suis sûr que Nameless, comme Johnatan, évolueront de concert en concert.

Je compris aussi que Johnatan était un gros bosseur, quand il parla du temps qu’il passait à composer. Il aurait aimé avoir des journées bien plus longues pour pouvoir en faire plus. Le temps, un peu comme pour Billy, semblait être un ennemi. Mon chanteur le lui affirma…

Moi, je souris.

-Pas vraiment de tout le monde… Ce n’est pas le mien, par exemple. Parce que j’ai une façon de composer différente de vous. Je ne dois pas poser mes riffs sur papier… Je puise mon inspiration du bitume et du sable de L.A. quand je la parcoure de long en large. Après, il me suffit de jouer.

J’avais quelque chose de totalement naturel dans mon processus de création. Et j’avais toujours la voix de Billy en tête. Tout le temps… Et je m’efforçai de donner à cette voix le meilleur tremplin possible grâce à ma guitare.

Pour ce qui était de l’article qui perturbait tellement Johnatan, j’essayais, avec Billy, de le faire relativiser… De laisser couler et de répondre sur scène. Mais je savais qu’en tant que jeune artiste, ce n’est pas toujours simple d’encaisser les premières critiques. Je le mis en garde comme quoi insulter, ou frapper comme l’avait suggéré Billy, n’était pas forcément la plus intelligente des réponses. Billy disait que ça passait les nerfs… Mais Johnatan semblait plus compréhensif. En fait, ce qui le dégoûtait, c’était d’être jugé par quelqu’un qui n’était pas musicien.

Ce à quoi Billy répondit qu’au final, c’était toujours le public qui décidait.

-Et j’ai été témoin que le public était avec toi, au Dizzy… Il faut continuer comme ça.

Il semblait aussi très dévoué à son manager, ce qui me fit sourire en pensant à Lenny Knowles, notre manager. Parce que je ne considérais toujours pas Samantha Ricci comme notre manager aussi. Non, ça, c’était hors de question. Si j’avais quelque chose à dire ou à demander, c’était à Lenny que je m’adressais.

-C’est bien de bien s’entendre avec son manager, c’est important.

Billy affirma alors que les gens qui allaient critiquer sans savoir sortir une seule note de musique d’un instrument allaient être légion. Et il avait raison. Je chipotai au goulot de ma bouteille.

-Ça fait partie du jeu…

Quant à ce qui était de répondre par la violence, Billy admit que ça lui avait causé des ennuis. Et je fus un peu soulagé pour Johnatan quand il affirma ne s’être jamais battu.

-C’est tout à ton honneur.

Je n’étais pas un violent, sauf dans les mots. Je savais que je pouvais être très méchant dans les mots, sans même proférer une seule insulte. J’avais une sorte de don pour ça.

Après que Billy ait promis de passer inaperçu au prochain concert de Nameless, on parla des épreuves que L.A. pouvait mettre sur notre chemin. C’était une vicieuse, L.A. ELlel pouvait faire miroiter les plus belles des illusions mais, comme dans le Désert, il ne s’agissait parfois que de mirages.

Je pensais que rester humble et réagir intelligemment était la clé. Billy trouvait que c’était plus facile à dire qu’à faire.

-Je sais. Parfois, je n’arrive pas à suivre mon propre conseil, tu sais.

Samantha Ricci et ses grands airs me poussaient parfois à dire ou faire des choses qui n’étaient pas forcément intelligentes. Mais je n’arrivais pas plus à l’encaisser que Johnatan n’arrivait à encaisser Moriarty.

Bref, pour en revenir à L.A., je demandai à Johnatan ce qui l’avait amené ici. Le rêve de son père et quelques encouragements l’avaient mis sur la voie. Je l’écoutai attentivement, fasciné. Puis Billy raconta sa propre histoire, qui était à l’opposé de celle de Johnatan. Puis je sentis que c’était mon tour.

-Moi, je suis un enfant de L.A. Elle m’a donné naissance, au milieu de ce désert magnifique. Je peux sentir les pulsations qui font d’elle une entité vivante. Sa respiration, chaude et sèche.

Je souris à Johnatan.

-On m’appelle le Shaman ou le Roi Serpent.

On discutait avec Billy et Cash de Nameless. Je leur avais expliqué que c'était plus qu'un personnage. Que c'était un symbole d'une autre partie de moi. L'artiste en lui-même qui s'exprime. Et ça a l'air de leur plaire. Je leur souris.

ça fait du bien d'avoir la validation de deux stars de la musique comme vous. C'est que je suis sur le bon chemin. Et je vais devenir meilleurs avec le temps.

Par la suite, on vient à parler du processus de création. Billy me dit que lui a besoin d'écrire comme moi, mais Cash lui n'a pas besoin de ça. Tout vient seul et c'est vraiment impressionnant.

Moi, c'est compliqué, je fais le taff de tout le monde. J'écris les paroles, les partitions etc ... Les gars après ont plus qu'à jouer même si mon bassiste tente d'écrire lui-même et de changer ce que je fais. Ce qui n'est pas plus mal !

On parle aussi de l'article de Guitar&Pen. Au début j'étais contrarier, mais au fil de la discutions je finis par me calmer et relativiser. Cash me confirme les dires de Billy. Ce n'est pas Moriarty qui décide de ce qui marche ou pas. C'est le public et Cash me confirme que le public était  à fond avec moi. Je souris tout en continuant de boire ma bière. Billy me disait que je pourrais frapper quand je serais célèbre, mais je ne suis pas bagarreur et Cash m'en félicite.

En même temps, je suis aussi épais qu'une chips, alors, je ne risque pas de faire très mal !

Je ricane, il est vrai que je ne suis pas très musclé. Assez pour faire le con sur scène et tenir ma guitare. Billy me dit qu'il a hâte de me voir sur scène, ce qui me touche vraiment. Je lui fais la blague très facile en lui demandant de ne pas me faire de l'ombre, ce qu'il fera. Puis, on parle des épreuves que L.A va me donner et chacun d'eux me donne des conseils et leurs façons de voir les choses.

Je prends bien note de vos conseils. C'est vraiment gentil de votre part de donner du temps à un mec comme moi.

C'est vrai ! Eux sont des stars, moi, je suis personne et ça me touche qu'ils prennent le temps de m'expliquer tout ce qui se passe ici et me préparer au mieux pour plus tard. Cash me demande par la suite pourquoi j'ai choisi L.A plutôt qu'ailleurs. Je leur explique mon chemin, mes rêves, les amis qui m'ont poussé à faire ce que je fais aujourd'hui, Billy me parle aussi de ce qui l'a poussé à venir à Los Angeles. Je compatis, je savais que j'ai eu la chance d'avoir un père n'aimant pas comme celui de Billy, il semblerait.

Chaque chemin est différents mais c'est ce qui fait la beauté de la vie, je suppose. Mais il est vrai que mon père doit vraiment être fier de là où il est... Et ma mère doit lui taper sur les doigts en lui disant que ce n'était pas une bonne idée de venir faire de la musique et que j'aurais dû continuer de faire barman.

Putain John t'est devenue philosophe ou quoi ? Enfin, Cash se met lui aussi à parler de ce qu'i l'a poussé à faire carrière dans la musique. Il a sa vision à lui et elle me plait. Il communique avec la ville et cette dernière communique avec lui. Il à même un surnom. "Le roi serpent" ou "le Shaman".

J'aime beaucoup, c'est original. Moi, je n'ai pas été cherché bien loin pour Nameless mais forcé de constater que ça marche !

Autant Cash que moi aimions la symbolique que Nameless avait apporté à son personnage. Ça donnait de la puissance à la chose. Il semblait apprécier nos retours et comptait bien devenir meilleur avec le temps. Il démarrait plutôt bien, en tout cas.

Tout comme Johnatan, j’avais besoin de beaucoup de temps et de travaille pour créer. Je devais être dans un état d’esprit favorable pour réellement sortir ce qui était clair dans ma tête. Car il était souvent très rare quand le rendu était totalement conforme à ce que j’avais en tête. De quoi, souvent, rendre le processus long et intense. Pour Cash, les choses étaient différentes. Il jouait s’inspirant de la ville qui l’avait créer. Il surfait souvent sur mes paroles. Sur mes émotions… Y mêlant les siennes.

-C’est cette complémentarité de nos deux processus qui font que The Lightening est un groupe unique.

Je n’avais pas peur de le dire. The Lightening était un groupe unique.

Johnatan, lui, expliqua faire le boulot de tout le monde. Il écrivait tout, partition comprises, même si son bassiste tentait d’écrire lui-même et modifier certaines ce qui semblait plaire à Johnatan.

-Le tout est que le résultat finale plaise et que la magie opère. Ce qui compte c’est d’être satisfait de ce qui sort de vos instruments.

Moi, je n’étais pas toujours satisfait et quand je ne l’étais pas je recommençais encore et encore quitte à ce que ça tape sur les nerfs de Ziggy.

On parla de Moriarty qui avait fait une critique mitigée sur Nameless. Je vouais une haine envers ce genre de journalistes. Finalement, Johnatan finit par relativiser les autres. Car après tout, ceux qu’il avaient à convaincre était le public. C’est eux qui feraient sa renommée ou non. C’est eux qui le suivront partout et le défendront. Et, d’après Cash, Nameless avait déjà gagné une part de ce public lors de son premier concert au Dizzy.

Johnatan montra, dans son discours, qu’il avait une certaine loyauté en son manager. Cash trouvait ça bien de bien s’entendre avec son manager. Il s’entendait bien avec Lenny mais pas vraiment avec Samantha. Il ne s’était pas entendu avec les autres managers qui étaient passé sous notre coupe comme, par exemple, Legrio ou, encore, Watson. Cash n’aimait que Lenny. Parce que Cash déteste le changement alors que je suis l’incarnation du changement.

-Important mais pas indispensable. Je ne m’entends pas toujours avec Lenny, par exemple.

Son stress me contamine. Je n’aime pas être contaminé.

Tout ça pour dire que des non-initiés à la musique ne s’empêcheront pas de critiquer ce dont il ne sont pas expert. Ça faisait partie du jeu, comme le disait Cash. Même si ce jeu pouvait devenir dangereux au point de me faire, parfois, sortir de mes gongs. J’avais déjà frappé. Ce n’était pas le cas de Johnatan ce que saluai Cash avant que Nameless n’ajouta qu’il n’avait pas vraiment la carrure pour se battre. Je n’étais pas spécialement épais non plus mais quand j’étais en rage, j’étais inarrêtable.

-La colère peut parfois faire du plus petit gabarit une arme de destruction massive.

Je savais de quoi je parlais.

Pour Cash tout ce qu’il fallait faire était de rester humble et intelligent. Ce qui était plus facile à dire qu’à faire. Il en était conscient.

-Je sais… Je t’ai déjà vu à l’œuvre, Cash…

Je frappais avec les poings. Lui avec les mots. Encore une fois, nous étions différent. Souvent de véritables opposés. Et les opposés s’attirent.

Johnatan semblait apprécier nos conseils. Je souris.

-Dans ce genre de monde, il faut parfois se serrer les coudes. Je déteste quand certains bons talents ne percent pas parce qu’ils auraient été mal conseillés.

On avait une certaine expérience. Cash aimait le talent de Nameless. Il fallait, donc, s’atteler à l’aider à éviter les pièges de L.A.

L.A., ma mère d’adoption. Peut-être la future mère d’adoption de Johnatan ? Qui sait. Tout ça avait poussé Cash à savoir ce qui avait conduit Johnatan à L.A.. C’était ses amis ainsi que son rêve qu’il avait en commun avec son père qui était responsable de ce choix. Mon histoire était différente mais l’issue était la même : Los Angeles avait été notre destination. Johnatan confirma que son père devait être fier alors que sa mère, visiblement plus protectrice, aurait préféré qu’il reste barman.

-Le milieu d’où tu viens semble être ta force. Mais ce que tu as vécu aussi. Perdre des parents aimant, ça doit certainement marquer.

Tout comme moi, c’est la révolte qu’on pouvait entendre dans mes chansons. Une révolte née aussi de là où je venais. De ce que j’avais vécu. Des démons qui me poursuivent encore.

Cash expliqua alors que, lui, c’était un enfant de L.A.. Je savais qu’il en était très fier tout comme son statut de Roi Serpent ou de Shaman. Cash avait un monde bien à lui. Un monde dont il était Roi. Johnatan trouvait tout ça original. Il avoua ne pas être aller chercher loin pour Nameless.

-Peut-être. Mais ça représente bien ton personnage. C’est tout ce qui compte, finalement.

J’esquissai un petit sourire avant de me tourner vers Cash.

-J’espère, en tout cas, que tu ne feras pas faire un tour de ton Désert à Johnatan, Cash… Montre lui plutôt les bons coins de Los Angeles avant de lui montrer ton Paradis artificiel.

Nous avions un deal, Cash et moi. Et ce deal excluait les drogues.

Je souris quand Johnatan affirma que ça lui plaisait d’avoir notre validation quant à ce qu’il produisait. J’avais tout simplement eu un coup de cœur pour ce qu’il avait proposé au Dizzy Warhol, c’était aussi simple que ça. Après, ça me semblait normal de l’inclure dans notre monde où il était en train de faire ses premiers pas.

-Ce qu’on dit n’est peut-être pas parole d’Evangile, on a pas la science infuse, même en musique. Mais moi, j’ai tout simplement apprécié ce que j’ai entendu. Ça me semble normal de t’en faire part.

On parla processus de création et on avait chacun notre façon de faire. Pour The Lightening, cela reposait sur une forme de complémentarité, comme l’expliqua Billy. Pour Johnatan, c’était un travail solitaire, mais il semblait ouvert aux propositions de ses musiciens, puisqu’il laissait à son bassiste l’occasion d’écrire lui aussi.

-Chaque groupe ou artiste a sa façon de fonctionner. Mais c’est cool si tu peux partager le processus de création avec ton bassiste. C’est toujours mieux quand tu as un feedback direct.

Je souris à Billy.

-Mais ouais… The Lightening est unique.

Une unicité qui coûtait parfois cher, bloquant ce même processus de création dont nous étions fiers. Parce que ni Billy, ni moi, n’étions facile à vivre.

Des journalistes charognards, on passa aux managers. Pour moi, ils étaient importants. Sans eux, l’organisation ne se faisait pas. Sans eux, pas de concerts, pas de salles, pas de matériel. Johnatan semblait apprécier son manager et pour moi, c’était un bon point pour lui. Billy, lui, souligna qu’il ne s’entendait pas toujours avec Lenny. Je savais très bien que c’était parce que Lenny était un stressé maladif et que Billy, qui était une éponge émotionnelle, était parfois mal à l’aise par rapport à ça.

Je regardai mon chanteur en laissant la fumée de ma cigarette s’échapper par mes narines et ma bouche entrouverte.

-Je sais, Billy…

Puis, en souriant à Johnatan.

-Mais je pense qu’avec Brent, tu n’auras pas de problème de stress. Il a l’air plutôt cool, pour ce que j’en sais.

On parla un peu, ensuite, des conséquences néfastes que pouvaient avoir les journalistes… De la violence que ça pouvait entraîner. Mais si Billy pouvait être violent, Johnatan, lui, affirma ne pas être un bagarreur. Il me fit un peu rire en disant qu’il était taillé comme un chips. Je savais que ça ne voulait rien dire, parce que j’avais déjà vu Billy à l’œuvre et il n’était pas plus musclé que Johnatan. Peut-être même moins.

Et de fait, Billy déclara que la colère pouvait changer quelqu’un… Comme lui m’avait déjà vu à l’œuvre dans un tout autre style. Quand je disais qu’on était pas facile à vivre. Je pris une gorgée de bourbon, comme si je buvais à ce fait indéniable.

Bref, tout ça pour dire que Johnatan appréciait nos conseils. Billy déclara alors qu’il fallait bien se serrer les coudes.

-Et c’est avec plaisir qu’on t’aidera si tu en as besoin.

On en vint à des questions plus… métaphysiques ? Pourquoi L.A. et comment L.A., en tant qu’entité vivante, fonctionnait. Ce qui avait amené Johnatan ici était un rêve saupoudré de quelques encouragements de la part de ses proches. Comme Billy le disait si bien, c’était sa force. Et moi, je fis 1+1 avec une chanson à moitié en français qu’il nous avait proposée au Dizzy.

-Ah ! C’est pour eux la chanson que tu as chantée au Dizzy. Celle en deux langues ? C’était un remerciement en fait. Je comprends pourquoi je t’ai sentis ému alors.

On donna un peu tous notre rapport à L.A. Je lui donnai mes surnoms, mon statut. Johnatan prétendait ne pas s’être foulé pour Nameless.

-Un surnom trop réfléchi ne marche jamais. Il faut que ça vienne des tripes.

Quant à mon Désert, Billy ne voulait pas que j’y emmène Johnatan… Je savais qu’il me disait, en vrai, de ne pas l’initier à l’héroïne. Je souris à Billy.

-Je peux atteindre le Désert différemment. Et l’emmener avec moi. En toute sécurité.

Ce fut là que Marc Canter s’approcha de notre table, un carnet pour prendre les commandes en main. Il nous sourit.

-Vous voulez manger quoi, les gars ?

La discussion avance bien entre nous. Il semblerait que j'ai tapé dans l'œil de Cash. Il semble ok avec Billy pour m'inclure dans leur monde, ce qui est un honneur pour moi. Puis, on vient à parler de la production des chansons. Avec Billy, on explique qu'on a besoin d'écrire, contrairement à Cash qui lui laisse son esprit écrire pour lui. Je viens à parler de mon boulot en solitaire. En effet, c'est moi qui écris tout. Même si Scott m'aide.

Disons que j'ai trois profils différents qui travaillent avec moi. Scott, mon bassiste, bosse beaucoup dans son coin pour m'aider à produire. Il s'investit vraiment, Lance mon guitariste lui copie ce que je lui propose, mais est très franc en me disant clairement si c'est de la merde, par contre, il me laisse me démerder seul. Et Ben lui... Il n'en a  juste rien à faire, tant qu'il peut taper, il s'en fiche.

On vient ensuite à parler de Brent, Billy m'explique qu'il a eu du mal avec son ancien manager, alors que Cash lui à du mal avec la nouvelle. Je leur souris quand ils me disent que je n'aurai pas de soucis avec Brent.

Disons que quand je vois Brent, j'ai l'impression d'avoir un deuxième papa en face de moi, c'est le même que lui.

On vient à parler de l'article de Guitar&Pen à mon propos, au début, je crachais mon venin, Cash me conseille de ne pas frapper, je le fis rire quand je disais que je ne me battais pas et que j'étais taillé comme une chips, mais Billy qui a le même gabarit que moi, lui me dis que même l'homme le plus maigre du monde, très énervé pouvait être une bombe atomique, je le regarde en souriant.

Peut-être, mais j'évite au maximum ce genre de choses, après tu as trop d'emmerdes derrière.

Puis je dis que j'étais honoré de recevoir des conseils de la part de Cash et Billy. Et ils me disent que ça leur fait plaisir et qu'il faut se serrer les coudes dans le métier.

Je prends note, merci les gars !

On arrive sur une question pourtant si simple, mais qui donnera toujours différentes réponses, pourquoi L.A ? Pourquoi ici et pas ailleurs ? J'explique toutes mon histoire, ma chute et ma remontée grâce au rêve de mon père et mes amis, Billy lui semble ne pas savoir ce que ça fait de perdre des parents qui t'aiment, dans ma tête ça fait 1+1 et je comprends que lui n'a pas eu des parents faciles à vivre.

C'est ça qui fait la vie, ce sont les choix qu'on fait, les personnes qu'on côtoie, tu as tes raisons pour te lancer ici plutôt qu'ailleurs, moi aussi, Cash de même et c'est ça qui est beau et triste à la fois.

Puis Cash comprend pourquoi j'ai chanté en français et en anglais, je le regarde en souriant.

Et oui, vu que j'ai des amis à Blackpool et à Paris, j'ai fait en sorte que ma chanson soit comprise par tous !

En effet, même si les gens ne comprenaient pas le français, il semblerait que j'ai réussi à transmettre mes émotions puisque Cash les a sentis.

Puis Cash vient me parler de son désert, mais Billy ne semble pas trop pour, je ne comprends pas tout, mais bon, de toute façon, je n'aime pas les grosses chaleurs.

Alors, il faudra y aller la nuit dans le désert. Je n'aime pas trop les grosses chaleurs, je préfère le froid !

Puis le serveur vient à notre table pour commander.

Une autre blonde avec un burger ! Saignante la viande s'il vous plait !

Johnatan appréciait nos conseils même si Cash déclara que notre parole n’était pas parole d’Evangile. Peut-être pas mais on était passé par là avant Johnatan. Notre expérience était quand même solide et il y avait certaines choses dont nous étions quand même certain.

On parla un peu de notre façon de fonctionner à tous en ce qui concernait le processus de création. Des façons différentes pour un même résultat : le meilleur rendu possible. Johnatan disait avoir l’aide de son bassiste pour composer mais qu’il faisait, en général, les choses tout seul. J’hochai de la tête pour confirmer les dires de Cash avant que Johnatan n’explique un peu mieux comment fonctionnait chaque membre de son groupes. Ils étaient tous différents, en fait.

-Le principal c’est que vous vous y retrouver tout dans ce processus.

The Lightening était unique. C’est ce que je lançais. En réalité, chaque groupe était unique.

Des critiques de Moriarty, on passa aux managers. Ma relation avec Lenny était parfois conflictuelle ce dont Cash était bien conscient. Je savais aussi qu’il avait un peu de mal avec Samantha. C’est pour ça qu’on avait trouvé un certain équilibre en ayant deux managers. Ainsi, personne n’est content mais personne n’est entièrement déçu. Johnatan, lui, était heureux avec Brent Hughes qu’il considérait un peu comme un second père.

-C’est vrai que Brent n’est pas du genre stressé. Tu as de la chance d’être tombé sur le bon du premier coup.

Cash nous rappela que la violence n’était pas la façon la plus intelligente de répondre aux critiques mais Johnatan n’était pas du genre violent, de toute façon. Il disait que ça ne faisait qu’amener des emmerdes. C’est vrai. Mais, parfois, c’était plus fort que moi que de me laisser aller. Je voyais rouge et puis je frappais. Je ne me contrôlais pas.

Nameless était, apparemment, quelqu’un de posé qui aimait avoir des conseils. Il appréciait les nôtres. Il pouvait compter sur notre aide pour se diriger dans la jungle de Los Angeles. Car L.A. attire des gens, les tests, les mets à l’épreuve… Pour survivre à ça, il fallait du cran mais, aussi, savoir écouter les enfants de cette ville. Comme moi qui avait été adopté. Et comme Cash qui venait d’ici.

Ce qui nous fit, alors, parler à tous de nos parcours. Tous les trois on avait des parcours différents qui menaient tous ici, à L.A.. Le jeune homme ne regrettait pas son chemin. Il fit une remarque sur la vie. J’hochai de la tête. Les choix. C’est ça qui détermine la suite. Et Johnatan avait choisi L.A.. Un choix qui, pour le moment, était payant. Et il avait tenu à remercier les gens qui l’avait poussé à faire se choix dans une chanson à son concert. Une chanson en deux langues. Pour être certains que tous les gens qui l’avait aidé comprennent. J’aimais cette symbolique encore une fois.

Cash nous parla alors de ses surnoms. Le Shaman était sans doute celui qui le représentait le plus. Tout comme Nameless représente bien le personnage incarné par Johnatan. Des surnoms qui venaient des tripes. Je n’en avait pas moi en dehors des sobriquets inventés par les journalistes. J’étais Billy Lighter… Parce que sur scène, c’est moi que j’exposais. Je ne savais jouer rien d’autre. Bien que, en soit, Billy Lighter est ce que la vie à fait de William Lighter. Une grosse boule d’émotions destructrices.

Quand Cash parla du Désert, je ne pus m’empêcher de mettre en garde mon guitariste et éviter qu’il ne fasse prendre le mauvais chemin à Johnatan. Il affirma qu’il pouvait atteindre ce Désert de façon différente. Johnatan lui, pensait bien qu’on parlait d’un vrai Désert ce qui me fit sourire. Il n’était pas encore habitué au langage métaphorique de Cash.

-Dans le Désert de Cash, il n’y fait chaud que si tu en as envie…

Je n’en dis pas plus parce qu’on vint prendre nos commandes. On commande tous quelque chose afin de pouvoir profiter un maximum de cette soirée.