Je n'ai pas de passé, sauf si grandir dans un orphelinat géré par des nonnes en plein milieu des champs de maïs de l'Indiana, ça compte... Mais ça ne compte pas pour moi: déjà enfant, j'en avait rien à foutre de toutes ces prières qui ne me tiraient quand même pas de ce trou à rats. Et pourtant, c'est pas faute d'avoir essayer, au début...
On m'a abandonnée là alors que j'avais à peine quatre ans. Je ne sais pas qui sont mes parents, ni d'où ils venaient. Aucun repère pour me construire alors j'ai choisi de me définir à partir du néant plutôt que de faire comme les autres filles et de prendre ce bon vieux pote Jésus pour exemple. Non. Les hippies et les peace and love, très peu pour moi!
Alors comme je m'emmerdais, j'enchaînais conneries sur conneries, fuguant, fumant, sans même me cacher, dans les couloirs de l'orphelinat. Les nonnes me haïssaient ou me prenaient en pitié, pensant que j'étais possédée. Et mon physique pourtant encore très sage n'aidait pas.
Jusqu'à mes 16 ans où j'eus envie de changer d'air et fuguai pour de bon. Je laissai alors Meg Tyler à l'orphelinat et me présentais dorénavant comme Delta... Pourquoi? Ça te regarde?!
Je fis pas mal de stop, ce qui s'avéra dangereux. Mais je ne me fis avoir qu'une seule fois, par un camionneur, dans un motel sordide où on s'était arrêté pour la nuit alors qu'il m'avait promis de continuer le lendemain jusqu'à L.A. Surprise et dégoûtée, mais trop forte pour m'apitoyer sur moi-même, je me suis cassée dès qu'il se fut endormi.
Le suivant n'eut même pas l'occasion de bander: alors qu'il passait sa main sur ma cuisse, m'annonçant la couleur, je lui avait glissé une lame de rasoir , dont je ne me séparais plus, sous la gorge, n'oubliant pas de le couper un peu au passage. Il m'emmena jusqu'à L.A., sans broncher.
L.A., cette ville, son ambiance, ses lumières, ses possibilités et ses rêves brisés, c'était encore mieux qu'un orgasme. Et j'en savais quelque chose: on n'avait profité de moi qu'une seule fois sur la route... Le reste du temps, dans les bars à proximité des motels, ça regorgeait de jeunes bikers pas mal du tout! Et j'en avais bien profité. Et chacun de mes péché était un grand "Va te faire foutre!" lancé à la gueule des nonnes de l'orphelinat.
Une autre découverte à L.A., la drogue, et les gens qui vont avec. Ce que je préférais, c'était le Speedball avec ses hauts et ses bas. Et ceux qui se désignaient eux-mêmes comme des "punks". On allait de squats en squats, se faisant jeter ou arrêter puis relâcher par la police.
Je n'avais retenu qu'une seule chose de mon enfance: le solfège. Et un de mes potes de L.A. jouait chaque soir autour de notre feu de camp improvisé dans un pneu. Et un jour, je lui pris sa guitare des mains, imitant ses rythmes particuliers, déstructurés, joyeux même, mais y improvisant mes propres paroles révolutionnaire, en total désaccord avec la musique et pourtant, ça marchait. J'envoyais, en paroles, royalement péter toute organisation établie et prônait l'anarchie!
Je me découvris une voix, même si ma maîtrise de l'instrument restait à travailler. Quant à mes lyrics, ils étaient le résultats du mélange de colère et de Speedball qui coulait dans mes veines.
C'est un jour que je jouais devant le Dizzy Warhol, essayant de réunir assez de thunes pour ma prochaine dose alors que je n'avais même pas pensé à manger depuis 48 heures, que je croisai la route d'un Daniele Ricci, de chez BSC, un peu éméché. Il me paya ma dose, m'emmena en studio et enregistra ma voix la nuit même, pour que je puisse m'entendre. Je n'avais accepté de le suivre qu'à condition d'avoir cette dose, mais quand je m'entendis sur la bande... Ce fut une révélation!
Daniele me dit cash, sans langue de bois, que ma voix et son génie en affaire pourraient rapporter gros, assez pour me payer assez de dope pour 50 overdoses! Reste pour lui à convaincre BSC... En attendant, il me prend sous son aile, ne sachant pas où il mets les pieds...
Quant à mon futur... Qui vous dit que mon cœur ne va pas me lâcher dans une heure?
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"Rock On"