Il faisait nuit noire à Lancaster, Kentucky. Cependant, on pouvait apercevoir une petite lumière, une flamme, qui s'éteignait et s'allumait. La flamme provenait d'un briquet qu'une gamine d'à peu près treize ans tenait dans la main. Elle était dehors, toute seule, vers 2h du matin, et, pyromane, elle cherchait quelque chose à enflammer.
Une heure plus tard, la police sonne à la porte d'une grande maison. Une femme, qui visiblement vient de se réveiller, ouvre quelques secondes plus tard. Alors que ses yeux sont à peine ouverts, elle devine ce qu'on lui apporte : son enfant. "On a trouvé votre fille en train de mettre le feu à une poubelle. On la suspect d'avoir aussi enflammé des affiches publicitaires. Encore." Elle gémit plaintivement. "Encore ?! Allez rentre." Elle en avait marre de cette gosse. "Occupez vous d'elle, madame. Si ça se reproduit, on fera pire que de vous la ramener jusqu'à chez vous." Mais elle ferme la porte. Qu'est-ce qui n'allait pas avec cette enfant ? Elle avait tout ce qu'elle désirait, car l'argent ce n'était pas ce qu'il leur manquait. Et pourtant, elle ne cessait de lui causer des problèmes. Pas étonnant si cette mère n'aimait pas sa fille. À vrai dire, elle ne l'a jamais vraiment aimé, et son arrivé au monde n'était qu'un accident. Un accident qui a empoisonné sa relation avec son mari et les a conduit au divorce. Pourtant, ils étaient deux grands héritiers, ils auraient pu se construire un empire à eux tout seuls. Mais ce malheureux événement à tout gâché.
Peut-être que si elle s'était occupé elle-même de l'enfant pendant ses sept premières années plutôt que d'employer la vielle nourrisse familiale, elle aurait pu apprécier l'enfant. Mais ce n'est pas ce qu'elle avait fait. Au lieu de ça, pendant sept ans, elle se noyait dans l'alcool et le désespoir. La naissance de cette enfant était un tragédie pour elle. Elle était une honte : il lui arrivait encore de faire pipi au lit jusqu'à ses dix ans ! Mais c'était son sang et son héritage sur Terre. Elle devait en faire quelque chose de bien.
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La jeune fille avait désormais seize ans et, allongée sur le carrelage froid de la salle de bain, les yeux fermés, une bouteille de vodka de sa mère à la main, une boite de somnifères ouverte et vide dans l'autre. Le t-shirt trop grand pour elle qui lui servait de pyjama remonté jusqu'à son ventre, laissant ses jambes blanches et nues repliées sur un côté exposées. Ses longs cheveux blonds sur son visage et ses épaules. On appelle son nom, mais elle ne répond pas. Elle est bien là par terre, dirait-on. On appelle son nom encore, mais elle ne l'entend pas. Elle n'entend plus rien. La voix se fait insistante, en colère. On lui dit de descendre. Mais elle ne réagit pas, alors on menace de monter. Et on monte les escaliers, on ouvre la porte de sa chambre, mais elle n'y est pas et on l'appelle encore, mais sur un ton plus inquiet cette fois. On ouvre alors la porte de la salle de bain, et on la voit, étendue pas terre, inconsciente. Et on crie son nom, encore.
Internée depuis trois jours à l'Eastern State Hopital, hôpital psychiatre situé à Lexington, Kentucky, l'adolescente refusait de manger et de prendre ses médicaments. Elle provoquait le personnel, mais avant tout, exprimait régulièrement sa rage et son mécontentement de se trouver ici.
Mais dans le bureau du psychiatre, elle était beaucoup plus calme. Elle gardait néanmoins cette expression faciale qui exprimait la colère et le refus de coopérer.
- J'en ai vu beaucoup des jeunes filles comme toi passer ici, dit-il à sa patiente. Ne crois pas que tu m'auras. J'ai l'habitude des gens comme toi.
Elle ne répondit pas, mais releva le menton, pour montrer qu'il n'était pas digne d'une réponse. Trois jours qu'elle était là, trois séances pendant lesquelles elle n'avait rien dit.
- Il y a écrit dans ton dossier que tu consommes de la drogue et de l'alcool en quantité depuis un moment maintenant, continua tout de même le docteur. Et tu as fait une tentative de suicide la semaine dernière. Tu ne penses pas que tout ça est lié ? Qu'il y a un problème, et qu'il faut savoir quelle en est la source ?
Mais la patiente continuait d'ignorer le médecin.
Changement de décor. Elle n'est restée à peine une semaine au Eastern State Hopital que déjà elle changeait d'établissement. Sur ordre de son père, apparemment. La voilà donc dans un centre de soin psychiatrique privé, ignorant son emplacement exact. Mais l'endroit était beaucoup plus propre et luxueux, avec moins de monde. L'odeur était beaucoup moins dérangeante et l'ambiance légèrement plus calme. Dans deux jours, ce serait son anniversaire.
La porte du cabinet s'ouvre et laisse sortir la jeune fille de dix-sept ans. Plusieurs mois se sont écoulés depuis son anniversaire. Depuis qu'elle a vu sa mère, un visage familier, n'importe qui. On l'avait complètement oublié ici. On l'avait abandonné ici. Mais elle n'en avait que faire. Ce n'était pas parce qu'elle voulait revoir ses parents ou ses "amis" qu'elle voulait s'échapper. C'est pour le fait de s'échapper qu'elle voulait s'échapper. Aller à l'encontre de l'autorité. Sa nature. Car elle venait d'être diagnostiquée sociopathe par son médecin. En tout cas elle venait de l'apprendre. Au fond d'elle-même, elle le savait déjà. Dans la semaine de son arrivée, elle contrôlait et manipulait déjà les patientes les plus faible qui voyait en elle un leader déjanté. Il lui fallut peu de temps pour enrôler les autres. Evidemment, il y en avait qui étaient contre elle, qui lui faisait face. Et elles se bagarraient souvent. Elle avait semé la zizanie comme personne, et malgré son attitude imprévisible, le personnel la connaissait par coeur. Et elle aussi, elle connaissait le personnel par coeur. Mais plus important : elle connaissait cet endroit par coeur.
Elle avait tenté de s'échapper plusieurs fois, mais on l'avait vite rattrapé ou prise en flagrant délit et balancé dans la chambre d'isolement. Mais cette fois, elle avait réussit. Elle était sortie par les souterrains, la nuit, couru jusqu'à la grille d'entrée et l'avait escaladé assez facilement. Puis elle avait couru, couru, couru, jusqu'à la route et avait était prise en stop par une voiture. Une femme la conduisait, bientôt vielle, elle avait l'air d'avoir conduit toute la nuit. Elle ne demanda rien à la jeune fille qu'elle venait de prendre, seulement où elle voulait aller. "Le plus loin possible." avait-elle répondu. La femme lui dit qu'elle allait à New-York, pas plus loin. La blonde s'en contenta donc.
Arrivée à New-York, elle faisait les poches pour avoir un peu d'argent. Elle l'utilisa pour téléphoner à son père et lui demander d'organiser sa sortie de l'hôpital administrativement, pour que la police arrête de la chercher. Elle obtint ce qu'elle voulu, mais elle ne savait pas où aller, elle ne connaissait personne. Elle ne tarda pas à connaitre un dealer qui accepta de l'aider en échange évidemment de services qu'une belle jeune fille comme elle pouvait lui faire. Au fils des semaines, elle réussit à se faire un petit montant d'argent qu'elle conserva. Une nouvelle idée avait germée dans sa tête : rejoindre L.A. C'était à l'autre bout du pays.
Los Angeles, elle en avait rêvé, et elle y était enfin. Elle avait fait la route avec les seuls vêtements qu'elle avait sur elle, un peu d'argent et son fidèle couteau qu'elle a dû utiliser à plusieurs reprises pour se défendre. Elle se nourrissait avec ce qu'on lui donnait où ce qu'elle prenait, trouvait refuge chez des gens pour dormir le soir ou ne dormais pas du tout. Mais maintenant, elle était arrivée. Elle rêvait de devenir mannequin, ou actrice, ou les deux. Grâce aux rencontres qu'elle avait faites sur la route, elle avait pu s'approvisionner en drogues, en musique, en rumeurs et en connaissances. On lui avait donné une adresse à Los Angeles, et elle s'y rendait.
Deux ans qu'elle est ici désormais. Bien qu'elle aurait pu choisir la voie du mannequinat qui, certes était difficile mais pouvait s'avérer être une bonne idée, elle a préféré la voie trouble et sans filets, comme d'habitude, la voie qui lui semblait la plus facile. Elle s'amusait à draguer des gens dans des bars, aller à des fêtes, des concerts, et essayer d'enter en contact avec des gens importants, pour se faire un nom elle aussi, une réputation. Fondée sur quoi ? Rien spécialement, juste ses contacts. Elle voulait lier son nom à la musique. Mais être dans un groupe comportait trop de responsabilités, et elle s'en lasserait vite. La meilleure idée était donc de suivre un groupe en particulier, de se faire repérer, de devenir proche avec le chanteur (ou le guitariste), très proche, puis faire presque partie du groupe en tant que membre, mais n'avoir aucune réelle utilité, parce qu'elle n'avait pas de talent spécifique. Mais elle aimer contrôler et diriger. Donc peut-être qu'elle pourrait faire ça. Elle se ferait voir avec le groupe, deviendrait célèbre pour être la copine du frontman, on la reconnaitrait dans la rue, on la verrait dans les journaux, on lui ferait des faveurs. Et elle se congratulait pour être aussi intelligente.