La nuit venait à peine de tomber lorsque j'étais sortis prendre l'air. J'errais sans réel but dans cette immense ville, dissimulé de tous et toutes par la légère noirceur du ciel. L'air humide de L.A. emplissait mes narines d'un doux parfum, dilemme complexe de cocaïne, sexe, alcool, pollution. Bienvenue à L.A. Passant devant une église où sortait toute une jolie famille de négro. Ils avaient l'air heureux eux, plus que moi. Oh, je n'avais rien contre les afro. Mon oncle était issu d'un mariage afro, enfin j'crois. Ca ou alors il avait abusé des UV.
Avançant vers downtown, j'sortis mon paquet de Lucky Strike. J'en avais pas tiré une depuis ce fameux baiser au B&G. Je pense que je venais à peine de comprendre l'intensité de ce moment que nous avions partagés Alexie et moi même. J'étais pas amoureux! Enfin j'pense pas. Mais elle me plaisait grave. Sa façon de sourire, le léger plissement de ses yeux lorsqu'elle riait et sa façon de tenir son verre de vin. D'une main d'experte et pourtant fébrile comme si elle n'avait jamais bu de vin de toute sa vie. Bon, son passé oblige.
J'avais attaché mes cheveux en un chignon serré, poser sur mes yeux des lunettes de vue que je ne portais que très rarement, aux verres larges assez année 60. Une simple chemise un peu trop ouverte, et un froc banal accompagné de ses Levi's d'un cuir brun légèrement délavé. Comme souvent, le noir entourant mes yeux verts faisait fuir le regard des passants et c'était pas plus mal. J'avais de toute façon les yeux baissés, évitant les merdes de chien, les flaques et les emmerdes. Je savais pas où j'allais mais j'y allais et c'était certain.
Puis cette salope arriva. De ses clip clap sur les capots des bagnoles garées là, sans aucun respect pour la propriété privée, comme si tout lui était dû sous le prétexte puérile qu'elle voyageait beaucoup. Elle imbibait mes yeux de fausses larmes, mettait à rude épreuve le feu de ma cigarette et glaçait mes bras d'un froid mortel. Les passants la fuyaient et moi aussi. Sans trop savoir comment en fuyant la pluie, j'entrais dans un Centre Commercial aux allures neutres, acceptant aussi bien le middleclass que le richou un peu bobo qui se sentirait au dessus de Beverly Hills et son groove.
J'aimais en fait que peu le monde auquel j'appartenais. Probablement car la solitude ne me seyait pas. Il y avait dans ce centre commercial, quelque chose de rassurant. Autre qu'un toit contre la pluie. Il y avait aussi beaucoup de monde, j'aurais aimé y voir cette foutue nana qui me rentrait dans la peau au fur et à mesure. La seule pour qui je ferais les choses bien. Prenant le temps de m'appeller Galilée, Newton, Copernic pour son corps galaxie, nébuleuse, univers.