Tôt ce matin, j’avais pris un vol, sur un coup de tête alors que j’aurai dû me préparer à rencontrer un psychologue suite à ma conversation à sens unique avec Jordan. J’étais encore fortement ébranlée par les évènements mais plus encore par la manière cavalière avec laquelle mon petit ami m’avait refilé à un spécialiste de la santé mentale. Il m’avait donné l’impression d’être une patate chaude avec laquelle il ne voulait pas jongler, probablement parce qu’il en avait assez de celles avec lesquelles il devait le faire chaque jour. Entre le boulot et Grant et ses propres démons, mes bobos et moi ne pesions pas lourd dans la balance de ses préoccupations.

Depuis, j’avais le sentiment de l’importuner chaque fois que je regardais en direction d’une porte ou que je refermais une fenêtre. Je n’osais plus ne serait-ce que soupirer par peur de me faire dire que mes craintes étaient débiles. Certes, elles l’étaient. Je savais que je n’avais aucune raison de croire qu’un voler s’introduise à nouveau dans notre demeure, je me le répétais moi-même, comme une grande fille.

Si seulement Jordan m’avait laissé m’exprimer !

Il m’avait fallu toute ma force et mon courage pour amorcer la conversation, cette nuit-là. Je voulais en venir à lui dire que je m’en voulais de ne lui avoir apporter tout mon soutient contre Ward sans sa quête de le discréditer comme père. Si je l’avais fait, Grant ne serait jamais allé vivre chez Ward et n’aurait pas rapporter de flingue chez nous en croyant cela normal. Je me sentais coupable et ma culpabilité m’empêchait de passer par-dessus le choc traumatisant de Grant tirant de sang froid sur un voleur.

Voilà pourquoi j’avais prit un vol pour San Quentin. Je n’avais pas douze heures à mettre sur la route, en avion c’était beaucoup plus rapide. J’avais besoin de confronter la source de mon mal-être, au risque d’en revenir encore plus troublée. Mais si je n’essayais pas, j’allais finir au bout d’une corde, je le sentais, tant tout me rongeait de l’intérieur.

San Quentin avait l’air triste vu de l’extérieur et de l’intérieur, ça ne s’arrangeait pas. En même temps, ça ne devait pas avoir l’air d’un beach club faute de quoi, les gens y résidents feraient tout pour y demeurer le plus longtemps possible. J’avais dû remplir une fiche visiteur, laisser mon sac à main, mes boucles d’oreilles et autre bijoux et même la ceinture de mon jeans dans un casier verrouillé à l’entrée puis on m’avait donner un badge mentionnant que je n’étais que de passage avant de me faire passer par plusieurs portes séparant l’accueil de la prison. Je devais attendre chaque fois qu’ils verrouillent celle que nous venions de franchir avant qu’ils n’utilisent une nouvelle clé pour déverrouiller la porte devant laquelle nous nous trouvions. Chaque fois, j’avais l’impression de m’enfoncer dans les confins de l’enfer et que petit à petit, je perdais un peu de mon âme et de mon innocence.

Après ce qui me sembla être un trajet sans fin, on me désigna une pièce faite sur la longueur, comprenant plusieurs espèce de cubicule ou de casiers, tous munis d’un cornet de téléphone accroché contre le mur. Il y avait déjà des gens installés et qui discutaient avec une personne détenue, de l’autre côté d’une vitre. Certaines avaient des graffitis et, alors que je me dirigeais vers le siège qu’on m’octroyait, soit le combiné numéro cinq, une femme s’emporta dans une langue qui me sembla être de l’espagnol, se leva et cracha dans la vitre. L’homme de l’autre côté lui répondit d’un doigt d’honneur avant de raccrocher et de s’en aller, escorté par un gardien.

- Qu’est-ce que je suis venu faire ici ?

C’était un question que j’aurais dû me poser avant de prendre mon vol mais, c’était trop tard. J’y étais et, Ward Fleming venait de s’installer sur le siège en face de moi, une vitrine pas rop net nous séparant.

- Je… Salut…

Je me sentais complètement ridicule et je n’avais trouvé mieux à dire que de le saluer, bêtement, comme si je venais de retrouver un ami pour diner. Ne manquait que le verre de vin et le serveur qui venait nous demander alors que nous mastiquions notre première bouchée, si tout était à notre goût.

- J’avais besoin de te voir, je… Est-ce que tu vas bien ?

@ Billy Lighter

Je manquais de sommeil… Il faut dire qu’il était difficile de dormir sur ses deux oreilles quand Thomas Fleming s’amusait à utiliser les autres détenus pour mettre fin à mon existence.

Il jouait à ce petit jeu depuis mon arrivée. J’avais déjà reçu des coups mais je savais qu’il cherchait désormais à en finir. Je savais qu’il pouvait rallier n’importe qui à sa cause. Je ne savais pas réellement comment il s’y prenait… Je crois qu’il choisissait sa méthode au cas par cas… La corruption, les menaces,… C’est autant de techniques que mon père aimait utiliser.

Je ne pouvais pas ouvertement contrer ses attaques. Juste être vigilent. Sauf que, dernièrement, c’est mon compagnon de cellule qui était devenu nerveux… Si avant c’était un véritable moulin à parole au point que je l’avais tué plusieurs fois dans ma tête, désormais, il était plus taiseux et j’avais bien peur que mon père s’était amusé à le menacer pour qu’il me tue dans mon sommeil.

Alors je ne dormais plus.

Et lui non plus.

C’était pénible. Au point que je souhaitais que le procès se passe le plus rapidement possible. Il n’y avait pas encore de date mais je savais de la part de mon avocat que ça n’allait pas tarder.

Bien ! Plus vite ça sera l’heure du procès, plus vite je serais sorti d’ici.

En attendant, je n’avais qu’un seul moyen pour éliminer les sbires de mon père : foutre la merdre. Il suffisait, pour ça, de faire croitre des rumeurs afin qu’ils se retournent les uns contre les autres. Ce genre de chose fonctionnait bien dans les bars. Je me rappelle que j’avais créer une bagarre sans lever le petit doigt au Crazy Ginger sous les yeux impuissants de Leia. Et bien, ici, ça fonctionnait aussi. J’avais envoyé une rumeurs… Deux sbires de mon père se sont battus. L’un est toujours à l’infirmerie dans un état critique. Un de moins. Et personne pour savoir d’où venait ladite rumeur.

Mais ça n’éliminait pas les gens assez vite et mon manque de sommeil me rendait de plus en plus agressif.

Il fallait que je tienne.

-Ward… Tu as de la visite.

Je levai les yeux de mon magazine qui avait encore élu Samantha Ricci comme manage de l’année… Elle avait la belle vie, cette belle traitresse… Pas sûr que ça plaise à son mari…

-De la visite ? Mon avocat est venu hier…

Et je doutais qu’il se tape deux jours d’affilé tout le trajet jusqu’à Saint Quentin.

-Ce n’est pas ton avocat. Mais une femme. J’ai déjà oublié son nom alors bouge…

Je me levai soudainement curieux de savoir qui était venu jusqu’ici. Ce n’était pas l’avocat de Sky. Parce qu’on m’aurait prévenu si c’était l’avocat de ma femme. Ce n’est pas non plus Sky parce que, sinon, aussi stupide soit Bob, il m’aurait dit qu’il s’agissait de ma femme.

C’était quelqu’un d’autre.

Mais qui ?

Je n’avais aucune réponse à cette question.

Riley ? Peut-être qu’elle était venue jusqu’ici pour me cracher sa haine, qui sait ?

Les gardiens m’escortèrent jusqu’au parloir et je découvris que la femme en question n’était autre que Nell.

Intéressant.

Mais loin de moi l’idée de lui sourire. Pas avant de comprendre pourquoi elle s’était déplacée jusqu’ici.

Je m’installai face à elle. Une vitre nous séparait. Je pris le téléphone.

Elle me salua en bafouillant un peu.

-Bonjour, Nell…

Elle semblait mal à l’aise… En fait, depuis que j’avais récemment revu Nell, elle m’avait toujours semblée mal à l’aise. L’effet Jordan ? Peut-être bien. Je savais que le flic n’aimait pas que je dise le moindre mot à sa petite amie. Comme s’il s’agissait de sa propriété. Il faisait ça aussi avec Grant. Alors que, techniquement, Grant est à moi.

Bref, Jordan est prompt à voir chez les autres des défauts qu’il possède lui aussi.

Nell déclara avoir besoin de me voir. J’aimais ce que j’entendais. J’aimais que les gens ressentent le besoin de me voir. Dans mes nuits d’insomnie, j’en venais souvent à me demander si Sky pensait à moi. Si je lui manquerais.

J’espérais que oui. J’espérais qu’elle souffrait de mon absence qu’elle avait provoquée.

Nell demanda si j’allais bien. Je fis un geste vers mon visage marqué par les cernes et quelques bleus.

-Disons que j’ai vu de meilleurs endroits où vivre. Mon père me fait vivre un enfer… Apparemment, il ne m’apprécie pas beaucoup. Ou alors, il aime simplement me taper sur la gueule comme il le faisait avant. Sauf que, désormais, il préfère que d’autres le fassent pour lui…

Je soupirai en haussant des épaules.

-Pourquoi est-ce que tu veux me voir, Nell ? Tu n’as pas l’air d’aller bien… On dirait que tu as autant dormi que moi. Sans t’offenser, bien sûr.

Je parlais calmement d’une voix bien moins monocorde que d’habitude. Si Nell était ici, j’avais peut-être une occasion qu’elle croit, elle, que je n’étais pas aussi pire que tout le monde le pensait. Mon avocat compris.

@ Billy Lighter

Quand je vis Ward s’installer sur le banc de l’autre côté de la vitre et prendre le combiné dans sa main pour le porter à son oreille, je ressentis une grande bouffée de chaleur et sentis presque le sol se dérober sous mes pieds. Je ne devrais pas être ici, ce n’était pas une bonne idée. Pourtant, j’y étais et je ne pouvais plus reculer.

Je déglutis et, tremblante, je pris le combiné et le portais moi aussi à mon oreille avant de bredouiller quelques mots presque inaudibles. J’avais la gorge sèche comme si je venais d’avaler deux pelletées de sable et mes main étaient en alternance très moites puis glacées.

Je lui demandais s’il allait bien, pourtant, la réponse me sautait aux yeux.

Ward n’avait pas bonne mine bien que le contraire m’aurait surprise. On ne venait pas passer du bon temps en prison et de ce que j’en savais, les batteurs de femmes n’étaient pas de ceux qui étaient le plus appréciés, autant que ceux qui s’en prenaient aux enfants.

Il me répondit d’un ton détaché que son père lui faisait vivre un enfer entre les murs de San Quentin en remontant d’autres détenus contre Ward. C’était triste mais était-ce que qu’on pouvait appeler de retour de balancier ?

Puis Ward me demanda pourquoi j’étais ici avant de souligner que je ne semblais pas, moi non plus, au sommet de ma forme. Je figeais, la bouche entre-ouverte, ne sachant pas quoi répondre. En fait, ce fut comme si je ne n’avais pas prévu que Ward pouvait lui aussi me poser des questions ce qui était parfaitement débile, pour reprendre un mot qu’on m’avait fait avaler dernièrement et qui ne passait toujours pas.

- Disons que…

Mon index passa sur le fil métallique reliant le combiné au mur, j’en constatais la rigidité surprenante. On ne devait pas être en mesure de l’arracher du mur et s’en servir pour étrangler le gardien qui faisait le guet, derrière soi. Si moi, la fille la moins violente sur cette terre, pouvait imaginer une telle situation, c’est que forcément, quelqu’un avait déjà tenté le coup.

- Tu as raison, je ne vais pas bien et… Et j’avais besoin de… Tu… Tu.. Tu as laissé Grant se servir d’un flingue, sérieux ? Il a tiré sur un intru l’autre nuit et… Et… Et je n’en dors plus parce que… On dirait qu’il n’y a que moi qui vois que ce n’est pas normal ! Et je ne suis pas débile, ok ? Mes émotions ne sont pas débiles !

Je craquais comme une porcelaine qu’on aurait laissé tomber sur le sol. J’en voulais à Ward d’avoir laisser Grant s’amuser avec une arme comme s’il s’agissait d’un jouet. J’en voulais à Jordan de minimiser l’acte et de le récompenser par des leçons de tire dans un stand et je m’en voulais de me sentir coupable de ressentir de la culpabilité pour avoir laisser les choses aller comme si tout était normal.

Je m’attendais à ce qu’il e foute de ma gueule, qu’il rigole à gorge déployée et s’il n’y avait pas cette vitre entre nous deux, qu’il me nargue d’une chiquenaude sur l’épaule, ou je ne sais pas quoi. Je me doutais bien que Ward n’allait pas prendre  mon partit contre Grant et se dire outrer du comportement de son fils. Pourtant et aussi étrange que cela pouvait être, depuis notre toute première rencontre, Ward avait toujours été celui qui décryptait le mieux mes émotions et qui se retrouvait toujours près de moi quand j’avais besoin d’aide. Ça devait être pour ça que je me trouvais ici aujourd’hui.

@ Billy Lighter

Nell Harris.

Je ne m’attendais pas à avoir sa visite surtout ente les quatre murs de la prison de Saint Quentin. Son malaise était plus que palpable. On dirait qu’elle se demandait ce qu’elle fichait ici. Pourtant, elle avait eu l’occasion de se poser la question. Ce n’est pas comme si Saint Quentin était à côté de L.A.. Il y en avait des kilomètres à faire avant de venir ici.

Elle hésita, bafouilla et me demanda sa j’allais bien. C’était évident que je ne vivais pas ma meilleure vie. Par chance, je savais que mon séjour ici était temporaire. Je devais, donc, subir… Ma vengeance viendra quand mon père apprendra que je sors de prison alors que lui continuera d’y croupir jusqu’à sa mort.

Il allait râler. Il en fallait déjà peu pour qu’il râle alors j’étais sûr qu’il allait l’avoir mauvaise.

Mais assez parler de moi. Je voulais savoir pourquoi Nell était venue jusqu’ici pour venir me voir. Je doutais sincèrement que Jordan l’avait laisser aller sans broncher… Soit il le savait et devait râler, soit il ne le savait pas. Ou alors, lui et Nell n’était plus en couple. Vu ce que j’avais vu chez la psy de Grant, ça ne serait pas bien étonnant.

Elle hésita encore… Elle semblait chercher ses mots. Je la fixai droit dans les yeux comme si je cherchais à savoir avant qu’elle me le dise les raisons de sa visite.

Mais elle finit par se lancer. Elle disait ne pas aller bien. Ça se voyait. Sa simple présence ici témoignait de ça.

Ses phrases ne semblaient jamais trouver de fin et je plissai des yeux pour essayer de comprendre son discours. Elle en vint alors à Grant. Grant à qui j’avais appris à se servir d’une arme. Chose plutôt utile quand on est le fils de Ward Fleming. Mais je ne m’attendais pas à ce que Nell me dise que Grant avait tiré sur quelqu’un.

Est-ce que ça m’étonnait ? Non… Pas vraiment. Je savais que le gamin avait ça en lui. C’était bien pour ça que je voulais en faire un allié.

Je n’interrompis pas Nell qui, quelque part, venait de me dire ce qu’on refusait de me dire depuis que j’étais incarcéré : la localisation de Grant. Il était, donc, retourné chez Jordan. Ce n’était pas étonnant.

Donc… Grant avait tiré sur un intrus et Nell ne dors plus depuis. Elle pensait que l’acte de Grant n’était pas normal. Elle parla alors de ses émotions qui n’étaient pas débiles… Pourquoi précisait-elle ça ? Pourquoi venir me dire tout ça à moi ?

Je penchai légèrement la tête sur le côté.

-Est-ce que j’ai déjà pensé que tes émotions étaient débiles ?

Je ne lui avais jamais dit ça. Pour moi, les émotions des autres dépassaient souvent mon entendement. Mais c’est très jeune que j’ai compris que la majorité des gens étaient plus comme Nell que comme moi. J’ai juste toujours trouvé que d’être comme moi était mieux. Plus pratique. Bien que j’avais tout de même des émotions. Le panel était juste moins large bien que plus intense.

Si je commençais à dire que les émotions des autres sont débiles, je n’en finirais plus de le dire à chaque foutu individu que je voyais. Alors, je ne disais rien. Je vivais avec ce décalage et j’en tirais avantage.

-J’ai appris à Grant à se servir d’une arme pour qu’il se rende compte que ce n’est pas quelque chose qu’on utilise à la légère. Il était toujours avec moi quand il tirait. En dehors de ça, il n’avait pas d’arme.

Non. Je n’allais pas donner une arme à un gamin dont je n’avais pas encore entièrement acquis la confiance. Je n’étais pas stupide. Je ne tenais pas à crever aussi bêtement.

-Comment a-t-il eut une arme ? Il a tiré sur un intrus, tu dis… L’autre était armé ? Parce que si c’est le cas alors il valait mieux l’autre que Grant.

Grant avait tiré sur un intrus et Nell en était bouleversée. Mais au lieu de la joué détaché, je comptais prendre le parti de Nell dés qu’elle m’en aura dit plus.

@ Billy Lighter

Pour me rendre en cachette à San Quentin, il fallait vraiment que j’ai touchée le fond émotionnellement parlant. J’étais à cran, perpétuellement sur le qui-vive et je camouflais tout ça derrière un sourire plastique parce que mon petit ami disait que ce que je ressentais était débile alors que je n’avais même pas pus aller au fond de ma pensée.

Dans une incohérence totale, je balançais en vrac tout ce que je voulais dire à Ward sans vraiment prendre le temps d’aller au fond des choses. J’avais conscience que je disais des trucs sans finir mon idée pour sauter sur un autre sujet avant de me défendre que je n’étais pas débile, mes émotions encore moins !

Étrangement, de voir Ward pencher sa tête sur le côté pour me regarder de manière impassible me rassura. Il n’afficha pas une tête de coucou fraîchement sortie de sa boîte à surprise et surtout, ne sembla pas avoir envie de me dire que je devenais hystérique. Non, il me demanda simplement s’il avait déjà pensé que mes émotions étaient débiles.

- J’en sais rien… Je… Tu… Non ? Tu ne me l’as jamais dit en tous les cas.

Une boule se forma dans mon estomac alors que je constatais que jamais Ward ne m’avait brusqué en parole.

Pas une seule fois.

Jamais.

Cette pensée, en plus de la désagréable sensation de boule d’émotion dans mon ventre, me donna le vertige et même, une bouffée de chaleur. J’en échappais presque le combiné du téléphone que je rattrapais de justesse pour le replaquer contre mon oreille au moment où il justifia avoir apprit à Grant le tire avec une arme pour se rendre compte que ce n’était pas quelque chose à faire à la légère.

Mes yeux s’embrumèrent alors que je les levais vers le plafond puis je rabaissais mon regard sur Ward qui, maintenant, voulait en savoir plus sur ce que je venais de lui raconter. J’inspirais profondément en rassemblant mes pensées. Ce serait quand même mieux de lui expliquer en essayant de formuler de vraies phrases et en utilisant plus de mots.

- L’homme n’était pas armé. Grant lui a tiré dessus quand il l’a vu entrain de fouiller le salon. Je ne comprends pas… Je veux dire, ça aurait pu être moi qui soit dans le salon, Grant a simplement prit le flingue avec lui et il a tiré sur le voleur. Et… Hein ?

Je réalisais qu’il m’avait demandé tout d’abord où il s’était procurer l’arme. Est-ce qu’il en doutait vraiment ? Je n’étais pas stupide au point de croire qu’il n’en avait pas la moindre idée. J’étais sous le choc, un peu perdue, sur le point de me briser comme une porcelaine mais pas encore totalement demeurée.

- Chez toi ! Il l’a dit aux flics qu’il l’avait prise chez toi quand ils sont allés avec Sky prendre ses choses. Tu… Tu savais que Sky… ?

Bien sûr qu’il savait ! Il devait se douter que sa femme ne l’attendait pas sagement à la maison et qu’elle devait même avoir déménagée. Je coinçais le cornet du téléphone entre ma joue et mon épaule et je me penchais vers l’avant en croisant mes bras sur la tablette et j’y posais la tête mais le fil du téléphone n’était pas assez long et le cornet glissa de ma prise pour pendouiller au bout de son câble métallique. Je pris quelques secondes avant de tourner la tête, regarder le combiné se balancer doucement de gauche à droite puis je me redressais et le repris contre mon oreille.

- Pardon… Je n’ai pas l’habitude de tout ça.

Je ne parlais pas que de la visite en prison mais aussi de tout ce qui se passait dernièrement dans ma vie. Tout perdait un petit peu plus de sens chaque fois que je faisais un pas vers l’avant.

- J’essais de trouver ma place mais je commence à me dire qu’il n’y en a pas pour des filles comme moi dans un monde comme dans celui où nous vivons.

Non, je n’étais pas faite pour encaisser autant de désillusions.

@ Billy Lighter

Le discours de Nell allait dans tous les sens… De Grant, au fait qu’il avait tiré sur un intrus à ses émotions qui n’étaient pas débiles… Comme si elle sortait tout ce qu’elle avait dans la tête sans savoir par où commencer. Mais ce que je me demandais c’était pourquoi elle avait fait tout ce chemin pour me dire tout ça… Je pensais qu’elle aurait plutôt parlé à Jordan de ce genre de choses… Était-ce une preuve qu’il y avait un problème dans leur couple ? Peut-être…

Je finirais pas le découvrir.

En attendant, je mis en avant le fait que jamais je n’avais déclaré à Nell que ses émotions étaient débiles. Ma compréhension de certaines émotions était telle que, pour moi, certaines n’avaient aucun sens mais je savais qu’elles existaient chez d’autres.

Et, en général, je m’en servais. Donc, ces émotions « débiles » m’étaient utiles quand elles naissaient chez les autres.

Elle clama ne pas savoir si je lui avais déjà dit ça avant de se dire que, non, je ne l’avais jamais fait.

-Effectivement. Parce que tes émotions ne sont pas débiles…

Et une point pour Ward Fleming ! Un ! S’il n’y avait pas eu la vitre, j’aurais mis ma mains sur la sienne. Là, je ne pouvais que la regarder dans les yeux.

Je vis les yeux de Nell s’embrumer de larmes. Elle semblait à fleur de peau… Était-ce à cause de ce qu’avait fait Grant ? Peut-être… Je savais que la tolérance de Nell à la violence était très basse. J’avais demandé si l’autre homme était armé. Nell confirma que ce n’était pas le cas. Qu’il avait vu l’homme fouillé dans le salon et qu’il avait tiré.

Je lui avais enseigné ça. A tiré le premier. A ne pas hésiter. Je lui avais appris à se servir parfaitement d’une flingue. Et, visiblement, il avait tout retenu et tout mis en pratique.

Un parfait petit soldat.

-Je crois que Grant t’aurait reconnu… Il ne t’aurais pas tiré dessus. Il a sans doute eut peur que l’autre sorte une arme.

Mais la question était : comment Grant a-t-il eut une arme ? Je m’attendais à ce que Jordan ait fait une erreur. Une erreur suffisante pour que je puisse récupérer le gamin à ma sortie. Sauf que c’est moi qui avait fait l’erreur vu que Grant avait pris ce flingue chez moi. Je penchai légèrement la tête sur le côté. Pas tant pour ce qu’elle venait de me dire sur Grant mais pour ce qu’elle venait de me dire sur Sky.

-Non… Je ne savais pas.

Je ne savais pas qu’elle avait quitté notre appartement.

-Je n’ai pas de nouvelle de Sky. Pas de nouvelles d’Heaven. Jusqu’ici, je n’avais pas de nouvelles de Grant non plus. Personne ne veut rien me dire sur comment vont mes enfants. Je m’attendais à recevoir l’avocat de Sky pour le divorce mais ça n’a pas encore été le cas.

Pourtant, je m’attendais à le voir venir… Sauf que ça n’était pas encore arrivé. Je me demandais ce qu’il se passait dans la tête de Sky, actuellement.

Je le saurais bien vite. Quand je sortirais de ce trou à rats.

-Donc, Sky a laissé Grant ramener un flingue chez vous ?

Je roulai des yeux.

-C’est pas malin… Quand j’étais là, crois-moi que je faisais gaffe à ce que Grant n’y ait pas accès.

Nell mit alors le téléphone entre sa joue et son épaule mais le fil n’étant pas assez long, elle perdit notre seul moyen de communication avant de le reprendre rapidement. Ses gestes étaient fébriles. Elle était au bord du craquage. Elle clama alors ne pas avoir l’habitude « de ça ».

-J’imagine que c’est ta première fois…

Elle en vint alors à des réflexions existentielles. Des réflexions qu’elle partageait avec moi et pas avec son petit ami… C’était… Intéressant.

Je penchai légèrement la tête sur le côté me penchant légèrement en avant comme pour avoir une  rapprochement physique entre nous.

Nell pensait, avant, être une agneau dans une bergerie qui n’était que de temps en temps visité par un loup. Désormais, elle se rendait compte qu’elle était un agneau au milieu du repère de loup ce qui n’était pas totalement la même chose.

Et là, elle me donnait l’occasion de l’avoir comme alliée. J’en avais peu. Un de plus ne fera pas de mal.

-Nell… Le monde a besoin de gens comme toi. Tu vois le bon là où les autres ne le voient pas. Tu l’as vu en moi. Quand on était ensemble, j’arrivais à voir que je n’étais pas uniquement celui que mon père m’avait fait devenir. J’étais plus que ça. Si A.J. n’avait pas fait ressortir ce que j’essayais de faire disparaitre à ton contacte… Qui sait ce qui serait arrivé ?

En réalité, je serais resté le même. Je ne pense pas qu’entre Nell et moi ça aurait fonctionné très longtemps. Nell est gentille mais elle n’est pas complètement naïve.

Mais je pouvais lui donner l’illusion que ça aurait pu fonctionner si A.J. n’avait pas mis son grain de sel.

-Grant a probablement plus besoin de toi que de cet impulsif de Keller. D’ailleurs… Il sait que tu es ici, le Keller ?

C’était là toute la question.

@ Billy Lighter

Qu’est-ce que je faisais ici ?

C’était une question sans réponse et, qui plus est, maintenant que j’étais devant Ward, il était beaucoup trop tard pour me la poser. Pourtant, en dedans ce moi, je sentais que c’était la chose à faire, le seul moyen de me décharger de mon sentiment de culpabilité. En le refilant à quelqu’un d’autre, ça me semblait logique sauf que Ward, me souligna qu’il n’avait jamais discrédité mes émotions, quel qu’elles furent.

Ça aurait dû être Jordan !

Ça aurait dû être mon petit ami qui me dise que mes émotions n’étaient pas débiles, que j’avais le droit de les vivre et qu’il m’aiderait à passer au travers. Lui et pas un psychologue !

Plus rien ne faisait de sens dans ma tête et dans mon cœur, il y avait comme un trou qui grandissait à chaque battement. Comment pouvais-je être malheureuse avec l’homme que j’aimais et trouver réconfort auprès de celui que je devais craindre ? Que devais-je comprendre dans tout ça ?

Je débitais des phrases en pensant me sentir mieux mais ce n’était pas le cas. J’étais incapable d’aller en profondeur, même quand Ward me posait des questions sur ce qu’il tentait de comprendre de mon récit. Cette fameuse nuit m’avait fortement ébranlée au point où je ne me sentais plus en sécurité, que je craignais absolument tout et rien tout à la fois.

- Nous n’en savons rien de s’il aurait tiré ou non. Je ne sais pas s’il… Est-ce qu’il a prit le temps de réaliser ce qui se passait ? Tout est allé si vite !

Je savais cependant que Grant avait voulu me protéger et que c’était pour cela qu’il avait tiré. Je ne remettais pas ses intentions en doute. Mais je continuais de croire qu’un enfant de son âge n’aurait dû avoir le réflexe de tirer. Il n’aurait même pas dû songer à prendre une arme pour se défendre !

Ward demanda où Grant avait bien pu se procurer un flingue et ce fut moi qui resta surprise, cette fois.  Il n’allait tout de même pas croire que c’était Jordan qui la lui avait offerte ? Je lui expliquais alors que Grant l’avait ramené de chez lui quand ils étaient allés chercher ses choses ainsi que celle de Sky et je réalisais que j’en disais peut-être trop au sujet de sa femme… de son ex-femme ?

- Je ne peux pas te donner de nouvelles d’elle. Enfin, je ne sais pas si je peux ou ne peux pas mais honnêtement, je n’en ai pas.

Depuis qu’elle était entrée en centre pour femme victime de violence conjugale, je n’avais pas de nouvelles d’elle. Peut-être que Jordan en avait mais si c’était le cas, il ne m’en avait pas parlé.

- Grant a dit avoir prit l’arme dans un tiroir du salon.

Il n’avait pas dit que Sky l’a lui avait remise ou même qu’elle savait qu’il en avait pris une. Ce jour-là, personne n’a pensé vérifier ce que récupérait Grant. Même moi, à son retour à la maison, je n’aurais pas songé à fouiller son sac.

Cette conversation me drainait toute mon énergie et je voulu me coucher sur la petite tablette devant moi, me reposer la tête sur mes bras mais le cordon métallique du téléphone ne suivit pas mon mouvement et je perdis momentanément la communication avec Ward qui me regardait me briser de son côté de la vitre. Je devais être un spectacle lamentable à regarder, lui qui avait besoin de tellement mieux que ça avec ce qui lui pendait au bout du nez.

Je n’avais pas l’habitude de tout ceci au point où je me demandais où était ma place dans ce monde de fou. Même en me dévouant corps et âme à la mission, ça ne suffisait pas à rendre ce monde plus beau. Lentement, je me laissais désillusionner.

Ward croyait pourtant que le monde avait besoin de fille comme moi, que moi j’avais su voir le bon en lui et que si son ex petite-amie n’était pas venue jouer dans ma tête, qui sait comment aurait évolué entre Ward et moi, pour lui. Peut-être que je serais parvenu à tirer le maximum de bien de lui pour qu’il vive une tout autre vie.

Ça me brisais le cœur de l’entendre dire ça ! Comme si c’était une façon de me faire comprendre que je n’avais pas été assez tenace, que je n’avais pas persisté.

Une larme coula le long de ma joue et je levais ma main pour la mettre contre la vitre nous séparant. Je ne pouvais pas croire que l’homme qui se tenait là devant moi allait bientôt être condamné à mourir. C’est ce qui se murmurait partout. La peine ne mort ne devrait pas exister ! Personne n’avait le droit de jouer à Dieu !

Ma main glissa lentement de la vite puis je la ramenais sur ma cuisse tremblante.

- Je ne savais pas moi-même que je viendrais. Je n’aurais pas dû venir ? Je n’aurais pas dû venir…

Je le savais, je n’aurais pas dû venir.

- Je crois que je te devais bien une visite. Toi tu… Toi tu as toujours été là pour me secourir.

Et moi, je ne pouvais absolument rien pour lui.

@ Billy Lighter

Nell disait ne pas être sûr que Grant n’aurait pas tiré si ça avait été elle dans le salon et pas le voleur. Je doutais que le gamin soit capable de tirer sur quelqu’un pour qui il a de l’affection. Et je savais que Grant s’attachait aux gens qu’il côtoyait. Elle se demandait si le gamin avait pris le temps de réalisé ce qu’il se passait. J’haussai des épaules.

-Peut-être… On ne le saura jamais… Peut-être qu’il a vite pris conscience qu’il était face à un voleur et qu’il devait se défendre… Peut-être qu’il a tiré par instinct sans réfléchir…

Je n’étais pas là ce jour-là. Et je ne suis pas dans la tête de Grant. J’ai assez avec la mienne, de tête.

Dans tous les cas, Grant avait bel et bien un flingue et j’appris que c’était chez moi qu’il se l’était procuré quand il était allé chercher des affaires avec Sky… Sky qui avait donc quitté notre domicile. J’appris plus de chose en deux minutes de conversation avec Nell qu’après une dizaine avec mon foutu avocat. Même si elle déclara ne pas pouvoir me donner de nouvelles de Sky… Et que, de toute façon, elle n’en avait pas. Je soupirai…

-Même pas d’Heaven ? Rien ? Dommage…

Quant à l’arme, j’avais déclaré que si j’avais été là, Grant n’y aurait pas eu accès. Nell déclara alors que le petit avait trouvé l’arme dans un tiroir du salon. J’avais des armes partout dans mon appartement. Souvent dans des tiroirs.

-Un tiroir que Grant n’était pas censé ouvrir. Sky savait aussi où se trouvait les armes. Elle devait le surveiller lors de cette petite visite.

Pour moi, c’était la faute de Sky. Bien que si Grant n’avait pas tiré sur ce voleur, Nell ne serait peut-être plus de ce monde. Car, même sans armes, un type peut venir à bout, à main nue d’un gamin de 10 ans et d’une jeune femme.

Nell perdit momentanément le téléphone. Ses gestes étaient fébriles. Elle paraissait exténuée et au bord du craquage. Elle doutait de sa capacité à trouver sa place dans un monde qui, apparemment, était devenu bien trop sombre pour elle. Je n’avais jamais vu Nell comme ça… Autant douter de ses convictions. Elle qui, autrefois, se croyait capable de changer Ward Fleming. Désormais, elle n’était pas sûr d’être encore utile à quoi que ce soit. Et je ne savais pas si ses doutes étaient là à cause de Grant ou bien de Jordan qui ne l’avait pas accompagné pour cette petite visite… Pas sûr qu’il soit au courant, d’ailleurs.

Je la rassurai cherchant à entrer un peu plus dans sa tête. Je déclarai que le monde avait besoin de gens comme elle. Je lui parlai, aussi, de notre ancienne relation. Celle qui avait couper court à cause d’A.J.. J’ajoutai que Grant avait besoin d’elle avant d’essayer de savoir si Keller savait qu’elle était venue jusqu’ici.

Elle mit sa main sur la vitre laissant couler une larme sur sa joue. Comme si elle essayait de me toucher. J’allais mettre la mienne mais la sienne glissa le long de la vitre.

Elle ne répondit pas réellement à ma question. Elle déclara simplement qu’elle était venue sur un coup de tête et semblait le regretter. Même si… Elle disait qu’elle me devait bien une visite.

-On est lié. C’est pour ça. Je suis toujours là pour toi. Et je le serais toujours.

Certains verraient ces paroles comme un cauchemars. Mais je savais que Nell ne le verrait pas comme ça.

-Et tu n’es pas venue pour rien. Cette visite… C’est une bouffée d’air pour moi.

Je pris un air concerné. Le genre d’air que j’avais appris à faire avec les années.

-Mais je ne t’ai jamais vue aussi perdue et malheureuse… Si c’est la faute de Grant, j’en suis désolé…  Ce gamin n’est pas facile.

Il ne l’est pas. C’est un Fleming.

@ Billy Lighter

Il y avait trop de données que nous ne savions pas concernant cette fameuse nuit qui avait remis en question beaucoup de choses dans ma tête et dans mon cœur pour pouvoir se faire une idée claire de la situation. Si j’étais arrivée brusquement et avait fait sursauté Grant ou bien qu’il n’y avait pas eu de voleur et que ce fût moi qui avait été sans le salon, est-ce que Grant aurait tiré en se croyant en danger ? S’il avait été surpris ? Il l’avait fait de façon si spontané, sans se poser de question, que je ne pouvais pas être certaine de sa réaction.

- Peut-être que ce que tu dis est vrai mais l’inverse l’est aussi. Nous ne pouvons être certain de rien, c’est ce qui me perturbe autant, dans toute cette histoire.

C’est avec Jordan que j’aurais aimé parler de tout ça. C’était dans ses bras à lui que j’avais besoin de trouver du réconfort. Cependant, mon petit ami m’avait vite proposé une aide psychologique après avoir qualifiés mes émotions de débiles. Je pense que j’avais été beaucoup plus blessée et ébranlée par le peu d’empathie de Jordan que par toute cette nuit cauchemardesque.

Le pire était qu’en venant parler avec Ward dans l’espoir de refiler ma culpabilité à quelqu’un d’autre, quelqu’un qui la méritait pour avoir laisser un enfant de dix ans s’amuser avec un flingue comme si c’était une affaire de rien, je ne faisais que me rendre compte que j’avais raison de croire en mes convictions.

Je n’avais pas de nouvelles de Sky ou d’Heaven à offrir à Ward et, même si j’en avais eu, je ne lui en aurait pas donné. Je ne voulais pas me faire l’intermédiaire entre lui et son ex-femme bien que je trouvais un peu cruel qu’il risque de mourir sans avoir vu sa fille une dernière fois.

- Je ne veux pas lancer de débat sur le comment et le pourquoi Grant a pu trouver si facilement cette arme, d’accord ?  Honnêtement… Ça ne changera rien à l’histoire et puis tu sais aussi bien que moi que lorsque Grant veut vraiment quelque chose, il parvient toujours à l’obtenir.

Ce n’était pas une critique négative du petit, mais une constatation de sa capacité à aller au bout de ses désirs. En développant cet aspect de sa personnalité de façon positive et encadrée, il pourrait aller très loin dans la vie et sur le droit chemin.

Ma réflexion après tout ça était que je n’aurais pas dû venir ici, bien que je me disais que je devais une visite à Ward ne serait-ce que parce qu’il avait toujours été là pour moi quand j’en avais eu besoin. Il remettait ça sur le lien que nous avions mais que nous ne savions pas expliquer.

J’eu un énorme pincement au cœur quand il ajouta qu’il serais toujours là pour moi. Je replaçais ma main contre la vitre pour qu’il puisse apposer la sienne de son côté.

- Est-ce que tu sais… Ta sentence ? Tu sais ce qui va arriver ?

Je ne pouvais accepter qu’il puisse être condamné à mort ! Il méritait une sentence pour ses actions, mais la mort, ça non ! Personne n’avait de droit sur la vie d’autrui ! Condamner quelqu’un de mort parce qu’il avait tué envoyait un message vide de sens.

- ma visite autant au moins servie à ça, alors.

Si je n’avais obtenue aucune réponses aux questions que je me posais, ma visite aura fait du bien à un homme qui n’en recevait pas beaucoup. Ce serait ma bonne action du jour.

Je sursautais alors qu’un gardien, baraqué comme trois, arriva par derrière pour nous aviser que la visite tirait à sa fin. Les prisonniers ici étaient soumis à tellement de règles et de restriction, était-ce nécessaire de leur donner un temps minimum de visite ?

- Euh… Grant ? Euh… Non, il n’a rien à voir. Il est… Tu sais ? Un gamin intense et ça va bien avec lui à la maison, quand il n’y a pas de voleur qui nous rend visite la nuit.  Je suis simplement à cran avec cette histoire, ça va passer, t’en fait pas.

Je soupirais en me disant que si nous avions encore quelque chose à dire, ce serait le temps de le dire avant qu’il ne soit trop tard. Après, le reverrais-je ?

- Je suis désolée… Ward. Je…

Mes épaules se soulevèrent et je soupirais à nouveau. Qu’y avait-il à dire de plus que ce que j’avais déjà dit ? Je n’étais pas parvenue à me décharger de ma culpabilité et pire encore, Ward m’avait fait comprendre que mes émotions étaient loin de stupide. Pourquoi avait-il fallu que ce soit lui qui me réconforte plutôt que Jordan ?

- Je dois y aller avant qu’on me force à partir.

J’allais ajouter une phrase… Trop lourde se sens pour être dite à la volée et que je ne pouvais pas prononcer simplement pour soulager ma conscience et penser qu’il l’emporterait avec lui dans un monde meilleur.

- À bientôt… Qui sait ?

@ Billy Lighter

Nell ne cessait de pensé à ce qui aurait pu arriver. Elle se noyait sous des questions dont elle n’aura jamais la réponse. Combien il y avait-il de chance de se retrouver dans l’exacte même situation ? Très peu. Donc ça ne servait à rien de se torturer l’esprit.

Pourtant, elle se torturait. Comme si elle avait eu peur du monstre qui se cachaient à l’intérieur de Grant. Ce même monstre qui se cachait dans chaque Fleming. Bien que je pensais bien être le seul à m’en accommoder.

Pour Nell, j’étais encore partie coupable de ce qui était arrivé car c’est chez moi que Grant avait eut le flingue. Je n’étais pas là. Et si j’avais été là, jamais il n’aurait pu s’en emparer. Sky avait laissé faire. C’était mon avis. Faire passer Sky pour une mère imprudente et une femme qui a besoin d’aide est mon quotidien. C’était ma version pour le tribunal bien que je savais que mon  jugement était gagné d’avance.

Nell déclara ne pas vouloir entrer dans un débat concernant l’arme. Elle disait simplement que quand Grant voulait quelque chose, il faisait tout pour l’obtenir. Je lançai alors :

-Crois-moi que si j’avais été là, il ne l’aurait pas obtenu. Pas sous ma surveillance.

Maintenant, rien ne l’aurait empêché d’en acheter une sur le chemin de l’école mais, ça, c’était la responsabilité du commerçant. Que je sache, on ne peut pas vendre d’arme à un gamin de 10 ans… Je pense, en tout cas.

-Mais tu as raison. Grant est du genre persévérant et persuasif.

Nell commença alors à vaciller. A se demander pourquoi elle était venue jusqu’ici. J’ajoutais qu’on était lié et que je serais toujours là pour elle.

Elle replaça alors sa main contre la vitre. Je posai la mienne comme si elles pouvaient se toucher. Elle se demanda alors si je savais ce qui allait m’arriver. Je la regardais dans les yeux.

-Je risque la peine de mort ou la prison à vie… Mais je suis innocent. Et j’ai confiance en la justice.

En fait, je n’ai aucune confiance en la justice mais j’ai confiance en la corruption alors ça va.

Je déclara, ensuite, que sa visite m’avait fait du bien ce qui sembla la réconforter. Ce qu’il fallait faire avec Nell c’était la rassurer. Aussi simple que ça. Il ne lui fallait pas un Jordan Keller, il lui fallait un Ward Fleming.

J’étais certain de ça.

Un gardien arriva alors. L’heure tournait et il nous restait peu de temps. On en revint alors à notre conversation et je déclarai qu’elle avait l’air malheureuse. Mais ce n’était pas à cause de Grant, apparemment… Elle disait être simplement à cran à cause de ce qu’il s’était passé avec le voleur.

Et c’est moi qu’elle est venue voir pour ça.

J’hochai de la tête.

-Normal. On ne vit pas ça tous les jours.

En réalité, des intrusions, j’en avais déjà vécu plein. Mais je doutais que ça soit le quotidien de Nell.

Elle disait être désolée. Pourquoi ? Aucune idée.

-Tu n’as pas à être désolée.

Je parlais d’une voix apaisante. Je savais qu’elle fonctionnait sur Nell.

Elle sembla vouloir ajouter quelque chose mais se retint. Elle dit alors qu’il était temps pour elle de partir. J’hochai de la tête.

-D’accord.

Elle me salua. Est-ce que son message voulait dire qu’elle comptait venir me revoir ? Peut-être.

-A bientôt, Nell.

Et elle s’en alla probablement autant ébranlé qu’avant. Mais j’étais certain que tout ça allait finir par jouer à mon avantage.

@ Billy Lighter