Je terminais tranquillement ma petite journée au commissariat avec un dernier café en compagnie de Conrad et Katy, le nouveau petit couple de la bande. Ce n’était pas rare que des collègues sortent ensemble entre eux. Un peu logique, pour plusieurs raison… Déjà, il y avait les horaires. Pour un policier qui sort avec un civil, c’est très compliqué à faire comprendre qu’on sait toujours quand on commence notre service, mais jamais quand on le finit.

Et deuxièmement, comme on passait plus de temps au commissariat qu’ailleurs, c’était presque inévitable que des liens bien plus forts que l’amitié se lie.

Moi, j’étais, quelque part, une exception. Et je m’estimais heureux. Bien que ce n’était pas tous les jours rose avec Nell. J’étais un ancien militaire et un policier, j’étais blindé contre certaines choses, ce qui n’était pas le cas de Nell. Et comme j’étais pas très psychologue ni très empathique, je ne savais pas toujours l’aider avec ses questions existentielles.

Et justement, l’assistant social du service pour l’aide aux victimes, avec qui j’avais pris rendez-vous pour Nell pour qu’elle puisse s’épancher sur ses peurs depuis le cambriolage avorté par Grant, sortit de son bureau et passa par notre salle de repos.

Quittant ma conversation avec mes deux amis, je me dirigeai vers lui.

-Salut ! Ça a été avec Nell ? Je demande pas de me dire ce qu’elle t’as dit, je sais que c’est secret professionnel… Mais c’est juste pour savoir si ça a été. Je m’inquiète beaucoup pour elle alors…

Je haussai les épaules.

Et je n’aimai pas du tout la façon qu’eus Franz de pincer les lèvres.

-Elle ne s’est pas présentée, Jordan.

Je clignai plusieurs fois des yeux.

-C’est qu’elle avait peut-être un truc urgent à faire à la mission… Elle a téléphoné pour annuler, non ?

Franz secoua la tête.

-Non, elle n’a pas prévenu, rien du tout…

Je grommelai, quittai Franz, attrapai mes affaire et lançai à Katy et Conrad.

-Faut que j’y aille.

En rentrant à la maison, je passai par St-John’s où on me dit qu’on n’avait pas vu Nell de la journée. Et là, je commençais vraiment à flipper. Je rentrai à la maison, personne. Et je ne savais même pas où téléphoner pour prendre de ses nouvelles.

Peut-être qu’elle était partie…

Je me changeai, le cœur battant… Puis, quelques heures plus tard, alors que Grant était juste revenu manger un bol de céréales avant de repartir pour la tour BSC, la porte d’entrée s’ouvrit sur Nell.

Je me levai d’un bond et allai vers elle. Je pris son visage entre mes mains et la regardai dans les yeux.

-Seigneur ! Nell ! Mais où tu étais ?! Franz m’a dit que tu n’étais pas allée le voir…

@ Billy Lighter

L’avion avait atterrie et j’avais lentement traversé l’aéroport jusqu’à me retrouver à la sortie puis dans un taxi qui me ramena chez moi. Dans ma quête désespérée de me décharger de ma culpabilité, je n’avais rien fait de plus que de m’embrouiller davantage ce qui n’allait en rien m’aider à y voir plus clair.

J’aurais voulu que Ward se montre aussi détestable avec moi qu’il ne l’avait été pendant le processus psychologique et ensuite, durant le procès. J’aurais voulu qu’il se révèle comme l’homme violent que Sky disait qu’il était. J’espérais qu’il m’avoue être un mauvais père et avoir tout fait pour pervertir l’esprit de Grant.

Ward avait trouvé les mots qu’aurait dû avoir Jordan. Il m’avait réconforté plutôt que de minimiser mes émotions et de m’envoyer dans la cours d’un psychologue du commissariat pour pouvoir dormir en paix.

Je détestais ma journée, en fait, je détestais toutes mes journées dernièrement puisque je n’arrivais plus à fonctionner normalement. Je me sentais débile, impuissante, trop émotive. Je commençais même à me dire que j’aurais dû entrer en religion et me cloitrer. Ainsi, j’aurais pu continuer de me bercer d’illusion en priant pendant toutes les heures de la journée, plutôt que d’essayer de changer le monde, un sdf à la fois.

J’entrais dans la maison et je fus accueilli par Jordan qui, de toute évidence, savait que je ne m’étais pas présentée à la rencontre avec le psychologue du commissariat et qui s’était donc inquiété de ne pas me voir à la maison à son retour.

- Non… Je…

Ça n’allait pas lui plaire de m’entendre lui dire que je débarquais de San Quentin mais je n’avais pas l’intention de lui mentir. Je ne mentais jamais.

- J’arrive de San Quentin.

Je lui laissais le temps de réaliser que ce que je venais de lui dire, c’était qu’en fait, j’étais aller voir Ward en prison. Il n’avait pas besoin d’exploser de rage, de frapper dans un mur ou de se mettre à hurler pour me faire comprendre que je le décevais, que de savoir ce que j’vais fait de ma journée ne lui plaisait pas. De toute façon, ça n’avait pas à lui plaire. J’avais ressentis le besoin de le faire, je l’avais donc fait.

- Je voulais décharger ma culpabilité quelque part, la passer à quelqu’un qui méritait de la subir. Ça n’a pas fonctionné. J’en suis au même point, prise avec mes émotions débiles.

Le pire dans toute cette histoire résidait dans ce tout petit mot. Un mot qui avait eu de grandes et de graves répercussions sur mon estime de moi, sur ma gestion émotionnelle. J’avais tenté de me confier à mon petit ami en qui j’avais confiance mais le résultat le résultat me laissa avec de plus grandes blessures.

- Ça n’a pas fonctionné alors voilà. J’en suis au même point, probablement pire encore.

Voilà, c’était dit.

@ Billy Lighter

Je m’étais inquiété pendant des heures ! Des putains d’heures où j’avais enchaîné les cigarettes en me demandant quel numéro je pourrais faire pour savoir ce que me foutait Nell ! Pourquoi elle n’avait pas été au rendez-vous avec le service pour l’aide aux victimes ?

Je croyais que j’étais prêt à tout entendre.

Je croyais.

Inquiet comme j’étais, j’avais directement pris le visage de Nell entre mes mains, lui demandant ce qui s’était passé. Mais je n’aimai pas du tout ce que je vis dans ses yeux, juste avant qu’elle ne les dérobe à mon regard, comme honteuse.

Mais quand elle me dit, en hésitant un peu, qu’elle revenait tout juste de Saint Quentin, je sus que je n’étais pas prêt à tout entendre, en fait. Mon cœur fit un bond avant de se mettre à courir le marathon. Enervement, colère, et quelque chose d’encore pire que je ne savais pas nommer.

Voilà ce que je ressentais.

Je laissai retomber mes mains le long de mon corps et m’écartai d’elle comme si elle était couverte de boue et de merde.

J’étais dégoûté.

Et j’étais en colère au point que je n’en avais rien à foutre de ses excuses sur la culpabilité et autres conneries.

Je marchai à reculons, jusqu’à trouver la chaise de la petite table de la cuisine. En tremblant de colère, j’arrivai à m’asseoir dessus.

Puis je frottai mon visage à deux mains. Je sentais les battements de mon cœur jusque dans mes tempes. Et là, j’entendis Nell dire qu’aller voir Ward n’avait pas arrangé les choses, que ça les avait même empirées.

-Voilà pourquoi tu devais aller voir le service d’aide aux victimes comme je te l’avais dit. Et pas aller donner du bon temps à Ward Fleming ! Ce putain de psychopathe manipulateur à la con !

Je faisais de mon mieux pour garder mon calme, mais mon ton montait quand même malgré moi. Je serrai les poings, assis sur ma chaise.

-Je fais tout ! Tout ce que je peux ! Tout ce qui est en mon pouvoir pour éradiquer Ward Fleming de nos vies !

Je fusillai Nell du regard.

-Je veux vous protéger de lui. Et toi, tout ce que tu trouves à faire, c’est d’aller te jeter volontairement dans la gueule du loup ?! C’est une trahison, Eleanore. Et c’est pas la première fois !

@ Billy Lighter

Je me doutais avant même d’entrer dans la maison que mon occupation de la journée de plairait pas à Jordan. Cependant, étant tous les deux adultes et civilisés, je ne voyais pas de raison de dramatiser la situation plus que ce qu’elle devait l’être. Nous en parlerions calmement et, maintenant que je savais que je ne pouvais pas plus décharger ma culpabilité sur Ward et que Jordan ne se sentait pas capable de m’aider, j’irais voir l’aide psychologique du commissariat.

J’entrais donc la maison et je fut accueillis par Jordan visiblement très inquiet. Je ne pensais pas lui avoir donné des raisons de s’en faire bien qu’après coup, je réalisais que la personne ressource sensée me recevoir devait l’avoir prévenu de mon désistement.

Si j’hésitais à lui dire que je revenais de San Quentin, ce n’était pas parce que je m’en voulais d’y être allée, mais parce que je savais que ça ne lui plairait pas. Effectivement, il n’était pas content, pas du tout ! Ses mains glissèrent de mon visage pour tomber de chaque côté de son corps avant qu’il ne recul comme si je portais sur moi la peste. Il alla jusqu’à la cuisine et se laissa choir sur une chaise.

Je confessais pour amorcer la discussion que ça n’avais pas amélioré la situation parce que je n’avais pas su retirer de mes épaules la culpabilité qui m’accablait.

J’allais rejoindre Jordan à la cuisine mais je figeais à mi-chemin par son ton. Un ton qui grimpais et que je ne lui reconnaissais pas. Un ton qui se faisait violence et accusateur.

- Une trahison ?

Mes mains se glacèrent en l’entendant m’accuser de trahison.

Parce que de minimiser mes émotions à un seul qualificatif pour pouvoir dormir tranquillement ce n’était pas une trahison ? Je ne pensais pourtant pas l’avoir accusé de rien. Je pouvais concevoir que d’aller voir Ward ce n’était pas l’idée du siècle mais s’il me laissait lui expliquer ma démarche, il comprendrait pourquoi je l’avais fait, je ne lui demandais pas de l’accepter mais juste de faire l’effort de m’écouter.

- Est-ce que nous pouvons discuter calmement et éviter de se crier dessus et de s’accuser à tort et à travers ?

Si la conversation allait en ce sens, elle ne m’intéressait pas ! Il m’avait blessé plusieurs fois et jamais je ne l’avais accusé de quoi que ce soit ! Au contraire, j’encaissais en me disant que c’était ma faute, que je ne lui démontrais pas assez de support.

Je n’avais pas bougée d’un poil, je n’osais pas m’approcher de lui tant je le sentais à cran et sur le point d’exploser. Je n’avais pas envie qu’il m’explose dessus !

- Je comptais me rendre à l’aide aux victimes mais avant de le faire, j’avais besoin de le regarder en face pour qu’il prenne sa part de responsabilité. Je ne me suis pas rendu là pour prendre de ses nouvelles.

Bon, j’en avais prise quand même mais ce n’était pas le but premier de ma visite. De toute façon la question n’était même plus à se demander pourquoi j’y étais allé mais pour quel crime mon petit ami m’accusait de trahison !  

@ Billy Lighter

Nell semblait choquée que je considère son acte comme étant une trahison. C’était peut-être un peu fort. Mais sur le coup, c’était ce que je ressentais. Je tremblais de rage sur ma chaise, mes jambes tressautant.

J’étais à deux doigts de dire à Nell de faire ses bagages et de partir d’ici ! De ne plus tourner autour de Grant ! Parce que je ne voulais pas d’une deuxième Sky Fleming à mes côtés.

Je savais que je n’étais pas sans avoir mes torts là-dedans. Mais je n’en pouvais rien si je ne savais pas m’y prendre avec les émotions des gens, si pour moi, pleurer était un signe de faiblesse. Or, j’avais quand même eu le tact, l’autre soir, de ne pas lui dire qu’elle était faible.

Je serrais les poings, mordais ma lèvre…

Puis finalement, elle me demanda si on pouvait discuter calmement, comme les deux adultes matures que nous étions censés être.

Pour toute réponse, je hochai la tête avant de tendre ma main vers le paquet de cigarettes qui traînait sur la table.

Mes mains tremblaient tellement que je dus m’y reprendre à quatre fois pour faire sortir une flamme de mon briquet.

J’inspirai profondément une grande bouffée de nicotine puis regardai à nouveau Nell.

Ce n’était pas à moi de m’expliquer, mais à elle. C’était elle qui était aller donne du bonheur à Ward, pas moi !

Nell disait qu’elle comptait se rendre au service d’aide aux victimes mais qu’elle devait voir Ward avant.

Je ricanai…

-Tu connais Ward. Je connais Ward. Qu’est-ce qui t’as fait croire qu’il pouvait ressentir ne fut-ce qu’une once de regret pour tout ce qu’il a fait ? Et de la culpabilité ? Ce n’est même pas la peine d’en parler !

J’écartai les bras en signe d’impuissance.

-Pour lui, tout ce qu’il a fait est normal ! Parce qu’il est dérangé, Nell ! C’est un psychopathe !

Je soupirai et repris ma clope entre mes doigts.

-Après, je sais que je n’ai pas été à la hauteur pour toi. Quand tu t’es mise à pleurer l’autre soir. Je ne sais pas gérer ça et je te demande pardon pour ça. C’est pour ça que j’ai préféré t’envoyer vers des gens qui savent ce qu’ils font…

Je pinçai les lèvres.

-J’ai déjà perdu une petite-amie qui s’est suicidée… Je ne voudrais pas que ça t’arrive à toi aussi. Parce que je t’aime.

@ Billy Lighter

Je savais que j’avais fauté mais de là à m’accuser de trahison, il y avait une marge. Si Jordan ne m’avait pas rabroué alors que je cherchais du réconfort et une oreille attentive en lui l’autre soir, je n’aurais peut-être pas eu la fausse bonne idée d’aller décharger mon sentiment de culpabilité à celui dont je pensais en être la source. Malgré ça, je n’accusais Jordan de rien puisqu’il serait inutile de chercher un coupable pour quelque chose que nous ne contrôlions pas ni l’un ni l’autre.

Dommage pour moi que celui que j’aimais ne voyait pas les choses de la même façon et rendait ma démarche encore plus difficile.

Il était en colère pour ne pas dire sur le point d’exploser. Je tentais tout de même de lui demander de se calmer afin que nous puissions discuter comme des adultes matures plutôt que de se crier dessus. Il sembla d’accord malgré cela, je ne me sentais pas capable de m’approcher trop près de lui, même s’il y aurait une table entre nous deux. Le simple fait de le voir se battre avec son briquet pour allumer sa cigarette me faisait craindre ses gestes brusques.

- Je ne m’attendais pas à ce qu’il accepte sa part de responsabilité pour tout ça. Je voulais qu’il voit les ravages qu’il avait créé.

Je m’abstenue d’ajouter que, parce que Ward avait toujours revendiquer avoir un lien spécial avec moi que ni lui ni moi savions expliquer, j’avais stupidement cru qu’il serait affecté de me voir en si piteux états. Jordan se serait moqué de ça en me disant que tout ça n’était que de la manipulation de la part de Ward, que je me laissais retourner le cerveau par lui et ses belles paroles.

- Tout ce que je voulais c’était de me départir de ce sentiment de culpabilité qui me pèse et me gruge petit à petit. J’ai tenté de le faire, deux fois et ce fut un monumental échec, les deux fois.

Évidement, je faisais référence à ma tentative de discussion avec lui l’autre nuit puis de ma visite à San Quentin avec Ward. L’un comme l’autre ne m’avaient pas aidés. L’un avait réduit à un seul qualificatif mes émotions alors que l’autre en avait fait son tremplin pour passer pour le héros à mes yeux. Je n’avais pas été stupide au point de croire que ce ne lui avait pas fait plaisir d’être l’oreille attentive à mes problèmes. Mais ça ne changeait rien que je le voyais tout de même plus comme un dangereux criminel et moins comme un être persécuté. De toute façon ce que je pensais de lui n’avait plus aucune importance. Il allait soit passer sur la chaise électrique soit finir ses jours en prisons.

Jordan clama encore que Ward était un psychopathe et qu’il n’aurait jamais vu comme anormal tout ce qu’il faisait.

- J’ai cru longtemps qu’il y avait du bon en lui. Je suis qui je suis. Parfois j’ai raison, d’autre fois j’ai tort. Je suis loin d’être parfaite mais je sais reconnaitre quand ce n’est pas le cas.

Je soupirais tout comme Jordan qui reprit sa cigarette entre ses doigts tremblant. Je savais que quelque chose s’était brisé entre nous. Je ne savais cependant pas jusqu’à quel point ça l’était et si c’était réparable.

Jordan avoua ne pas avoir été à la hauteur. C’était bien le moins qu’il pouvait dire. Il aurait pu se contenter de me prendre dans ses bras, de m’expliquer qu’il ne se sentait pas capable de m’aider mais qu’il avait les moyens de le faire par le biais de son travail plutôt que de choisir la voix de l’insulte. J’étais profondément blessée par ce stupide mot, un mot débile ! Il ne se doutait peut-être pas de l’impact qu’un seul mot pouvait avoir.

- Je savais ça. Je veux dire…

Je fis quelques pas vers l’avant sans toutefois franchir totalement la distance nous séparant. Je ne me sentais pas prête, encore sur mes gardes et craintive qu’il n’explose. Il canalisait mal ses réactions à vif. Je l’avais souvent vu s’emporter contre Sky, contre Ward qui le faisait entrer dans son manège en un claquement de doigts. Puis je baissais les yeux alors qu’il me parla de sa petite amie qui s’était suicidée et de la peur qu’il ressentait qu’il m’arrive la même chose. Je n’étais pas encore au point d’avoir des pensées suicidaires. J’étais simplement désorientée et effrayée suite à ce que nous avions vécu.

- Je comprends que ce que je ressens puisse t’effrayé et que tu ne te sente pas capable de m’aider. C’est à partir du moment où tu m’as jugé comme débile, j’ai été profondément blessée par tes mots. Je me suis sentie comme…

Je ne trouvais pas les mots justes alors je me contentais de mettre la main sur ma poitrine, là où battait mon cœur. Ça m’avait été très douloureux, certainement autant que la colère que Jordan avait ressentit quand il m’avait entendu lui dire que je revenais de San Quentin.

De mon côté, je ne pouvais pas lui demander pardon de m’être rendue à San Quentin. Je ne pensais pas être dans une relation ou je devais demander la permission pour aller là où j’avais envie de me rendre. Cela dit, je comprenais très bien que de l’avoir fait sans le lui dire avait été blessant et déstabilisant pour lui, bien que moi-même, en me levant ce matin, je n’avais aucune idée que je m’y rendrais.

- Je te demande pardon de ne pas t’avoir dis où j’allais. Je sais que j’aurais dû le faire, ne serait-ce que par respect pour toi. Je suis désolée.

@ Billy Lighter

Au moins, Nell ne pleurait pas. Elle assumait pleinement les conséquences de ses actes. Conséquence qui était principalement de me mettre complètement hors de moi ! J’étais fâché comme je pensais ne jamais l’avoir été !

Mais elle voulait que je l’écoute… Et j’étais prêt à l’écouter. Même si je tremblais toujours, même si une part sombre de moi avait juste envie de la foutre dehors avec toutes ses affaires ! Elle préférait une aide apportée par Ward à la mienne ? Très bien !

Mais non, il fallait que j’essaye de me calmer et d’écouter sa version des faits comme je l’aurais fait avec n’importe quel suspect d’un crime.

Parce que ouais, c’était un crime, une trahison à mes yeux.

Elle me parla de Ward qui ne l’avait pas aidée.

-Mouais, ça, j’aurais pu te le dire. Faut pas être Einstein pour deviner qu’il ne pouvait faire que pire que mieux !

Elle affirmait avoir essayé deux fois de se départir de ce sentiment de culpabilité qui la rongeait. Et je savais que dans les deux fois, il y avait celle où elle avait pleuré dans notre lit. Putain ! ça c’était la meilleure !

-Donc, je m’arrange pour qu’une aide te soit apportée ! Je passe des coups de fils, je m’inquiète pour toi ! Et tu appelles ça un échec ?! Je ne suis pas un psychologue, Nell ! Je ne veux pas me tromper et faire pire ! Et c’est ça que tu me reproches ?

Elle disait qu’elle ne pouvait pas changer qui elle était et qu’elle avait longtemps cru qu’il y avait du bon en Ward. Je ne répondis rien, tirant nerveusement sur ma cigarette, luttant pour ne pas juste l’engueuler, lui gueuler dessus.

Une seule chose me retenait : toujours cette irrationnelle précaution de ne pas vouloir faire pire. Je voulais, bien sûr, que Nell se sente mieux. Mais je ne me sentais pas à la hauteur et je n’avais pas envie qu’elle finisse comme Roxane.

Mais là encore, elle avait un reproche à me faire : parce que j’avais dit que ce qu’elle ressentait était débile. Elle fit quelques pas vers l’avant et je reculai ma chaise pour m’éloigner, faisant crisser les pieds sur le sol.

Je ricanai.

-C’est pour cette raison que je ne suis pas psy, Nell.

Il n’y avait qu’une chose pour laquelle elle acceptait de s’excuser : elle aurait du m’en parler avant. C’était toujours ça. Je me détendis un peu. Mais vraiment très légèrement.

-Si tu m’en avais parlé avant, j’aurais au moins eu une chance de te convaincre qu’aller voir Ward était une mauvaise idée. Mais tu n’en as fait qu’à ta tête alors…

Je me levai brusquement et pris mes clés de voiture sur le plan de travail.

-Je ne sais pas si je suis prêt à te pardonner tout de suite. Je vais faire un tour pour me calmer. Je serai là pour le retour de Grant.

@ Billy Lighter

Jordan se montrait de mauvaise foi et il ne changerait pas d’attitude qu’importe ce que je pourrais lui dire. Il avait décidé que j’étais coupable de trahison et il était blanc comme neige. Je n’avais aucune marge d’erreur alors que lui, ses manœuvres entraient dans un terrain de football.

Il lâcha qu’il ne fallait pas être Einstein pour savoir que Ward ne m’aurait pas aidé dans ma démarche. Donc, en plus d’avoir des sentiments débiles, je n’étais pas très intelligente. Pour une mauvaise décision prise impulsivement, j’étais passé de la future mère de ses enfants à une moins que rien.

Calmement, je tentais de lui expliquer que j’avais tenté de me défaire de cette culpabilité qu’il jugeais de débile, dont l’une de ces fois était en prenant tout mon courage et en lui parlant, dans notre lit. Ça m’avait valu d’être rudement rabrouée et humiliée avant d’être grossièrement référée aux services professionnels offert par le commissariat.

De toute évidence, je m’étais fait une fausse idée d’une relation amoureuse. Je pensais qu’entre amoureux nous pouvions s’écouter, s’épauler, se rassurer, de comprendre. Je faisais de mon mieux pour écouter, épauler, rassurer et comprendre Jordan depuis le début de notre relation, dans son combat perpétuel contre Ward, pour conserver la garde de Grant, pour tenir Sky éloignée de son pupille. Moi, en contrepartie, quand ce que je disais ne lui plaisait pas, j’avais droit à des regards assassins et à de l’humiliation.

- Je sais que tu n’es pas psychologue. Je ne te demandais pas de me psychanalyser mais simplement m’écouter et me rassurer. C’est mon erreur d’avoir cru que tu avais la possibilité de le faire. Je m’en excuse.

Maintenant, je m’excusais pour ses propres faux pas, était-ce à ça qu’étais réduite notre relation ? Il semblerait bien que oui.

Il exposa à nouveau alors que je faisais quelques pas vers l’avant en expliquant que son choix de mots m’avait blessé. Il n’y avait aucun reproche dans ce que je disais ni même dans le ton de ma voix. Je voulais mettre les choses en perspective pour qu’il comprenne que parfois, un simple mot peut faire de grands ravages mais il n’y avait rien à faire.

Pour Jordan, j’étais coupable de trahison et j’étais coupable de l’avoir fait me traiter comme une merde. C’est du moins ce que son attitude et sa gestuelle me laissait comprendre.

Je demandais pardon de ne pas l’avoir prévenu bien qu’il m’aurait été difficile de le faire puisque j’avais prit la décision sur un coup de tête. Même après avoir acheté mon billet, je n’étais toujours pas convaincue que j’irais jusqu’au bout. Même en entrant dans San Quentin, je pensais encore reculer et rentrer à la maison.

Il se leva brusquement et cela me fis reculer. Jordan attrapa ses clés de voiture avant de dire s’il ne savait pas s’il était prêt à me pardonner tout de suite. Et moi ? Est-ce que j’étais prête à lui pardonner ? N’étais-je déjà pas entrain d’effacer toute son ardoise alors qu’il ne cessait de remplir la mienne ?

- Jordan ?!

S’il s’était comporté de la sorte avec Roxanne, pas étonnant qu’elle est connue une si triste fin et s’il continuait à m’enfoncer comme ça pour se sentir supérieur, je n’allais pas tarder à lever les pattes, moi aussi ! Mon menton tremblait et j’avais les yeux embrumé de larmes. Je ne comprenais absolument pas ce que je venais de vivre mais je savais une chose : tout était de mon unique faute. C’est ce qui arrive quand une fille pas très intelligente exprime des émotions débiles !

@ Billy Lighter