Il avait fallu que je parte… Je n’en pouvais vraiment plus d’entendre parler de bébés, de bébés et encore de bébés. Sky ne pouvait pas s’en empêcher… C’était vraiment plus fort qu’elle. Chaque fois ça revenait dans les conversations…

Et ça me tapait sur les nerfs de plus en plus !

Pourtant, je l’aimais et même ça ne changeait pas le sentiment que j’avais pour elle. Rien ne changera jamais ça.

Mais il fallait que je prenne l’air !

Alors, sans lui montrer mon agacement, je lui avais dit que je devais faire un saut à mon gang. Je ne l’avais pas alarmé sinon elle allait encore sortir les larmes. Non, j’avais simplement dit qu’il fallait que j’y passe quelques heures pour planifier ce qu’on allait faire le moins prochain. J’avais lancé que si je devais absolument rester plus souvent à la maison, je devais coordonner mes hommes pour une longue période. Je lui avais dit que je n’en aurais pas pour longtemps. La soirée tout au plus. Que je serais rentré vers minuit. J’avais dit tout ça non sans la rassurer, la caresser et l’embrasser…

Puis, j’étais parti… J’avais bien fait un saut à mon gang simplement pour écrire une lettre. Une lettre que je destinais à Samantha. Samantha chez qui je devais entretenir la peur. Cette lettre servira à ça. J’envoyai un de mes hommes la mettre dans la boîte aux lettres de Ricci. Il devait le faire en pleine nuit pour ne pas être vu.

Après… Après, j’avais pris deux hommes et j’étais parti vers le Crazy Ginger. Ce bar était sur mon territoire. J’aurais bien voulu faire une incursion dans l’Eastside mais je devais me méfier. J’avais tué un de leur membre important et j’étais toujours en attente de la contre-attaque.

Je ne devais quand même pas trop m’exposer.

Le Crazy Ginger, c’était bien. Je pourrais y boire, écouter de la musique… Et apprendre des choses. Parce qu’on apprenait souvent beaucoup des rumeurs qui couraient dans les bars.

Une fois arrivé, un de mes hommes resta dehors. L’autre rôdera à l’intérieur sans pour autant me coller. Ils étaient là au cas où des Los Diablos se pointeraient. Je sais que certains d’entre eux venaient parfois au Crazy Ginger.

J’entrai dans le bar venant m’asseoir au comptoire où je commandai un whisky. Il y avait du monde et mon regard se posa un peu partout. Qu’est-ce que je cherchais en venant ici ? Rien… Je voulais juste ne pas entendre parler « bébés » le temps d’une soirée. Il le fallait avant que mes envies de meurtre ne reviennent au galop et que je fasse des choses que je pourrais regretter.

Comme avec A.J..

Ici, je savais que je pourrais avoir ma dose de tout : d’alcool et de violence. Parce que je savais que c’était rare des soirées au Crazy Ginger où il n’y a aucune bagarre. Et si jamais ça restait calme, je savais que je pourrais toujours allumer la mèche pour que tout s’enflamme.

J’étais doué pour ça.

@ Billy Lighter

Le Crazy Ginger ne déborde pas de monde mais c’est raisonnable pour un mercredi soir. Les gens sont encore sur le rythme du lundi, ce n’est que demain que le parfum du weekend allait se faire sentir et que je verrais l’endroit se remplir. En attendant, il y avait les  habitués de l’endroit, assis avec leur bières en main à leur table préférée, discutant fort de la prochaine saison des Chargers à savoir s’ils feraient mieux que l’an dernier, je leur souhaitais sincèrement vu la ferveur de leur encouragement et avec quel force ils défendaient Dan Fouts qui n’a pas su mener son équipe au Superbowl de cette année. Tant pis, ce n’est que partie remise, c’est ce que je répondais chaque fois que j’allais leur porté une nouvelle tournée de bière et des plats de bretzels.

Il n’y avait pas de groupe ce soir, c’était fort probablement pour cette raison que les discussions sportives étaient si vives ce soir. Ça aurait été un soir parfait, pourtant, pour un groupe, ça aurait mis de l’ambiance parce que ce soir, bien qu’il y ait des gens, c’est un peu tranquille et lorsque c’est tranquille, les gens boivent moins et lorsqu’ils boivent moins, cela me fait moins de pourboires !

À la maison, j’ai un pot de beurre d’arachide, vide et lavé bien sûr, dans lequel je mets tous mes pourboires pour m’acheter une belle voiture. C’est un défi que je me suis donné il y a de cela un bon moment déjà et même si aujourd’hui j’ai les moyens d’aller me chercher un prêt dans une banque pour m’acheter ma voiture, j’ai quand même garder le même objectif, par orgueil, pour le plaisir de la chose, pour pouvoir dire que je suis aller au bout de quelque chose. Ça amuse Duncan de me voir de temps en temps sortir mon pot pour y mettre mes pourboires de la semaine !

Un petit mercredi soir tranquille donc ce qui  me permis de remplir mes réfrigérateurs de bière, de nettoyer les bouteilles d’alcool fort et de replacer les verres dans les étagères. J’aimais bien me tenir occupé plutôt que de rester derrière mon comptoir et attendre qu’on me fasse signe pour une bière ou un cocktail.

Et puis il y avait ce type assit au bar, Ward Fleming.  Il y avait un moment que nous ne l’avions pas vue ici et c’était parfait comme ça. Sa présence était plus que souvent synonyme de problèmes.  Les esprits pouvaient rapidement s’échauffer, je n’avais pas envie de voir une bagarre éclater ce soir comme ça arrivait trop souvent.

Je lui avais servis un verre de whisky et je l’avais laissé le boire seul, le surveillant du coin de l’œil de temps en temps sans vraiment vouloir le faire. Il faut dire qu’il traîne une sacré réputation celui-là et, forcément, ça me fait penser a Grant…  Il n’avait pas besoin d’un père comme ça dans sa vie, en fait, personne ne méritait un père comme Edward Fleming. Mais ma pensée m’éclata au visage, me laissant croire aussi qu’en fait, je ne connaissais rien de Fleming sauf pour ce qui se chuchote dans son dos.  Oh, je ne suis pas entrain de me dire qu’il est victime de racontars, loin de là.

Il sirotait son whisky que je lui avais servi peu après son arrivée, il était seul et ne parlait à personne. Il semblait perdu dans ses pensées même si son regard balayait de temps en temps le bar et les gens autour de lui, comme s’il attendait quelqu’un qu’il n’espérait pas voir. Peut-être qu’il attendait une fille… Je ne l’avais en tous les cas jamais revue avec une autre que la grande blonde qui mordait tout ce qui bougeait. Celle-là, elle venait assez souvent, avec ou sans Fleming mais  il y avait un bon moment qu’elle n’avait pas remit les pieds ici et personne n’allait s’en plaindre. Je n’ai jamais vu une telle furie ! Toujours là pour mettre le feu aux poudres, elle faisait un beau couple avec Fleming.

Son verre était maintenant vide alors je m’approchais de lui, avec mon plus beau sourire, pour le prendre et lui demander s’il voulait autre chose.

- Je te serre un autre whisky ? Un double ?

@ Billy Lighter

Pour l'instant, il n'y avait aucun signe qu'une bagarre allait se déclencher. Les bribes de conversations que j'entendais concernaient le sport mais ça restait bon enfant. Pourtant, ce genre de conversation pouvait parfois tourner à la bagarre. Il suffirait que l’un ou l'autre ne supportent pas la même équipe et ça pouvait faire des étincelles... Mais là, ils semblaient tous aller dans le même sens. J'en entendais même qui riaient de bon cœur.

Mais je savais que les choses pouvaient vite tourner autrement. Il suffirait parfois de peu. Une parole de travers, un regard de travers ou encore une femme. Bref toute des petites choses qui pouvaient se faire s'embraser le Crazy Ginger.

Je restais patient. J'avais encore le temps. C'était encore le début de soirée. Il pouvait encore se passer des choses.

Tout du moins, je l'espérais.

Quand je ne regardais pas autour de moi, je regardais, parfois, Leia, la barmaid, servir tout ce beau monde. Leia détestais quand il y avait des bagarres. Elle préférait les soirées calmes. L'idée même de rendre sa soirée pénible me tentait. Je n'avais rien contre elle... En fait, je ne savais pas grand-chose d'elle. Je savais juste que, d'après des rumeurs que j'avais entendues, elle sortirait avec le chanteur BleedingHeart. Celui-là même qui serait le frère de Jordan Keller, le flics et tuteur de Grant Custer.

Oui L.A. est petit.

Je savais aussi qu’elle était Irlandaise. Ça je l'entendais à son accent semblable à celui de Quinn. Un accent que je détestais pour cette unique raison. Parce que c'est celui de Quinn.

Quand achevai mon verre, elle vint me le prendre et m'en proposer un autre. Je levai un regard distrait sur elle.

-Oui. Un double.

Mon regard se fit moins distrait, ensuite.

-Dis-moi, Leia... C'est vrai la rumeur qui court? Tu sors avec Duncan Keller? Tu fais dans les futures stars maintenant?

Futures stars, c'était un bien grand mot tant BleedingHeart avait du mal à percer en dehors des States.

-Tu as brisé le petit cœur de Finan Quinn?

Je ne savais pas si Leia le savait mais Finan, il y a un temps, avait un faible pour la barmaid. Je crois que certains Los Diablos le charriaient à ce sujet. Moi j'ai toujours pensé que Finan l'aimait parce qu'elle causait comme lui et qu'ils étaient les seuls à pouvoir vraiment se comprendre.

Oui l'accent irlandais est horrible à ce point.

Je disais ça non sans sourire d'un sourire en coin qui témoignait de mon sarcasme.

@ Billy Lighter

Ward Fleming, installé au comptoir du Crazy Ginger, me semble bien loin dans ses pensées et c’est bien tant mieux, au moins, pendant se temps là, il n’est pas entrain d’alimenter une potentielle bagarre et ça m’arrange car je n’ai jamais aimé quand ça devait une arène de catch, ici. Pourtant, je devrais y être habitué, ce n’est pas comme si ça n’arrivait presque jamais, le Crazy Ginger est réputé pour ses soirées explosives. Seulement ce soir c’est tranquille et j’aimerais bien que ça demeure comme ça.

Il avait commandé un whisky et son verre vide, je le ramassais et lui en proposais un autre, un double cette fois.

- Parfait je t’amène ça.

Je pris la bouteille de whisky et versais  la quantité d’alcool pour lui servir un double, ce qu’il m’avait demandé et lui donnais son nouveau verre avant de noter cette seconde consommation à sa facture.

Je figeais un peu quand il me parla de ma relation avec Duncan, non pas que c’était un secret mais je ne pensais cependant pas que cela puisse intéresser assez Fleming, en particulier lui, pour venir m’en parler ici.  Alors forcément, mon cerveau se fit aller,  passant de ma relation avec Duncan à Jordan qui a la garde de Grant Custer.

- La rumeur dit vrai, tu arrives juste un peu trop tard, désolée !

Souvent, les hommes qui viennent s’échouer au comptoir, espèrent un flirt avec moi. Ce n’est pas unique à moi, les barmaids en général vivent ce genre de situation, ça fait partie du métier alors je préférais lui répondre de cette manière plutôt que de lui dire que ce n’était pas ses affaire ou encore, en étant  rude et impolie. Il n’est pas le genre de personne que je désire avoir à dos.

- Finan ?  Il n’y a jamais rien eu entre lui et moi. Tu as pêché ça où ?

Sonny a été mon dernier petit ami avant Duncan et est donc le seul cœur que j’ai pu briser, à regret, je n’ai jamais voulu lui faire de mal, seulement, nos chemins n’allaient plus dans la même direction, malgré l’amour qui nous unissait.

La vie est ainsi faite.

Je n’aimais pas le petit sourire moqueur de Ward Fleming, comme s’il était satisfait de ce qu’il venait de me révéler, comme s’il avait pu me blesser ou blesser Finan avec une telle révélation alors qu’il n’en était rien. Je voyais ça comme un coup d’épée dans l’eau.

Tant qu’à en être à la section du courrier du cœur, je me permis moi aussi une question indiscrète.

- Et toi tes amours ? On ne te voit plus avec cette belle grande blonde.  Elle va bien ?

Cette belle grande blonde à la grande gueule qui aimait un petit peu trop provoquer les conflits, spécialement quand Ward était là. De ça non plus, je n’allais pas m’en plaindre, personne ici, même, allait se plaindre de ne plus la voir trainer ici.

@ Billy Lighter

Leia s’exécuta et m’apporta un nouveau verre de whisky. Un double. Comme je lui avais demandé. Je pris directement le verre en main buvant à petite gorgée avant de commencer à parler de la rumeur qui disait que Leia O’Reiley, la petite barmaid du Crazy Ginger, sortait avec Duncan Keller, le chanteur de BleedingHeart, un groupe qui avait fait la première partie de The Burning Fire.

Elle confirma la rumeur disant que j’étais arrivé trop tard. Ça me fit ricaner. Comme si un type comme moi pouvait être intéressé par une fille comme Leia O’Reily. Je n’avais jamais eu aucune attirance pour elle. Pas comme la plupart des types qui venaient s’échouer à son bar à moitié bourré et qui commençaient à essayer de la chauffer. Elle devait avoir l’habitude que les gens flirtent avec elle. Moi, ça ne m’intéressait pas. Ce n’était pas mon style de fille.

Sky était mon style de fille. Sky et personne d’autre.

-Mais tu ne m’intéresse pas, O’Reily. Pas du tout. Je laisse cette déception à d’autre.

D’autres comme Finan Quinn qui, lui, je le savais, avait un sacré faible pour Leia O’Reily. Et il semblait que tout l’Eastside soit au courant sauf la principale concernée. C’était typique ça. Du coup, quand je soulignais qu’elle avait dû briser son petit cœur d’Irlandais, elle ne semblait pas forcément comprendre clamant qu’il n’y avait jamais rien n’eut entre elle et Finan.

-J’ai pêché ça dans l’Eastside. Il a toujours été amoureux de toi, Quinn. Tu ne le savais pas ?

Elle le savait maintenant.

-J’imagine qu’il est tombé amoureux parce que tu parles la même langue que lui.

Et cette phrase, je venais de la dire en imitant l’accent irlandais de Finan et Leia. Je l’avais tellement entendu que je savais parfaitement l’imiter.

Elle finit par se prendre à la conversation alors qu’elle se fit indiscrète concernant « mes amours ». Elle parla d’A.J.. Elle demanda si elle allait bien. Je penchai légèrement la tête sur le côté en regardant Leia.

-Elle a disparu… Tu n’as pas lu ça dans les faits divers ?

Je disais ça en lui laissant, le temps d’une autre gorgée de whisky, de se faire autant de films qu’elle le voulait. Puis, je repris :

-Du coup, je ne sais pas si elle va bien ou non. Elle peut être partie sans laisser d’adresse… Elle peut avoir fait une mauvaise rencontre aussi… Bref, les possibilités sont énormes. C’est A.J.. Elle est cinglée. Elle peut être n’importe où et dans n’importe quel état.

J’haussai des épaules.

-De toute façon, ça faisait un moment qu’on ne se voyait plus. Voilà où en sont mes amours.

Je parlais de ça comme si ça n’avait aucun intérêt. Mais, en réalité, la mort d’A.J. me restait encore en travers de la gorge même si j’avais Sky maintenant.

-Et ton beau-frère ? Il va bien ? Lui aussi ça fait un temps que je ne l’ai plus vu. Il faut dire que je deviens sage.

Non, j’étais juste plus doué ce qui m’empêchait de finir en cellule. D’ailleurs, mon petit sourire trahissais que je ne pensais pas du tout être devenu plus sage. Juste meilleur.

@ Billy Lighter

S’il en était à son premier verre ici, je n’aurais pas été surprise d’apprendre qu’il avait picolé ailleurs, en tous les cas, il m’en donnait l’impression. Non pas qu’il ne savait pas tenir une phrase ou qu’il s’affalait sur le comptoir mais par son air perdu, son regard absent. Il semblait loin dans ses pensées jusqu’à ce que, son second verre en main, il me parle de ma vie sentimentale. Je choisis de lui répondre sur le ton de l’humour mais sa réplique n’est pas sur le même ton.

- Alors tant mieux, je n’aurais pas voulu te briser le cœur.

Non pas que j’en avais quelque chose à faire de ses sentiments, mais avec la réputation qu’il traine, je préfère ne pas l’avoir contre moi, en fait, je préfère qu’il ne pense pas du tout à moi, ni en bien, ni en mal, lui servir ses verres, prendre son argent fin de toute collaboration possible !

Je ne m’attendais pas qu’il me parle de Finan Quinn, surtout pas de cette manière.  Je trouvais ridicule comme allusion, Finan et moi n’étions que des amis il n’avait jamais été question d’autres choses entre nous deux.  Alors je regardais Fleming qui expliqua qu’il avait entendu ça dans l’Eastside, qu’il avait toujours été amoureux de moi. Si ça m’avais figé l’espace d’une seconde, je me repris ensuite en me disant que Fleming n’avait cherché qu’à me surprendre, qu’il avait réussit mais que si Finan avait réellement eu des sentiments pour moi, il me les aurait avoué, nous avions une belle communication lui et moi, quand il venait ici, nous parlions de tant de choses…

Je n’aimais pas me faire surprendre, encore moins par des gens que je ne connaissais pas alors, je décidais de lui retourner un peu sa propre question en lui demandant ce qu’il était advenue de sa copine, cette belle blonde qui trainait jamais bien loin de lui. Il balança, sans émotion qu’elle était disparue, que j’avais bien dû le voir dans les journaux.

- Oui, j’avais vu dans les journaux qu’elle était portée disparue mais je n’ai pas suivis en profondeur l’histoire. Peut-être aurait-elle pu redonner signe de vie depuis.  Elle avait suivie en thérapie un jeune que je connais.

Je trouve ça gros d’entendre de la bouche de Fleming que son ex petite copine était cinglée, il devrait se regarder dans un miroir avant d’affirmer n’importe quoi. Et ne dit-on pas que derrière chaque folle, ce cache un fou qui l’a rendu ainsi ? Je n’avais cependant pas le courage de le lui faire remarquer.

- Cinglée ou non, elle nous avait été chaudement recommandé.

Les mots m’avaient échappés.  Je parlais trop et je regrettais déjà les avoir prononcés, alors je me retournais, l’air de rien, pour passer un coup de chiffon sur les bouteilles derrières moi, puis je déposais la bouteille de brandy que je venais de faire briller avant de me retourner pour regarder Ward qui demandais des nouvelles de Jordan.

- Il se porte à merveille ! Je ne crois pas que tu lui manque, si cela peut te rassurer !

Un paquet de trouble en moins, personne n’allait s’en plaindre, pas vrai ?

J’attrapais mon cabaret et sortis de derrière mon comptoir pour aller nettoyer une table et prendre une nouvelle commande de mes piliers de taverne préféré, revînt remplir des pichets, retournais les leur porter puis, encore, retournais derrière mon comptoir pour mettre l’argent dans la caisse et nettoyer les pichets vides.

- Alors tu deviens sage ?  Tu as réorienté ta carrière ?

@ Billy Lighter

Leia n’aurait jamais su me briser le cœur pour la simple et bonne raison qu’elle ne m’avait jamais intéressé. Elle disait que c’était tant mieux parce qu’elle n’aurait jamais voulu me briser le cœur. Je ne savais pas vraiment dire si c’était de l’ironie ou si elle le pensait vraiment à cause de ma réputation.

Alors, je ne fis que confirmer que, si elle ne m’avait aucunement brisé le cœur, elle avait certainement cassé en plusieurs morceaux celui de Quinn. Si Finan savait jouer les gros dur, il n’en était pas moins extrêmement sensible sur certains points. Il était psychologiquement facile à démolir. Il suffisait de savoir où taper. Et je savais toujours où taper avec lui. Mais là, pour la cause, c’était Leia que je voulais toucher mais elle ne semblait pas croire ce que j’avançais. Mais je savais que j’avais fait naitre le doute en elle et ça me suffisait.

Mais la barmaid avait du répondant et, surtout, de quoi alimenter la conversation tout en essayant de la retourner à son avantage. Ainsi, c’est d’A.J. qu’on parlait. A.J. qui avait disparu. C’est ce que je dis. Parce que, pour L.A., l’histoire en était là. Personne ne savait que j’avais étranglé A.J. dans l’appartement de Carolyn avait d’aller enterrer son corps à des kilomètres d’ici.

Personne.

Et je crois que personne ne cherchera vraiment après elle… Pour moi il n’y avait qu’elle et pour elle, que moi. On avait ça en commun : aucune famille. C’était notre atout…

Enfin, sauf quand la mort venait frapper à la porte, là, ce n’était plus un atout du tout.

Même si, maintenant, les choses avaient changé parce que j’avais Sky et, donc, une famille.

Je savais que ça allait me compliqué la tâche mais j’aimais Sky.

Leia confirma qu’elle avait bien entendu son avis de disparition mais qu’elle n’avait pas suivi l’histoire en profondeur. Elle croyait, qu’entre temps, elle aurait donné signe de vie. J’haussai des épaules.

-Peut-être que c’est le cas. Je n’en sais rien et je m’en fiche un peu.

Mais ce qui était intéressant dans ce que disait Leia, c’était qu’elle connaissait un jeune qui était suivie, avant sa mort, par A.J.. L’information fut d’autant plus intéressant quand Leia ajouta qu’A.J. leur avait était chaudement recommandé. Donc, le jeune en question devait être proche de Leia. C’est ce que je soupçonnais vu la manière dont elle venait de présenter les choses. Mais son attitude trahissait aussi autre chose. Un « merde, j’aurais dû la fermer ». C’est ce que je ressentais sans savoir si je décryptais bien l’attitude de Leia. Je savais qu’elle n’avait pas d’enfant… Et elle avait dit « jeune », pas « petit enfant » ou même « bébé ». Donc ça devait être un gosse d’un certain âge. Le seul gosse que je connaissais dans l’entourage de Leia c’était Custer.

Mais ça pouvait très bien être quelqu’un d’autre. Leia devait avoir plus que Duncan et Jordan Keller comme proches.

Je ricanai, donc.

-Elle vous a été recommandé ? A.J. était doué pour faire penser qu’elle était une psy tout à fait compétente. Alors qu’au fond, elle adorait ce métier parce qu’elle se nourrissait des malheurs des gens et que ses plus belles réussites, pour elle, c’était quand ils finissaient pas se suicider…

Leia finit par se retourner vers moi quand j’enchainai en demandant des nouvelles de Jordan Keller. Elle prétendait qu’il allait bien et que je ne lui manquai surement pas. Je ricanai à nouveau.

-Moi, je pense que je lui manque. Ça doit lui manquer d’avoir, dans ses cellules, quelqu’un qui a un QI supérieur à 50.

Parce que, pour moi, tous ceux qui finissaient en cellule, à mon exception, n’était qu’une bande d’abrutis.

Je suivis alors Leia du regard alors qu’elle s’affairait à faire son boulot avant de revenir vers moi pour me demander si j’avais réorienté ma carrière. Je la regardai dans les yeux.

-Ouais. Dealer, c’est fini pour moi.

C’était vrai. Je ne dealais plus.

-Et tout ce qui va avec aussi, du coup.

J’esquissai un petit sourire en coin.

-Maintenant, je travaille dans les assurances. C’est un travail de connard aussi mais c’est légal. Ça me va bien, non ?

C’était un vrai bon mensonge, bien sûr, et je n’étais pas certain que Leia allait mordre à l’hameçon. Mais ça n’avait pas spécialement d’importance. Je n’allais pas lui dire que mon nouveau métier était de faire régner la terreur à South L.A. pour mon bon plaisir.

-Dis-moi, Leia… Le jeune que toi et je ne sais qui que tu connais avez envoyé chez A.J., il est toujours vivant ? Il est soigné de ses maux ou c’est encore pire ? Juste pour savoir si je dois rajouter un suicide au palmarès de mon ex.

Je ne pouvais pas me risquer à demander si c’était Custer. Je ne suis pas censé savoir que j’avais une fils… Et encore moins de savoir qu’il trainait chez Jordan Keller.

@ Billy Lighter

En général, je me garde bien de parler de ma vie privée avec les clients du Crazy Gingers parce que, premièrement, quand ils croient avec ne serait-ce qu’une toute petite chance, ils sont plus généreux avec les pourboires et ils sont tentés de revenir, mais surtout, parce que ça ne les regarde d’aucune manière.  Mais entendre Ward me questionner à ce sujet, ça me donne à la fois froid dans le dos et ça m’intrigue parce que je ne pensais jamais qu’il lisait ou s’intéressait aux potins People.

Je tentais donc, possiblement maladroitement, de rediriger la conversation sur ses amours à lui. Il avait l’habitude de se pointer ici avec une belle grande blonde qui aimait bien foutre le bordel ici de temps en temps mais, cependant, elle avait eu d’excellentes références  en son domaine, la psychologie, ce qui fait que je n’avais rien dit en apprenant que Jordan allait amener Grant à son cabinet. Je ne voulais pas mélanger les cartes puis, ça ne voulait pas dire non plus que Fleming allait rôder autour. J’en doutais en fait, el risque était minime, bref, je n’avais rien dit mais quand elle a été affichée comme disparue, je n’avais pas non plus levé la main. Elle n’avait, de toute façon, pas eu un grand impact sur Grant.

- Si tu t’en fiche, ça clos le sujet, alors !

Je n’allais pas extrapoler là-dessus.

J’en avais de toute façon trop dit.

Ça n’était tout de même pas tombé dans l’oreille d’un sourd puisque Ward commenta sur la recommandation qui nous avait été faite sur son ex petite amie mais en des termes beaucoup moins flatteurs. Je ne pu m’empêcher de grimacer tout en me demandant comment cela se faisait que personne pratiquant avec elle ou même des patients n’avaient vu clair dans son jeu et ne l’avait dénoncé à l’Ordre des psychologues. Un mystère de plus à ajouter à la liste.

Ce fut ensuite sur Jordan que Ward portait son attention, à savoir s’il lui manquait et je répondis par la négative, il ne devait certainement pas manquer à mon beau-frère ce qui sembla amuser Fleming qui croyait tout le contraire.

- Et bien, va lui demander toi-même, alors.  

Je n’allais certainement pas faire la messagère entre cette crapule et Jordan !

Mais puisqu’il est assit à mon comptoir et que je n’ai pas non plus des centaines de bouteilles à nettoyer, aussi bien discuter avec lui, au moins, ça passe le temps.

- Vraiment ? Tu fais dans l’assurance maintenant ? Tu n’aurais pas une carte d’affaire sur toi ? Je crois que le patron voulait justement revoir ses contrats…

Je ponctuais ma phrase d’un petit sourire moqueur. Je ne croyais pas un seul instant à la réorientation de carrière de Ward Fleming mais pourquoi ne pas lui laisser le bénéfice du doute, tant qu’à y être. J’allais lui proposer un autre verre en espérant qu’il allait décliner, payer et rentrer mais il me questionna sur la recommandation qu’on nous avait faite pour Angelica J. Litrell.  Je savais que ça allait revenir sur le comptoir et je m’en voulais terriblement de l’avoir échappé.

- Oui, il est toujours vivant merci de t’en inquiéter. Le neveu de Faith se porte très bien maintenant, il va graduer a la fin de l’année.  Il faut croire que parfois, elle savait ce qu’elle faisait, ton ex petite amie.

Je n’avais en fait aucune idée à savoir si Faith Maldonado avait de la famille mais c’est la première chose qui me sembla crédible et qui avait atterrit dans ma tête rapidement.

- Tu veux un autre verre ou tu paies tes consommations ? Tu dois te lever tôt demain, c’est du 9h à 17h que tu fais, j’imagine ?

@ Billy Lighter

En réalité, je ne me fichais pas tellement de la mort d’A.J. quoi que j’en dise à Leia… Je vivais le fait d’avoir tué A.J. comme un échec personnel. Je détestais perdre le contrôle... Parce que, quand je le gardais et quand je décidais qui, quand et où, je me sentais bien plus puissant. Or, avoir tué A.J., était la preuve flagrante que je ne pouvais pas toujours me contrôler…

Et je détestais ça.

Sans compter qu’A.J., je l’aimais… Et si je n’avais pas rencontré Sky, je serais, à l’heure d’aujourd’hui, soit mort, soit en prison. La première solution étant, toujours, la meilleure.

Mais j’avais gardé dans un coin de ma tête certaines informations lâchée, peut-être malgré elle, par Leia. Le jeune dont elle parlait, je soupçonnais que ça soit Grant Custer. J’avais vu le gamin en action et il lui manquait, assurément, une case. Il faisait une fixation sur Sky qu’il voulait garder uniquement pour elle.

Mais Sky était à moi.

J’étais persuadé, intérieurement, que Grant était tel qu’il était parce qu’il tenait de sa mère… Même si je savais que Daisy n’était pas du tout comme son fils. Mais j’arrivais à m’en convaincre facilement, malgré tout.

La conversation passa d’A.J. à Jordan Keller. Je connaissais Keller parce que j’étais un criminel réputé à L.A. et que, comme tout bon criminel qui se respecte, je connaissais la plupart des flics de la ville. Jordan Keller en faisait partie. Et, comme ça faisait très longtemps que je ne m’étais plus fait avoir, j’étais certain que je lui manquais malgré ce que disait Leia. Je lui donnai mon explication et elle répliqua que je n’aurais qu’à lui demander moi-même.

-Je le ferais… Si je le revois un jour.

En réalité, moins je le voyais, mieux je me portais… Et puis, je n’allais plus le revoir de sitôt. J’étais devenu bien trop malin pour me faire avoir. Même si la raison que je donnais à Leia était tout autre. A elle, je déclarais simplement m’être assagi et avoir un job dans les assurances.

Mais, vu comment elle me répliqua, elle ne me croyait pas vraiment. Leia faisait donc partie des gens qui croyaient que les gens ne pouvaient pas changer…

Elle faisait, donc, partie des gens qui étaient dans le vrai.

Les gens ne changent pas. Ceux qui croient le contraire sont des abrutis.

J’esquissai un petit sourire en coin.

-Je ne travaille pas, là. Alors, je ne me balade pas avec ma carte d’affaire. Je viens pour me détendre, O’Reily.

A elle de voir si elle voulait me croire ou non. En réalité, ça n’avait pas fort d’importance.

Et je revins sur le jeune dont elle m’avait parlé tout à l’heure. Mais, si j’étais persuadé que c’était Grant Custer, elle déclara que c’est le neveu d’une certain Faith. Faith Maldonado ? Celle de BleedingHeart. Peut-être… Quoi qu’il en soit, étant donné que ce n’était pas Grant Custer ou que Leia ne veille pas m’avouer que c’était Grant Custer, ça n’avait plus fort d’intérêt de parler de ça… Surtout que le gamin s’en était tiré. C’était une fin banale et qui manquait de saveur.

-Disons que, parfois, mon ex n’arrivait pas à ses fins, c’est tout.

Leia demanda alors si je voulais un autre verre ou si je m’en allais… Elle semblait pressée que je parte clamant que je devais sûrement lever tôt avec mes horaires d’assureurs. Je penchai légèrement la tête sur le côté.

-Oui. Mais dormir, c’est surfait.

Il n’était pas question que je parte avant la fête que je voulais, moi-même, provoquer. Et avec O’Reily comme témoin, ça sera d’autant plus drôle.

-Remet-moi un whisky, s’il te plait.

Elle ne pouvait de toute façon pas me mettre dehors.

Pendant qu’elle me servait, je regardai à nouveau autour de moi cherchant un moyen d’allumer la mèche.

Et j’en trouvais un… Il y avait un type, là-bas… Phil, il s’appelait… C’était un consommateur de drogue invétéré et, aussi, un coureur de jupons. Et il était justement en train de causer à son meilleur ami, Daniel. Mais ce que je savais pas Daniel, c’est que Phil se tapait sa petite-amie. Comment je le savais ? Parce que Phil, quand il n’était pas avec Daniel, et qu’il était trop bourré, s’en vantait.

Alors, j’interpellai Daniel.

-Hey ! Daniel !

Il se retourna.

-Quoi, Ward ?

Mon air été neutre et je penchai, légèrement la tête sur le côté.

-Tu savais que ton pote Phil se tape ta petite-amie ?

Daniel me regarda avec des yeux ronds avant de se tourner vers Phil dont le teint était passé du rouge poivrot au blanc immaculé.

Il n’en fallut pas plus pour qu’ils commencent à se crier dessus… Puis, à se taper dessus… Et comme ce genre de bagarres finissait, toujours, par dégénéré, je savais que ça n’allait pas tarder avant qu’une partie du Crazy Ginger ne se mette sur la gueule.

Je me retournai, alors, vers Leia, non sans afficher un sourire mauvais.

-La vérité, ça blesse, apparemment…

J’étais fier et elle pouvait le voir. Je la fixai toujours alors que le ton montait dans le bar.

-Ton patron doit revoir ses contrats, c’est ça ? Ce n’est pas vraiment étonnant vu le nombre de bagarres qui se passent ici…

Je me délectai du spectacle autant que je me délectais de mon whisky.

@ Billy Lighter

Je me serais bien passé d’une soirée avec Ward mais, malheureusement pour moi et heureusement pour lui, il est encore libre d’aller et venir comme bon lui semble. Je me contentais donc de faire mon boulot avec autant de courtoisie que possible mais les sujets de conversations ne pleuvaient et comme c’est lui qui a amorcé la discussion, je me vois mal m’en sortir en l’ignorant quoi que quand j’y songe, ça aurait quand même été mieux que d’essayer d’être courtoise.

Bref, de mes amours aux siennes, c’est vers Jordan puis le supposé nouveau job de Ward que notre conversation converge. Je doute sincèrement qu’il se soit réorienté dans le domaine des assurances. À moins que ce soit dans l’assurance tout risque du genre ‘’ Je t’assure que tu risque de te faire casser les deux jambes’’ alors oui, ça pourrait être possible.

- Ouais c’est comme moi dans le fond… Quand je ne suis pas derrière ce comptoir je n’ouvre jamais une seule bouteille de bière !

Il n’avait pas de carte pour la seule et simple raison qu’il ne travaillait pas dans les assurances, mais ça ne me servais à rien de continuer dans cette voix avec lui, il trouverait toujours un truc à redire pour me faire taire.

Il voulut ensuite en savoir plus sur le gamin pour qui nous avions eu recours aux services de son ex.  J’aurais bien aimé que cette information lui entre par une oreille et lui ressorte par l’autre mais il l’avait retenue. Je lui expliquais qu’il s’agissait du neveu de Faith et ça semble le satisfaire, en tous les cas, il ne demanda pas plus er je m’en trouvais soulagée.

Il acheva son verre, il pouvait bien partir, non ?  Mais non, puisqu’il m’en redemanda un prétextant que dormir ce n’était pas pour lui.

- Super…, marmonnais-je avant de lui servir son troisième verre.

Pendant un instant, je cru bien qu’il allait me lâcher, il regardait un petit peu tout autour de lui, sauf que j’aurais dû me douter qu’il ne cherchait que la braise pour souffler dessus.  Et il trouva exactement ce qu’il cherchait et en moins de temps qu’il ne faut pour cligner des yeux, la fournaise venait d’exploser.

- WARD !!!

J’étais en colère et complètement impuissante. Je ne pouvais pas me lancer dans la mêler et tenter de séparer les anciens amis, je ne pouvais que regarder avec désespoir le chef d’œuvre de Ward et les videurs tenter de calmer le jeu.

Puis ce fus l’escalade.

La bagarre qui avait éclot à une table entre deux amis se rependit à la suivante quand l’un, dans un geste brusque pour esquiver un coup, renversa le pichet de bière sur l’autre qui lui, se leva brusquement et frappa un autre qui  n’avait visiblement pas envie de voir sa bulle éclater et qui riposta sans attendre.

Je regardais ce chaos habilement orchestrer par Ward puis c’est sur lui que je portais ensuite mon regard.

- Pleins de nouveaux clients pour toi, on dirait bien !

J’allais en avoir pour des heures à  nettoyer ce carnage !

@ Billy Lighter

Je n’avais pas de carte sur moi pour la simple et bonne raison que je ne travaillais pas dans les assurances. J’avais un métier bien plus intéressant que ça… Un métier qui me permettait de tuer, intimider et gagner de l’argent tout en même temps. Et j’étais, en plus de ça, en haut de la chaine alimentaire…

Alors, je n’avais aucun intérêt à prendre un job de bureau réglo. Aucun.

Mais Leia fit mine de marcher dans mon mensonge. Je disais « fit mine » parce qu’en réalité son ton voulait clairement dire qu’elle n’en croyait pas un seul mot. Elle connaissait ma réputation. Et, à force de travailler ici, elle a dû se rendre vite compte que les gens ne changent jamais.

Et, puis, je ne la croyais pas non plus quand elle disait qu’elle n’ouvrait jamais une seule bouteille de bière en dehors du Crazy Ginger. Je suis sûr qu’elle en ouvrait pour Duncan de temps en temps.

Mais je ne fis pas de commentaire me contentant de ricaner un peu à sa réflexion avant de lui empêcher d’avoir le plaisir de me voir partir au lieu de reprendre un verre. Pour moi, la soirée ne faisait que commencer et j’espérais bien avoir un peu d’action au menu.

Je l’entendis marmonner alors qu’elle me servait à nouveau du whisky. Pendant qu’elle faisait ça, je réussi à trouver le moyen d’allumer la mèche. En fait, il n’en avait pas fallu beaucoup. Juste avoir les bonnes informations. Et c’était facile de les avoir en général.

Et une bagarre générale commença en moins de temps qu’il ne fallait pour le dire. Leia cria mon nom ce qui me fit sourire d’un sourire carnassier tellement j’étais fier et satisfait du résultat de mes « efforts ».

Elle, elle ne l’était pas. Elle était en colère. Mais elle ne pouvait rien faire contre le chaos qu’il y avait maintenant au Crazy Ginger.

Les videurs essayaient de faire leur boulot mais ce n’était pas évident. Je me tournai alors vers Leia qui déclara que j’allais avoir plein de nouveaux clients. Je ricanai.

-En effet… C’est mon patron qui va être content.

Je n’avais pas de patron. J’étais mon propre maitre. Mais je continuais à suivre ma ligne de conduite et faire comme si je n’avais pas menti tout à l’heure.

Je bus un coup de whisky toujours dos au carnage alors qu’un type, qui sortait tout droit de la bagarre, vint s’affaler à moitié sur le comptoire, juste à côté de moi. Je crois qu’il reprenait quelques forces avant de retourner dans la mêlée. Mais je ne lui en laissai pas le temps. Je me levai un coup le tirant par l’arrière du col et par le bras avant de frapper violement sa tête sur le comptoire.

Assez pour l’assommer.

Tout ça devant Leia.

Et je la regardai avec un sourire toujours aussi fier avant de me rassoir.

-C’est fin de soirée pour lui, on dirait…

Mais, malheureusement, la bagarre finit par s’apaiser… Les sorteurs avaient sortis ceux qu’il fallait alors que les autres étaient soit trop sonné, soit assez défoulé que pour continuer la bataille.

Je fis une moue me retournant vers Leia.

-Dommage… Personne n’a sorti de flingue…

Ça aurait été plus drôle. Je penchai légèrement la tête sur le côté en regardant Leia après avoir achevé, d’une traite, mon whisky.

-Tu as aimé pour petit spectacle, O’Reily ? Tu en veux encore ?

Parce que ça pouvait toujours s’arranger.

@ Billy Lighter

La conversation que j’échangeais avec Ward n’était ni plaisante, ni désagréable. Elle était platonique, sans profondeur comme l’était la majorité des conversations que je pouvais avoir soir après soir, ici derrière mon comptoir, avec différents clients. Mais avec Ward, c’était quand même plus délicat. On ne savait jamais quand un truc anodin pouvait lui faire péter un capable, cet homme était rien de moins qu’une véritable bombe a retardement.

Cependant ce soir, il étai seule et l’ambiance était au beau fixe, il m’était permis de croire que la terre ne tremblerait pas.  Je servis donc un troisième verre à Ward même si je supposais que, avec son nouveau job, il devait avoir besoin d’une bonne nuit de repos.

C’est probablement ce qui déclencha la bombe Fleming.

Il s’adressa directement à l’un des clients attablé tranquillement avec un pote, pour lui verser une véritable douche froide sur la tête et s’en suivis alors un déferlement d’insultes, de bousculades, puis de coups de poings et de tables qui se renversent.

J’étais pétrifié sur place.

Non pas par peur mais par colère et haine.

J’étais en colère de ce que venait de faire Fleming et je le détestais  plus encore, si c’était possible. J’avais envie de lui casser mon cabaret sur la tête mais je n’en fis rien. Je regardais les videurs séparer les malheureux et tenté tant bien que mal de calmer les esprits.

- On dirait bien, oui ! Tu es satisfait, j’imagine. Tu as eu ce que tu voulais, il y a eu une bagarre, tout va bien dans ton petit monde.

Je respirais lentement pour me calmer tout en pitonnant la facture de Ward sur la caisse puis lui sortis son ticket.

- Ils n’ont pas tous un flingue caché dans le pantalon comme d’autres.

Je plaçais le ticket de caisse près de la main de Ward.

- Non. Pas vraiment non mais ça, tu t’en doute, j’imaginer. Je vais prendre ma pause alors si tu pouvais payer ce que tu dois, je t’en serais reconnaissante.

J’espérais qu’il ne finisse par partir et nous laisse tranquille.  Il n’avait personne d’autre à aller embêter ? Ou une femme avec qui flirter ?  Peu importe ses plans, je me refuserais de lui servir un autre verre ce soir, peu importe ce que mon patron allait dire ou le chantage que me ferais Ward.

@ Billy Lighter

Je voyais bien que tout ce que j’avais fait n’avait pas plu du tout à Leia. Je savais qu’elle détestait les bagarres. Elle les haïssait même. Alors qu’il ne suffisait, souvent, qu’une petite phrase bien placée pour faire s’embraser son lieu de travail. En même temps, c’est elle qui avait choisi de venir travailler ici. C’est qu’elle devait un peu aimer ça au fond. Sinon, ça ferait bien longtemps qu’elle aurait été cherché un autre job ailleurs.

Quant à moi, j’avais eu monde petit moment de détente. Même si, je devais l’avouer, j’étais resté sur ma faim. Je n’avais eu le temps que d’assommer un seul type. Je devais avouer que je préférais encore plus prendre part à tout ça et envoyer des poings dans la tronche des autres.

Mais ce soir, savourer ça à côté d’une Leia en colère me faisait encore plus plaisir que de frapper plus fort que les autres et envoyer quelques abrutis bourrés à l’hôpital.

J’entendais Leia pester que j’étais satisfait. Que, après cette bagarre, tout aillait bien dans mon petit monde. J’esquissai un petit sourire en coin.

-J’aurais voulu plus que ça.

J’aurais voulu plus de sang… Voir même un flingue de sorti. Quelque chose qui aurait encore plus fait monter la tension et la peur. Mais je n’avais pas eu ça. Juste des poings et des sorteurs bien trop rôdé que pour paraitre surpris. C’est, en quelque sorte, ce que je disais à l’Irlandaise qui répliqua que tous n’avaient pas un flingue caché dans le pantalon avec des sous-entendus qui m’arrachèrent un sourire en coin.

-Il y en a plus que tu ne le crois qui se balade avec un flingue dans la poche, Leia… Bien plus que tu ne le crois.

Elle me fila alors mon ticket de caisse alors même que je ne comptais pas partir. Je lui avais dit… Mais c’était à peine si elle ne me foutait pas dehors. Elle répliqua qu’elle n’avait pas aimé le spectacle. Et elle m’incitait à payer en espérant, sûrement, que je sois parti à son retour de pause.

Je ne comptais pas partir.

Plus elle le voudra, moins j’en aurais envie.

-Mais j’ai encore envie de boire… Et les sorteurs ne m’ont pas sorti, O’Reily. Il n’est pas question que je parte.

J’achevai mon verre d’une traite.

-Sers en mois un autre !

Mon ton était ferme alors que je la regardai droit dans les yeux.

-Le client est roi, non ? Ce n’est pas ça la devise ?

Si. Ça l’était.

-Sers en mois un autre, maintenant.

Je penchai légèrement la tête sur le côté.

-Fait-le et je te promets que, jusqu’à la fin de la soirée, il n’y aura plus aucune bagarre…

J’esquissai un sourire en coin. Je voulais voir si elle allait le faire. Si elle allait me laisser ce pouvoir. J’aimais ce petit jeu. Un petit jeu auquel je n’avais plus joué depuis un moment.

@ Billy Lighter

Ici nous avions l’habitude des bagarres d’ivrognes, les esprits s’échauffent après un discours douteux, une blague mal formulée, c’était monnaie courante et parfois, ça dégénérait assez pour devoir faire appel aux flics, il faut dire que nous avions toute une belle ribambelle de moineau dans notre clientèle. Mais aucun d’eux n’arrivait à la cheville de Ward Fleming.  Il n’y avait que lui pour partir une bagarre par plaisir, parce qu’il trouvait que l’ambiance ne volait pas autant haut qu’il ne le voulait.

Il me fit donc une magnifique démonstration de son talent en provoquant une querelle entre deux clients sagement attablés. Il ne s’en fallu pas de beaucoup pour que des tables se renverses et que notre videur fasse maison net. C’est un spectacle assez triste qui n’a pourtant pas suffit à Ward qui aurait aimé que ça explose d’avantage.

- Peut-être mais ils ne le sortent pas parce qu’ils s’ennuient !

Je voulais mettre un terme à cette conversation et l’obliger à partir. C’était l’heure de ma pause et je comptais bien voir son tabouret vide à mon retour. Alors je sortis son ticket de caisse et le lui donnais mais bien sur, il n’avait pas envie de partir et il avait raison, à mon plus grand malheur, je ne pouvais pas décider de le virer juste parce que j’en avais marre de lui. Il réclamait un autre verre et je n’avais d’autre choix que de lui servir.

- Très bien…

Alors je posais rudement un verre près de lui et vidais l’alcool dedans avant de déposer la bouteille à sa place.

Peut-être qu’à force de boire il finirait par de bourré à un point tel qu’il en oublierait sa passion dans la vie : foutre la merde partout où il passe. Et s’il devait se rendre à ce point d’enivrement, il me ferait très plaisir de lui appeler un taxi pour le ramener à l’autre bout du monde.

Je lui servis donc son verre, et les suivant, puisqu’il était toujours là après ma pause, malheureusement. Je continuais mon boulot, allant nettoyer la salle quand besoin il y avait, en allant porter d’autres pichets, et parfois il y avait un client pour prendre place au comptoir et  il me faisait vraiment très plaisir de discuter avec lui pour ignorer Ward qui collait et qui,  malheureusement, semblait supporter très bien l’alcool.

L’heure tournait et bientôt, ce fut le last call pour tout le monde, le moment ou jamais de commander un dernier verre et de le boire rapidement parce qu’il serait l’heure de virer tout ce beau petit monde pour fermer la place.

- Tu veux le dernier verre de la bouteille ou tu as ton compte ?

Je me disais que, lorsqu’il se lèverait, l’alcool ferait son effet. Je l’imaginais déjà s’affaler au sol comme une lamentable et pathétique crêpe. Si ça devait se produire, je me marrerais que trop bien en racontant ça à Jordan. Ou alors…

- Tu n’es peut-être pas en état de conduire. Tu veux que je t’appel un taxi ou que je te raccompagne ?

Tiens, ça m’intéressais soudainement de jouer à l’enquêtrice !

@ Billy Lighter

Si… Certains sortent leur flingues parce qu’ils s’ennuient. Il y en avait qui avait la gâchette facile… Même si, c’est vrai qu’en plein milieu d’un barre, rare étaient ceux qui tentaient le coup. Je ne crois pas l’avoir déjà fait, d’ailleurs. En rue, si. Dans une planque ou l’autre, je le faisais très souvent. Mais jamais dans les lieux publics. Alors, je ne fis qu’hausser les épaules avant que Leia ne me montre, en me filant mon ticket de caisse, qu’elle ne voulait plus me voir.

Mais je ne voulais pas partir… Tout comme je ne voulais pas lui donner la satisfaction de partir.

Alors, j’exigeai un autre verre déclarant qu’elle n’avait pas le choix. Et, pour cause, elle n’avait pas le choix. Je ne m’étais pas fait viré parce qu’on vire rarement celui qui allume la mèche mais plus souvent les abrutis qui se battaient. Alors, j’avais le droit de boire autant de verres qu’il me plaisait.

Elle me servit donc un verre en me faisant bien comprendre qu’elle le faisait à contre cœur. Elle me laissa même la bouteille, ce qui n’était pas plus mal. J’allais rester là pour bien lui montrer qu’on ne se débarrassait pas aussi facilement de moi mais, pour ce qui était de discuter avec elle, j’avais eu ma dose de son accent irlandais.

Elle finit par prendre sa pause et, moi, par sombrer dans mes pensées si bien que j’enchainais les verres sans m’en rendre compte. Je pensais à Sky… Sky a qui j’avais dit que je rentrerais pendant la nuit. Pas spécialement tard mais pendant la nuit.

Mais je n’avais pas envie de rentrer.

Parce qu’elle risquait de me parler encore des bébés. Encore et toujours. Et je ne voulais rien entendre de ça, ce soir.

Quand mon regard n’était pas dans le vide, il était sur les gens du Crazy Ginger. Aucune autre bagarre ne semblait être prévue au programme… Dommage… Ça ne me fit que plus broyer du noir alors que je vidais la bouteille ni trop lentement, ni trop vite… Mon oreille, elle écoutait les conversations sans profondeur de l’Irlandaise avec les divers clients qui passaient au comptoire.

Puis ce fut le last call…

Déjà ?

Mon regard sortit du vide alors que Leia demandait si je voulais le dernier vers de la bouteille.

Je plissai les yeux.

-File le dernier verre.

Et je n’attendis pas vraiment qu’elle me le serve. Je me servis moi-même alors qu’elle demandait si je voulais qu’elle m’appelle un taxi ou si…

Elle voulait me raccompagner ?

Je ricanai. Je ne me rendais même pas compte que même mon ricanement trahissait tout l’alcool que j’avais bu.

Je n’avais plus bu autant depuis longtemps… Des excès, j’en faisais beaucoup quand j’étais chez les Los Diablos. J’avais freiné par après… Mais, aujourd’hui, j’avais enchainé les verres sans vraiment m’en rendre compte.

Je fixai O’Reily.

-Me raccompagner ? Tu veux me raccompagner… Toi ? La petite Leia O’Reily ?

J’affichai un sourire carnassier.

-Tu n’as pas froid aux yeux…

Elle n’avait pas peur que je la tue et que je cache son corps ? Non. Visiblement, non…

Ces Irlandais…

Mais d’un coup, j’arrêtai de sourire pour reprendre un air neutre.

-Tu crois quoi ? Je sais me débrouiller tout seul.

Et, pour cause, je mis une poignée de dollars sur le comptoir sans me rendre compte qu’il manquait quelques dollars pour payer tout ce que j’avais bu et je me levai d’un coup…

Trop vite…

Ma tête tourna d’un coup et je perdis l’équilibre. Mais j’eus quand même le réflexe de me rattraper d’une main au comptoir ce qui m’empêcha de tomber.

Je pris le temps de reprendre mes esprits grommelant un peu. Avant de me retourner vers Leia.

-Pas de taxi.

Je déteste les taxis.

-Ta voiture.

Je savais que si je conduisais, j’allais me prendre un mur. Et si je me prenais un mur, les flics allaient rappliquer. Et s’ils rappliquaient, j’étais mal barré.

-Tu vas me ramener chez moi.

Pourquoi pas mes hommes ? Parce que j’avais envie de jouer un peu avec le courage de Leia.

Quand je fus sûr de pouvoir tenir debout, je lâchai le comptoir avant d’attendre Leia et de la suivre à sa voiture. Mes hommes m’avaient vu. Ils savaient que ça signifiait qu’ils pouvaient rentrer chez eux sans même que je doive leur faire un signe.

Je pris place, tant bien que mal tellement je ne marchais pas droit, à aller jusqu’à la voiture de Leia et m’installer côté passager. Une fois que les portes furent fermées, je lui donnai l’adresse de mon appartement.

C’était stupide… Vraiment stupide. Mais mon esprit était complètement embrouillé par l’alcool au point où j’en oubliais Jordan Keller… Pour moi, Leia n’était qu’une petite barmaid à qui j’allais pouvoir faire peur pendant un trajet. Du moins, c’est ce que je croyais.

Alors qu’on fut en route, je déclarai :

-La dernière fille qui m’a raccompagné chez moi, plus personne ne l’a jamais revu.

C’était faux. Aucune fille ne m’avait jamais raccompagné. Mais c’était dans l’optique de faire peur à Leia de la façon la plus stupide qui soit. Et je rigolai. Sans savoir pourquoi.

@ Billy Lighter

Ward avait absolument raison et de l’admettre, même en pensée dans ma tête, laissait un goût amer dans ma bouche, pire, comme si je venais de vider un shooter de vinaigre.  Je posais donc la bouteille près de lui en lui offrant un sourire cynique et je continuais ma soirée de travail, après ma pause, en essayant de l’ignorer au maximum, jetant tout de même un coup d’œil de temps en temps en sa direction pour voir combien de fois il remplissait son verre. Il n’y allait pas de main morte ce qui était surprenant, lui qui se contentait de quelques verres, une pinte de bière plus souvent qu’autrement.  Il avait besoin de noyer quelque chose dans l’alcool et… ça piquait ma curiosité, j’avais envie de savoir ce qui pouvait bien turlupiner dans la tête de Ward Fleming.

Je saurais peut-être comment percer son mystère alors que l’heure de la dernière tournée sonna et que je proposais un dernier verre à mon client le plus indésirable. Il me regarda d’un air surprit, comme si avec chaque verre, il perdait un peu plus la notion du temps.  Il avait sifflé la bouteille, il ne restait que l’équivalent d’un shooter, il pouvait bien se l’enfiler celui là aussi, au point où il en était.

- Monsieur est servie !

Je vidais le restant de la bouteille dans son verre et encaissais ensuite l’argent des derniers clients à quitter le bar. Il ne restait que moi, Ward et les videurs. Comme il n’y avait pas eu beaucoup de grabuge ce soir, et que j’avais tenu mes tables propres tout au long de la soirée, je n’avais pas besoin de m’attarder ce soir. Le patron ferait lui-même la caisse puis il fermerait l’endroit dès que nous aurions quittés.

J’allais peut-être m’en mordre les doigts mais je proposais à Ward de lui appeler un taxi ou mieux, d’aller le conduire moi-même.

- Oui, je sais, je suis généreuse à ce point là moi ! Un jour ça me perdra ! Profite, c’est de bon cœur et c’est gratuit en plus… avec ce que tu viens de boire, tu ne dois plus avoir un rond en poche…

À vrai dire, je m’en foutais un peu de ses finances, j’étais curieuse de voir où il vivait et qui sait si je n’arriverais pas à le faire parler pendant le trajet. De quoi ? Je n’en avais aucune idée mais le risque en valait peut-être la chandelle…

- Je sais que tu peux te débrouiller seul, je n’en doute pas un seul instant, je te l’offrais, c’est tout… rien ne t’y oblige.

Je ramassais mes clés et mon sac toujours en l’observant. Il n’était clairement pas en état de conduire puis je prit le combiné du téléphone derrière le comptoir du bar pour faire mine de téléphoner un taxi mais Ward décida qu’il n’en voulait pas et qu’il acceptait ma proposition.

’’Ouiiiii !’’, en espérant cependant que je ne termine pas dans la rubrique nécrologique des prochains jours…

-   Leia ?! Tu… Soir prudente ! Lâche un coup de fil en rentrant chez toi !

Je fis un signe de la tête à Bob, le videur puis j’accompagnais Ward jusqu’à ma voiture et le laissais grimper à bord. Je n’allais pas pousser l’injure jusqu’à l’aider, lui qui sait de toute façon se débrouiller lui-même.

Cependant, une fois à bord, je regrettais mon audace quand il lâcha que la dernière fille qui l’avait raccompagné, bah, personne ne l’avait jamais revu. J’eu un petit rire et je le regardais avant de lui dire que Bob s’attend à mon appel et qu’il m’a vu partir avec lui alors…

- Disons que ça serait pas très bon pour ton image si je n’appelais pas Bob dans la prochaine heure…

Je fis démarrer mon moteur et appuyais sur l’accélérateur en conduisant selon les indications de Ward. Son discours était à la hauteur de sa réputation, teinté de violence contre la planète en entier.  J’essayais de ne pas me laisser atteindre, de faire comme si il parlait de la pluie et du beau temps mais je n’arrêtais pas de me répéter que ce type était un grand malade avec plusieurs cases en moins.  Je ne fus pas fâché quand il me dit que je pouvais me garer, et ce fut même avec un grand soulagement que je sortis de la voiture pour lui tenir la porte, parce que ça semblait réellement laborieux, de voir qu’il y avait deux hommes qui discutaient près de l’abri d’autobus.

- Tu as besoin d’aide pour monter ou ça ira ?

@ Billy Lighter

J’achevai le dernier verre d’une traite comme si j’avais pris la phrase de Leia comme un défi alors qu’il n’en était rien. Et, après qu’elle ait tout encaissé chez tout le monde, elle me proposa de m’appeler un taxi ou de me ramener chose qu’elle faisait parce que, je la cite, elle est généreuse. Généreusement cinglée, vous voulez mon avis… J’avais une réputation, dans le coin, qui allait du dealer violent au serial killer. Mais ça ne semblait pas refroidir Leia qui disait que c’était de bon cœur et gratuit parce que, d’après elle, je n’avais sûrement plus un sou en poche. J’haussai des épaules.

-J’ai encore plein d’argent.

Non. Je n’avais presque plus rien sur moi. J’avais, effectivement, tout liquidé dans les verres que j’avais bu.

Mais je refusai disant que je pouvais me débrouiller seul. Ce qui était le cas. Je n’avais pas besoin d’une Irlandaise un cœur tellement grand qu’elle en devenait naïve pour me ramener chez moi. Elle disait que rien ne m’y obligeait.

Et j’allais partir.

Mais ma tête tournait au point où je faillis tomber.

L’offre de Leia étant toujours sur la table, je l’acceptai. Je n’avais aucune envie de finir dans une cellule, ce soir. Surtout pas en étant bourré de la sorte.

Le sorteur fit un commentaire. Visiblement, il avait peur pour Leia. A raison ? Peut-être. Qui sait ce qu’il va se passer entre ici et chez moi. Qui sait ce qui me passera par la tête.

Je ne dis rien au videur. Je ne fis que suivre Leia jusqu’à sa voiture où je m’engouffrai sans avoir besoin de son aide même si mon équilibre était totalement instable.

Et c’est là que je commençai mon petit numéro en inventant l’histoire d’une fille qui m’aurait raccompagné et, qu’après ça, on n’avait plus jamais revu.

Mais ça n’empêcha pas Leia de répliquer et démarrer. Bob, le videur, savait qu’elle était partie avec moi et que si elle n’appelait pas dans l’heure qui suivait, les soupçons seraient entièrement sur moi. Je ricanai mais un ricanemant qui perdait de sa force tellement mon corps était engourdi par l’alcool.

-Et ben, je n’aurais qu’à tuer Bob juste toi... Un de plus, un de moins…

Je n’allais ni tuer Leia, ni tuer Bob mais le faire ne m’aurait fait ni chaud, ni foid. C’est ce qui transparaissait de mes paroles alors que l’alcool me faisait dire tout haut tout ce que je pensais tout bas.

-Vous ne serez que deux de plus sur ma liste.

C’était un aveu… Mais, en même temps, je savais que ce n’était pas forcément préjudiciable. J’étais un tueur… Mais on n’avait encore jamais su me relier à un seul meurtre que j’avais commis.

Pourtant, dans ma vie, j’en avais commis quelques-uns. Mais je n’étais pas le genre de cinglé qui comptait chacune de ses victimes comme le faisait mon père.

Je posai ma tête contre la vitre et fermai les yeux. Mais ça ne m’empêchait pas de parler… Même si, je ne savais pas si je pensais fort ou si je parlais vraiment. J’étais loin… Très loin…

-La prochaine fois, je viendrais un vendredi soir… Il y aura plus de chance d’avoir une vraie bagarre.

Et j’enchainai les remarques du même genre tout en indiquant le chemin à Leia dont la conduite me donnait envie de vomir. Ça tanguait bien trop.

-Arrête de faire tanguer la voiture !

C’est ce que je disais, de temps en autre, sur un ton agacer avant de reprendre, chaque fois, un ton neutre et des commentaires du genre :

-Cette ville n’est remplie que de loosers… Quinn et Alonso sont des loosers.

Des commentaires chaque fois hors-sujet mais qui n’était que des pensées qui venaient à moi et que je disais tout haut sans m’en rendre compte.

Jusqu’à-ce qu’on arrive.

Elle sortit de la voiture et je sortis de la mienne mais avec tellement de difficulté que je dus m’appuyer, par après, contre la voiture avant.

La porte était là. La porte qui me mènera à Sky et, certainement, ses reproches.

J’avais le droit d’être bourré. C’est ce que j’allais lui dire, à Sky.

La porte d’entrée était maintenant ouverte et Leia demanda si j’avais besoin d’aide pour monter ou si ça allait aller. Je la regardai de haut.

-Qu’est-ce que tu crois ?  Que je ne sais pas monter des escaliers ?

Elle tenait toujours la porte et je m’avançai vers les escaliers… Je grimpai quatre marche… Quatre foutue marche… Avant d’être pris d’un vertige qui me figea littéralement sur place…

Je me retournai m’agrippant à la rampe. Je n’avais aucun équilibre et j’avais l’impression que j’étais à dix mètres du sol alors que je n’étais monté que de quatre marches. Je regardai vers l’entrée où était Leia.

-Je vais tomber…

Je dis ça alors que mes dents étaient serrer et que je tenais tellement fort la rampe à deux mains que mes jointures en étaient blanches.

Je détestais ça. Cette perte de contrôle total. Comme quand Guillermo avait failli tomber du toit.

Comme quand Sean était tombé de la falaise.

Je fermai fort les yeux.

-Je vais tomber…

Je répétais ça.

J’allais peut-être tomber mais pas de haut… Mais ma tête tournait trop et mon esprit était trop embrumé pour que je comprenne la stupidité totale de ma situation.

Même si… Si je grimpais encore, il était probable que je rate une marche et que je dégringole l’escalier.

-Je peux pas monter… C’est… Trop haut…

Alors que ce n’était que des foutus escaliers.

@ Billy Lighter

Honnêtement, je ne pensais pas que Ward accepterait mon offre de le raccompagner.  J’en suis la première surprise et Bob, qui avait toujours une oreille qui trainait quelque part, ne rata bien sûr pas notre conversation et me demanda de lui passer un coup de fil en rentrant chez moi. Dans la voiture, Ward ne manqua pas de vouloir m ‘effrayer en disant que la dernière fille qui l’avait raccompagné était aujourd’hui disparue. J’avoue que mon estomac se noua légèrement et je tentais de jouer d’assurance en répliquant que si Bob n’avait pas de mes nouvelles d’ici une heure, il serait le premier suspect, de toute évidence.

- Ah bon ? Parce que tu as une liste ? Très longue, cette liste ?

Je jouais gros, c’était vraiment très imprudent et Jordan, si je rentrais en vie, ne manquerait pas de me chauffer les oreilles pour avoir fait preuve d’autant d’imprudence, mais quelque chose me disait qu’il fallait que je le fasse.

Pourquoi ?

Je n’en savais rien ! Mais de voir Ward autant songeur installé au bar ça ne lui ressemblait pas, j’étais resté avec cet impression et je voulais percer le mystère. C’était très stupide de ma part, maintenant qu’il est dans ma bagnole, j’en prends pleinement conscience.

L’alcool lui faisait se délier la langue, il déblatérait plein de chose allant de ma façon de conduire à sa haine pour cette ville et Alonso et Quinn.  Je ne faisais pas tanguer ma bagnole, c’est lui qui se balançait d’un côté et de l’autre sur son siège.

- Ouais ben on est tous le looser de quelqu’un d’autre tu sais ! Et arrête de bouger sur ton siège, déjà, tu te sentiras mieux !

J’avoue qu’ensuite, je fis un peu exprès pour appuyer plus brusquement sur mes freins aux arrêt et pour tourner un rien plus serré, jusqu’au moment où il m’indiqua ou me garer. Je sortis de ma voiture par politesse et peut-être oui avec l’espoir qu’il me fasse monter. Ne croyez pas que j’entretenais des pulsions suicidaires mais…  cette idée fixe de percer son mystère me faisait complètement oublier d’être prudence.  Je lui proposais de l’aider mais même bien saoul, il avait encore sa fierté de mâle qui lui fit refuser mon aide, je l’avais piqué dans sa fierté.  Je le laissais donc grimper l’escalier mais bien vite, il tangua vers l’arrière, s’accrocha à la rampe et répéta qu’il allait tomber.

L’espace d’une seconde, j’eu vraiment pitié de lui ! J’ai même bien failli courir le secourir mais il pouvait bien tomber, et puis au pire, il se serait fait une entorse au poignet ou a la cheville. Ward aurait-il un point faible ?

- Ok, ok ! Je viens t’aider !

Je rentrais dans le halle du building et le rejoignis sur la quatrième marche et lui fit passer son bras autour de mes épaules alors que je le soutenais du miens autour de sa taille. Cette scène avait quelque chose de complètement surréaliste et, forcément, je ne pouvais m’empêcher de me demander si je ne vivais pas mes dernières  minutes de vie.

- On va y aller doucement, d’accord. Une marche à la fois.

Les hommes saoul sont tous les mêmes ! Aucun tonus et ils pèsent, du moins ils en donnent l’impression, le double pour ne pas dire le triple de leur poids normal. J’en ai aidé souvent à se rendre à leur voiture, à se relever de leur chaise mais jamais à grimper autant d’escalier pour arriver à leur appartement.  Et ce n’est qu’en arrivant à son pallier que je remarquais  la cage d’ascenseur à l’autre bout du corridor.

- Tu n’aurais pas préféré l’ascenseur plutôt que de donner du travail à mon chiropraticien ?

Ward trouva ses clés, et ouvrit la porte pour que nous puissions rentrer et mon sac à main glissa de mon épaule quand je le libérais de mon étreinte.

- Je peux te demander un verre d’eau ?

Seulement je n’obtenue pas la réponse de Ward puisque la voix d’une femme visiblement inquiète nous accueillit et, qu’une fois qu’elle alluma la lumière, me fit figer sur place. Je ne m’attendais pas du tout à ça. J’aurais pu imaginer un million d’autre chose mais pas à tomber sur la babysitter de Grant que je savais enceinte, de son mari… Sam je ne sais plus qui.

- Il n’était pas en état de conduire…  Je dois y aller !

Je tournais des talons et descendis quelques marches avant de revenir sur mes pas, d’entrer à nouveau dans l’appartement pour y récupérer mon sac.

- Malaise… désolée…

Je fuyais ensuite comme une petite souris.

@ Billy Lighter