Aujourd’hui, c’est le bon jour pour parler à Jack bien qu’il n’y ait aucun bon jour pour annoncer ce que je m’apprête à lui annoncer. J’en ai eu des palpitations toute la nuit, je me suis levée la gorge sèche, les mains moites, le cœur absolument retourné mais, ma décision est prise.  Brooke va chez le dentiste avec Jesse, pauvre petit bonhomme ! Lui aussi il a eu une bien mauvaise nuit, il avait sa propre anxiété à gérer, mais quelle idée aussi d’amener un enfant chez le dentiste et lui vendre l’idée que ça va être chouette parce qu’il pourra ensuite choisir la saveur de son dentifrice ? C’est quand même ce qui arrive quand on s’empiffre de chocolat et qu’on ne fait que passer sa brosse a dent sous le jet du robinet pour faire croire qu’on les a nettoyés.

Jack et moi seront seuls à la maison c’est pour cette unique raison que le moment est idéal, bien que jamais franchement bon.  J’ai joué la comédie toute la matinée, fait comme si tout allait bien  et attendue patiemment que Brooke et Jesse quitte, ainsi que Sloan, la cousine de Jack, qui devait prendre part à un tournage.

Tout le monde a plein de projets en ce moment, c’est cool. J’ai un examen de chimie a réviser, c’est beaucoup moins cool mais mieux que le dentiste !

Je me suis avancé dans le salon, là où est installé Jack, avec son journal et j’Ai souvent ouvert la bouche avec l’intention de prononcer des mots, de faire des phrases mais je me ravisais à la dernière seconde et restais muette. Je me frustre moi-même.

J’ai décidé d’accepter l’offre de Daniele Ricci, non pas parce que je n’ai plus confiance en Jack, ni même parce que j’ai changé d’opinion à son sujet, non, c’est tout le contraire. Il restera toujours le meilleur manager du monde à mes yeux, celui qui m’a donné ma chance, celui avec qui j’ai vécu beaucoup de première fois. Oh mon dieu ! Je me souviendrai toujours… la honte d’avoir eu mes premières règles et d’avoir été seule avec lui. Il ne savait pas comment faire et il a trouvé de l’aide en allant chercher Miss vernis à ongle.  Je ris aujourd’hui, surement que Jack aussi rigolerait mais ce jour là, oh là là !

Mon premier single, ma première tournée. Jack m’a donner mes premières chances, il a été pour moi un père, un confident, un ami, c’est tout ça que je veux garder avec lui. Je suis prête à essayer autre chose, à voir si je peux aller ailleurs, et je sens que c’est avec Ricci que ça se passe, le truc, c’est de le dire à Jack.

Je n’ai pas même annoncé à Daniele Ricci avoir décidé de le suivre ! Jack mérite d’être le premier, enfin, le second parce que Julian le sait.

- Jack ? J’aimerais te parler de quelque chose.

Ça y’est ! J’ai lancé ma ligne… J’ai fais le premier pas ! C’était le plus difficile, il me faut maintenant continuer.

- Je… heu… Je réfléchis à beaucoup de choses depuis un bout de temps et je me sens prête à tourner la page, à aller de l’avant, explorer de nouvelles choses.

Et j’ai peur qu’il me dise ‘’ Super, justement j’ai songé à …’’ et sortirait des lapins de son chapeau, une tournée, des concerts, des choses qui m’allumaient avant, qui m’allumerais maintenant.  Il est facile de dire que j’ai besoin de changement mais à quel prix ? Jack, le père, le confident, l’ami, je ne veux pas le perdre, pour rien au monde !

- Je t’aime, comme une fille aime son père, je veux que tu le sache.

Et là, je sens que mes larmes me montent déjà aux yeux.

@ Billy Lighter

Les nouvelles n’étaient pas bonnes pour Billy Lighter. Je ne lisais pas L.A. People, mais le journal local mais aucun doute que L.A. People allait ou en faisait déjà les choux gras de cette affaire de violence conjugale. La pauvre April Fox venait de faire les frais du caractère bipolaire du chanteur et je me demandais vraiment comment Lenny Knowles allait gérer ça.

Ce fut Olivia qui me sortit de ma lecture et de mes réflexions.

La jeune chanteuse avait meilleure mine depuis qu’elle et Julian, son mari, s’étaient réconciliés. Mais là, elle me paraissait un peu pâle quand même. Un peu triste ? Oui, aussi, un peu triste ? Alors quand elle m’annonça avoir quelque chose à me dire, je repliai mon journal que je posai sur mes cuisses.

-Bien sûr… Assied-toi, Livia… Et dis-moi ce qui te tracasse.

Un peu timidement, ce qui ne ressemblait pas à Olivia, elle me dit qu’elle était prête à essayer de nouvelles choses, de nouveaux projets et j’eus un sourire jusqu’aux oreilles de la voir à nouveau motivée pour créer, écrire et chanter.

-Alors nous allons tout faire pour mettre ça en place ! Je te fais confiance ! Je suis content de te voir à nouveau motivée pour des projets, on va faire du beau travail.

Je voulu me lever pour aller la prendre dans mes bras mais ce fut sur un ton un peu bizarre que Livia continua en disait qu’elle m’aimait comme une fille aime son père. Et ce changement de ton me fit peur et me freina dans mon élan… D’autant que Livia était de plus en plus pâle.

-Qu’est-ce qu’il y a Livia ? Moi aussi, je t’aime comme un père aime sa fille mais qu’est-ce qu’il y a ?

Je la regardai dans les yeux.

-Tu peux tout me dire, tu sais.

Elle avait les larmes aux yeux et je ne comprenais pas. Je ne comprenais pas.

Ou je ne voulais pas comprendre.  

@ Billy Lighter

Amener le sujet avec Jack n’était pas aussi facile que je l’avais imaginé quoi que je ne me fusse pas imaginer que la situation puisse être facile.  Jack est le premier qui a cru en moi, qui m’a offert ma première chance, qui m’a soutenue au travers tant d’épreuves et moi, j’allais lui planter un couteau dans le dos en le quittant pour son compétiteur de la même tour.

Ce qui me fit encore plus douter fut lorsqu’il me confirma que nous allions faire du bon travail ensemble, preuve qu’il y avait lui aussi réfléchi, qu’il avait probablement développé des idées, des projets, peut-être même qu’il avait avancé des propositions.

J’esquissais un demi sourire alors qu’il disait lui aussi m’aimer, comme un père aime sa fille, ça me rassurait mais pas encore assez pour être à l’aise de lui dire que je le quittais. Ce genre de chose ne se fait pas à la légère, sans créer de dommage.

- Je sais que je peux tout te dire. Tu as été mon confident de bien des choses que je n’aurais même pas osé dire à ma mère.

Inutile de faire durer le suspens plus longtemps d’autant plus qu’il ne me servait à rien et allait faire péter du cœur mon pauvre Jack si je persistais dans cette voix.

- Je vais signer avec Daniele Ricci.

Je ne cherchais pas à fuir son regard. Je le regardais, lui et pas ailleurs.  Peut-être que je faisais une erreur mais j’assumais ma décision.

- Je l’ai rencontré au mariage de mes parents, nous avons discuté. En fait, c’est la seconde fois qu’il m’approche, la première fois c’était pendant la tournée.

Je me penchais légèrement vers l’avant, mes mains à plats sur mes cuisses.

- Si j’ai décidé de m’en aller avec lui, ça n’a rien à voir avec quoi que ce soit entre nous. Tu as toujours été parfait, tu m’as poussé à aller plus loin, à voir grand, à avoir confiance aussi.  Je n’ai pas de raison particulière pour expliquer ma décision, sauf peut-être l’envie d’aller voir ailleurs, d’essayer quelque chose de nouveau.

Je m’attendais à ce que Jack explose de colère ou qu’il me bombarde de question et de reproche, du genre que je le laissais tomber alors qu’il avait tout fait pour moi, jusqu’à m’héberger, à agir comme un père pour moi. L’aurait-il fait si je n’avais pas été sa protégée, artistiquement parlant ?  Bien sûr que oui ! Jack a bon cœur, il tend la main à son prochain, ça n’avait rien à voir avec notre lien d’affaire.

- C’est soudain, j’en ai conscience. Risquer, peut-être aussi. Ça me fou la trouille, je marche vers de l’inconnu et il a quand même une sacré réputation.

J’avais lâché le morceau et j’étais prête à affronter la colère de Jack. Je n’aurais peut-être pas de réponse précise à lui offrir s’il voulait savoir exactement pourquoi je le lâchais pour Daniele Ricci, il n’y en avait pas, bien que j’avoue que de voir mon père perdre son pari au profit de son meilleur ami me faisait sourire mais ce fait n’avait pas pesé dans la balance au moment de prendre ma décision, ça n’avait été que la cerise sur le gâteau.

@ Billy Lighter

Plus ça allait, plus j’avais peur de ce que Livia voulait me confier. Pourtant, c’était rapport à son art puisqu’elle venait de me dire qu’elle se sentait prête à tourner la page et à essayer de nouvelles choses. Mais il y avait quelque chose dans la manière dont elle le disait qui fit accélérer le rythme de mon cœur. Pourtant, c’était complètement irrationnel.

Et puis, j’étais son confident, elle pouvait tout me dire et elle avait toute mon attention.

Jusqu’au moment où elle lâcha le morceau. Il y eut alors un grand vide, un grand silence alors que ma gorge se serrait. Je ne m’étais pas attendu à ça. Il me fallait un moment pour me reprendre.

Elle allait signer avec Daniele Ricci.

Mon regard était plongé dans celui de la jeune femme. Et comme je ne disais rien, parce que je n’y arrivais simplement pas, j’en profitai pour l’écouter. Alors Ricci l’avait approchée par deux fois. Une fois pendant la tournée, une fois au mariage des Reed.

Je pris une grande inspiration, mais Livia n’avait pas fini, je la laissai donc continuer.

Et je réalisai que c’était un peu moi qui l’avait jetée dans les griffes de Ricci en lui disant de voir loin, de voir haut, toujours plus haut… Et qui pouvait la mener plus haut que Daniele Ricci en personne ?

Mais Livia avait peur aussi, comme un enfant qui, à la piscine, met pour la première fois les pieds dans la grande profondeur. Elle avait peur de perdre pieds.

Je lui fis signe de venir vers moi et la fit asseoir sur mes cuisses.

-Tu veux essayer avec Ricci…

Je raclai ma gorge qui était rauque d’émotion.

-Alors je te souhaite bonne chance. Mais sache que quoi qu’il arrive, je serai pas loin derrière, pour te rattraper si tu tombes.

Je lui souris.

-Tu marche depuis longtemps maintenant… Il est temps d’essayer de te mettre à courir.

Je lissai une mèche de ses longs cheveux blonds entre mes doigts.

-Sache que Brooke, Jesse et moi, on sera toujours là pour toi. Que ce soit pour des affaires personnelles ou professionnelles. On ne te laissera pas tomber.

Je lui souris, les yeux embués de larmes.

-Tu auras toujours ta place ici, quoi qu’il arrive. Et au pire, tu pourras toujours revenir en arrière.

@ Billy Lighter

Je venais le lâcher le morceau et la réaction que je redoutais tant ne se fit pas voir. Certes Jack ne sautait pas de joie, il me semblait un peu sous le choc, comme s’il cherchait là où il aurait cafouillé alors qu’il n’avait absolument rien fait pour orienter ma décision en ce sens. C’était tout le contraire, Jack est parfait ! Il sait écouter, réconforter, encourager. Il est disponible, il a des idées.
Je n’avais aucune raison à lui fournir, de toute manière,  je n’en aurais trouvé aucune sauf l’envie d’aller voir ailleurs, d’essayer autre chose.

Il ouvrit les bras pour m’inviter à m’y réfugié, j’en avais grandement besoin.

- Oui… , dis-je simplement alors qu’il répétait ce que je venais de lui annoncer.

L’émotion se trahissait dans la voix de Jack, j’avais peur de l’avoir blessé, insulté, Qu’il croit à tord que je lui avais joué dans le dos, conspiré avec l’ennemi alors qu’il en était rien.  J’étais moi aussi envahit pas l’émotion, ne sachant plus quoi dire, que faire. Il n’y avait pas de mode d’emploi pour rompre professionnellement avec quelqu’un ou alors, je n’étais pas encore rendu à ce chapitre.

- Merci Jack !

Ça me faisais tant de bien de l’entendre dire que quoi qu’il arrive, il serait toujours là, pas très loin et que je pouvais compter sur lui. J’acquiesçais de la tête, le laissant jouer avec mes cheveux avant d’appuyer ma tête contre sa joue, comme s’il était mon père et qu’il me berçait après un mauvais rêve ou un orage qui avait troublé mon sommeil.

- Ouais… c’est une façon de voir les choses.

Je rigolais doucement, cette image de premier pas avait marqué notre association et était même gravé à jamais dans notre histoire.  J’avais fait mes premiers pas alors qu’il me tenait la maison, j’ai ensuite marcher par moi-même et, maintenant, il était temps d’augmenter ma vitesse et de courir un peu.

- Ça fou la trouille mais de savoir que vous êtes là c’est rassurant. J’avais surtout peur de ça, que ça ruine notre lien, c’est la dernière chose que je veux.  Vous êtes trop précieux pour moi, vous êtes ma famille.

Plus que ma vraie famille, ça ne se compare même pas.

Je pouvais recommencer à respirer, sachant que Jack continuait de prendre soin de moi, plus comme un manager mais comme un père, un ami, un confident.  Je ne savais pas de quoi ça aurait l’air avec Daniele mais si je ne tentais pas l’expérience, je ne le saurais jamais.

- Je ne lui ai pas dit encore. À Daniele, je veux dire. Je préférais te parler à toi avant.

Et voilà c’était fait. J’allais, demain… ou cette semaine… me rendre chez BSC et rencontrer Daniele pour lui faire part de ma décision.

@ Billy Lighter

Olivia vint se réfugier dans mes bras, comme une enfant pendant un orage. Pourtant, au dehors, il faisait beau, un beau ciel bleu sans nuage. Mais en fait, Olivia venait juste de me déclarer son désir d’émancipation. Mais il résidait en elle comme une sorte de peur… Que je réagisse mal, sans aucun doute, mais aussi la peur de partir seule à l’aventure avec Daniele Ricci.

Je ne lui en voulais pas de me quitter. J’étais surpris, attristé, mais je ne lui en voulais pas.

Elle pouvait bien courir, maintenant qu’elle savait marcher. L’image la fit rire et pour cause : cette métaphore nous avait toujours accompagné. Mais quoi qu’il arrive, je serais toujours là pour la rattraper en cas de faux pas.

Mais ça, elle le savait, aucun besoin que je le lui dise.

Je restai là, à bercer Livia, tout contre moi. Il n’y avait pas de larmes versées ce qui était déjà bien. Elle avouait avoir la trouille mais je souris quand elle dit que nous étions précieux pour elle, que nous étions sa famille.

-Je sais, Liv… Je sais…

Et je la serrai encore un peu plus contre moi.

Elle disait qu’elle n’avait encore rien dit à Daniele, qu’elle avait voulu m’en parler avant.

-Et bien en voilà un qui va être ravi. Mais au moindre problème, sache que tu peux revenir en arrière, Livia. Un contrat, ça se rompt.

Je l’embrassai sur le front les larmes toujours au bord des yeux mais que je me refusais à verser.

-Maintenant, va, cours, vole, Livia.

@ Billy Lighter