La psy n’avait pas trainé avant de fixer un rendez-vous pour cette fameuse médiation avec Jordan Keller. Je savais que Keller allait essayer de me faire passer pour le pire des tueurs au monde mais il n’avait aucune preuve de ça alors j’allais me délecter de calmer le contraire mettant en avant mon histoire d’homme repenti.

Je ne savais pas si j’avais complètement convaincu la psychologue de Grant, la dernière fois mais j’étais certain que, après ça, elle ne pouvait pas ma qualifier de psychopathe. D’ailleurs, elle ne saura jamais me qualifier de tel pour la simple et bonne raison que je n’en étais pas un.

J’étais meilleur que ça. J’étais plus que ça.

Quoi qu’en pense Keller.

Je n’avais pas caché, la dernière fois, que j’avais l’intention d’obtenir la garde de Grant. Et j’avais comme l’impression que la psy n’aura pas caché ce fait à Jordan Keller malgré ses beaux discours sur le secret professionnel. Je ne faisais aucunement confiance aux psys et aux médecins à ce niveau. Pour ça que je pesais toujours mes mots quand je rencontrais l’un ou l’autre de ces spécimens. J’étais, donc, certain que Keller sera d’autant plus en colère et d’autant plus sur la défensive et c’était ça que je voulais voir aujourd’hui. Je voulais voir à quel point mes décisions pourrissaient sa petite vie si parfaite avec MON fils, qui était MA propriété. Tout comme Sky. Tout comme Heaven.

Il était à moi.

Je ne laisserais pas Keller en faire une arme destiné, un jour, à me détruire vu que, apparemment, le petit avait hérité du caractère de mon père. Voir pire… Du mien.

J’arriva, donc, au centre les mains dans les poches et, dans la salle d’attente, se trouvait déjà Jordan… Et Nell… Première surprise. Je ne pensais pas qu’elle serait dans l’équation. Tant mieux. Ça me fera un avantage supplémentaire. Parce que Nell avait l’art de voir le bon en chaque personne qu’elle rencontrait. Je crois que même si elle voyait mon père, elle pourrait lui trouver un bon fond. Tout comme je savais que j’avais un certain pouvoir sur Nell. Quelque chose de mystique.

Je les saluai.

-Salut Nell… Salut Keller…

Avant de m’asseoir sur un siège en face d’eux.

-Désolé de vous faire perdre votre temps avec ce genre de rendez-vous mais après tout ce que Sky m’a rapporté de votre entrevue à toi et à elle, Keller, je ne pouvais pas vraiment faire autrement que de continuer à me laisser me faire calomnier sans me défendre et montrer ma version des choses.

Je dis ça sur un ton neutre espérant que la psy n’allait pas tarder mais, en attendant, je souris à Nell.

-Tu as bonne mine…

Puis, je revins sur Keller.

-J’espère que Grant va bien…

Je savais que ça allait le faire fulminer et je savais que c’était son point faible. Sky me l’avait bien dit, ça, aussi.

Nous étions arrivés les premiers chez la psychologue de Grant… Je tenais la main de Nell et respirait fort et profondément. Il ne fallait pas que je m’emporte comme la dernière fois. Mais ça me faisait fulminer d’être face à Ward, un criminel notoire, et de ne pas pouvoir lui passer les menottes faute de preuves !

Au cul les preuves ! Tout le monde, dans les rues de L.A. et au commissariat, savait que Ward Fleming était l’un des pires fléaux de L.A. ! Seule Nell voyait du bon en lui mais Nell voyait du bon dans TOUT LE MONDE.

Je serrai un peu plus fort sa main quand Ward se présenta. Lui avait l’air à l’aise… je n’avais pas voulu que Nell vienne parce que je savais qu’elle risquait de me faire perdre des points en nuançant la menace que représentait Ward pour Grant ! Mais elle avait tellement insisté que je n’avais pu lui refuser.

Il faudrait que je la joue finement.

Et l’autre qui s’amenait, tout détendu et nous salua… Je ne répondis pas, les yeux fixés sur la porte du bureau de la psy en espérant qu’elle s’ouvrirait vite.

Mais mon regard se posa sur lui quand il affirma qu’il était là pour qu’on arrête les calomnies à son sujet.  

-Des calomnies ? Tout L.A. sait ce que tu es, Fleming. Tu es une plaie pour cette ville. Un jour, tu finiras à Saint Quentin comme ton père. J’en fais le serment. Un jour, Fleming, tu feras une erreur par excès de confiance, et ça te perdra.

Je reportai mon regard sur la porte.

-Je me réjouis d’entendre ta version des choses… Et je suis sûr que le Dr. Johnson est assez intelligente pour voir clair dans ton jeu.

Il dit ensuite à Nell qu’elle avait bonne mine… Je fixais toujours la porte.

Puis il s’adressa à moi en me demandant comment allait Grant.

-Grant va très bien, jusqu’ici. Il a de très bonnes notes…

Je marmonnai…

-Mais les chiens ne font pas des chats. Il a quelques problèmes de comportement. Mais avec notre aide à Nell et moi, il comprendra bien vite où est le bien et le mal…

La porte s’ouvrit et je me levai direct.

-Bonjour Dr. Johnson. Content de vous voir.

Il était temps, avant que Ward me fasse trop fulminer.  

Jordan était tellement tendu avant même que la rencontre ne commence qu’on aurait dit qu’un couperet était sur le point de s’abattre et trancher l’ambiance à vif. C’est pour cela que j’avais insisté pour l’accompagner à la rencontre bien que je gardais un mauvais souvenir de la précédente. Certains commentaires de Jordan m’avaient heurté mais puisque je savais la situation difficile pour lui, je ne lui en tenais pas rigueur.

Aujourd’hui, cependant, ce serait pire que la première fois avec Sky ! Nous allions faire face à Ward Fleming et je n’avais jamais statué sur ce que je pensais vraiment de lui et je ne tenais pas à le faire devant la psy. En fait, si on me posait la question, je crois que ma réponse pourrait compromettre sérieusement ma relation avec Jordan. Mais je ne pouvais pas mentir !

Nous étions les premier arrivés et je soufflais en me disant que peut-être, nous serions entrés dans le bureau de la docteur Johnson avant l’arrivée de Ward. Dans ma tête, ça voulait dire qu’il n’y aurait pas de confrontation ou tout du moins, pas une très grosse puisque Jordan comme Ward voudraient faire bonne figure.

Malheureusement, Ward arriva peu après et nous salua. Évidement, Jordan l’ignora mais moi, je le saluais en retour d’un petit geste de la main. Ça venait tout juste de commencer que déjà, je sentais que ça serait plus éprouvant qu’une balade en montagne russe.

Je passais ma main sur mon front quand Ward ouvrit la bouche pour amorcer sa mission ‘’Je suis ici pour faire péter les plombs à Keller’’ ce qui fonctionna parfaitement bien puisque Jordan lui répondit qu’il ne s’agissait pas de calomnie et qu’il finirait à San Quentin comme son père un jour. Alors je posais ma main sur la sienne pour qu’il tempère un peu ses réactions. Nul servait d’entrer dans le jeu de Ward car oui, je savais qu’il jouait un jeu.

- Je vais bien, merci. Comment va Heaven ?

Et moi, pas plus fine, je tombais aussi dans le panneau. Après Ward revînt sur Jordan en ce souciant à haute voix de l’état de Grant. Je sentais que les choses allaient rapidement escalader ou dégringoler mais en tous les cas, ça allait vite prendre des proportions incroyable si la psy n’intervenait pas rapidement. Jordan lui répondit en disant que Grant allait bien et qu’il avait de très bonnes notes et que grâce à notre aide, il saurait vite où est le bien et le mal.

- Il est très intelligent et appliqué. C’est un bon garçon.

J’allais dire qu’il pouvait en être fier mais ça ne se faisait pas. Ward pouvait être fier de Grant mais je ne pouvais pas l’encourager à l’être. Mon avis étant que ça aurait été comme de l’encourager envers son fils alors que le but de mon petit ami était justement d’éviter un contact entre le père et le fils. Mon dieu ! Comme ça devenait complexe et déstabilisant tout ça !

Peut-être que nous pourrions simplement permettre des contacts à Ward avec les mêmes conditions imposées à Sky et ainsi, nous garderions un contrôle sur la situation et nous pourrions mieux évaluer les aptitudes de père de Ward ? Ce n’était pas à moi de proposer cette solution alors j’allais me contenter de ne pas trop m’avancer si on demandait mon avis, aujourd’hui.

La porte s’ouvrit enfin et la docteur Johnson nous invita à entrer. J’avais les jambes molles et en m’avançant, je me retrouvais entre Jordan, devant moi, et Ward, derrière moi. C’était malaisant d’autant plus que cette situation arrivait plus souvent qu’elle n’en avait l’air et bien malgré moi !

Ça allait être un rendez-vous tendu. Je le savais d’avance… J’avais pourtant accepté de jouer les médiateur dans cette histoire. Pourquoi ? Parce qu’il en allait de la sécurité d’un enfant. Un enfant qui, bientôt, sera pris dans un bataille qui risque bien d’ajouter des complications à sa vie déjà pas facile. Et après ma première entrevue avec Ward Fleming j’avais de gros doute quant à penser que c’était une bonne chose que le petit tombe entre ses bras.

Cette entrevue était là pour que je puisse affiner mon jugement par rapport à Fleming. Je l’avais vu en face à face mais je voulais le voir dans d’autres circonstances. Des circonstances plus tendues. Je voulais, aussi, amener Ward à faire par de ses intentions à Keller afin que ce dernier puisse se préparer. Parce qu’il n’y avait rien n’à faire… Je sentais que quelque chose clochait avec Fleming mais, comme Keller, je n’en avais aucune preuve…

Mais rien n’empêchait d’aller à la chasse aux preuves… Et j’avais l’impression que cette entrevue pourrait nous aider à ça. Car si Ward Fleming était bel et bien un psychopathe alors il devait prendre tous ces rendez-vous pour un jeu. Un jeu dans lequel il peut être poussé à faire des erreurs… Si jamais il est blanc comme neige, alors, ça se verra aussi.

Du moins, je l’espérais.

Quand ce fut l’heure du rendez-vous, je pris une grande inspiration. Sur mon bureau, j’avais le dossier de Grant et celui que j’avais intitulé « Fleming »… Qui était, en réalité, celui de Ward. C’est ce dernier qui était le plus fourni de toute ce que j’avais emmagasiné ces derniers temps.

Je me levai pour sortir de mon bureau remarquant qu’ils étaient déjà tous là à déjà discuter dans la salle d’attente. Eleanor était de la partie. Je ne m’y attendais pas mais j’imagine que ça pouvait être une bonne chose. Parce que Keller avait le don de s’emballer parfois. Alors Eleanor pouvait être un soutien. Du moins, je l’espérais. J’espérais que Ward n’allait pas voir sa présence comme un avantage.

Keller fut le premier à se lever et me salua. Je voyais qu’il était déjà sur les nerfs. L’avantage c’est que, cette fois, il pourra s’allumer une cigarette étant donné que Ward n’était pas venu avec son enfant qui devait certainement être avec sa femme.

-Bonjour Monsieur Keller.

Je me tournai vers Eleanor et Ward.

-Bonjour Mademoiselle Harris et bonjour Ward. Veuillez me suivre.

Je les fis entrer et c’est vers mon petit salon que je les dirigeai après avoir embarquer les dossiers sur mon bras. Je m’installai les laissant prendre place comme il le désirait sachant que j’avais fait en sorte que ça fasse un rond et pas que je sois directement face à eux trois. Les dossiers étaient maintenant posé sur mes genoux, celui de Grant au-dessus de l’autre.

-Nous sommes ici pour une médiation demandé par Ward ici présent afin d’aplanir les choses entre vous. N’est-ce pas Ward ? Je vous laisse expliquer les choses à Keller.

Je voulais le faire parler un maximum. C’est en l’écoutant parler et interagir que je pourrais avoir des réponses à mes interrogations.

Il n’y avait que Nell qui avait répondu à mon salut d’un timide signe de la main avant que je ne commence mon plan d’extermination du Jordan Keller rien qu’à coup de mots. Et il réagit directement comme je l’avais prévu en disant que j’étais une plaie pour cette ville et que j’avais un avenir tout tracé à Saint-Quentin. Il ne m’appelait pas Ward mais Fleming certainement pour que ça soit moi qui pète les plombs mais je restai de marbre face à ce que je considérais comme des menaces.

A L.A., il y avait toute sorte de gens. Mais si on voit ça comme une jungle, je fais office de tigre alors que Keller n’est rien d’autre qu’un chasseur raté. Ce qui le rends efficace que d’autre c’est qu’il se refuse à dépasser les limites. Il est droit et loyal. Pas le genre à se laisser corrompre. Pas le genre à mettre ses collègues en danger pour chopé, justement, un plus gros poisson.

Donc, il ne m’aura jamais.

Je penchai légèrement la tête sur le côté quand Keller déclara que la psy était assez intelligente pour voir clair dans mon jeu.

-Quel jeu ? Je ne joue pas Keller.

Je demandai, ensuite, à Nell comment elle allait et elle répondit poliment qu’elle allait bien avec de demander des nouvelles d’Heaven. Je souris.

-Elle va très bien. Elle grandit.

Et, avec, toujours l’intention d’énerver Keller avant même qu’on entre dans la pièce, je lui demandai comment allait Grant. Il déclara qu’il avait de bonne note mais que les chiens ne faisaient pas des chats. Je levai un sourcil.

-Ta version du bien et du mal, tu veux dire ?

Nell ajouta que Grant était un bon garçon très intelligent. J’hochai de la tête.

-Ça, je n’en doute pas.

C’est là que la psy arriva et Keller se leva le premier comme s’il était pressé qu’on en finisse. En fait, je crois qu’il était réellement pressé qu’on en finisse alors que moi, j’allais profiter de chaque instant. Je me levai à mon tour après Nell alors que la psy nous salua chacun.

-Bonjour…

Et on finit par la suivre alors que je fermai la marche et la porte. La psychologue nous fit nous asseoir dans une autre partie de son bureau qui ressemblait plus à un salon qu’autre chose et je m’installai sans trop réfléchir à où je me mettais par rapport aux autres. Ça n’avait pas spécialement d’importance parce qu’on était assis en rond.

Je fixai le Docteur Johnson qui déclara que j’avais été celui qui désirais cette médiation et c’était vrai. Alors, je me lançai regardant tantôt Jordan, tantôt Nell, tantôt la psy.

-Je suis ici parce je suis allé voir le Docteur Johnson suite à ce que m’a raconté Sky de votre rendez-vous à elle et à toi. Au départ, je ne voulais pas m’emmêler parce que je pensais que Sky pourrait gérer tout ça et défendre son point mais il parait que votre rendez-vous c’est un peu transformer en tribunal à savoir si j’étais oui ou non un sociopathe… Je sais ce que tu penses de moi, Keller… Tu m’as arrêté plusieurs fois. Je comprends que tu ne vois de moi que l’homme que tu as mis en cellule. Mais je trouve que tu n’as pas le droit de me juger ou de porter de fausse accusation à mon encontre. J’ai fait des conneries il y a quelques années. J’en suis conscient. J’ai payé pour ces conneries. Maintenant, je me suis rangé. J’ai une femme et une fille et ma vie tourne autour de ça. Alors me juger et juger ma femme sur l’homme que j’ai été autrefois et qui n’a, finalement, pas fait plus de crime qu’un autre Los Diablos, ce n'est pas vraiment quelque chose que j’accepte.

Je marquai un pause avant de reprendre.

-J’aimerais simplement que tu comprenne ça… Et qu’on puisse au moins se tolérer pour le bien de Grant. Parce que je ne crois pas que ça soit très bon pour lui de lui faire penser que je suis comme mon père et qu’il risque, un jour, de devenir comme ça, lui aussi… Je sais ce que ça fait quand quelqu’un essaye de vous faire croire ça et ça n’aide en rien.

Mon regard était, maintenant, uniquement sur Keller.

Nell répondait aux questions de Ward posément, pendant que moi, je lui répondais sèchement. J’étais si près et n’avais pas le droit de le foutre en taule pour tous ses crimes, dont le massacre de la Casa Nuova qui avait fait, outre des mafieux, des victimes innocentes. Ou encore pour ces morceaux de corps qu’on retrouvait parfois ça et là sans pouvoir prouver que c’était lui le responsable. Plus le deal, plus les bagarre et que sais-je encore.

Ward disait ne pas jouer… je ricanai. Mais je ne dis rien. Il savait exactement de quoi je parlais.

Nell, elle, se préoccupa d’Heaven… Je ne pouvais pas lui en vouloir, mais ça m’énervait quand même.

Quant à Grant, on devait lui apprendre où était le bien et le mal… Et Ward se foutu complètement de ma gueule. Je serrai les dents.

-La version du bien et du mal de la majorité des gens, Fleming.

Heureusement, la psychologue arriva et je me mis debout. Après l’avoir saluée, je m’installai dans son petit Salon, Nell placée entre Ward et moi.

Je pris mon paquet de cigarettes et en allumai une.

Pendant de temps, la psy donna la parole à Ward qui se mit à parler… Je crois que je ne l’avais jamais entendu parler autant. D’habitude, il parlait par des phrases courtes un peu comme Grant. Même si Ward adorait s’écouter parler. Et c’était une démonstration de ça qu’il nous montra.

Il parlait posément, sans s’énerver et comme s’il avait étudié son texte à l’avance, ce qui était peut-être le cas. Moi je fumais nerveusement, ma clope tremblant entre mes doigts.

Il disait que je n’avais pas à le juger… Que tout ça remontait à plusieurs années, que maintenant, il était un père modèle.

Quand il eut terminé, je le regardai dans les yeux.

-Si tu es un père si dévoué, je peux savoir pourquoi Sky et Heaven sont venue seule à la première séance ? Qu’est-ce que tu foutais pendant ce temps, hein ? Ward ? Tu faisais le plein de putes à South L.A. ? Ta voiture a été vue là-bas et bizarrement, alors que le coin semblait presque libéré de la prostitution, ça reprend de plus belle.

Je tirai sur ma cigarette.

-Et tu veux qu’on en parle, du bien de Grant ? Il n’y a pas que toi qui a une mauvaise influence sur lui, Sky aussi. Parce que Sky a changé, elle est devenue plus dure, plus fourbe. J’ai autant confiance en elle qu’en toi.

Je soufflai longuement la fumée de ma cigarette.

-De toute façon, je respecterai ma promesse faite à Daisy… Tu n’auras aucun droit sur Grant, pour la simple et bonne raison que tu dois payer pour ce que tu lui as fait subir quand vous étiez ensemble.

Je vrillai son regard.

-En plus, je suis sûr que tu n’es là que pour un caprice de Sky. Tu n’en as rien à foutre de Grant.

JDe nous retrouver tous les trois devant la porte close de la docteure Johnson était certainement pire encore que la fois où Grant et moi avions prit le mauvais taxi qui nous avais conduit à South L.A. ! L’ambiance était si tendue qu’elle bouffait absolument tout l’air dans la pièce et je craignais de ne commencer à suffoquer si ça continuait.

Ward commença fort en déclarant qu’il était désolé de nous faire perdre notre temps mais qu’il n’avait pas l’intention de se laisser calomnier, suite à la précédente rencontre qui avait eu lieu avec Sky. Il fallait donc croire que la jeune femme avait donné sa version des faits à Ward, ce qui était parfaitement logique. J’aurais fait la même chose qu’elle si j’avais été dans la même situation.

Évidement, Jordan eu une réaction prompte qui me fit me raidir. Si Ward jouait un peu, comme le prétendait mon petit ami, c’était bien celui de faire perdre son sang froid à Jordan et ça fonctionnait trop facilement.

- Et si nous gardions tout ça pour la rencontre…

Je préférais nettement que la docteure Johnson serve de médiateur plutôt que de me laisser de rôle. J’allais y perdre toutes mes plumes à ce rythme et donc, quand Ward demanda des nouvelles de Grant et qu’on lui répondit qu’il allait bien, je me permis de lui retourner la question en demandant comment allait Heaven. Ça allait certainement aider à diminuer la tension, non ?

- Oui… J’ai vu l’autre jour qu’elle avait bien grandit. Elle est vraiment très belle.

Je m’éclaircissais ensuite la gorge en secouant mon haut, comme pour m’éventer un peu. C’est qu’il faisait vraiment très chaud dans cette salle d’attente, ou était-ce que moi ?

Enfin, la porte du bureau s’ouvrit et nous y entrions tous les trois pour y prendre place, moi, éternellement prise entre Ward et Jordan. Quelle ironie ! La psychologue présenta les choses et ce fut à Ward de prendre la parole en premier. Ce fut surprenant que de l’entendre parler autant, lui qui ne parlait jamais plus que ça. Mais je trouvais que ce qu’il avait à dire avait plein de sens et que nous ne pouvions pas le blâmer pour vouloir reprendre sa vie en main. Cependant, c’était peut-être trop peu trop tard et ses bonnes intentions ne pouvaient pas effacer complètement son ardoise.

Ensuite, Jordan explosa, si je peux le dire ainsi et je m’en mordis la lèvre, nerveuse que j’étais. Il y allait en attaquant alors que Ward y avait été en modérant ses propos. Je n’étais pas psy mais pour l’instant, Jordan montrait qu’il était incapable de gérer ses pulsions et de mettre de l’eau dans son vin pour le bien de Grant. J’aurais voulu le soutenir à deux cents pour cent mais il n’aidait pas notre cause en tonnant qu’il tiendrait coûte que coûte la promesse faite à Daisy mais il semblait oublier que c’était la parole d’une défunte contre celle d’un vivant. Personne, malheureusement, je pourrais prouver que ce qu’avait avancé Daisy était la pure vérité bien que je n’étais pas près de croire qu’une femme se serait sauver à l’autre bout du pays avec un enfant pour faire mal paraitre son ex.

Je soufflais doucement en penchant la tête en me disant que rien de tout cela ne serait simple et que, en dépit des promesses, des opinions favorables ou non, il ne fallait peut-être pas oublier de demander au principal intéressé ce qu’il voulait, lui.

Il y avait de la tension. Beaucoup de tension entre Jordan, Nell et Ward… Ça se sentait à 10 kilomètres et je n’avais, donc, pas tarder à les faire entrer laissant la parole à Fleming. Il se lança, donc, dans un grand monologue. J’avais déjà noté ça : il aimait s’entendre parler. Il donna, donc, les raisons qui le poussait à venir ici. Je pensais qu’il mettrais en avant le fait qu’il désirait la garde de Grant mais, non, Fleming mit plutôt en avant la vision que Jordan avait de lui. Bref, avant de lancer la bombe, il préférait y aller doucement en essayant de montrer le nouvel homme qu’il était devenu.

Il utilisa bien Grant dans ses propos… Mais ça résonnait comme une attaque directe contre Keller. Mais je ne dis rien parce que Jordan ne tarda pas à  répliquer.

Il était énervé. Encore plus que lorsqu’il était face à Sky. Il commença à attaquer Fleming sur le fait que sa femme était venue seule au rendez-vous avec Keller. Je savais que Ward allait facilement démolir ça. Par contre, je ne pus m’empêcher de regarder les expressions de Ward quand Jordan l’accusa d’être impliqué dans des affaires de prostitutions. Si j’avais bien compris, d’après Jordan Keller, Fleming était impliqué dans des affaires de violence, de meurtre et de crime organisé. C’est ce que je comprenais de cette entrevue et de celle qu’on avait eu avec Sky. Mais j’avais beau regarder Ward, il restait impassible.

C’est, donc, vers Nell que je posais mon regard et je vis qu’elle semblait extrêmement mal à l’aise. Je voyais qu’elle essayait, d’une certaine façon, de calmer Jordan mais c’était inutile. Je savais que Keller s’emballait vite. Et je savais que c’était une avantage pour Ward.

Jordan parla alors de Sky qu’il pensait influencée par Fleming et qui, donc, était une mauvaise influence pour Grant. Et face à l’énervement de Keller, Ward restait extrêmement calme… Trop peut-être pour quelqu’un qu’on accusait à tort. Quand on accuse quelqu’un à tort, ce quelqu’un à souvent le réflexe de se défendre avec ardeur. Fleming balance des faits avec un rien de cynisme.

Puis, ce fut Daisy qui fut mise sur le tapis. Sauf que dans ce cas Keller avait des preuves et Ward avait avoué l’avoir frappé. Il avait utilisé ça pour me faire gober son histoire de rédemption.

Jordan termina son discours en disant que, de toute façon, Ward était ici pour sa femme et pas pour Grant. Je fixai, donc, Fleming.

-Ward… Que pensez-vous des allégations de Jordan concernant Daisy ? Avez-vous était violent avec elle ?

Je savais déjà la réponse.

-Et Grant… Quel est votre sentiment par rapport à Grant ?

Je savais qu’il en voulait la garde. Mais je voulais qu’il le dise lui-même.

Je roulai des yeux à la réflexion de Keller sur le bien et le mal alors que Nell disait que nous devrions garder ça pour la rencontre. J’hochai de la tête avant de demander de ses nouvelles et elle me renvoya la question pour Heaven. Elle disait l’avoir vu et confirma qu’elle avait grandi et tout ça m’amusait un peu parce que ça semblait encore plus énerver Keller.

C’est là que le Docteur Johnson entra en scène et nous on entra dans son bureau bloquant Nell entre moi et Jordan. Elle était mal à l’aise. Il ne fallait pas être doué pour se rendre compte de ça. Peut-être regrettait-elle d’être venue ?

A moi, j’étais sûr qu’elle allait me servir pourtant.

Une fois assis, j’expliquai pourquoi j’étais là. Du moins, j’expliquai une partie de ce pourquoi j’étais là. Et Keller ne tarda pas à éclater me demandant pourquoi je n’avais pas été là avec Sky et Heaven lors de l’entrevue de Sky avec Jordan. La réponse me semblait tellement évident que je me demandais si je faisais l’insulte à Keller de lui répondre… Mais quand il ajouta que j’étais sûrement en train de faire mon petit trafic d’être humain, je levai carrément un sourcil.

-Si je ne suis pas venu c’est parce que Sky pensait bien que ma présence n’allait faire qu’envenimer les choses. La preuve c’est que, même si je n’étais pas là, tu as réussi à ne parler quasi que de moi. Quant à tes accusations… Combien de voiture il y a à South L.A. ? Je n’ai rien n’à voir avec un quelconque trafic, Jordan… Je vais souvent à South L.A. parce que je pratique la boxe à la salle de sport. J’ai des connaissances là-bas, aussi… Tu habites dans l’Eastside… Ça ne veut pas dire que tu es un Los Diablos que je sache… Mais si tu es si certain de ce que tu avances, pourquoi tu ne m’arrêtes pas ?

Parce qu’il n’avait aucune preuve. Ma voiture au cœur de South L.A. est très loin d’être une preuve tangible. Keller croyait que j’étais El Lider mais, apparemment, il ne pouvait pas le prouver certainement parce que sa source n’est en rien fiable. Je me demandais d’ailleurs qui était la source en question.

Je le saurais, un jour.

Puis, il vint à Sky… Sky qu’il trouvait changée. Je le fixai droit dans les yeux.

-Ma femme a changé à tes yeux le jour où tu as su que j’étais marié avec… Le problème, dans ce cas, ce n’est pas Sky, Keller…

Je restais calme. Je parlais posément contrairement à Jordan qui était devenu une vrai foutue locomotive à fumer sans arrêt. Ça commençait, d’ailleurs, à devenir irrespirable.

Il finit par dire qu’il allait respecter la promesse de Daisy à qui j’avais fait « subir » des choses. Et il acheva en ajoutant que j’étais ici pour un caprice de Sky mais que je n’en avais rien n’à faire de Grant.

Ce n’était pas entièrement vrai.

Je soupirai avant que mon regard ne se tourne vers la psychologue qui me balança des questions dont elle savait les réponses. Ça c’est digne des psy.

Mais je ne répondis pas tout de suite. Je me levai et me dirigeai vers la fenêtre avant de tenter de l’entrouvrir sans y arriver. Je fronçai les sourcils.

-Ça s’ouvre pas ! Je fais mourir enfumé, ici…

J’avais laissé transparaitre une certaine frustration et j’entendis la psychologue répliquer.

-On est dans un hôpital psychiatrique, Ward… Aucune fenêtre ne s’ouvre de l’intérieur. Même celle des bureaux… Nous sommes au deuxième étage. C'est pour évier des évasions de patients ou, pire, des suicides...

Je plissai le nez.

-Je ne sauterais pas.

Je ne la vis pas lever un sourcil et elle répliqua.

-Ça, je n'en ai aucun doute... Mais ça ne reste pas moins impossible à ouvrir.

Je grommelai avant de me rasseoir et de reprendre directement mon calme. Je fixai Keller et Nell.

-J’ai été violent avec Daisy. Je l’admets… A l’époque je m’emballais vite et je l’ai frappé… C’est là que tout a été fini entre nous et qu’elle a commencé à m’éviter. Je ne peux pas lui en vouloir. C’était une mauvaise période pour moi mais…

Je fixai Nell.

-Je n’ai pas toujours été violent… N’est-ce pas Nell ? Est-ce que je t’ai déjà frappé ?

J’étais sorti avec Nell. Elle pouvait témoigner, non ? Et je n’avais jamais frappé Nell. Ça, j’en étais certain. Avec Daisy, j’avais été jusque-là parce qu’elle n’était rien pour moi.

-Je regrette ce que j’ai fait à Daisy…

Quant à Grant, je fixai, cette fois, uniquement Keller.

-Et, non, je ne suis pas ici pour un caprice de Sky… J’ai appris que j’avais un fils qui a déjà 10 ans. C’est pas simple à gérer… Il m’a fallut le temps de digérer l’information. Je pensais, dans un premier temps, que Grant était entre de bonnes mains avec toi mais les derniers événements me prouve que ce n’est pas le cas… De plus, j’ai vu l’enfant… Deux fois.

Je fixai brièvement Nell avant de reposer mon regard sur Jordan.

-Et après la deuxième fois, j’ai eu envie de le revoir sans que je m’explique pourquoi. Sûrement parce que Heaven m’a montré que je pouvais être un bon père. Et que je peux être pareil pour Grant. Raison pour laquelle, j’aimerais en obtenir la garde.

Je savais que ce que je venais de dire était probablement pire qu’une balle en pleine tête pour Jordan Keller.

Une fois dans le bureau et les premières questions du Dr. Johnson lancées… En fait, elle n’avait pas vraiment posé de question, juste laissé la parole à Ward… Les deux femmes restèrent coites alors que nous nous lançâmes dans une joute verbale. Ward restait calme, c’était sa force et je le savais. Alors que moi, j’étais un impulsif colérique hanté par ce que j’avais vu et fait au Vietnam.

J’entendis Nell soupirer, tendue alors que je fumai ma clope qui était déjà presque finie et que je fini par en rallumer une pendant que Ward se défendait par rapport à son absence à la dernière séance. Il disait que c’était parce que sa présence n’allait faire qu’envenimer les choses. Et que je ne pouvais pas avoir reconnu sa voiture dans South L.A.

-Et ta plaque d’immatriculation ? Je la connais par cœur. Tous les flics la connaissent par cœur. Et tu n’étais pas à proximité de la salle de sport.

Je le savais, j’y allais avec Grant en priant à chaque fois pour ne pas croiser Ward. Mais apparemment, Amon cherchait à l’éviter aussi et savait quand venir. Et comme c’était lui qui entraînait Grant…

Je grommelai quand il ajouta que si c’était vraiment ce que je pensais, je n’avais qu’à l’arrêter. Je ne pouvais pas le faire. Pourtant, ce n’était pas l’envie qui manquait.

Quant à Sky, il disait qu’elle avait changé à partir du moment où je l’avais su mariée avec lui. Je regardai la psy, comme un appel au secours. Parce que j’avais bien peur que sur ce coup-là, il avait raison.

-Mais Sky veut être la mère de Grant… Elle l’influence en ce sens. Mais jamais elle ne le sera. Comme je ne serai jamais son père. Mais c’est pourtant moi que Daisy Custer a choisi pour prendre soin de lui.

Soudain, Ward se leva et se dirigea vers la fenêtre pour essayer de l’ouvrir. Mais il n’y arriva pas parce que la psy lui expliqua que c’était tout bonnement impossible… je pris une grande inspiration et regardai Nell, désolé pour ce que je lui faisais subir. Et j’écrasai ma cigarette fumée à moitié.

-Voilà, regarde Ward. J’arrête. Je sais me limiter pour Grant, je vais me limiter pour toi aussi.

Et je posai une main nerveuse sur la cuisse de Nell.

Je ne lui avais même pas souhaité de sauter, signe qu’il ne m’avait pas encore mis à bout. Je pris quelques grande respiration, retrouvai du courage dans le regard de Nell, même si elle semblait mal à l’aise, pour continuer.

Il expliqua qu’il avait bien frappé Daisy avant de demander à Nell s’il l’avait frappée elle.

-j’espère bien que non !

Je regardai Fleming dans les yeux.

-Mais je ne crois pas à tes regrets… On ne peut pas regretter et avoir l’air si… neutre… Là on dirait que tu regrettes d’avoir fait tomber la bouteille de lait ce matin…

Je serrai un peu plus la cuisse de Nell quand il parla de Grant en disant que finalement, il ne le pensait pas entre de bonnes mains. Et qu’il avait vu le petit, deux fois.

-Dont une fois où tu lui a broyé la main. Il m’a raconté ça.

Il jouait maintenant les repentis qui s’était découvert une fibre paternel au contact de sa fille. C’était peut-être vrai, peut-être pas, difficile à dire… Mais en tout cas, il n’aurait pas Grant.

Je dis alors très posément.

-Si tu veux la garde de Grant, il nous faudra aller au tribunal… Là, je montrerai la copie du testament de Daisy Custer qui me nomme spécifiquement comme le tuteur légal de Grant. Je ressortirai tous les PV qu’on a sur toi… Et surtout, je demanderai à ce qu’on te fasse passer un bilan psychiatrique complet.

Le bureau de la psychologue était assez grand pourtant il me semblait être dépourvu d’air et ce n’était pas uniquement parce que Jordan enchaînait cigarette sur cigarette. J’étais assise entre mon ex petit ami et mon petit ami qui se vouaient une haine sans borne ce qui rendait ma position incroyablement inconfortable. Je regrettais d’avoir autant insisté pour accompagner Jordan mais j’avais eu peur qu’ils n’en finissent par se taper sur la gueule.

La docteure Johnson demanda à Ward d’entrée de jeu d’expliquer ses raisons d’être ici et le monologue de mon ex petit ami suffit à faire exploser le thermomètre interne de Jordan qui s’emballa illico. Il pompait sur sa cigarette, enragé et moi, coincée entre les deux, je n’osais regarder ni d’un côté, ni de l’autre. Je restais le regard baissé et muette.

Je relevais la tête quand il fut question de la voiture de Ward, dont Jordan avait reconnu la plaque et que cette dernière n’était pas près de la salle de sport. Comme le fameux soir ou Grant et moi nous étions retrouvés dans ce quartier et que c’est sur Ward en personne que nous étions tombés.  Je restais tout de même muette sur ma réflexion, pourtant, une petite voix dans ma tête me criait que je devais le dire, ne serait-ce que pour appuyer Jordan qui enrageait de plus en plus.

Puis Ward défendit sa femme en disant qu’elle n’avait changer aux yeux de Jordan uniquement quand il avait su avec qui elle était mariée. Il n’avait pas tort, malheureusement mais les craintes de Jordan étaient légitimes.

- C’est juste que ça faisait étrange de l’apprendre, tu comprends ?

Ward se leva et chercha à ouvrir une fenêtre ce qui ne ferait pas de tort, il fallait l’admettre, puisque la fumée rendait l’air irrespirable, déjà qu’elle ne l’était pas beaucoup même sans ça. Elles ne s’ouvraient pas et ça énerva Ward qui se fit répondre par la psychologue que c’était ainsi partout dans l’établissement. Les fenêtres ne s’ouvraient pas pour éviter les fuites ou les tentatives de suicide.

- Même pas un tout petit peu ?

Il me semble qu’une petite brise aurait contribué à nous apaiser.

Devant l’impossibilité d’ouvrir les fenêtres, et parce que Jordan accepta d’écraser sa cigarette, Ward reprit sa place et avoua avoir été violent avec Daisy mais qu’il le regrettait. Encore une fois, je baissais les yeux, désolée d’entendre ça mais je les relevais, passant de Ward à Jordan quand le premier clama qu’il n’avait pas toujours été violent, la preuve, il ne m’avait jamais frappé moi, et ça fit encore une fois s’exclamer Jordan.

- Non, il ne m’a jamais frappé, ni brusqué.

Rien de tout ça.

Mais je ne pouvais pas dire que Ward était un modèle de tendresse et de romantisme.

Jordan n’achetait pas les regrets de Ward, le jugeant trop neutre alors que moi, je me disais que peut-être qu’avec le temps, le recul et tout, il avait déjà eu le temps de régler cette histoire dans sa tête. Je posais ma main sur celle de Jordan, sur ma cuisse, pour qu’il ressente mon support alors qu’il racontait qu’il avait serrer le poing de Grant lors de leur première rencontre. Je savais que c’était lors de celle là puisque j’étais présente la seconde fois et qu’étrangement, il me semblait que le père comme le fils observaient une certaine fascination l’un pour l’autre.

- Est-ce que… Est-ce… Je… En fait je me demandais si tu savais à ce moment-là que Grant était ton fils ?

Je levais le regard sur Ward puis je regardais la psy et ensuite Jordan avant de revenir sur la psy, nerveuse et incertaine de mon intervention.

- Ça ne change rien au geste…Ça ne se fait pas… Jamais.

On ne réglait jamais rien avec de la violence encore moins sur un enfant. Je me disais cependant que s’il avait su que Grant était son fils à ce moment, il aurait peut-être agi différemment, comme cela avait été le cas à South L.A.

Très clairement, Ward avoua vouloir obtenir la garde de Grant et mon cœur se serra. Si le petit devait quitter la maison, ce serait un coup très dure à surmonter, pour moi mais pour Jordan, surtout. Malgré tout, je ne pensais pas que nous avions complètement le droit de nous opposer à sa demande et encore là, j’allais suggérer de ne pas bruler les étapes et de trouver un arrangement sur une certaine période avant d’entreprendre des démarches radicales mais Jordan, sur un tom calme, dieu merci, refusa ce droit à Ward en parlant de tribunal, de testament et de dossiers pesant sur Ward.

- Avant d’en arriver à une demande de garde et d’aboutir devant le juge, ne pourrions-nous pas penser à Grant en tout premier et savoir ce qu’il veut lui, réellement ?

C’est bien dommage d’en arriver à des moyens aussi radicaux qui n’allaient pas nécessairement tourner à notre avantage.

Ward se justifia concernant le fait qu’il n’avait pas accompagné sa femme lors de la dernière médiation et je devais avouer que sa justification tenait largement la route… Quant aux accusations de Jordan, il les balaya d’un revers de la main même si le policier ne cessait de balancer les preuves, certes maigres, qu’il avait.

Quant à Sky, Ward disait qu’elle avait changé aux yeux de Jordan le jour où il a appris qu’elle était sa femme. Je pouvais lire sur le visage de Jordan qu’il n’avait aucune argument face à ça et j’avais bien peur que, déjà, Ward prenait l’avantage psychologique… Mais Jordan n’était pas en reste en mettant en avant que Sky voulait être la mère de Grant et que Daisy Custer avait été clair sur ses intentions. Il était loyal à la parole qu’il avait donné à la mère de Grant et je savais que Fleming aurait, jusqu’au bout, en face de lui, quelqu’un pour l’empêcher de récupérer son fils. Eleanor réagit à son tour disant que tout ça avait fait étrange de savoir que la babysitter de Grant était mariée à Ward Fleming. Ça oui, je me doute que ça a dû faire un choc.

C’est là que Ward se leva. Je fus surprise qu’il se lève pour se diriger vers la fenêtre dans le but de l’ouvrir certainement parce que la pièce commençait à s’enfumer… Je vis que Ward se frustra extrêmement vite…

-On est dans un hôpital psychiatrique, Ward… Aucune fenêtre ne s’ouvre de l’intérieur. Même celle des bureaux… Nous sommes au deuxième étage. C'est pour évier des évasions de patients ou, pire, des suicides...

C’était surtout utile pour des vrais patients… Je doutais sincèrement que Ward, Jordan et Nell se mettent à vouloir sauter par la fenêtre. Mais ce qui me fit tiqué c’est que Ward n’avait pas demandé à ce que j’ouvre la fenêtre… Il s’en était simplement donné le droit et n’avait pas aimé tombé contre un mur. Il déclara d’ailleurs qu’il ne sautera pas.

-Ça, je n'en ai aucun doute... Mais ça ne reste pas moins impossible à ouvrir.

Je mentais. Je pouvais entrouvrir la fenêtre mais je ne voulais pas mener la vie facile à Fleming… Même si Nell semblait étouffer aussi vu qu’elle se demanda si je ne pouvais pas un rien ouvrir. Je pris un air désolé.

-Navré mais non.

Ce fut finalement Jordan qui mit de l’eau dans son vin en écrasant sa cigarette. Mes lèvres se pincèrent mais je ne dis rien.

Ce fut la pauvre Daisy qui fut, ensuite, en centre de la conversation alors que Ward avoua l’avoir fappé comme il me l’avait avoué lors de notre première séance. Mais il prétendit alors n’avoir jamais frappé Nell. Je levai un sourcil assez surprise qu’il parle de Nell mais quand celle-ci confirma qu’il ne l’avait jamais frappé. Je les regardai l’un et l’autre.

-Vous avez été ensemble ?

Si c’était le cas, Eleanor était probablement une bonne source d’informations sur Ward Fleming. Pourtant, elle ne semblait pas aller totalement à l’encontre de Fleming contrairement à Jordan…

Ward balança, ensuite, ses regrets. Mais toutes ses paroles semblaient dites comme un texte répété et c’était ça qui m’ennuyais… Ça et tout ce que je savais sur lui… D’ailleurs, Jordan ne croyait en rien à ses regrets pour les mêmes raisons.

Fleming expliqua, ensuite, ne pas être ici pour un caprice de Sky et il expliqua brièvement avoir rencontré l’enfant deux fois… Donc une fois où Jordan nota qu’il avait été violent avec l’enfant. Je plissai des yeux alors que Nell posa une question pertinente à savoir si Ward savait que l’enfant été à lui à ce moment-là. J’avais bien envie d’entendre la réponse.

-En effet… Violenter un enfant pour quelque raison que ça soit n’est pas la solution.

Mais Ward avait grandi dans un environnement extrêment violent…  Donc, je doutais qu’il sache gérer les choses autrement que par la violence…

Ou la manipulation…

La preuve étant qu’il finit par dire qu’il voulait récupérer la garde de l’enfant et Jordan, qui semblait désormais plus posé ce qui n’était pas plus mal, déclara que, pour ça, il faudra aller au tribunal et qu’il se défendra de toutes les façons possibles afin que Grant ne tombe pas entre les mains de Ward. Quant au bilan psychiatrique complet, il me semblait plus que bienvenu !

Nell, elle, cherchait une issue en se disant que, la première chose à faire, était de voir ce que Grant pensait de tout ça. Je lui souris avec bienveillance.

-Grant pourra donner son avis… Mais il ne sera pas pris en compte par le juge. Il est trop jeune et, du point de vue de la justice, des enfants si jeune sont bien trop influençable… Dans le cas des gardes, un parent peut manipuler l’enfant afin que celui-ci soit de son côté. De plus, Grant a lui-même un suivi psychologique et, donc, la justice le voit comme un être encore plus fragile et influençable.

Je fixa, ensuite, Jordan et Ward mais c’est à ce dernier que je m’adressai.

-Vous accepteriez un bilan psychiatrique poussé, Ward ? Je vous préviens… Ça sera des psychiatres aguerris. Ils retourneront tout. Ils chercheront la petite bête et ils risquent bien de trouver…

J’ajoutai, ensuite :

-Ils vous demanderont, par exemple : « Grant Custer est un petit grimpeur. Il adore grimper… Mais il se peut qu’il se mette inutilement en danger en faisant ça et qu’il glisse… Que ferez-vous si vous êtes témoin de ça ? ».

La bonne réponse est de ne jamais laisser l’enfant se mettre inutilement en danger. Mais je m’attendais à ce que Ward réponde qu’il grimpera pour aller sauver son fils. Ce n’était pas une mauvaise réponse… Mais il y avait quelque chose que j’avais pu déduire de toutes les entrevues que j’avais eues avec tout le monde :

Daisy Custer a dit à son fils de grimper si jamais il voyait son père.

Sean Fleming est mort en tombant d’une falaise… Ward a subi un énorme traumatisme ce jour-là qui à, en partie, forgé l’homme qu’il est aujourd’hui.

M’est d’avis que si Daisy à dit ça, c’est que Ward ne saurait pas grimper parce qu’il a le vertige…

Je roulai des yeux quand Jordan parla de ma plaque d’immatriculation alors qu’il déclara que ma voiture ne se trouvait pas près de la salle de sport.

-Et ? Je ne peux pas aller à South L.A. ? C’est un crime d’être garé à South L.A. ? Ou c’est un crime d’être Ward Fleming et d’être garé à South L.A..

Finalement, s’il était si sûr de lui, il n’avait qu’à m’arrêter mais il ne pouvait pas. La preuve il grommela.

Quant à Sky, si Jordan se montrait aussi hostile envers elle, c’est uniquement parce qu’il sait que je suis son mari. Je vis son appel à l’aide à la psy mais il finit par répliquer tout seul comme un grand que Sky voulait être la mère de Grant. Ouais… Ça, je le savais. Mais, finalement, le seul légitime à avoir Grant, ici, c’est moi.

-En effet… Tu n’es pas son père. Son père, c’est moi.

Quant à Nell, elle dit simplement que ça avait fait étrange d’apprendre que Sky était marié à moi. J’haussai des épaules.

-Tout comme ça m’a fait étrange de savoir que j’avais un fils de 10 ans…

Ceci étant dit, je n’en pouvais plus de la foutue fumée de Keller… Avec un peu de chance, il allait pas tarder à crever à cause de ça. Ça serait drôle tiens. Et je voulu ouvrir la fenêtre mais c’était impossible à cause des cinglés qui vivaient dans cet endroit. Ça m’agaça mais je renonçai à m’acharner sur la fenêtre surtout que Jordan déclara qu’il allait faire un effort.

-Ouais. Fait ça.

Quant à Daisy, j’avouai l’avoir frappé. Je savais que Jordan avait des preuves alors, je ne niai pas. Par contre, je mis en avant que je n’avais pas toujours été violent et je pris Nell à parti pour ça. Jordan tonna qu’il y avait plutôt intérêt alors que Nell confirma que je ne l’avais jamais violenté. Mais il semblerait que Nell et Jordan n’aient pas tout dit à la psy qui ignorait que j’avais eu une relation avec Nell.

-Oui. On a été ensemble plusieurs mois il y a quelques années.

Mais Jordan ne croyait pas à mes regrets… Je levai un sourcil. Il trouvait que mon ton était trop neutre. Je soupirai et roulai des yeux mais ne répliquai rien.

Quant à Grant, j’expliquai que tout ça n’était pas un caprice de Sky. Que j’avais vu l’enfant deux fois. Bien sûr, Keller en profita pour me rappeler que j’avais broyé la main du petit quand il est venu chez moi. C’était vrai… Mais le gamin avait commencé. J’allais répliqué mais Nell demanda si je savais que c’était mon fils à ce moment-là… J’hochai négativement de la tête.

-Non. Je l’ai su quelques minutes plus tard. C’est Grant qui me l’a dit lui-même. Et je ne lui ait pas broyé la main. Il a tenté de me frappé, j’ai juste paré son coup.

Parce que, autant que pour Nell que pour la psy, violenter un enfant n’était pas une chose à faire. Je les regardai, l’un et l’autre.

-J’en suis conscient… Je suis un enfant battu… Je sais ce que ça fait…

Je déclarai, alors, vouloir la garde de Grant. Je pensais que Jordan allait sortir de ses gongs mais ce ne fut pas le cas. Dommage… Mais je savais que je pouvais le faire exploser… Il préféra dire qu’il allait tout ressortir afin d’avoir les faveurs du juge… Quant à Nell, elle disait qu’avant d’entrer là-dedans, il serait peut-être bien demander l’avis de Grant.

-C’est une bonne idée…

Mais la psy disait que le juge ne prendra pas en compte l’avis d’un enfant influençable… Ouais, je me doutais bien que les choses ne seraient pas aussi simples.

-Bien. On passera par le tribunal alors.

Je dis ça en soutenant le regard de Keller. Mais la psy ramena mon regard sur elle en demandant si j’acceptais le bilan psychiatrique… Un bilan dont elle me dit qu’il sera fait pas des psychiatres aguerris.

-Je n’ai rien n’à cacher… Alors, je n’appréhende pas ça.

Puis, elle posa une question… Je levai un sourcil devant la question. C’était très spécifique comme situation ce qui me faisait penser qu’elle essayait, d’une façon ou d’une autre, de me piéger…

C’est, donc, Keller, que je fixai.

-Tu laisse Grant grimper n’importe où ?

Je fixai, ensuite, la psy :

-Je ne l’autoriserais pas à grimper… Mon petit frère est mort comme ça. Mais s’il grimpe quand même, j’irais le chercher.

Elle ne lâchai pas mon regard.

-Vous avez le vertige, Ward…

Je penchai légèrement la tête sur le côté en foudroyant la psy de regard.

-Pas du tout…

Puis, je ricanai d’un rire jaune.

-Je vois… Vous vous liguez contre moi.

Je fixai, ensuite, Nell.

-Toi aussi tu penses que je suis un psychopathe, Nell ? Que je suis incapable de prendre soin de Grant ? Que je suis cinglé comme mon père ? Parce que je crois que c’est ce que pensent Jordan et le Docteur Johnson.

Ward démonta mes arguments par l’absurde… Ouais, ça pouvait paraître absurde d’accuser quelqu’un de tous les maux parce que sa voiture était garée dans un quartier particulier… Alors je fis la moue et me tus, pour ne pas ajouter de l’eau à son moulin.

Puis je revins à la charge en disant que Sky ne serait jamais la mère de Grant, tout comme je ne serais jamais son père. Et Ward pris la perche que je lui tendais pour dire qu’en effet, c’était lui son père…

-Et quel genre de père, hein ?

Nell s’imposa timidement pour dire que ça nous avait plus que surpris d’apprendre qu’il était marié à la babysitter de mon pupille.

Et il répliqua que ça lui avait fait tout autant bizarre de savoir qu’il avait un fils de 10 ans.

Il avait voulu ouvrir la fenêtre mais c’était impossible comme le dit la psychologue… Alors j’arrêtai de fumer, plus pour Nell que pour Grant qui voulait aussi un peu d’air.

Puis quand on parla du fait que Ward avait violenté Daisy Custer, le psychopathe mis en avant son ancienne relation avec Nell, lui faisant dire qu’il ne l’avait jamais violentée ni brusquée… Je ricanai, cynique.

-C’est que ça n’a vraiment pas duré longtemps alors.

Parce que pourtant, il avait fait mal au poing de Grant, le petit me l’avait raconté. Et Ward fit sa petite victime en soulignant qu’il était un enfant battu, qu’il savait ce que c’était. Oooh sortez les violons…

Ward était, pour moi, un homme violent et un potentiel meurtrier, même si je ne pouvais pas le prouver.

Nell demanda si ce ne serait pas mieux si on demandait à Grant ce qu’il voulait… Je la fusillai du regard mais ce fut la psy qui vint à la rescousse en disant que Grant pourrait s’exprimer, mais que devant un tribunal, son désir ne serait pas pris en considération, parce qu’il était trop jeune et trop influençable.

-Et Sky s’est déjà glissée dans son cerveau comme un ver dans une pomme.

Puis, c’est à Ward que la psy s’adressa, concernant l’évaluation psychiatrique que je demanderais au tribunal, si nous allions jusque-là… Et je me retins de sourire quand elle le testa. Mais ce fut à moi qu’il s’adressa en premier…

-Je lui ai fait comprendre qu’il ne pouvait pas grimper à tout va… Mais qu’il devait suivre le conseil de sa mère et grimper s’il te croisait.

Puis, il regarda le Dr. Johnson pour lui dire qu’il n’autoriserait pas Grant à grimper à cause de son frère mort de cette façon. Et que s’il persistait, il irait le chercher. C’est là que le Dr. Johnson le perça à jour.

Il avait le vertige.

-C’est malin de la part de Daisy.

Il nia en bloc, disant qu’on se liguait contre lui.

Puis c’est à Nell qu’il s’adressa, essayant de l’avoir de son côté.

-Ne l’écoute pas, Nell. C’est un manipulateur.

Il n’avait pas fallu longtemps pour que la conversation prenne des allures de combat de coq entre Ward et Jordan. L’un de défendant de tous les maux et l’autre, lui en pelletant d’avantage dans sa cours. Nous n’avions pas fini de tourner en rond dans cette joute verbale et je craignais que ce ne soit pas la bonne cible qui perde le plus de plumes là-dedans.

Puis, dans la conversation, quand Ward avoua avoir été violent avec Daisy contrairement d’avec moi, cela fit sourciller la psychologue qui demanda si nous avions vraiment été ensemble alors que Jordan lui, expliqua que si Ward n’avait pas été violent avec moi, c’est que notre relation n’avait pas durée assez longtemps.

- Oui, nous avons été ensemble quelques moi il y a quelques années de ça.

J’avais presque répondu en écho avec Ward.

Il fut question ensuite du comportement de Ward avec Grant et du fait qu’il avait été brusque avec le petit lors de leur première rencontre. Je ne pu m’empêcher de lui demander s’il connaissait l’identité du gamin à ce moment là mais il expliqua que non. Ce fait établi, j’ajoutais que de toute façon, ça ne se faisait pas que d’user de violence avec un enfant et Ward, qui tenait de toute évidence à toujours avoir le dernier mot, ajouta qu’il le savait étant lui-même un enfant issu d’un milieu violent. Je dû me retenir de poser ma main sur la sienne en signe de compassion mais cela aurait été déplacé et mal perçu. J’en avais marre de me sentir comme si je marchais sur des œufs.

Bref, Ward voulait la garde de Grant et il ne se gêna pas pour la revendiquer ce à quoi Jordan lui rétorqua sur un ton maîtrisé qu’il ferait absolument tout pour que cela ne se produise pas et, en pensant bien faire, j’ajoutais que nous pourrions peut-être aussi demander l’avis de Grant là-dedans, après tout, n’étions-nous pas là pour lui, justement ? Et j’eu droit à un regard de Jordan qui me vrilla sur la chaise.

La psychologue répondit que Grant serait certainement entendu mais que sa volonté n’influencerait pas la décision d’un juge puisque les enfants sont trop influençables.  C’était complètement logique et de toute façon, justement, l’influence de Sky risquait déjà d’avoir biaisé l’opinion de Grant. Mais, puisque je ne voulais pas provoquer malgré moi les réprimandes de Jordan, je décidais que le mieux était que j’évite d’exprimer mes commentaires et de le laisser ramer tout seul.

Ward acceptait de passer un bilan psychologique plus poussé, selon moi, cela témoignait de sa bonne foi et je commençais même à me demander si la psychologue était totalement neutre dans toute cette histoire, surtout quand elle demanda à Ward ce qu’il ferait s’il était témoins d’un acte dangereux de la part de son fils tel que de grimper. Évidement ça déstabilisa Ward qui se braqua et demanda à Jordan si c’était lui qui lui avait dit de faire ça. La psy enfonça le clou, littéralement, en affirmant que Ward avait le vertige et ce dernier nia.

J’étais franchement mal à l’aise d’assister à tout ça ! Pour avoir été longtemps en thérapie avec un psychologue, jamais il n’aurait appuyé délibérément sur ma faiblesse devant une autre personne. C’était un manquement à l’éthique professionnel mais ça aussi, je me gardais de le dire même si je bouillais en dedans ! Si je faisais ça, je risquais une grosse querelle avec Jordan qui m’avait déjà bien remis à ma place d’un simple regard.

Je sursautais quand Ward me demanda si moi aussi je pensais de lui qu’il était un psychopathe et tout un tas d’autres choses et je bafouillais avant de me retourner vers Jordan qui m’ordonna de ne pas l’écouter car c’était un manipulateur. Alors mon regard passa de l’un à l’autre puis c’est sur la psychologue que je me tournais ensuite.

- Je peux sortir ? J’ai vraiment besoin de prendre de l’air !

Ce n’était pas la fumée résiduelle de la cigarette qui m’étouffait, mais l’ambiance en elle-même !

C’était la guerre entre Ward et Jordan. L’un cherchant à prouver la culpabilité de l’autre et l’autre cherchant la meilleure pique à envoyer à l’autre. Car Ward savait taper où ça faisait mal en mettant en avant que c’était lui le père de Grant et non Jordan. Je savais que Jordan avait une grande affection envers l’enfant et que tout ça devait, quelque part, lui faire un peu mal.

Cette médiation était, pour l’instant, un champ de mine et je n’étais pas certain qu’il soit possible de trouver un terrain d’entente entre les deux partie. Même Nell qui pouvait être l’élément pacificateur me semblait être bien trop mal prise que pour changer les choses. Et je compris vite pourquoi quand autant Nell que Ward confirma qu’ils avaient été en couple tous les deux, il y a quelques années d’ici. Une relation où Ward n’avait pas été violent avec Nell et Jordan jugea que ça n’avait pas été le cas simplement parce que les choses n’avaient pas durées.

Evidemment, tout ça ne faisait que compliqué les choses… Si je savais que Ward et Jordan avaient un passif, je n’avais pas pu prévoir qu’il en était de même pour Nell.

-Je vois…

J’aurais bien demandé plus de détails, à savoir les raisons qui avait fait qu’ils s’étaient séparé et les raisons qui les avaient poussés à se mettre ensemble. Ça m’aurait permis de mieux comprendre les codes de cette conversation où Nell était vraiment très mal à l’aise. Ça expliquait certainement pourquoi elle ne soutenait pas tous les dires de son petit-ami.

Après ça, Ward expliqua avoir bel et bien était violent avec Grant mais brandit la légitime défense minimisant ce qu’il avait fait à l’enfant. Il déclara, aussi, qu’il n’était pas au courant que Grant était son fils à ce moment-là…

-Pourquoi vous a-t-il frappé ?

Ward confirma, ensuite, qu’être violent avec un enfant ne se faisait pas parce que lui-même avait été enfant battu. C’était une façon d’attirer la compassion… Car plus les minutes avançaient plus je voyais en Ward le sociopathe qu’il se disait ne pas être. En tout cas, il a une propension au mensonge, une faible tolérance à la frustration, un certain ego, une tendance à la manipulation et il est indéniablement trop sûr de lui. Sans compter son passé, son casier judiciaire et tout ce que j’avais récolté comme information sur lui. Maintenant, était-il une homme dangereux ? Comme Jordan, je n’en avais aucune preuve… Rien n’indiquait qu’il ne s’occupait pas parfaitement bien de Sky et de sa fille. Absolument rien. Son attitude et son passé ne pouvait, hélas, pas être suffisant pour lui refusé la garde de l’enfant qu’il souhaitait.

Car c’est ce qu’il dit tout haut… Qu’il voulait la garde de Grant Custer. Jordan se calma alors ce qui était un bon point et confirma que, pour l’avoir, Ward devra passer par le tribunal et par un bilan psychiatrique. Mais Nell, elle, disait que avant tout ça, il faudrait demander son avis à Grant. Je voyais que de bonnes intentions derrière son intervention. On pense souvent que le mieux placé dans l’histoire est finalement le principal intéressé mais, judiciairement, ça ne fonctionne pas comme ça pour des raisons que j’expliquais. Mais j’avais bien vu le regard que Jordan lança à Nell… Et c’est là que je compris que j’avais fait une erreur… En proposant cette médiation, j’avais donné à Ward l’occasion de déstabiliser Jordan et Nell et prendre l’avantage dans une bataille judiciaire qu’il souhaitait mener.

Jordan, après mes explications, ajouta que Sky avait déjà joué dans le tête du petit… Certes, il y était très attaché mais ça semblait être le cas depuis bien avant que Sky ne sache que le petit était le fils de son mari, si les dire de Grant étaient vrais. Dès le premier jour le courant est passé. C’est comme ça que Grant me présente les choses en consultation.

Ward était, donc, prêt à entamer une procédure judiciaire et je le mis en garde sur le bilan psychiatrique. Même s’il était fait par d’autre gens que moi, j’avais l’impression que Ward sous-estimait son audience et qu’il croyait passé entre les mailles du filet… Ou… Ou il pensait réellement n’avoir rien n’à se reprocher. Un sociopathe qui s’ignore ? C’était difficile à dire…

Alors, je tentai de le déstabilisé avec une question… Mais au lieu d’y répondre tout de suite, il s’adressa à Jordan qui se défendit de laisser Grant monter partout… Sauf s’il voit Ward. Et ce dernier tomba dans le piège en clamant qu’il grimperait si Grant venait à être en danger.

Il ne pouvait pas faire ça parce que il avait le vertige. Ça l’agaça que je mette ça en avant alors qu’il nia en bloc. Jordan jubilait ajoutant que Daisy était maligne. En effet… En hauteur, Grant ne risquait pas de trouver son père.

Mais je ne m’attendis pas à ce que Ward prenne Nell à parti… Il cherchait à l’avoir dans son camp. A ce qu’elle le défende parce qu’il se sentait acculé.

Et c’était trop pour la jeune femme qui ne souhaitait qu’une seule chose : s’en aller. J’hochai de la tête devant la détresse de la pauvre jeune fille qui vivait un très mauvais moment.

-Bien sûr. Et si vous souhaitez que l’on discute toute les deux après cette entrevue, ma porte vous est ouverte, Mademoiselle Harris…

Je la laissai s’en aller avant de regarder les deux hommes.

-Personne ne peux juger de vos qualité en tant que père, Ward. C’est à la justice d’en juger. Ainsi, si vous souhaitez aller en justice personne ne peut vous en empêcher. Vous ne pourrez pas passer à côté du bilan psychiatrique étant donné votre casier judiciaire. Je vous informe, c’est tout.

Il semblait comprendre. Et je fixai, à nouveau, les deux hommes.

-Je pense que, pour l’instant, cette médiation n’apporte pas vraiment de choses positives alors je pense que nous pouvons arrêter pour aujourd’hui. Si vous souhaitez reprendre une autre fois, je suis à votre disposition.

Et ça semblait convenir à Ward qui se leva, ajouta un phrase à Keller avant de nous saluer et de s’en aller… J’avais fait signe, de mon côté, à Keller de rester assis. Quand Ward fut parti, je le fixai :

-Ne soyez pas si dur envers votre petite-amie… Si elle a été en couple avec Ward, elle peut avoir une certaine vision de lui. Peut-être erronée, peut-être pas… Mais elle a un point de vue qu’il est peut être intéressant de prendre en compte. Mais il ne faut surtout pas vous désunir. Grant aura besoin de vous deux surtout s’il est prit au milieu d’une bataille judiciaire… Tout ça va avoir un impact sur lui… C’est inévitable. Mais Fleming semble déterminé… Et je doute que ça soit le genre d’homme à renoncer avant d’obtenir ce qu’il veut. Je l’ai eu en consultation. Il est sûr de lui, malin et il sait bien parler…

Je soupirai.

-Si bilan psychiatrique il y a, j’enverrais mes notes et observations… Je pense que c’est mieux parce que sans les preuves que j’ai concernant son passé, il n’est pas évident de déterminé si Ward Fleming est un psychopathe même avec son casier judiciaire… Je ne peux même pas totalement l’affirmer avec tout ça même si ça me semble tout de même être un manipulateur qui, autrefois, à fait usage d’une violence excessive…

Je fixai toujours Keller.

-Si vous n’avez pas d’autres questions, vous pouvez y aller, Monsieur Keller.

Quel genre de père ? Il ne savait pas comment j’étais avec Heaven… Ça se voyait. Mais je ne dis rien me contentant de rouler les yeux avant que ma relation avec Nell ne vienne sur le tapis. On confirma tous les deux que l’on avait bien été ensemble et, visiblement, la psy n’en savait rien. Quelque chose que Keller avait omis, peut-être ? En tout cas, ça ne l’empêcha pas de ricaner pour dire que, si je n’avais pas été violent avec Nell, c’est que ma relation avec elle n’avait pas dû durer longtemps. Je levai un sourcil.

-Plusieurs mois… Plus qu’avec Daisy.

Mais Nell n’était pas Daisy. Nell était différente. Dommage qu’elle avait pris la fuite. A cause d’A.J.. Avec Sky, je n’avais pas le même problème étant donné qu’A.J. était morte.

Mais Jordan essayait de m’abattre sur tous les terrains et il mis en avant le fait que, quand j’avais rencontré Grant, j’avais « violenté » le petit. C’était largement exagéré mais ça plaisait à Keller de me faire passer pour un monstre. Je m’étais défendu et c’est la psy qui me questionna à nouveau cherchant à connaitre les origines de ma querelle avec Custer. J’haussai les épaules.

-Pour une connerie. Je voulais l’ennuyer un peu parce qu’il était très sérieux et je lui ai lancé du pop-corn dessus. Il n’a pas aimé et à tenter de me frapper. Je peux pas vraiment lui en vouloir pour ça. Et il a une bonne droite.

Il n’y avait rien d’intéressant dans cette histoire et je finis par expliquer que mes intentions étaient claires : je voulais récupérer Grant. Pour ça, j’allais devoir passer par le tribunal ce que ne manquèrent pas de me dire Keller et le Docteur Johnson. Il n’y avait que Nell qui semblait vouloir éviter ça en demandant à Grant son avis mais elle se fit ramasser par Jordan et le psy à ce sujet. Je me retins de sourire. Plus ils enfonçaient Nell, plus sa relation avec Jordan risquait de rencontrer de grosses turbulences. Et quand Jordan ajouta un commentaire sur Sky, je le fixai.

-Sky fait simplement ce qu’une baby-sitter doit faire Keller : s’occuper du petit pendant que tu n’est pas là. C’est normal qu’elle s’y attache. Elle passe des journées entière avec…

Mais la psy semblait avoir définitivement rejoint le camp de Keller parce qu’elle cherchait à me dissuader d’entamer une procédure judiciaire en mettant en avant le bilan psychiatrique. J’avais l’impression qu’elle ne m’avait pas à la bonne et, intérieurement, j’étais largement frustré. Et je le fus encore plus lorsqu’elle me posa une question afin de me piéger.

Je n’aimais pas ça…

Je n’aimais pas ça DU TOUT.

C’est à Jordan que je renvoyai la question histoire d’évacuer un peu ma frustration et j’appris que Daisy avait dit à Grant qu’il devait escalader si jamais il me voyait.

La garce…

-Ça n’a pas de sens…

Je dis ça calmement… Mais intérieurement, je n’étais pas calme alors que la psy prétendait que j’avais le vertige ce que je niais. Mais tout ça faisait bien rire Jordan qui disait que c’était malin de la part de Daisy.

-Ça n’a juste pas de sens… Déjà parce que je ne ferais pas de mal à un enfant et, deuxièmement, parce que je sais grimper aussi.

Et j’en avais marre, au point que je me permis de demander à Nell si, elle aussi, elle pensait, comme Keller et Johnson, que j’étais un psychopathe. Parce qu’ils pensaient ça… Sinon, la psy ne se ferait pas aussi partial.

Mais Nell, au lieu de semer le doute, pris la fuite… Je tiquai… Elle demanda à sortir et la psychologue lui en donna l’autorisation.

Nell partit, donc, dans le silence me laissant seul avec ma frustration que je tentais de cacher en restant calme. C’est, ensuite, à ma que la psy s’adressa disant que c’était à la justice de tranché et qu’elle n’avait fait que m’informer.

-M’informer… Je pensais que les psy étaient là pour aider les gens… Pas pour les ramener à ce qu’ils veulent laisser derrière.

Elle ajouta que, pour l’instant, tout ceci n’avait rien apporté de positif et elle voulait suspendre la séance. Bonne idée.

-C’est une bonne idée… Pas de reprendre une autre fois. Mais d’arrêter.

Et je me levai et fixai Keller.

-On se verra au tribunal, Keller.

Je les saluai brièvement tous les deux avant de sortir de la pièce. Je retrouvai Nell dehors. Elle semblait ébranlée et la voir ainsi me prouvait que cette séance n’avait pas été aussi inutile que prévu. Je m’approchai d’elle.

-Je suis désolé pour tout ça, Nell… C’est juste que j’ai eu l’impression qu’ils étaient là pour me piéger alors que tout ce que j’essayais c’est de laisser le passer derrière et avoir, enfin, une vie normale avec ma femme et ma fille… Et Grant, peut-être, si la justice le veux…

Je mis ma main sur son bras pour le réconforter un peu. Si je ne pouvais pas avoir la psy dans mon camp, je pouvais peut-être avoir Nell.  

Nell confirma qu’ils avaient été ensemble il y avait plusieurs années de ça, et pendant plusieurs mois… Je grommelai… Je savais que je n’aurais pas du prendre Nell avec moi. Je l’aimais plus que tout au monde mais là, elle était plus un caillou dans ma chaussure qu’autre chose. J’avais l’impression que ‘un moment à l’autre, elle allait reprendre pour Ward alors que Ward était, si pas un psychopathe, un dangereux criminel.

Et Ward ajouta qu’il était resté plus longtemps avec Nell qu’il n’était resté avec Daisy…

Je secouai la tête, comme pour me mettre les idées en place. J’étais content que Ward n’ait pas fait de mal à Nell et comprenait mieux pourquoi elle ne le voyait pas tel que tout le monde le voyait…

Je regardai Nell…

-Ben il a bien joué son rôle pendant quelques mois alors.

Mais la psy passa à la soirée où Grant avait voulu frapper Ward et lui demanda pourquoi il avait essayé de le frapper.

Je regardai Ward. Ward qui répondit que c’était parce qu’il avait lancé du pop corn sur Grant et que le petit n’avait pas aimé… Je reconnaissais bien là Grant.

Quant à Sky, Ward me répondit que c’était normal qu’elle s’attache au petit parce qu’elle s’en occupait des journées entière. Je passai une main sur mon visage.

-Toutes les babysitters ne veulent pas devenir la mère des enfants qu’elles gardent, Ward.

Puis la psy le confronta à ses contradictions et à ses faiblesses. Ward avait le vertige ! D’où le conseil de Daisy à son fils qui devait grimper s’il voyait son père.

Et là, pour la première fois de la séance, Ward s’embourba. Il chercha de l’aide auprès de Nell mais celle-ci préféra quitter la pièce. Je pouvais comprendre que c’était compliqué pour elle. D’ailleurs, je lui servis un sourire d’excuse avant de perdre le contact visuel avec elle.

Et ça tourna court avec Ward aussi, à partir de là… La psychologue trouvait que cette médiation ne menait à rien et j’étais tout à fait d’accord. Ward se leva, disant que c’était mieux d’arrêter tout bonnement et simplement. Et il quitta la pièce sans aucune formule de politesse, disant qu’on se reverrait au tribunal.

-C’est ça, ouais.

J’allais partir aussi, mais la psychologue me retint, me disant de ne pas être dur avec Nell… Je hochai la tête.

-Je sais, je suis un impulsif, mais je n’en veux pas à Nell pour aujourd’hui… Elle était mal prise entre Ward qui sait se faire laid et moi qui peut pétrifier quelqu’un d’un seul regard. Je le sais, je ferai attention.

Je souris.

-Nous désunir n’est pas au programme… Ni pour nous, ni pour Grant.

Je me levai alors qu’elle me parlait du bilan psychiatrique qu’il y aurait « peut-être »… Je la regardai avec de grands yeux.

-Il faut qu’il y ait évaluation psychiatrique ! Il le faut, Dr. Johnson. On ne peut pas laisser un enfant entre les mains de Ward. Même sa propre fille est potentiellement en danger.

Puis elle me demanda si j’avais d’autre question et je hochai négativement la tête.

-Non, plus de question. Je vous remercie, Dr. Johnson… Grâce à vous, je me sens un minimum soutenu.

Puis je sortis de la pièce pour voir Ward beaucoup trop près de Nell.

-Ecarte-toi d’elle, Fleming ! Tu lui as fait assez de mal pour aujourd’hui ! Et moi aussi d’ailleurs.

Je pris la main de Nel et l’écartai de Fleming.

-Comme tu l’as dit, on se reverra au tribunal.

Et on s’en fut… Une fois hors de portée d’oreille de Ward Fleming, je chuchotai à Nell…

-Je suis désolé si je t’ai fait mal… Mais garder Grant, faire en sorte qu’il ne tombe pas entre les mains de Ward, c’est mon combat quotidien désormais. Tu ne le vois peut-être pas comme moi, je le vois… Mais un jour, quand il se fera prendre, tu te rendras compte qu’il t’a manipulée du début à la fin.

La médiation devenait excessivement pesante et prenante u point où je commençais à manquer d’air et non pas seulement à cause de la fumée des cigarettes qu’enfilait Jordan. Je me sentais comme une balle de pingpong voyageant entre mon ex petit ami et mon petit ami. Ça avait été mon idée de me joindre à cette rencontre car j’avais cru pouvoir tempérer les passions mais ce n’était de toute évidence pas le cas et lorsque mon ancienne relation avec Ward vint sur le sujet, je compris que j’allais perdre pied.

Et peut-être pas que ça.

- Je n’ai pas l’impression qu’il a joué un rôle pendant notre relation.

Je m’étais exprimé d’une toute petite voix, éteinte, sachant très bien que je cumulais de mauvais points auprès de mon petit ami qui allait peut-être remettre en question notre relation pour ça. Mais je ne pouvais pas mentir ! Ward n’avait jamais été violent avec moi. Parfois, il se montrait insistant mais jamais je ne m’étais sentie obligé de quoi que ce soit et rien ne prouvait qu’avec moi, il n’avait pas été tout simplement lui-même et que c’est dans la rue qu’il joue le rôle du gros dur à cuir ! Ça me paraissait logique puisqu’aujourd’hui, Ward était marié et père de famille et que sa femme et sa fille étaient toutes les deux heureuses.

Ensuite, il fut question de la première rencontre entre le père et le fils et le fait que Ward avait réagit violement envers le petit. Moi, je demandais s’il savait à ce moment-là qu’il se trouvait en présence de son fils ce à quoi il répondit par la négative. Ensuite, il éclaira un peu nos lanternes sur le contexte de son geste. Rien ne justifiait l’usage de la violence mais à mon avis, les circonstances étaient légèrement atténuantes.

Après, tout sembla s’escalader ! Entre la menace de Ward de saisir les tribunaux pour obtenir la garde de son fils et celle de Jordan d’utiliser tous les soupçons pensant sur lui pour étoffer sa position devant le juge, il me semblait que nous étions entrain d’oublier que le principale intéressé avait peut-être le droit de s’exprimer. Cela me valu un regard assassin de la part de mon petit ami et d’être recadré par la psychologue qui commençait à me faire douter de son impartialité.

Tout ce que j’avais voulu dire était que Grant pourrait au moins dire s’il avait envie de connaitre son père, ou pas du tout. Il n’avait pas été question de lui demander s’il avait envie de nous quitter pour aller s’installer chez Sky et Ward. Mais peut-être que, comme avec la baby-sitter, des droits de visites supervisés pourraient être envisagés et que cela calmerait les esprit de tout le monde.

Il était inutile que je rectifie ma pensée puisque de toute évidence, les trois étaient campés que leur position.

Ce fut quand je me retrouvais coincée davantage entre Ward et Jordan que je demandais à quitter la pièce. Je ne voulais pas répondre à une question qui signerait l’arrêt de mort de mon couple. J’avais compris que je ne pouvais avoir une opinion divergente ou du moins, plus atténuée que celle de Jordan. Si en prime j’osais dire que Ward était, selon moi, loin d’être un psychopathe ou l’homme violent qu’ils prétendaient, je pouvais déjà sentir la terre trembler sous mes pieds.

Je me levais donc et, tête baissée, passais entre mon fauteuil et celui de Ward et je me faufilais hors de la pièce ou je fis les cent pas en tournant en rond pour me ventiler l’esprit. Plus jamais de ma vie je n’allais revenir pour une médiation et plus jamais je ne donnerai mon opinion dans cette situation qui me dépassais largement. Ça faisait bien trop mal que d’être fidèle à ses valeurs et ses croyances.

Ward se pointa hors du bureau de la psychologue et je détournais le regard, le temps de me passer les mains sur le visage. Je savais qu’il ne passerait pas devant moi en m’ignorant. J’aurais bien aimé qu’il le fasse, cependant.

- Je ne pensais pas non plus que la rencontre prendrait cette allure. Et je suis désolée si je n’ai pas répondu. Je ne pouvais pas… Tu comprends ?

Je soupirais alors qu’il posa sa main sur mon bras et je lui répondis d’un sourire qui s’effaça quand Jordan sortit à son tour du bureau en ordonnant à Ward de s’écarter de moi car ils m’avaient fait assez de mal tous les deux. Devais-je aussi m’écarter de Jordan ? J’en avais envie, mais je ne bougeais pas, restant silencieuse devant le rendez-vous pour le tribunal lancé.

Je suivis Jordan à l’extérieur du bâtiment et c’est là qu’il s’excusa de m’avoir fait mal mais, puisqu’il y avait un mais, s’il l’avait fait c’était pour protéger la promesse qu’il avait fait à Daisy, celle de protéger Grant de son père et qu’un jour, je comprendrais que j’avais été manipulée du début jusqu’à la fin par Ward.

- Je n’ai pas voulue te nuire pendant cette médiation et je suis désolée si tu en as eu l’impression. Je crois que je ne te suis pas d’une grande aide et que je devrais m’abstenir si tu dois refaire une médiation, ou aller devant le juge.

Il me paraissait évident que, lors de ces deux médiations, je ne ramais pas dans le même sens que Jordan et qu’il allait être mieux servit par l’aide de la docteure Johnson que de la mienne.

A la sortie du bureau du Docteur Johnson, je bouillonnais à l’intérieur. J’avais l’impression que la psychologue avait carrément pris le parti de Jordan et qu’elle cherchait sans cesse à me piéger. J’avais lancé la guerre. Une guerre qui se passera au tribunal. Ce n’était pas du tout mon terrain de prédilection mais une victoire là-bas ferait beaucoup de mal à Keller.

Vraiment beaucoup de mal. Et j’avais quelques armes pour lui faire mal là-bas. Je savais que je pouvais réussir à montrer un beau parcours de rédemption et obtenir, par là même, la garde de Custer. Un Custer qui, à travers Sky, pourrait montrer son envie de vivre avec elle et, par extension, avec moi. Mais je n’avais pas que ça comme arme.

J’avais Nell aussi…

Je la sentais en prise à un conflit intérieur qui l’empêchait de prendre entièrement parti pour son petit-ami de flic. Elle savait que je n’avais jamais été violent avec elle. Elle savait que les choses étaient bien plus complexes que Keller voulait bien l’imaginer. Elle avait des valeurs qui l’empêchait de voir quelqu’un totalement en noir. Contrairement à Keller, elle ne passe pas son temps dans l’Eastside pour chasser les méchants… Elle passe son temps dans l’Eastside à essayer de rendre le quartier moins misérable et ça passait par le fait de voir des gens pas recommandable et de tenter de les aider en les sortant de leur merde. C’est comme ça qu’elle était tombée dans mes filets… Des filets dont elle n’était pas encore sortie.

Elle était sortie avant moi et attendait dehors. Elle semblait toujours ébranlée par la conversation. Alors, dans le but de continuer à semer la discorde dans son couple et à l’avoir de mon côté, je m’approchai d’elle disant que je m’excusais pour ce qu’elle avait dû subir. Elle déclara qu’elle n’aurait pas imaginé que la conversation prenne cette allure… Comme s’il y avait pu avoir un terrain d’entente entre moi et Keller.

C’était impossible.

Elle s’excusa de ne pas avoir répondu à ma question déclarant qu’elle ne le pouvait pas. Je penchai légèrement la tête sur le côté.

-Oui… Je comprends… Il ne te laisse rien dire sans te foudroyer du regard de toute façon…

Et Keller ajouta de l’eau à mon moulin en sortant de la pièce et en m’ordonnant de m’éloigner de sa petite-amie. Je lâchai le bras de Nell avant de fixer Keller.

-Je ne voulais pas lui faire de mal…

Il lâcha ensuite qu’on se retrouvera au tribunal et ils prirent, ensuite, la fuite alors que j’affichai, maintenant, un sourire en coin avant de reprendre mon sérieux. Si j’avais perdu des points auprès de la psy, j’en avais sans doute gagné auprès de Nell… Ou, du moins, j’étais sûr que Jordan en avait perdu.