La soirée d’hier avait été dure et j’avais du mal à me réveillé ce matin… J’avais beaucoup couru hier alors que je surveillais les environs de là où dealait Carlos… J’avais beaucoup couru parce qu’on devait toujours changer d’endroit à cause des New Soldados… Ils nous traquaient partout et tout le temps et c’était rare quand on pouvait dealer au même endroit sur une nuit.

J’étais, donc, très fatigué et quand j’ai ouvert les yeux dans ma chambre, il était déjà 10h du matin… J’avais frotté mes yeux posant mon regard dans ma chambre vide. Il y avait trois lit dans ma chambre. Le mien, celui qui était à Guillermo et celui qui était à Jesse… Tous les deux, ils avaient eu le droit à une autre vie.

Mais pas moi.

J’en voulais toujours à Guillermo énormément. Encore plus depuis que j’avais vu l’émission qu’il avait faite. Il s’appelait, maintenant, Guillermo Quinn et portait la même croix que Finan… J’avais la même aussi… Sauf que je m’appelais toujours Alvaro Torres. Et chaque fois que je pense à ce que j’ai vu dans l’émission, je pensais au jour où ma Maman est morte. Finan sortait avec elle à l’époque et on a vécu un peu ensemble chez lui. Tous ensemble. Comme une famille. Mais quand Maman est morte, Finan a dit qu’il pourrait pas m’élever seul et il a dit qu’Isabel serait plus douée pour ça.

Alors, il m’a mis ici. Et je suis devenu un Pequeñas Manos.

Je n’aimais pas aller dans la rue pour surveiller… J’ai jamais réellement aimé ça mais je l’ai toujours fait pour avoir un peu d’argent et, aussi, parce que je ne voulais pas abandonner mes amis. Guillermo et Jesse étaient mes meilleurs amis et, si Jesse a pas eu le choix que de partir, Guillermo, lui, a trahi et, en récompense, il a eut la vie que j’ai toujours voulu avoir.

Alors, après l’émission, j’ai pensé trahir. J’ai pensé que j’allais aller trouver Ward et lui dire que je veux bien travailler pour lui. Je prévoyais de me faire prendre très vite pour finir chez Finan, comme Guillermo. Je savais que ça pourrait fonctionner… Mais je savais aussi que Ward, il allait sûrement me tuer. Il aime bien Guillermo. Il ne m’aime pas moi. Je le sais.

Alors, j’ai renoncé à ça… J’ai préféré relire pour la énième fois Olivier Twist que Jack Perry m’avait donné. Cette histoire, c’était notre histoire à nous Pequeñas Manos. Mais je me disais aussi que, au sein d’un même groupe, il ne pouvait pas il y avoir que des belles histoires ou des miracles.

Il y avait eu Jesse.

Il y avait eu Guillermo.

Même Isabel avait pu avoir mieux.

Mais en dehors de ça, il y avait eu Paco… Manuel a suivi le chemin qu’il devait suivre…

Et moi ? C’était quoi mon destin ? Certaines devenir un Los Diablos… C’est ce qu’ils disent tous… Je ne trahirais personne. Je n’ai pas de talent pour la musique. Alors, je serais un Los Diablos…

Et cette idée me donnait presque envie de pleurer alors que je mangeais seul mes céréales alors que les autres étaient déjà partis jouer dehors. Je mangeai deux bouchée avant de laisser tout là et de sortir marcher… Je n’avais pas le cœur à lire…

J’avais mal.

Je trainai des pieds dans la rues regardant les gens passer. Des gens que je voyais souvent et qui ne prêtaient même plus attention à moi sauf la vieille June qui faisait toujours un petit commentaire méchant quand elle voyait l’un d’entre nous. Mais j’avais pas le cœur à ennuyer la vieille June. C’était pas drôle sans Guillermo et Jesse.

Rien n’était drôle sans eux et, en même temps, je leur en voulait quelque pas…

Je finis par m’asseoir sur un banc… Je devais toujours rester sur mes gardes au cas où les flics me repèreraient mais mon attention était sur les quelques affiches plaquées sur un abribus. Il y avait des publicités pour Coca mais aussi une affiche avec Ivar Miller de The Warriors, le groupe de Finan… C’était un pub aussi… Enfin, non… C’était une affiche qui expliquait qu’on pouvait téléphoner à Ivar parce qu’il était là pour écouter les enfants seuls.

Je relus plusieurs fois…

Seul…

J’étais pas seul… Mais je l’étais quand même… J’avais parlé à Alejandra, Ernesto et Ugo… Ils savaient ce que je ressentais mais ils ont simplement dit que ça passera.

Mais ça passait pas… Je trouvais toujours tout ça injuste. Et est-ce que parler à Ivar Miller changera quelque chose ?

Je secouai la tête…

Non… Je deviendrais un Los Diablos… C’est mon destin…

Je soupirai en pensant à ça alors que la vieille Helena discutait derrière moi avec la vieille Paula. C’étaient les commères du coin avec June… Sauf que, là, elles parlaient sur la vieille June.

-Tu sais que l’autre jour June et moi avons rencontré son fils, Howard Stone, et qu’elle a encore fait comme si elle n’avait qu’un fils ?

C’est ce qu’expliquait Helena. Et ça étonnait pas Paula.

-Ça ne m'étonne pas… Pourtant, elle devrait être fier de son fils ! Il n’avait strictement aucun talent étant petit hormis la batterie et il a réussi. June disait qu’il ne deviendrait qu’un délinquant et, lui, il a suivi ses rêves et est devenu une rockstar. Ce n’est pas rien !

Je savais que June était la mère d’Howard Stone et qu’elle le détestait. Je trouvais ça triste.

-Mais Paula… La carrière d’Howard, tout le monde sait, ici, que c’est un coup de chance… Ça n’arrive pas à tout le monde dans l’Eastside.

Oui… Comme Jesse. Comme Guillermo. C’est la chance… Je soupirai… Mais Paula s’énerva.

-Non ! Ce n’est pas de la chance ! C’est de la persévérance ! Petit, il s’entrainait sur des poubelles ! Des poubelles, Helena ! S’il est devenu rockstar c’est parce qu’il a travailler pour. C’est parce qu’il a cru en lui alors que personne ne croyait en lui. C’est parce qu’il a déjoué le destin en prenant, justement, son destin en main. Il a choisi de sortir d’ici alors il est sorti. Le problème des gens de l’Eastside, ce n’est pas l’Eastside! C’est eux-mêmes. Ils pensent tous que leur destin est soit de finir dans un gang, soit d’avoir un job mal payé. C’est ça le problème, Helena ! C’est qu’ils pensent tous que leur destin est tout tracé parce qu’ils sont nés ici ! Alors que, non ! Il suffit de choisir ! C’est tout !

Le discours de Paula était plein de passion. Et je l’avais écouter la bouche entrouverte. Elle avait peut-être raison… Je pense que mon destin est de devenir un Los Diablos…

Mais non.

Je ne le veux pas.

Tout comme Howard Stone ne voulait pas être un moins que rien.

Je fixai, alors, à nouveau l’affiche avec Ivar. Je voulais autre chose. Mais je savais que, seul, je n’y arriverais pas.

Il me faut de l’aide et l’aide, c’était l’affiche.

Je me levai d’un bond et courus très vite vers une cabine téléphonique à l’abris des regard. J’utilisai mes pièces et composai le numéro que j’avais vu sur l’affiche. On était dans les heures où on pouvait sonner à Ivar alors, j’avais pas trainé.

Et ça décrocha…

-Bonjour… Je…

Je me mordis la lèvres… J’avais pas préparé quoi dire…

-Je téléphone parce que j’ai vu l’affiche… Je m’appelle Alvaro et j’ai 13 ans… Je vis dans l’Eastside… Et… Je… Je peux parler sans que rien soit dit à personne ?

Parce que je voulais pas que les autres le sache… Et encore moins la police…

@ Billy Lighter

Aujourd’hui, c’était mon premier jour au standard de United For Youth. J’étais à la fois curieux, intrigué, impressionné et un peu stressé… C’est-à-dire que je ne voudrais pas envoyer quelqu’un dans la mauvaise voie sans le vouloir. C’était une grande responsabilité qu’on m’avait donné là. Et je devais m’en montrer digne.

Tout le monde croyait en moi, Vanya la première, bien sûr, mais aussi mes amis de The Warriors et Samantha, ma manager. Je ne voulais pas les décevoir. Mais surtout, je ne voulais pas me décevoir moi-même.

Catherine Harvey m’avait expliqué, alors qu’elle me guidait jusqu’à mon poste, que tout ce que j’avais à faire, c’était répondre au téléphone et être moi-même. Elle disait aussi que tous les problèmes n’avaient pas de solution mais qu’une simple écoute suffisait parfois aux bénéficiaires de se sentir mieux.

J’avais pris place et avait mis le casque sur ma tête, pas plus vaillant que ça même si je rêvais d’aider les autres. J’avais surtout très peur de me tromper.

J’attendis le premier appel qui arriva presque tout de suite et appuyai sur le bouton pour répondre, en réajustant mon casque.

-Bonjour, Ivar Miller au téléphone… Je suis à ton écoute.

Comme c’était un standard pour les jeunes, j’avais pris le parti de tutoyer directement. Et c’est la voix hésitante, qui commençait à peine à muer, d’un jeune garçon de treize ans qui me répondis.

-Salut Alvaro… Content que tu appelles.

Il disait vivre dans l’Eastside et demanda si ce qu’il dirait au téléphone resterait secret…

-Heu… Ouais… Tu peux parler sans crainte. Tout ce que tu diras restera entre nous. Mais si tu es victime de sévices ou que ta vie est en danger peut-être qu’après notre conversation, tu voudras bien que quelqu’un te tire de là…

Je marquai une pause.

-Sinon, tout es confidentiel et restera entre toi et moi.

Je croisai mes bras sur le bureau devant moi. J’étais tout ouïe.

-Alors vas-y, raconte-moi ce qui te tracasse, Alvaro… Et on cherchera des solutions ensemble.

@ Billy Lighter

Ivar Miller était bien à l’autre bout du fil. Je connaissais sa voix parce que je l’avais entendu à l’émission de Vanya. Je savais, du coup, que c’était réellement lui… Manuel nous avait dit de nous méfier de tout le monde et de tout. Alors, j’avais appris à me méfier de tout le monde et de tout.

Comme c’était bien Ivar à l’autre bout du fil, je me présentai en cherchant mes mots. Et Ivar Miller disait être content que j’appelle. Il semblait vraiment gentil. Comme à la télévision. Je comprenais pourquoi Finan était devenu son ami. Même si… J’en voulais à Finan… Il avait donné à Guillermo ce qu’il a pas voulu me donner il y a quelques années. Pourquoi ? Guillermo était meilleur que moi ? Peut-être…

La première chose que je demandai à Ivar c’était de savoir si ce que j’allais dire restera entre nous. J’avais peur de la police. Je savais que s’il m’attrapait, j’irais à l’orphelinat. Finan avait dit que c’était un endroit horrible et jamais personne ne l’avait contredit. Je savais que je pouvais aussi peut-être aller en prison pour tout ce que j’avais fait… Je crois… Parce que je suis pas bête. Je sais que vendre de la drogue, ce n’est pas bien. Mais ça aidait des gens à gagner de l’argent. On en avait besoin.

Ivar déclara que je pouvais parler parce que tout restera entre nous. Il dit que si je subissais des sévices ou que ma vie est en danger on voudra peut-être me tirer de là. Je me mordis le doigt parce que… Parce que je subissais pas de sévices et ma vie n’était pas en danger… Alors, je me demandais si j’avais bien fait d’appeler… Il faut être en danger pour appeler…

Et le temps que je réfléchisse à tout ça, Ivar demanda ce qui me tracassait… Ma voix était toujours hésitante…

-Heu… Moi, personne ne fait du mal, en fait… Je suis pas en danger… Je sais pas si j’aurais dû appeler…

J’avais une boule dans la gorge… Je voulais parler et dire ce que j’avais mais ça resta bloqué… J’avais les larmes aux yeux… Je pensais à mes amis… Parce que j’avais envie de dire quelque chose mais, en le disant, j’avais peur que ça leur fasse mal même s’ils entendaient pas…

Mais la voix d’Ivar était encourageante… Alors, après avoir déglutis, je déclarai :

-Je ne veux pas être un Los Diablos… Je ne veux pas ça.

Ma voix tremblait et je finis par parler plus.

-Je suis orphelin. Je vis avec mes amis dans une maison. Ma maman était Los Diablos et quand elle est morte, j’ai été mis là pour éviter l’orphelinat. Finan…

Je sais pas si je pouvais parler de lui alors que Ivar le connait. C’était pas bien… Mais… Mais je n’avais pas forcément le choix.

-Finan a dit que c’était un horrible endroit et… On a jamais manqué de rien dans cette maison. J’ai des amis là-bas mais… Mais je ne veux pas devenir un Los Diablos. J’aimerais…

Je déglutis.

-Je veux une famille… Comme Jesse. Comme Guilllermo. Guillermo m’a volé ma famille.

Il y avait des sanglots dans ma voix. Je n’étais pas arrivé à la retenir.

@ Billy Lighter

Le petit semblait avoir du mal à s’exprimer, comme s’il se retenait de pleurer… Quand il dit ne pas recevoir de sévisse ni être en danger, il se questionna sur la légitimité de son appel…

-Non, non, reste en ligne… je sens bien qu’il y a quelque chose qui ne va pas et on peut régler tous les problèmes, du plus petit au plus grand.

Alors il continua… Je l’entendis déglutir… il s’élança et je pâlis.

Il ne voulait pas être un Los Diablos… Et il finit par éclater en sanglots.

-Je comprends… Qui t’oblige à devenir un Los Diablos ?

Mais il était sur sa lancée et expliqua qu’il était un orphelin, qu’il vivait avec ses amis dans une maison que sa maman était une Los Diablos et qu’il avait atterri dans cette maison pour éviter l’orphelinat…

Il ne manquait de rien mais ça n’empêchait qu’il ne voulait pas devenir un Los Diablos. Je comprenais qu’Alvaro avait jusqu’ici la vie que Guillermo avait avant. Il était un Pequeñas Manos et était destiné à devenir un dealer quand il serait plus grand…

Et il ne voulait pas ça.

Ce qu’il voulait, c’était une famille, comme Jesse et comme Guillermo… Il disait que Guillermo lui avait volé sa famille.

Je repris la parole quand il eut fini.

-Tu sais que je connais Finan Quinn… Et je suis au courant pour les Pequenas Manos, ça ne devrait pas exister…

Je me raclai la gorge.

-Je vais en parler à Finan… Mais tu sais, tu peux toi-même changer ta destinée, sans pour autant être un traitre. Je sais, par Guillermo, que les traitres sont très mal vus.

Je pinçai les lèvres.

-Je ne sais pas si je pourrai convaincre Finan de prendre un autre orphelin sous son aile, même si ce serait légitime.

Je réfléchis deux secondes…

-En attendant… est-ce que tu sais où Finan vit ? Tu pourrais passer des journées avec lui… Te réconcilier avec Guillermo…

Puis, avec de la détermination dans la voix.

-Tu ne deviendras pas un Los Diablos. S’il le faut, c’est moi qui serai ton protecteur et te trouverai une famille où vivre.

Je marquai une pause puis posai une question :

-Vous êtes combien dans le même cas que toi ?

@ Billy Lighter

Après qu’Ivar se soit introduit, je pensais que j’avais mal jugé les choses et que je n’étais pas assez en danger pour ce genre d’appel… Personne n’était violent avec moi, j’avais à manger, j’avais un endroit ou dormir, j’avais pas mal de choses… Mais Ivar disait que je devais rester en ligne et lui expliquer. Qu’il était là pour toutes les sortes de problèmes.

J’avais la gorge nouée et, comme c’était vraiment beaucoup, je finis par me lancer et ça me fit pleurer tout en même temps. Je savais que je pouvais pas parler des Los Diablos en dehors des Los Diablos mais… Je ne voulais plus en devenir un… Je n’avais jamais vraiment voulu en devenir un…

Ivar disait qu’il comprenait et à sa questions, je ne sus pas vraiment quoi répondre. Qui veut que je devienne Los Diablos ? Le gang, je crois… Puis, je ferais quoi d’autre ? Tous mes amis sont des Los Diablos. Tous les gens que je connais… Alors, qu’est-ce que je deviendrais d’autre ?

J’expliquai alors les choses à Ivar. Que j’étais orphelin et que j’étais un Pequeñas Manos sans citer le nom. Que je manquais de rien mais que je ne voulais pas devenir un Los Diablos. Je savais pas si Finan avait parlé à Ivar de tout ça. Je ne savais pas… Alors, j’expliquai que je voulais une famille. Comme Jesse et comme Guillermo.

J’avais tout dit et je sentais, au fond de moi, une grosse boule de remords. Peut-être que je n’aurais pas dû. Et si quelqu’un l’apprend ? Si Alonso l’apprend ? Est-ce que je serais un traitre ? Je suis plus vieux que Guillermo. Peut-être qu’Alonso me tuera pour ça.

Je ne savais plus… J’étais perdu.

Et Ivar lança qu’il connaissait Finan. Et qu’il savait pour les Pequeñas Manos. Et ça me soulagea d’un coup.

-Tu sais ? Finan te l’a dit ?

Je dis ça d’une voix peu assurée. Mais il disait aussi que les Pequeñas Manos ne devraient pas exister. Je ne savais pas quoi penser de ça. Je dis d’une voix triste et désabusée :

-Vivre sans ses parents, ça devrait pas exister…

Parce que c’était ça le problème. Après que je sois devenu un Pequeñas Manos ou si j’étais allé à l’orphelinat, j’aurais eu le même problème : je n’aurais pas eu de parents.

Ivar dit qu’il allait parler à Finan… Mais Finan pourra faire quoi ? Il sait que je suis ici. Il sait ce que je veux… Mais il ne fait rien.

Ivar disait que je pouvais changer ma destinée. Il pensait comme la vieille Paula. Et quand il parla des traitres, je frissonnais.

-Mal vu ? Les traites sont tués. Sauf Guillermo… Guillermo a été récompensé. Des gens sont morts à cause de lui et il a été récompensé ! Il a la vie que je veux !

Je dis ça toujours en sanglotant mais avec une voix teintée de colère. Une colère qui grandit quand Ivar dit qu’il n’arrivera peut-être pas à convaincre Finan de prendre un autre orphelin. Mais il proposa que j’aille chez lui et que je pourrais me réconcillier avec Guillermo.

La colère prenait de plus en plus le pas sur mes pleurs.

-Je sais où habite Finan. Mais je ne veux pas me réconcilier avec Guillermo ! Ni avec Finan ! Quand Maman est morte, Finan vivait avec elle. Il était comme mon père. Puis Maman est morte et il m’a mis avec les autres. Je voulais vivre avec lui mais il m’a dit qu’il savait pas s’occuper de moi ! Et maintenant il a adopté Guillermo le traitre ! C’est pas juste ! Il s’appelle Guillermo Quinn ! Il a tout ce que je voulais ! Il passe à la télé et tout ! Il va à l’école ! Il a un Papa et une Maman ! Et qu’est-ce qu’il a fait pour ça ? Il a joué à la taupe pour El Lider ! Moi, si je fais ça El Lider me tuera parce que El Lider aimait bien Guillermo parce qu’il l’a élevé ! C’est pas juste ! Rien n’est juste ! Je devrais être Alvaro Quinn !

Je remarquai que je m’étais énervé et baissai un peu les yeux.

-Pardon. Je devrais pas crier.

Je relevai les yeux quand Ivar dit que je ne deviendrais pas un Los Diablos. Que s’il fallait il sera mon protecteur et il me trouvera une famille. Je clignai des yeux pensant que j’avais mal compris. Il voulait faire ça ?

-Tu… Tu peux faire ça ? Tu me trouveras une famille ? Comment ?

Et il demanda combien on était dans mon cas.

-Quatre… Moi, Ernesto, Ugo et Alejandra. Ils sont plus vieux que moi. Mais…

Ma voix trembla.

-Peut-être il y en aura d’autre qui vont arriver. C’est la guerre de gang. On doit faire attention…

Je soupirai :

-Je veux que personne meurt…

Ma voix trembla à nouveau.

@ Billy Lighter

-Ouais, je sais, Finan me l’a dit.

Et je savais que Finan aimait beaucoup Alvaro… Il aimait aussi beaucoup Guillermo mais au début qu’il l’avait, on aurait dit que le petit était comme une épine dans son pied.

Je soupirai.

-Tu as raison, personne ne devrait vivre sans parents.

Je dis que je parlerais à Finan… il avait adopté Guillermo, pourquoi ne pas faire la même chose avec Alvaro ? Et ce sans qu’il soit vu comme un traitre… Et Alvaro s’emporta un peu, disant que les traitres n’étaient pas mal vus, mais tués !

Les mots restèrent coincés dans ma gorge. Que dire après ça ?

-Comment ça se fait ? Comment ça se fait que le destin de Guillermo n’a pas été d’être tué ? Peut-être que Finan a voulu le sauver. Et que, comme toi, tu n’es pas un traitre, tu n’avais pas besoin de son aide à ce moment-là…

C’était dégueulasse de penser comme ça, mais je ne savais pas quoi dire, je ne savais pas comment tout ça fonctionnait.

Et à ses pleurs succéda la colère. Il s’emporta réellement en disant que Guillermo avait trahi, avait fait la taupe pour El Lider que je connaissais par la presse mais dont personne ne connaissait la véritable identité. Bref, avec tout ça, Guillermo était devenu Guillermo Quinn.

-Je comprends ta colère. Et ne t’excuse pas… Crier, ça fait du bien de temps en temps… Et je comprends pourquoi tu trouves tout ça injuste.

Je lui dis alors que j’allais lui trouver une famille. Et il me demanda comment.

-Tu sais, on a quelques ressources chez United For Youth. Et on est en contact avec des famille d’accueil prêtes à aimer un enfant, même déjà grand comme toi.

Je souris, même si Alvaro ne pouvait pas le voir, c’était un sourire bienveillant.

Je demandai combien ils étaient dans son cas, et il me répondit qu’ils étaient quatre.

-Parles-en à tes amis. Peut-être qu’eux aussi veulent une famille.

Sa voix trembla, c’était la guerre des gangs, et ils devaient faire attention.

-Cette guerre est une absurdité ! Il faut vous sortir de là. Je trouverai un moyen. Je parlerai à Finan pour voir comment ça marche.

Puis, sur un ton déterminé.

-Je démantèlerai les Pequeñas Manos.

@ Billy Lighter

Finan avait parlé à Ivar de nous… J’avais vu un peu Finan quand j’étais allé à la fête de Jesse mais j’avais pas voulu lui parler. Je ne veux toujours pas lui parler. Il savait tout sur moi et il n’était jamais venu me chercher… Tout ce que je voulais c’est une famille et Ivar était d’accord de dire que personne ne devrait vivre sans parents. Je reniflai pour essayer de ravaler mes sanglots en approuvant.

Ivar voulait parler à Finan parce qu’il était sûr que si il avait adopté Guillermo, il en fera de même avec moi. Il disait qu’il savait que les traitres étaient mal vu mais je dis que les traitres, normalement, étaient tués. Et Ivar ne comprenait pas, alors, pourquoi il n’en avait pas été de même pour Guillermo. Il croyait que Finan avait sauvé Guillermo et que, du coup, ça expliquait pourquoi Guillermo avait été adopté et pas moi.

-Je sais pas pourquoi il a pas été tué ! Peut-être parce que personne ne voudrait tué un enfant. Finan ne ferait pas ça et c’est lui qui s’occupe de ça ! Les autres feraient pas ça non plus ! Voilà, je crois, pourquoi ! Et Guillermo a finit chez Finan parce que c’était sa punition. Finan devait le surveiller. Mais il l’a adopté !

Et j’étais fâché de ça ! Pas que Guillermo soit en vie. Je ne veux que personne ne meurt même si Guillermo a trahi. Mais parce que sa punition s’est transformé en récompense. Et j’expliquai tout ça à Ivar. Je l’expliquai en m’énervant. J’étais en colère parce que tout ça était injuste. J’avais toujours tout fait bien pour le gang même si ça ne m’amusait pas. Pourtant, c’est Guillermo le traitre qui a eu une récompense ! Pas moi !

Je m’excusai de m’être emporté mais Ivar disait qu’il n’y avait pas besoin. Il comprenait que je trouvais ça injuste. J’avais toujours les larmes aux yeux.

-Finan a rendu ça injuste !

Je lui en voulais. Il avait adopté Guillermo. Pas moi. Il aurait pu. Mais il l’a pas fait ! Je ne comprenais pas pourquoi !

Mais Ivar dit qu’il allait me trouver une famille. Ça me surpris. Comme ça ? Simplement comme ça ? Je ne voyais pas bien comment mais il m’expliqua que United For Youth avait le pouvait de faire ça.

-C’est vrai ? Des familles qui veulent des enfants comme moi ? Même si…

Je me mordis la lèvre.

-Même si j’ai fait des choses pas bien ?

J’ai volé des gens. J’ai cassé des voitures. J’ai aider des gens à vendre de la drogue. J’ai ennuyé des policiers. J’ai fait péter des feux d’artifice dans des rues. J’ai fait plein de choses pas bien.

Je dis combien on était dans la maison où je vivais et Ivar m’invitai à en parler à mes amis… Je me mordis la lèvre.

-Je… Ils vont peut-être pas aimé que j’ai parlé. Il vont croire que la police va venir les chercher. Alejandra veut pas de famille. Elle veut vivre avec son petit ami qui est un Los Diablos. Ugo… Il veut devenir Los Diablos comme son père. Il dit que, un jour, il les dirigeras… Et Ernesto…

Je fis la moue.

-Il parle jamais de ça. Mais il a jamais l’air triste… Si je leur en parle, ils m’en voudront peut-être et il le diront à Alonso et je me ferais punir…

Je crois… Je ne savais pas. J’étais perdu. Je ne savais pas si les autres voulaient ce que je voulais.

Je dis que bientôt, il y aura peut-être d’autres Pequeñas Manos à cause de la guerre de gang. Et Ivar trouvait ça absurde. Oui… Mais tout le monde savait que c’était pas une question d’argent. C’est parce que Ward ne nous aime pas et veut nous faire mal. C’est Carlos qui a dit ça.

Mais Ivar était déterminé à nous sortir de là. Il voulait parler à Finan. Et j’ouvris de grand yeux quand il dit qu’il allait démanteler les Pequeñas Manos…

Je ne sûs pas quoi dire sur le coup.

-Mais… Et si les autres ne veulent pas ? Ils… Moi, je ne veux pas que tu sois en danger…

Mais il connaissait Finan… Il allait lui parler avant… Donc, Finan saura lui dire ce qui est dangereux ou pas.

-Finan te le dira… Enfin, je ne sais pas ce qu’il te dira… Je…

Suis perdu. Je savais ce que je voulais mais je ne voulais pas que mes amis m’en veuilles parce que je les ais entrainé là-dedans.

-Je veux juste ne plus être uns Los Diablos et avoir une famille.

C’est tout…

-Quand tu auras parlé à Finan… Tu viendras me voir et m’expliquer comment je sors ? Finan sait où me trouver…

Finan sait tout… Mais Finan ne fait rien… Et Ivar était mon seul espoir.

@ Billy Lighter

Je fus choqué d’apprendre que c’était Finan qui s’occupait d’exécuter les traitres des Los Diablos. Mais rassuré en même temps de savoir qu’il ne s’en prendrait pas à un enfant et avait choisi de prendre Guillermo sous son aile à la place, lui qui devait aussi se sortir de ce gang infâme qu’était les Los Diablos.

Et ça rendait fou le petit Alvaro qui ne comprenait pas cette injustice… Je pouvais comprendre, lui qui voulait une famille.

-Je ne peux pas imaginer ce que tu vis, Alvaro, mais sache que je suis de tout cœur avec toi et que je ferai tout pour que tu te fasses adopter.

Je marquai une pause avant d’ajouter.

-Tout enfant a droit à une famille aimante…

Alvaro en voulait clairement à Finan. Il ne comprenait pas pourquoi plutôt qu’une punition, Guillermo avait eu une récompense.

-Tu sais, ça n’a pas été facile entre Guillermo et Finan au début. Je crois que c’était une punition pour tous les deux. Mais c’était mieux que la mort.

Puis je lui parlai des familles d’accueil affiliées à United For Youth et qui pourraient l’adopter, puisque c’était une famille qu’il voulait. Je l’entendais renifler et ravaler ses sanglots.

Il se demandait si ces familles étaient prêtes à accueillir un enfant qui avait pas toujours fait des choses très bien.

-Ouais, je t’assure que ouais ! Ce que tu as fait, tu l’as fait pour survivre ou on t’y a obligé. Personne, aucun enfant, ne devrait vivre ce que tu as vécu. Et tu rendrais certainement une famille ou un couple heureux. Tu sais, chez United For Youth, on a beaucoup de couples qui ne peuvent pas avoir d’enfant.

Je souris.

-Et toi, en plus, tu es un bon petit gars. Ton appel le prouve. Il faut être courageux pour faire ce que tu es en train de faire.

Je demandai combien ils étaient dans son cas et me il me dit qu’ils étaient quatre… je lui proposai de leur parler de l’association, mais il avait peur de leur réaction. Apparemment, comme ils ne manquaient de rien, ce n’était pas facile de « trahir » le gang…

-Alonso c’est celui qui vous force à faire des choses pas bien ?

Puis j’ajoutai vivement.

-Promis, on n’impliquera pas la police là-dedans… Et je vais essayer que les services sociaux non plus. On va te trouver une famille au sein de United For Youth et qui sait, en voyant que tu as réussi, peut-être que tes amis suivront.

J’étais prêt à démanteler les Pequeñas Manos, mais Alvaro semblait penser que ce ne serait pas si facile que ça.

-Ecoute… Je vais parler à Finan. On va d’abord s’occuper de trouver une famille pour toi. Et après, on verra… Comme je te dis, peut-être que les autres viendront chercher notre aide d’eux-mêmes.

J’avais la gorge nouée… pauvre petit gars.

-Personne ne sera en danger, d’accord ? Je parlerai à Finan.

Puis, plus déterminé.

-Et on te sortira de là.

@ Billy Lighter

Ivar disait qu’il fera tout pour que je me fasse adopter. J’entendais qu’il était sincère et j’eus un peu moins mal au cœur. J’hochai de la tête.

-Merci.

Mais je ne cachai pas en vouloir à Finan. Je comprenais pas pourquoi je n’avais pas eu le droit de venir vivre avec lui. S’il avait pu adopter Guillermo, pourquoi pas moi ? Je commençais à croire qu’il n’avait pas plus envie que ça que je vive avec lui… Il m’avait déjà rejeté une fois… Maintenant, il l’avait fait, de mon point de vue, une deuxième fois. Ivar expliqua alors que, au début, ça avait pas été facile entre Finan et Guillermo et que c’était une punition pour les deux. Mais je répliquai à ça :

-Oui, mais plus maintenant ! La punition s’est transformé en récompense et tout le monde semble s’en foutre chez les Los Diablos !

Alors que Guillermo avait trahi ! Moi-même j’ai pensé à trahir mais… C’est pas possible pour moi. Je suis pas Guillermo et j’ai pas envie de faire mal à mes amis ou de risquer de mourir en allant voir Ward.

Mais Ivar expliqua que dans United For Youth il y avait des familles d’accueil et qu’il allait m’en trouver une. Ça me rassura mais, en même temps, je demandai à Ivar si les familles acceptaient des enfants qui avaient fait des choses pas bien… J’avais fait plein de choses pas bien. Je savais que c’était pas bien parce que je n’étais pas stupides. Si on doit fuir la police, c’est que ce n’est pas bien. Puis, je lis beaucoup et je regarde la télé. Je sais ce qui n’est pas bien.

Mais Ivar disait que ce n’était pas grave. Que j’avais fait ce qu’il fallait pour survivre. Je reniflai encore hochant un peu de la tête. Il disait que j’aurais pas dû vivre ce que j’avais vécu. J’haussai des épaules. Je crois qu’il y a pire… Mais il y a mieux aussi, ça c’est vrai. Et j’entendis Ivar dire que beaucoup de familles ne pouvaient pas avoir d’enfants et qu’ils seraient heureux de m’accueillir.

-J’espère…

Il disait que j’étais gentil et courageux. Je ravalai un peu plus mes sanglots.

-Merci…

Je ne savais pas quoi dire… Est-ce que j’étais vraiment courageux ? Si je l’étais, je n’aurais pas rechigner à devenir un Los Diablos. Manuel était courageux, lui. Il allait dehors tous les soirs malgré le danger pour vendre. Il disait qu’il le faisait pour que son salaire et celui d’Isabel leur permette d’acheter une maison hors de l’Eastside.

Moi, je voulais fuir tout ça.

Et je savais encore moins quoi dire quand Ivar voulait que je propose la même choses aux autres. J’avais peur de savoir ce qu’ils en penseraient. Je ne pense pas qu’ils ont envie de partir, eux… Je parlai d’Alonso sans savoir si j’aurais réellement dû le cité. Et je pensais bien que j’aurais dû m’abstenir quand Ivar demanda si c’était lui qui nous faisait faire des choses pas bien.

-Non… Enfin… C’est notre chef.

C’était faux. Ce n’était pas notre chef. Le vrai chef, c’était Jimmy Reed. Guillermo me l’a dit. Ward le lui a dit.

-Il dit quand on doit travailler mais il veille à ce qu’on manque de rien dans notre maison. Il nous protège aussi. Il n’est pas méchant du tout…

J’aime beaucoup Alonso. Il est très gentil avec nous même si beaucoup de Los Diablos ont peur de lui parce qu’il est le chef. Enfin… Presque le chef.

Je fus soulagé quand Ivar dit qu’il impliquera pas la police et les services sociaux et que, peut-être, mes amis voudront me suivre quand il me trouvera une famille.

-J’espère… Enfin… Je crois qu’il y a qu’eux qui peuvent savoir ce qu’ils veulent.

Même si Ivar voulait faire en sorte qu’il y ait plus de Pequeñas Manos… Mais je crois pas que c’est possible. Même si on s’en va tous les quatre, il y en aura d’autres. J’en suis sûr. Je le dis à Ivar que j’étais pas sûr de tout ça. Et il dit qu’il parlera à Finan et que personne ne sera en danger.

-D’accord.

J’eus un très léger sourire quand Ivar disait qu’on allait me sortir de là.

-Merci… Je vais mieux maintenant.

Oui. Et j’espérais que Ivar n’allait pas faire comme Finan et m’abandonner, lui aussi. Mais je ne crois pas qu’il est comme ça.

-Je dois y aller… Je n’ai plus de pièce pour le téléphone… Merci…

Je saluai Ivar et je raccrochai avant de sécher mes larmes espérant que, un jour, Ivar viendra me chercher.

@ Billy Lighter