-Putain ! C’est bien le moment de faire ce genre de connerie !

C’est ce que j’avais lancé pour moi-même en lisant L.A.People. L’album de The Lightening était terminé. Restait au graphiste à s’occuper de la pochette avant qu’il ne soit mis en vente. Et voilà que Cash avait décidé d’attirer l’attention sur lui en se battant au Crazy Ginger !

Quelle putain de bonne idée !

Il s’était battu avec le frère de Victoria Hunter. Je ne connaissais pas Victor mais il devait avoir redoublé d’imagination pour foutre Cash hors de lui. Ou alors, Cash était tellement shooté qu’il avait tapé sans raison ! Putain, s’il avait replonger si près de la sortie de notre nouvel album, j’allais l’étrangler moi-même avec mes propres mains !

J’avais refermé violemment le magazine. Je ne savais pas où était April. Dans notre chambre ? Dans le jardin ? Qu’importe ! Il fallait que j’aille voir Cash pour éclaircir tout ça en espérant que ça ne soit qu’un gros mensonge de Sørensen. Parce que je connaissais ce foutu Sørensen. Il était capable de dire n’importe quoi pour faire vendre. Il avait déjà menti à mon sujet à de nombreuses reprises. Mais ce que je savais, aussi, c’est qu’il se basait toujours sur un part de vérité.

Je voulais savoir où était la vérité là-dedans.

Alors, j’avais pris ma Lamborghini sans même prévenir April et j’avais roulé jusque à Hollywood où résidait Cash.

Je me garai dans la rue non loin de la porte d’entrée de la maison. Je m’y avançai d’un pas déterminé avec, en main, le L.A.People roulé. Je sonnai à la porte et c’est la mère de Cash qui vint m’ouvrir.

-Bonjour, Billy… Tu viens voir Cash ?

La mère de Cash était toujours bienveillante. Je l’aimais bien.

-Bonjour… Ouais ! Je viens le voir ! C’est important !

Elle déclara qu’il était dans sa chambre avant de me laisser entrer. Mon pas était toujours aussi décidé et je finis par toquer à la porte de la chambre de Cash avant d’entrer.

-Salut Cash !

J’avais dit ça alors que mon visage montrait que j’étais contrarié. Je lui lançai, alors, le L.A.People.

-Page dix ! Tu m’explique ?!

Il avait intérêt à m’expliquer ça très vite.

J’avais un petit peu mal la tête… Engourdi, le Désert me semblait plus loin que jamais. Mais il fallait que je tienne. Il fallait que je résiste au désir de me sentir tout puissant dans mon propre monde. Que je résiste à l’envie de revêtir les écailles du Roi Serpent et d’aller là où rien ni personne ne pourrait m’atteindre.

Pour calmer un peu ma gueule de bois, j’avais pris Io dans son vivarium… Sa peau lisse était froide contre la mienne alors que je la faisais passer d’un bras à l’autre, lentement. C’était agréable comme sensation. Elle siffla et je sifflai en retour, souriant.

Il allait falloir que je descende, pour me nourrir... ça ferait certainement du bien à ma tête… Mais au moins, je n’étais pas complètement dans le gaz comme avec l’héroïne… J’avais bien conscience de ce qu’il se passait dans la maison : la télé allumée que devait regarder ma grand-mère et les bruits de vaisselles alors que ma mère s’affairait dans la cuisine.

Puis il y eut la sonnette de la maison.

Je fis passer Io dans la masse compacte de mes cheveux, ses anneaux puissants massant mon crâne. Ça faisait un bien fou !

Qui sonnait à la porte ?

Probablement un colis.

J’avais déjà passablement oublié ce qui s’était passé la veille au Crazy Ginger. Bien sûr, je me rappelais quand même avoir versé un seau d’eau sur Victor Hunter pour le calmer alors qu’il était en train de défoncer la gueule d’un jeune chanteur.

Mais ce n’était pas grave… Juste une histoire parmi d’autres dans l’effervescence  nocturne de L.A.

Des pas dans l’escalier… Décidés…

Qui venaient vers ma chambre… Et ce n’était pas ma mère. Je connaissais le pas de ma mère.

La porte s’ouvrit à la volée pour laisser apparaître Billy… Et mon premier réflexe fut de me redresser, Io glissant sur mon crâne et redressant sa tête reptilienne vers le chanteur comme s’il l’avait vraiment dérangée dans son exploration de ma chevelure hirsute.

Je regardai le chanteur avec de grands yeux admiratifs, ravi de le voir ici ! C’était tellement rare quand il venait me rendre visite (et vice-versa). A la limite, on ne se voyait qu’aux studios.

-Salut Billy !

Mais lui n’avait pas l’air content. Il me balança un magazine que je pris d’une main. L.A.People… Je fronçai les sourcils, ne faisant pas le lien. J’ouvris alors ce torchon à la page dix et la première chose que je vis, ce fut ma photo et celle de Victor Hunter.

-Déjà ?! Mais ils impriment quand ces conneries ?

Je lus ensuite la signature du journaliste. Sørensen.

-Il travaille 24h/24 ?

Devant l’impatience de Billy, je parcourus rapidement l’article, chaque mot me donnant un peu plus mal à la tête.

Je passai une main sur mon visage.

-C’est… non… Ce n’est pas ce qu’il s’est passé. On ne s’est pas battu.

Je regardai Billy.

-J’ai une tête à m’être battu ?

Je n’avais aucune marque. Parce que je ne m’étais pas battu.

Cash semblait heureux de me voir mais, moi, je n’étais pas vraiment de bonne humeur après avoir lu ce foutu numéro de L.A.People. Et, sans cérémonie, je lui balançai le L.A.People lui sommant de lire la page dix.

Je croisai les bras, les sourcils froncés alors que Cash ouvrit le magazine et se mit à lire. Il s’exclama par un « déjà ! » se demandant quand est-ce que L.A.People imprimaient leur connerie.

-C’est un magazine ! Ils impriment au petit matin !

Il se demandait si Sørensen travaillait 24h/24. Je me fichais complètement de quand et comment Sørensen faisait pour obtenir ses informations ! Il trainait sans doute dans les bars. Si ça tombe, il était au Crazy Ginger hier soir et avait simplement écrit quelques lignes juste après l’altercation présumée entre Cash et Hunter.

-Je n’en sais foutre rien ! Et je m’en fiche ! C’est le contenu dont je ne me fiche pas !

Si Cash avait été si enjouée quand j’avais passé la porte, il l’était d’un coup beaucoup moins. Comme s’il était pris d’un soudain malaise.

Moi, je le regardais toujours les bras croisés et l’air sévère. Il clama qu’il ne s’était pas battu avec Victor. Il me fixa alors demandant s’il avait une tête à s’être battu. Je fronçai encore plus fort des sourcils.

-Je n’en sais rien ! On ne voit pas les trois quart de ton visage, Cash !

Il avait sans cesse les cheveux devant les yeux alors je ne pouvais pas vraiment voir s’il avait des coups. Puis, ça ne voulait rien dire ! S’il avait démoli Hunter alors il ne risquait pas d’avoir de coups dans le visage.

-Si tu ne t’es pas battu pourquoi Amon a écrit ça ? Il se base toujours sur une part de vérité. Dis-moi ce que tu as foutu hier avec Victor Hunter ! L’album va sortir dans quelques jours alors j’aimerais bien que ça ne passe pas au second plan parce que tu as décidé de faire le con avec un foutu avocat de merde.

Je ne connaissais pas Victor Hunter mais c’était un avocat et je me méfiais des avocats. Peut-être qu’il avait fait exprès d’emmerder Cash justement pour profiter à BSC et éclipser la sortie de notre album. Ce genre de personne en serait bien capable !

-Je veux la vérité !

Rien d’autre.

Billy n’était vraiment pas content. Je pouvais voir son aura noire s’étendre autour de lui comme un cancer vicieux. Et pour une fois, ce n’était pas du à April Fox.

Non, cette fois, c’était ma faute.

Il me balança l’objet de sa colère à la figure. L.A.People. Je soupirai… On en aurait jamais fini avec ces foutus vautours… C’était à se demander comment ils faisaient… D’après Billy, ils imprimaient au petit matin.

Je fis la moue, Io pendant devant ma figure comme si elle voulait me protéger de la fureur du chanteur.

-Ouais ben… quand même.

C’était assez impressionnant de faire quelque chose un jour et de se retrouver sur papier glacé alors que je n’avais même pas encore eu le temps de cuver.

Bref, Billy ne se foutait pas du tout de ce que contenait la page dix. Alors je la lus, lentement mais sûrement, finissant pas siffler comme un serpent indigné. D’ailleurs, Io qui l’était tout autant montra aussi la langue.

J’assurai à Billy que je ne m’étais pas battu avec Victor Hunter. D’ailleurs, je n’avais aucune marque sur la figure pour la simple et bonne raison que c’était vrai !

Mais Billy disait qu’on ne voyait pas les trois quart de ma figure. Je laissai Io glisser le long de mon bras pour qu’elle dégage ma tête et je soulevai mes cheveux, dévoilant à Billy mon regard aux iris noirs et au blanc légèrement injecté de sang de par l’abus d’alcool de la veille.

Comme ça, il pouvait voir que je n’avais pas de marque.

Mais ce n’était pas une preuve à ses yeux. En fait, il me croyait nettement capable de foutre sa raclée à Hunter. Ce dont je doutais un peu. Je l’avais vu se mettre en colère… Et je n’étais pas sûr de pouvoir faire le poids quand l’avocat était dans cet état. Le chanteur de la veille l’avait appris à ses dépens.

Mais une chose était vraie dans ce que disait Billy : Sørensen se basait toujours sur une part de vérité. Puis le reste, il inventait, extrapolait, pour rendre ça plus spectaculaire et digne de se retrouver dans son torchon…

Billy voulait savoir.

Je laissai retomber mes cheveux devant mes yeux et remis Io dans son vivarium avant de prendre une cigarette et de l’allumer.

-On discutait simplement, avec Victor. Tout allait bien mais un peu plus tôt, il avait provoqué le chanteur du groupe qui jouait hier soir au Crazy Ginger.

Je haussai les épaules.

-Le chanteur a voulu se venger après son concert. Victor s’est mis en colère. Ils se sont mis à se battre. C’est moi qui ai mis fin à la bagarre en leur balançant un seau d’eau dessus.

Je regardai Billy dans les yeux.

-Voilà, c’est tout. J’ai pas porté un seul coup, ni sur Hunter, ni sur personne.

C’est avec un serpent dans les cheveux que Cash prit conscience du contenu de l’article qui m’avait fait faire le chemin jusqu’à lui. Il s’exclama en se demandant comment la nouvelle avait-elle pu déjà être écrite dans L.A.People. A vrai dire, je m’en fichais un peu des modalités… Mais le fait que Cash dise ça me prouve qu’il y avait bien eu quelque chose !

Cash se défendit, après avoir sifflé tout comme son serpent, de s’être battu avec cet avocat au Crazy Ginger. Pour me le prouver, il déclara n’avoir aucune blessure qui montrerait qu’il ait frappé qui que ce soit. Sauf que… On ne voyait absolument pas sa figure avec tous les cheveux qui lui tombaient sur le visage ! Il fit alors glisser son serpent sur son bras pour écarter ses cheveux me montrant un visage sans aucune marque qui aurait pu trahir une quelconque bagarre.

Mais est-ce que ça suffisait ?

Non !

Parce que je voyais bien Cash démolir l’avocat sans aucun effort. Suffisait de voir la photo du gars. C’était un petit minet de la haute ! Je doutais qu’il puisse foutre Cash à terre.

Et je voulais savoir la vérité !

Cash se déplaça pour remettre son serpent dans son vivarium. Il s’alluma alors un cigarette avant d’expliquer qu’il discutait avec Victor Hunter avant que le chanteur du groupe qui se produisait ce soir-là ne vienne se venger de l’avocat qui l’avait plus tôt insulté. Ce n’est, donc, pas Cash qui s’est battu mais Hunter avec un inconnu. Cash, lui, avait, visiblement, arrêté la bagarre.

-Putain !

Je m’exclamai fâché ! Plus sur Cash mais bien sur Amon Sørensen qui avait complètement déformé l’histoire.

-Pourquoi il ne s’est pas simplement acharné sur Hunter, le Sørensen ? Pourquoi il n’a pas dit la vérité, hein ?! Pourquoi il cherche toujours à rabaisser notre foutu groupe ? Il a des putain d’action chez BSC ? Il me tape sur les nerfs !

Sørensen était un menteur et j’en avais marre que ses mensonges aillent toujours dans un sens qui ne profitait pas à The Lightening. Il nous faisait passer pour des violents incontrôlable alors que ce n’était pas le cas.

-Il va me le payer !

Je ne savais pas encore si je voulais le démolir à travers les médias ou en allant chez lui, lui foutre un poing dans la gueule !

-Il faudra qu’on raconte la vraie histoire ! Putain, et je ne sais même pas comment ! Ou l’envoyer en justice pour diffamation. Il n’est jamais inquiéter alors qu’il ne fait que raconter des conneries !

Je racontai toute l’histoire à Billy. Le chanteur, les insultes, la colère incontrôlable d’Hunter. Et comment j’avais mis fin à une bagarre qui aurait pu déboucher sur une émeute. Au Crazy Ginger, on ne savait jamais comment ça allait tourner.

J’étais un héros, dans l’histoire ! Je ne m’étais pas battu.

Je me réinstallai sur mon lit, tirant doucement sur ma clope.

La fureur de Billy, grande sœur de celle de Victor Hunter, se déplaça alors… Je compris direct, à son exclamation, au ton de sa voix reconnaissable entre mille, que ce n’était plus à moi qu’il en voulait.

Il en voulait à Sørensen maintenant… Et sa colère s’exprima sous forme de questions. Des questions plus que légitimes. Le Danois avait la sale manie de s’en prendre à The Lightening. Il n’avait jamais un bon mot pour nous.

Même quand on faisait des choses bien.

Je pris ma clope entre mes doigts, laissant la fumée s’échapper doucement par mes narines et ma bouche et monter en douces volutes jusqu’au plafond de ma chambre.

-Viens t’asseoir, Billy…

Je lui proposai une cigarette comme pour l’attirer…

Puis je répondis comme je pouvais à ses questions.

-Il ne s’est pas acharné sur Hunter parce que… personne n’en a rien à foutre d’Hunter… En tout cas pour le moment.

Je haussai les épaules.

-Il ne fait que partager le sang de Vicky… Il m’a dit lui-même ne pas être un artiste.

Quant au fait que le journaliste s’acharnait tout le temps sur nous…

-C’est un Satyre, Billy… Sørensen est un Satyre… Il se nourri des mauvais nouvelles comme un vampire… Et quand il n’a rien à dire, il invente.

Je fis la moue.

-Je crois qu’il n’est dans aucun autre camp que le sien. Son but, c’est de vendre son ramassis de conneries.

Billy disait qu’on aurait (encore) à se justifier… Qu’il ne savait pas comment.

-On arrivera bien à placer ça dans une interview ou l’autre. Tu sais, je ne sais pas si c’est vraiment notre devoir de nous justifier… Que les gens croient ce qu’ils veulent. Nos fans, eux, seront toujours là.

Il allait même jusqu’à vouloir attaquer le journaliste people en justice pour diffamation.

Je soupirai.

-Tu crois vraiment que ça en vaut la peine ? Sérieusement ?

Cash avait une toute autre version de l’histoire que celle d’Amon. Une version où mon guitariste était, en réalité, une sorte de héro. Le fautif étant le chanteur de ce soir-là et le frère de Victoria Hunter.

Mais ça n’atténua pas ma colère… Ça ne fit que l’augmenter et la rediriger vers une toute autre personne : Amon Sørensen. Le Danois s’efforçait à chaque fois de descendre The Lightening. Il n’avait jamais un bon mot pour nous et cherchait à nous détruire. Je le trouvais bien plus indulgent avec d’autres groupes. Il inventait même des histoires où The Lightening passait pour les mauvais alors qu’il aurait pu, hier, faire en sorte d’avoir de bons mots pour Cash !

Mais non !

Il en avait décidé autrement par des mensonges !

Je pestais contre Amon alors que Cash me proposa de m’asseoir. C’est toujours autant énervé que je vins m’asseoir à ses côtés pour prendre la cigarette qu’il me proposait. Je l’allumai nerveusement toujours en proie à une très grande colère.

Cash disait que si Amon ne s’était pas acharné sur Hunter c’est parce qu’Hunter, tout le monde s’en fout car, quelque part, il n’est personne.

-Ouais et ben, Amon aurait pu au moins raconté la VRAIE histoire ! Ça aurait vendu aussi, non ?

Je dis ça sur le ton de l’énervement. Je savais que les gens aimaient l’appel du sang. Mais dans la vrai version, il y en avait aussi.

Quant à Sørensen, Cash le prenait pour un satyre.

-Il n’a pas le droit d’inventer !

Il y avait des lois, non ?! Il ne pouvait pas ! Et j’en avais marre qu’Amon s’en tire sans rien. Comme si c’était normal qu’il puisse mentir pour son compte ! D’ailleurs, Cash pensait bien qu’il n’avait aucune camp.

-Je l’emmerde !

Cash était sûr qu’on arrivera à caser la vérité dans une interview ou l’autre. Il disait qu’on avait pas à se justifier. Je plissai des yeux pas du tout satisfait pas ça.

-Je sais. Nos fans ne croiront pas Sørensen. Ou ils te trouveront des excuses. Mais je déteste qu’on dise un tas de conneries sur notre compte ! Je déteste ça ! Et balancer ça dans une interview, ça ne fera pas assez de bruit.

Je pensais carrément attaquer Amon en justice. Mais d’après Cash, ça n’en valait pas la peine. Je grommelai. Je savais que ça aller nous coûter du temps, du stress et de l’argent.

-Alors, il aura encore le monde contre lui. Parce que je ne vais pas le rater. J’utiliserais la presse pour le nuire et, comme la dernière fois, envoyer nos fans contre lui. Il aura une partie de L.A. pour le détester comme ça.

Il fallait que je passe mes nerfs. Je fumais nerveusement.

-En tout cas, il entendra parler de nous. Ainsi, ça lui apprendra à dire des conneries.

Je fixai Cash droit dans les yeux.

-Nous sommes à nouveau en guerre.

Contre la presse et contre Sørensen.

Je haussai les épaules quand Billy demanda si la vérité n’aurait pas vendu aussi.

-Je ne sais pas… Personne ne connait se chanteur, j’ai même oublié son nom… Et Hunter, je te dis, il n’est pas assez connu.

Pour le moment. Il était apparemment fraîchement revenu de New-York pour se faire un nom ici en tant qu’avocat, si j’avais bien compris. Et il avait Jimmy Reed comme client. On risquait d’en entendre encore parler.

-Peut-être qu’un jour, hunter sera suffisamment intéressant pour Sørensen, mais pas maintenant.

Je fis la moue.

-Et puis il y a le timing. Comme par hasard, il parle de moi à la veille de la sortie de notre album. Comme si le fait de créer nous rendait soudain fous.

Billy était venu s’installer près de moi et avait accepté la cigarette, mais il fulminait toujours. Et j’avais l’impression que ça augmentait plutôt que de se calmer.

Il disait qu’Amon n’avait pas le droit d’inventer. Je le regardai, résigné.

-Il invente avec tout le monde…

Et limite, je trouvais qu’il était encore plus vicieux avec Howard Stone qu’avec nous. Nous au moins, on savait qu’il était contre nous. Mais avec Howard, un coup il était de son côté, un coup il le descendait en flèche. Le batteur ne devait plus savoir où donner de la tête.

J’essayai de rassurer Billy en lui disant que, quoi qu’il arrive, nos fans seraient toujours là. Il était d’accord, mais trouvait que nous justifier dans une interview, même si j’estimais que ce n’était pas nécessaire, ne ferait pas assez de bruit.

Je tirai longuement sur ma clope, pensif.

Et Billy continua. Il voulait réitérer le fait de monter nos fans contre le journaliste.

-Je sais pas, Billy… La dernière fois qu’on a fait ça, Amon en a fait un article.

Il avait retourné la chose à son avantage. Et, heureusement, aucun de nos fans n’avait pris Billy au mot.

-Tu trouves pas ça dangereux ? Si un fou furieux s’en prend à Sørensen, c’est nous qui allons morfler après pour avoir inciter à la haine et à la violence.

Mais pour Billy, c’était clair, nous étions à nouveau en guerre. Je soupirai et écrasai ma clope dans le cendrier de la table de nuit.

-D’accord. Nous sommes en guerre. Mais nos armes seront ma guitare. Et ta voix.

Cash pensait bien que la vérité n’aurait pas autant rapporté que le mensonge de Sørensen. Tout ça parce que Victor était peu connu et le chanteur en question, pas du tout ! Je grommelai :

-Tu étais quand même dans l’histoire, ça aurait pu vendre.

Je n’en démordais pas ! La seule différence aurait été que Cash aurait eu le bon rôle ! Ce qui vend tout autant, de mon avis !

Cash disait que, peut-être, un jour, Hunter sera suffisamment intéressant pour Amon. J’haussai des épaules. Je m’en fichais complètement de la vie de Victor Hunter. Qu’il devienne connu ou qu’il ne le devienne jamais ne changeait rien.

Cash souligna aussi le timing du mensonge d’Amon. Je grommelai très fâché sur Sørensen qui n’en ratait jamais une.

-Il l’a fait exprès. A croire qu’il nous fait suivre rien que pour avoir une bonne histoire à raconter.

Enfin… En inventant une « bonne histoire ». Parce que c’était une faible base de vérité et un gros ramassis de conneries. Chose qu’il n’avait pas le droit de faire ce que je clamai haut et fort. Cash déclara qu’il mentait avec tout le monde.

-Et bien il n’a pas le droit !

Avec personne !

Je voulais me venger. Faire comprendre à Amon qu’il ne peut pas faire ça sans représailles. Je voulais le frapper, l’attaque en justice, contre-attaquer par le presse. Toutes les idées étaient bonnes mais aucune ne me satisfaisait vraiment. Sauf celle de monter nos fans contre Amon. Ça, je pensais bien que ça pouvait fonctionné mais Cash déclara que, la dernière fois qu’on avait fait ça, Amon en avait fait un article.

Je tirai nerveusement sur ma cigarette.

-Putain, je le hais !

Puis, il disait que c’était dangereux. Que s’il arrivait quelque chose à Amon, ça retombera sur nous. Je grommelai parce que je savais que Cash n’avait pas tort. Mais j’ajoutai tout de mon qu’on était en guerre.

Parce que nous l’étions. Et c’est Amon qui avait lancé la première bombe !

Cash confirma… Mais voulait contre-attaquer par la musique.

Je le regardai droit dans les yeux. Il y eut un silence avant que je ne réponde.

-D’accord…

Puis, mon regard se fit plus déterminé. J’étais à nouveau animé par une force. Celle de la vengeance.

-Mais si jamais Amon ne comprend pas, on fera à ma manière.

Et ça sera bien plus violent.