-Aïe ! Si tu ne sais pas mieux masser que ça, Carla, tu peux t’en aller, ok ?!

J’étais dans la salle de repos de la tour BSC à bosser sur ce foutu future procès où j’allais devoir comparaitre pour coups et blessures. Mélanger tout ça avec ma récente mauvaise expérience sur le tournage de Death Boat et vous avez un Victor particulièrement de mauvaise humeur et extrêmement tendu !

J’étais énervé et constamment angoissé par les flash de ce foutu River qui m’immerge la tête sous l’eau. Si j’avais une phobie de l’eau avant même ce foutu tournage, c’était encore pire désormais. Je n’osais même plus entrer dans ma propre piscine !

Carla cessa son massage et répliqua d’une toute petite voix :

-Désolé, Victor… Je ne voulais pas te faire mal. Est-ce que tu veux que j’aille te chercher un café ?

Carla est le genre de fille extrêmement jolie mais qui a autant de personnalité qu’une huitre et autant de cerveau qu’un pigeon. Parfois, elle arrive à me taper sur les nerfs rien qu’en respirant, c’est dire !

Je laissai brutalement tomber mon carnet sur la table avant de soupirer d’exaspération.

-Non, je ne veux pas un putain de café, ok ? Je veux que tu me masses comme il faut. C’est trop demandé ?!

Ses lèvres se pincèrent alors qu’elle hocha de la tête négativement.

-Non… Je vais faire de mon mieux.

C’est ça ! Fait de ton mieux ! Et fait le bien, si possible parce que, jusqu’ici, je regrette de ne pas avoir été voir dans l’autre tour si je ne trouve pas mieux, tiens ! Ou j’aurais dû rester chez moi et appeler une vraie masseuse !

-Victor ! Jimmy Reed veut te voir. Et il veut te voir tout de suite alors tu n’as pas intérêt à trainer.

Je fronçai des sourcils me tournant vers la voix. C’était Frances qui venait de faire irruption dans la salle de repos pour m’interpeller et me demander d’aller voir directement Reed. Son regard se tourna alors vers Carla et je vis le visage de Frances passer d’une froideur froide à une froideur glaciale. Frances jeta un regard à sa montre avant de lancer :

-Carla… Ta pause est terminée depuis deux minutes… Va directement reprendre ton poste.

Je roulai des yeux alors que Carla s’exécuta directement non sans s’excuser à moi et à Frances. Je soufflai un bon coup.

-Pourquoi il veut me voir, Reed ?

Frances fronça les sourcils.

-Monte et tu le sauras… Il n’a pas envie qu’on le fasse attendre alors, je serais toi, j’irais directement.

Je fronçais les sourcils. Je sais que je suis l’avocat de Reed mais ça ne l’empêche pas de prendre rendez-vous comme tout le monde, hein ! Non ! Il faut que je sois à sa disposition tout de suite !

Je hais le monde entier !

-J’y vais ! Mais c’est bien parce que je n’ai rien d’autre à faire.

Et je me levai, toujours tendu, pour rejoindre l’ascenseur et me pointer devant la porte du bureau-appartement de Jimmy Reed. Je toquai à la porte et quand j’entendis sa voix m’invitant à entrer, j’entrai.

-Salut, Jimmy…

C’est ce que je lançais alors qu’il m’était très difficile de cacher ma mauvaise humeur. J’espérais qu’il avait du whisky, parce que j’en avais bien besoin.

-Alors ? Qu’est-ce qui me vaut cette urgence ?

Daniele venait de quitter mon bureau et j’étais furieux. Encore bien plus furieux que lorsque Victor m’avait annoncé qu’Olivia, beaucoup trop émotionnelle et irréfléchie, avait renoncé à une excellente place dans la société et la jet-set, ainsi qu’à un éventuel héritage, tout ça parce qu’elle n’aimait plus Julian Hughes.

Mon meilleur ami venait de m’annoncer qu’Olivia mettait fin à son contrat et quittait BSC… Entre ça et Maritza qui n’était plus qu’une coquille vide qui ne semblait rester dans ma villa que pour me faire enrager, je commençais à en avoir marre de ces deux femmes et de leurs foutus caprices.

Alors j’allais agir.

J’allais couper tous les membres gangrené dont j’étais affublé. Parce que ces deux-là ne méritaient pas d’être mes faiblesses.

Non. Parce qu’elles ne faisaient aucun effort.

Alors, à peine Daniele sorti, j’avais donné ordre à Frances d’aller me chercher Victor, mon avocat. Avec de la chance, il trainerait dans les couloirs de la tour.

Je voulais Victor et je le voulais tout de suite. Parce que je voulais mettre tout ça derrière moi. Resterait encore Maritza, mais sincèrement, j’étais en train de me demander si je n’allais pas l’abandonner au Hollywood Mental Health Center un de ces quatre. Et qu’eux en fasse ce qu’ils veulent.

Frances s’exécuta très vite et j’entendis frapper seulement quelques minutes après mon ordre.

-Entrez !

Quand Victor entra, je vis qu’il avait sa tête des mauvais jours. A croire qu’il y avait quelque chose de mauvais dans l’air. J’ouvris un tiroir de mon bureau et lui fis glisser un tout nouveau paquet de cigarette avant de prendre le mien, entamé.

-Salut, Victor.

Les cigarettes étaient pour les mauvais jours… Les cigares, pour fêter quelque chose. Victor saurait décoder tout ça.

Je me levai pour aller vers la grande baie vitrée donnant sur L.A. et soufflai une première bouffée de nicotine.

-Je veux revoir mon testament. Je veux que les noms Olivia Hughes ou Cortez ainsi que celui de Maritza Reed soient rayés chaque fois qu’ils apparaissent.

Je me retournai vers Victor.

-Je ne veux pas que l’une ou l’autre, s’il m’arrive quelque chose, touche un seul centime. Tout ira à J.R. à sa majorité, sous la régence de Daniele si je meurs avant que ce ne soit le cas.

Je me dirigeai vers mon mini bar pour nous servir du whisky.

-Ça, c’est une première chose.

J’étais entré dans le bureau de Reed. J’étais bien trop de mauvaise humeur que pour voir que Reed était tout autant en colère que moi pour d’autres raisons. Je compris simplement qu’il ne m’avait pas amené ici pour célébré quelque chose quand il sortit des cigarettes de son tiroir et pas des cigares. Je savais que Reed aimait célébrer avec des cigares. C’était dégueulasse, d’ailleurs, pour être tout à fait honnête. Je préférais les cigarettes et, une fois assis, je ne me fit pas prier pour prendre le paquette, sortir un cigarette et l’allumer pour évacuer la pression.

Reed, lui se leva pour regarder à travers la baie vitrée de sa tour. J’espérais qu’il n’allait pas tourner autour du pot et qu’il allait en venir directement aux faits. J’avais une défense à mettre en place pour m’éviter pas mal de trucs désagréables lors de mon propre procès.

Heureusement que le grand manitou de L.A. était du genre à être concis. Et je pus entendre sa contrariété quand il me demanda de virer sa femme et sa fille de son testament. Il voulait que tout revienne à son fils sous la régence de Ricci. Il ne fallait pas me faire un dessin pour que je comprenne qu’il y avait eu une bisbrouille entre Livia, Reed et Maritza. Est-ce que ça concernait le divorce d’Olivia ex-Hughes ? Je n’en savais rien. Je savais que Reed n’était pas très content que sa fille divorce mais pas de là à la déshérité. Il y avait dû il y avoir autre chose.

Je ricanai à cette demande. Je ne connaissais pas bien Maritza. Je l’avais vu quelques fois à des fêtes alors qu’elle accompagnait Jimmy et, à part sourire, je ne l’avais rien vu faire. Quant à Livia, j’avais déjà parlé avec elle et, sincèrement, je ne l’aimais pas.

Jimmy nous servit un whisky déclarant que c’était une première chose. Ça signifiait qu’il avait d’autres demande.

-Ça sera fait rapidement. Rien de plus simple que de changer un testament. Mais dis-moi… Qu’est-ce qui vaut ce changement d’avis ?

Parce que c’était un changement d’avis. Un changement de testament est automatiquement un changement d’avis.

-Maritza t’en veux d’en vouloir à Livia pour son divorce et tu as décidé de les punir toutes les deux ?

Il n’y avait pas pire punition que d’être éjecté d’un testament, de mon avis. Les thunes c’était important !

-Oh, ou elles t’en ont voulu toutes les deux pour la fuite dans L.A.People ? Pourtant, Amon a dit quasi la vérité pour une fois.

Je ricanai. C’était moi qui avait balancé l’information à Amon. Et si j’avais exagéré le nombre de fois où Livia avait trompé Julian, il n’en était pas moins que l’adultère est bien réel. Les stars devraient se mettre dans la tête que gagner autant d’argent à pousser la chansonnette a une contrepartie et que cette contrepartie c’est que leurs faits et gestes sont analysés à la loupe par les médias !

-Et c’est autre chose, c’est quoi ?

J’avais pris mon verre de whisky et j’en avais bu une grosse gorgée. J’étais toujours tendu mais entendre les malheur de Jimmy me faisait du bien. Comme si je regardais une foutue émission où on voit les malheurs des stars.

Victor était arrivé aussi vite que faire se pouvait, ce qui était un bon point pour lui. Après ce que Daniele venait de m’annoncer, je n’aurais rien pu tolérer, même pas que mon avocat prenne son temps.

J’étais tellement à bout de nerf que je ne vis pas que Victor n’était pas dans son assiette non plus. Non. J’avais désormais un objectif et je voulais mettre tout ça derrière moi pour retrouver mon calme habituel.

Je détestais être stressé, je détestais être en colère. Je détestais que mes émotions prennent le pas sur mon sang-froid. Or, je savais que seules Livia et Maritza étaient capables de me mettre dans cet état.

C’était pour ça que, d’une façon ou d’une autre, il fallait que je m’en débarrasse, que je m’en détache. Sans elles, je pourrais retrouver mon esprit logique et mon cœur froid. C’était ce que je voulais, parce que le pouvoir tenait à ça.

J’étais revenu m’asseoir après nous avoir servi whisky et cigarette. Mon avocat avait accepté les deux et mon appartement au sommet de la tour BSC allait probablement bientôt devenir un vrai fumoir. Je me détendis un peu, assis face à Victor, quand ce dernier affirma qu’il n’y avait rien de plus simple et rapide que de réviser un testament.

Mais forcément, cette décision entraîna des questions de la part de Victor. Il était d’un naturel curieux.

Mais dans cette affaire, il devait tout savoir, pour pouvoir, au cas où il y aurait réclamation de la partie adverse, dresser le portrait horrible que ma fille avait dessiné d’elle-même ces derniers temps. Pareil pour Maritza qui n’était plus en mesure de gérer quoi que ce soit au point où j’en venais à souhaiter qu’elle mette fin à ses jours… Et avec style, si possible.

Ça me permettrait d’en être débarrassé sans avoir à divorcer.

Victor émis plusieurs hypothèses, mais à la deuxième, je l’arrêtai d’un geste.

-Il s’est passé que j’ai tout donné à Olivia. Toutes les opportunités, elle les a eus. L’argent pour lancer sa carrière, elle l’a eu. La protection, elle l’a eu. Et maintenant qu’elle est lancée, elle souhaite quitter BSC.

Je grimaçai.

-C’est un putain de vampire opportuniste.

Je soupirai.

-Quant à Maritza, je ne te cacherai pas qu’elle est en train de perdre l’esprit. Pourquoi ? Va savoir. A elle aussi, je lui ai tout donné. Mais avec ces deux femmes, ça ne suffit jamais.

Victor se demanda alors quelle était l’autre chose que j’attendais de lui.

-Je veux que, sur tout ce que Livia a sorti chez BSC, elle ne puisse plus gagner que ses droits d’auteur. Je veux que tout le reste, les bénéfices sur le marchandising et autre en rapport avec ses deux premiers albums et ses singles sous ce label-ci, revienne à BSC. Sans compter les indemnités de sortie.

Je soufflai une longue bouffée de nicotine et regardai Victor droit dans les yeux.

-Tout ce que tu peux légalement lui prendre, prend-le.

Je le vrillai du regard.

-Saigne-la à blanc.

Reed m’avait amené jusqu’ici pour changer les termes de son testament. Plus il causait, plus je sentais son énervement. Sauf que j’étais aussi de mauvais humeur et je ne voyais pas bien ce qu’il y avait d’extra urgent dans le changement d’un testament. Reed n’était pas mourant que je sache, hein !

Mais je me gardais bien de dire ça me contentant de me servir autant de whisky que de cigarettes. Au moins, ça aura le don de me libérer un peu de mon agacement que je ressentais depuis des jours. Et, tant qu’à faire, je voulu combler ma curiosité en essayant de comprendre pourquoi Reed voulait déshériter deux des trois seules femmes qu’il piffait. Enfin, il ne les piffait plus, visiblement, mais restait à comprendre pourquoi.

Je balançai des théories mais elles s’avérèrent fausses. En réalité, Livia avait simplement décidé de claquer la porte de BSC après que la maison de disques l’a aidé à obtenir argent et célébrité. Pourquoi ? Allez savoir ! Certainement parce que Livia traine avec Stone et que Stone déteste Reed. Parfois, la vie est aussi simple que ça ! Je levai un sourcil devant cette nouvelle à laquelle je ne m’attendais pas vraiment. Et je finis par pouffer un peu de rire quand Reed parla de Livia comme d’une vampire opportuniste.

-Jamais donner à la basse classe de quoi s’élever. Regarde Stone. Même chose. Il a tout reçu du business musicale. Sans ça, il serait encore dans l’Eastside. Et maintenant, il fait quoi ? Il mord la main qui l’a nourri. C’est tous une bande d’ingrats ! Ta fille ne fait pas exception.

Elle est à moitié Mexicaine. Qu’est-ce que Reed espérait ? J’ai rencontré Livia une fois et le feeling est loin d’être passé. Quelque part, ce changement de testament m’arrange. Je n’aurais pas à défendre les intérêts de Cortez dans le futur.

Quant à Maritza, visiblement, elle perdait l’esprit. Reed ne savait pas la raison de cette récente folie. Moi, j’avais une théorie ! Les Carlos Ramirez n’ont rien à faire dans la jet-set. Ça les rend dingue et ils disjonctent car ce n’est pas leur place. Regardez Hugh Crusher. Même chose. Il a disparu pendant 10 ans pour quoi ? Certainement pas pour aller faire une cure de jouvence, hein !

-Si elle perd l’esprit il ne vaut mieux pas qu’elle hérite. Qui sait ce qu’elle fera de ton argent, hein ?

Construire un orphelinat à Tijuana ?

Mais Reed n’en avait pas terminé. Je crus un moment qu’il allait me demander de préparer son divorce et ça, malgré ce qu’il m’avait dit l’autre jour, mais non. Ce qu’il voulait c’était que je tire un maximum d’argent de la rupture de contrat de Livia. Il suffira que je m’appuie sur le contrat qu’elle a signé pour ça. Je ne pouvais, bien sûr, pas toucher aux droits d’auteur. Livia les touchera jusqu’à la fin de sa vie. Mais je pouvais la charger sur d’autres plans.

Je ricanai. Je sentais la haine dans la voix de Reed. C’était rare de le voir dans cet état. A vrai dire, seule sa fille semblait réussir à le faire sortir de ses gongs. Preuve qu’il voyait tout ça comme une trahison.

-Tu peux compter sur moi. Il me faudra la copie de son contrat pour que je puisse voir toutes les possibilités qui s’offrent à nous. Je prendrais tous les centimes que je pourrais prendre.

Je bus le reste de mon verre de whisky d’une traite. Au moins, les petits malheurs de Reed avaient le don de me détendre un peu, c’était déjà ça !

-Mais dis-moi… Elle quitte BSC pour où ? MTI ? Don Hughes voudra bien d’elle, même si elle a brisé le cœur de Julian ? Putain, il serait capable. Le vieux Don adore ta fille.

Je ricanai. Il préférait largement Livia à moi, en tout cas.

-Je pourrais changer le testament dans les prochains jours. Laisse-moi un peu plus de temps pour le contrat, ok ? J’ai un procès sur le feu. Le mien…

Victor, une fois que je lui eus dit les raisons qui me faisaient à la fois déshériter Olivia et Maritza y alla de sa petite théorie comme quoi les gens issus des basses classes n’étaient pas fait pour en changer. Il prit l’exemple de Stone et je devais dire qu’à l’instant T, je me disais qu’il avait peut-être raison.

Je fis tourner mon verre entre mes dois, ma cigarette se consumant dans le cendrier où je l’avais posée.

-Mais Olivia est de mon sang. Je croyais qu’elle serait forte, qu’elle saurait s’adapter et tirer son épingle du jeu. Elle me l’a fait croire, un temps, comme Maritza.

Je serrai les mâchoires.

-Ça n’a pas duré. Elle sont incapables de voir les opportunités, d’avancer leurs pions correctement… Elles sont passées à côté d’un immense pouvoir. Tout ça pour quoi ? Hein. Pour quoi ?

J’avais imaginé Maritza et ma fille devenir les impératrices de L.A. et peut-être même au-delà. Les voir se montrer, grandes, souriantes, dans des robes de luxe et jouer de leurs charmes pour manipuler les plus faibles.

Mais non… Non, tout ça n’avait été qu’un doux rêve. Le mien, pas celui des deux femmes que j’avais cru un temps être les femmes de ma vie.

J’avouai à Victor que Maritza perdait la boule. Je ne pouvais pas faire confiance à quelqu’un qui prenait des médicaments et qui restait prostrée dans un transat’ toute la sainte journée. Victor voyait les choses comme moi.

-C’est pour ça que je la déshérite.

Bref, sans détour, je dis à Victor ce que j’attendais de lui. Qu’il pompe autant qu’argent qu’il le pouvait dans la bourse de Livia. Et je ne fus pas déçu quand il affirma que je pouvais compter sur lui. Je repris ma cigarette dans le cendrier et en tirai une bouffée pensive alors que j’étais encore en train de ravaler les espoirs que j’avais mis en Olivia et Maritza.

-Daniele te fournira son contrat. Je te fais confiance.

Victor pouvait être une véritable crapule d’avocat, quand il le voulait. Et je savais que le genre de mission que je venais de lui donner allait li plaire. Donc, le travail serait bien fait.

Il demanda si Livia quittait BSC pour MTI.

-Je n’en sais rien et je ne pense pas qu’elle le sache elle-même. D’après Daniele, elle veut d’abord prendre du temps pour elle.

Je haussai les épaules.

-Ce genre d’indécision ne m’étonne même plus. Livia réagit toujours à l’émotion, sans réfléchir. A croire qu’elle n’est pas de moi, en fait.

Après tout, je n’avais pas fait de test… Peut-être que Maritza me mentait depuis le tout début. Et que comme j’avais toujours été amoureux d’elle, je m’étais fait avoir comme un bleu ?

Je soupirai.

-De toute façon, quoi qu’elle fasse, une fois qu’on aura fini de la pomper, je ne veux plus rien à voir à faire avec elle. Qu’elle se démerde. J’ai assez donné pour ne recevoir en retour que de la haine.

Victor affirma qu’il pourrait tout faire dans un délai raisonnable. Mais je haussai les sourcils quand il parla d’un procès qu’il avait sur le feu. Son procès.

-Ton procès ? Mais qu’est-ce que tu as fait ? Rien de grave, j’espère !

Ce n’était pas le moment de perdre mon avocat. J’en avais besoin !

Jimmy Reed a eut tort de croire que le sang faisait tout… Sauf qu’il avait eu la fâcheuse idée de se mettre avec une ressortissante de Tijuana. Que voulait-il qu’il sorte d’un tel mélange, sincèrement ? Et si les origines de Livia ne sont pas flagrantes, il ne faut jamais se fier à l’emballage.

-Maritza Cortez… Tu aurais dû t’en douter…

J’avais appuyé sur le « Cortez ». Mais j’imagine que l’amour a aveuglé Jimmy Reed et qu’il a sincèrement pensé que sa progéniture avait hérité des meilleurs gênes. Le pauvre bougre tombait de haut.

Il rageait que les deux ex-femmes de sa vie étaient incapables de voir les opportunités et jouer au grand jeu de la jet-set. Il se demandait bien ce qu’il leur avait pris. J’haussai des épaules.

-Qu’en sais-je ? Je ne sais pas ce qu’il leur a pris.

Parce que ça faisait un moment que Jimmy Reed et sa fille avaient renoués au point même où Jimmy Reed avait rendu leur lien public. Donc, je ne savais pas vraiment ce qui avait déconné, hein ! Peut-être l’influence de Stone qui, depuis un temps, était entrée en croisade contre Reed alors même qu’il jouit des bienfaits de BSC. Si ça c’est pas de l’ingratitude, je ne sais pas ce que c’est !

Bref, Reed avait placé de grands espoirs en sa fille et sa femme et, désormais, il s’en mordait les doigts. Parce qu’il semblerait que, en ce qui concernait Maritza, elle était simplement en train de perdre la raison. Et laisser une grosse somme d’argent à quelqu’un qui perd la raison n’a rien d’avisé ! D’où le fait que Reed la déshérite.

Quant au reste, comme Livia comptait aussi quitter BSC, il me restera à faire mon travail d’avocat et voir tout ce que je pourrais lui prendre en me basant sur le contrat. Reed fera en sorte que j’obtienne une copie du contrat. J’hochai de la tête.

Maintenant que j’étais plus détendu après avoir vu que même des gens comme Reed avaient des problèmes, je me fis plus curieux quant à l’avenir de Livia pas-Reed ex-Hughes Cortez. Sauf que, visiblement, pour le moment, la gamine n’avait pas de projets. Juste celui de se reposer. Une hésitation de plus qui faisait pensé à Reed qu’elle n’était peut-être pas de lui. Je ricanai.

-Il y a des tests de paternité, pour ça, tu sais. Et je sais de quoi je parles !

J’en avais déjà passé, hein ! Tous négatif, bien entendu ! Mais j’imagine que si Reed n’en avait pas fait c’était qu’il était certain que Livia était bien sa fille.

Bref, Jimmy disait qu’après toutes ces histoires d’argent bouclées, il ne voulait plus avoir rien n’à faire avec sa fille. Il lui avait offert un empire, elle l’avait récompensé avec de la haine. Si j’avais un gosse et qu’il me faisait ça, il pourrait, effectivement, aller se faire voir.

J’esquissai un petit sourire en coin.

-Chaque fois que je parle avec toi, Jimmy, je suis conforté dans l’idée qu’avoir des enfants est la pire des choses qui puisse arrivé à quelqu’un. Je suis bien content d’avoir décidé de ne jamais en avoir.

Vous auriez Ian Hunter comme foutu neveu, vous prendriez la même décision que moi !

Bref, je comptais arranger les bidons de Jimmy Reed mais je lui déclarai de me laisser un peu de temps parce que j’avais un foutu procès sur le feu. Evidemment, le magnat de BSC se questionna là-dessus me faisant, inévitablement, ouvrir les vannes.

Et je me mis, à nouveau, à m’emballer frappant du poing sur le bureau.

-Tout ça c’est la faute de cette foutue petite garce de Jessica Hill ! Elle m’a mis sur sa foutue liste noir et je me suis quand même pointé à une de ses soirées. Elle a voulu me foutre dehors. J’ai refusé. J’ai le droit d’être là ! Je ne lui ais rien fait. Elle me reprochais d’avoir défoncé son portail mais le fait est que j’ai payé les dégâts. Pourquoi tant de rancunes ? Bref… Elle a dit qu’elle allait appelé les flics. Je me suis foutu d’elle. Les flics n’allaient quand même pas venir pour les petits caprices de Hill quand même ? Bref… J’ai continuer à m’amuser jusqu’à-ce que je tombe sur Willow Ford et son nouveau petit ami !

Je marquais une pause pour tirer sur ma cigarette rageusement avant de reprendre.

-Et quel petit ami ! Un foutu travailleur social, activiste… Où Willow la trouvé ? Mystère ! Sûrement dans un caniveau ou l’autre ! Un Carlos Ramirez en plus ! Bref… J’ai voulu me montrer sympathique parce que j’ai du respect pour Willow mais cet enfoiré m’a pris de haut. Pire ! Il a prit de haut toute la jet-set en se prenant pour plus vertueux et plus intelligent que nous tous ! J’ai vu rouge… J’ai commencé à le frapper parce qu’il le méritait. Sauf que les flics sont arrivés à ce moment-là parce qu’ils n’avaient rien d’autre à foutre que de répondre à l’appel de Hill. Il y a plein de criminalité dans l’Eastside et à South L.A. mais les flics préfèrent bouffer des donuts à Beverly Hills. Tu te rends compte ? Bref, ils m’ont arrêtés, ils m’ont foutue en cellule, le foutu petit pète cul à porté plainte, je suis passé devant le juge, j’ai payé ma caution et me voilà à devoir me défendre pour coups et blessures volontaire !

Je fixai Jimmy Reed après mon récit de la situation.

-Ce type n’avait rien à foutre là ! J’avais le droit d’être là. Pas lui. Hill a l’art de pourrir ses fêtes avec des gens douteux !

Je grimaçai quand Victor souligna le fait que Maritza était latina. Je ne pensais pas qu’il avait raison. J’avais un tas d’amis latinos parmi les Los Diablos et ils étaient tous plus loyaux les uns que les autres.

-C’est une femme, surtout. On ne peut pas se fier aux femmes.

J’étais déçu, en colère et au final, tout ça me fatiguait au point que tout ce dont j’avais envie, c’était de me débarrasser à la fois de Livia et de Maritza. Je n’aurais plus de problème. Je pourrais retrouver ma vie d’avant et oublier que j’avais un jour été père d’une sale gamine et mari d’une femme faible.

Je voulais juste l’argent qui me revenait. Le reste, je m’en foutais. C’était pour ça que Victor était là. Pour protéger les intérêts de BSC. Preuve en était que je ne voulais même pas mener une véritable guerre : j’avais dit à Victor de prendre tout ce qu’il pouvait LEGALEMENT prendre à Livia.

Pas plus, pas moins. Même si rien que les indemnités de sortie représenteraient une assez grosse somme.

J’avais dit que je voulais qu’il saigne ma fille à blanc… C’était une façon de parler… De passer ma colère par les mots.

Mais aussi de lui faire comprendre, à Victor, que je voulais du bon travail et qu’il pouvait s’éclater dans l’aventure.

Victor ne comprenait pas plus que moi pourquoi Maritza et Olivia n’avaient pas sauté sur la vie de reine que je leur avais offerte. Ingratitude, quand tu nous tiens…

J’en venais à me demander si Olivia était vraiment ma fille et si Maritza ne m’avait pas menti depuis le début… Le tout début. C’était presque tentant, maintenant… Parce que ça me permettrait d’avoir une raison plus que valable pour foutre Maritza dehors, elle et ses états d’âme.

J’écrasai mon mégot de cigarette dans le cendrier alors que Victor constatait une fois de plus qu’il ne voulait pas avoir d’enfant.

-N’en fait pas. Choisis-toi plutôt un héritier en qui tu crois comme je l’avais fait avant toute cette histoire en choisissant Tony Ricci.

J’aurais dû rester sur cette position. Je n’aurais jamais dû accepter Olivia ni dans ma vie, ni chez BSC. J’aurais dû rester fidèle à mes principes.

J’avais l’impression de m’être bien fait avoir. Et je détestais cette sensation.

Victor était prêt à se mettre au travail. Seulement, il avait ses propres affaires à régler. Apparemment, il était, lui, en procès. Et forcément, quand je lui demandai ce qui s’était passé, Hunter ouvrit les vannes, comme à son habitude.

Je l’écoutai attentivement, du début à la fin. Il avait été à une fête chez Jessica Hill où il n’était pas le bienvenu et avait fini par massacrer le petit-ami latino et activiste de Willow Ford à coups de poings…

-Oh… C’était donc de ça que parlaient Jessica et Willow la dernière fois que je les ai croisées !

Je frottai mon menton.

-Je peux essayer que le juge qui prendra ton dossier en charge soit Dorsley… Il intercèdera en ta faveur à tous les coups, si je lui demande… Et que je lui graisse un peu la patte.

Je souris.

-Parce que moi, je sais montrer ma gratitude pour le travail que tu vas fournir.

Je tendis le bras et décrochai mon téléphone.

-Maintenant, si tu veux bien m’excuser… J’ai une information à vendre à Axel Moriarty… Et tu as du pain sur la planche, toi aussi.

Si je pensais bien que Jimmy avait fait une erreur en mariant une ressortissante de Tijuana, lui pensait bien que le problème venait du fait que Livia et Maritza étaient des femmes. J’haussai des épaules, pas forcément convaincu. Mon hypothèse me paraissait plus logique.

Quoi qu’il en soit, ma mission était simple et consistait à récupérer l’argent dû à BSC et déshérité les membres désavoués de la famille Reed. Une mission normal pour un avocat comme moi… Enfin, normal quand le client était un homme d’affaire. Mes petits psychopathes de Saint Quentin ont d’autres missions pour moi… C’est l’avantage d’avoir une pelle de clients bien différent. Même si beaucoup diront qu’il n’y a qu’un petit pas entre un homme d’affaire de l’acabit de Reed et un psychopathe de Saint Quentin. Ils avaient peut-être raison ou peut-être pas, quoi qu’il en soit, les deux me remplissent les poches.

Bref… Reed était déçu de sa fille et cette déception l’avait poussé à la colère, chose rare chez un type comme Reed habituellement en total contrôle. Sans doute parce qu’il avait mis bien trop d’espoir en une fille dont il n’est même pas sûr qu’elle est véritablement sa fille. Il n’a pas fait de test. Il faut toujours faire une test !

Je déclarai alors que toutes ces histoires me confortait dans l’idée de ne pas avoir d’enfants. Reed me conseilla alors de choisir un héritier en qui je croyais comme il l’avait fait avec le rejeton bâtard de Ricci. Mouais. Trop peu pour moi, ça. Reed et moi avions des points commun mais sur certaines choses on était différents.

-Je ne crois en personne, à vrai dire. Ce que mes thunes deviendront à ma mort, je n’en ai que faire. Tant que ça me sert de mon vivant, c’est tout ce qui compte.

Reed était du genre à vouloir laisser un héritage… Une marque sur ce monde. Moi, je voulais juste du pouvoir et de l’argent, peu importe comment… Je me fichais de mon image. J’aimais avoir du pouvoir et de l’argent pour mon amusement personnel. Ce que les gens penseront de moi à ma mort, je m’en fiche, je serais mort.

Je serais plutôt du genre à ne pas faire de testament et à laisser les gens se battre jusqu’à la mort pour mes thunes. Je trouve que ça me représente assez bien, tiens !

De fil en aiguille, j’en vins à parler de ma mésaventure chez Jessica Hill. J’en voulais à Jessica, à Willow et à ce connard d’activiste. Et il semblerait que les deux filles avaient parlé de ça ensemble non loin de Reed. Je grommelai.

-Ouais… Certainement…

Reed me proposa alors de régler mon problème en trois coups de cuillère à pot en faisant en sorte que Dorsley soit en charge du dossier et qu’il intercède en ma faveur. Je fis la moue. Il parla de gratitude. Sauf que j’avais ma petite fierté, hein ! Le tribunal, c’était mon terrain de jeu. Là où je peux montrer ce que je vaux. Là où j’excelle. Je n’ai aucunement besoin de Reed pour gagner sur mon terrain. Je n’ai aucunement besoin que l’avocat en face me croit faible au point que j’ai besoin d’un coup de pouce pour gagner. Non. Je ne voulais pas de ça.

-Merci pour ta gratitude mais je refuse ton offre. Je veux gagner à la régulière et voir ce foutu activiste se mordre les doigts et regretter d’avoir osé envoyé Victor Hunter en justice. Je l’aurais par mes propres moyens. Je veux que les autres avocats me craignent parce que je suis doué.

Il y avait de la détermination dans ma voix. Une preuve que, dans ce domaine, mon orgueil n’avait aucune limite.

Reed décrocha alors son téléphone. Il voulait vendre une info à Moriarty. Sans doute celle de la rupture du contrat de Livia. Je me levai avant de ricaner concernant le travail que j’avais à abattre.

-Je ne te le fais pas dire…

Je le saluai alors et quittai son bureau, un peu moins énervé que tout à l’heure.