« La vie ce n'est pas d'attendre que les orages passent, c'est d'apprendre comment danser sous la pluie. » Sénèque.

Nos efforts avaient été réduits à néant. On était venu voir Amon à ce gala dans l'espoir de pouvoir exercer sur lui une certaine pression, ou se venger, même si le mot me semblait fort après coup. Mais visiblement, rien ne touchait Amon. Et ce n'était pas pour autant non plus qu'il arrêterait.

Daniele m'avait proposé de venir chez lui, à défaut de rentrer chez Evan. Peut-être culpabiliserais-je moi-même si je rentrais directement, après cet échec cuisant. Je me dirais que j'étais venue là-bas pour rien. Même si ça devait être loin d'être le cas. Mais ça en donnait vachement l'impression. Alors, je suivais Daniele à travers la salle du gala et nous étions sortis quelques minutes après Amon.

On laissait derrière nous toute cette foule, toute cette presse et ces flashs éblouissants qui m'aurait presque ôté la vue si j'étais restée quelques minutes de plus. J'avais apprécié sortir de cet endroit, arrêté d'afficher cet air supérieure, à l'image de toutes les jeunes femmes de la haute. Puisqu'en plus, ça ne me correspondait pas vraiment. Je redevenais Gaïa la junkie, Gaïa la pauvre et je retrouvais mes problèmes. Problèmes auxquels j'allais bientôt devoir trouver des solutions si je voulais qu'on s'en sorte, Evan et moi.

J'avais gardé le silence dans la voiture, trop contente de pouvoir m'asseoir et soulager mes pieds quelque peu comprimés dans mes chaussures à talons. L'air était frais et agréable, même si je frissonnais de froid au bout de quelques minutes. Au moins, c'était respirable, pure.  

Je reconnus rapidement la villa de Daniele. Je ne pensais pas revenir chez lui, ou pas de si tôt. Ça me faisait bizarre de me dire que j'allais y passer la soirée. Gaïa la junkie n'avait pas vraiment le profil type pour être à l'aise dans une villa comme celle-ci. Ma place était dans un studio miteux et bordélique comme celui d'Evan, dans un quartier de l'Eastside, montrant bien à quelle branche sociale j'appartenais en temps normal.

Le majordome de Daniele nous accueillit avec surprise. Étonné de nous voir revenir si tôt ou avec la mine déconfite tous les deux? Je ne savais pas mais il me saluait avec une politesse que je n'entendais que très rarement. Il était vraiment classe et gentleman comme majordome!

Ne me sentant pas réellement concernée par ce que disait Erik, je gardais le silence. Il me salua et je ne répondis que d'un bref signe de tête laissant Daniele répondre à la question qui suivit. Daniele résumait parfaitement la soirée et voilà qu'Erik partit vaquer à ses occupations, nous laissant seuls.

« Alors, qu’est-ce que tu fais de tes soirées d’habitude ? Il faut que j’arrive à oublier Amon alors je suis prêt à faire tout ce que tu veux. »

Je regardais autour de moi, ce n'était que la deuxième fois que je venais chez Daniele après tout. Puis je n'avais pas vraiment eu l'occasion de découvrir tous les trésors que détenait cette villa.

Je souris en voyant le manager réussir à lancer sa veste sur le porte-manteau et tapais des mains doucement pour le féliciter avec un sourire amusé.

« Joli coup. »

Seulement, j'avouais ne pas vraiment avoir d'idées de choses à faire, puisque dernièrement je ne sortais pas beaucoup, alors mes soirées n'étaient certainement pas passionnantes.

« Je doute que nos soirées soient vraiment très différentes. Mais commencer par boire un verre, c'est pas mal. »

Je faisais encore deux-trois pas sur mes talons pour regarder une petite statuette sur une table. Jolie décoration.

Je rejoignais Daniele sur le fauteuil en cuir. J'étais déjà en train de réfléchir à ce que nous devrions faire mais le manager me reparlait alors d'un détail de la soirée. Les 1000 dollars.

« Je... Je sais pas. » et je soupirais.

J'avais baissé mon regard, pensive. Je voulais bien de cet argent, il nous dépannerait bien. avec ça, on aurait au moins de quoi manger convenablement pendant un mois... Mais après? Est-ce que cela valait le coup d'aller chez Amon, s'abaisser à ça pour quelques billets en poche? c'était comme d'approuver l'apparition de cet article en acceptant cet argent.

« J'en parlerai avec Evan. S'il le veut, j'irai chercher l'argent. »

J'avais l'impression que ça n'avait pas beaucoup de sens dans mes paroles, mes pensées elles-mêmes ne semblaient pas filer droit. Heureusement Erik venait avec le whisky. Daniele nous servit tous les deux. Le manager but son verre cul sec. J'avais amené le verre à mes lèvres sans oser boire, toujours en pleine réflexion.

« Je m'excuse aussi pour... avoir bu dans le verre que tu voulais boire là-tantôt. Je ne savais pas que cela te dérangerait. »

Ça m'avait marqué. Je savais que certaines personnes n'aimaient pas trop ça mais... Enfin, je ne vois pas où est le mal. On fait parfois pire en soirée. Je pouvais boire toute une semaine dans le même verre sans que cela ne me dérange. Il m'en fallait tout simplement beaucoup pour être dégoûtée, tant qu'on a un minimum d'hygiène... Mais ça ne devait visiblement pas être le cas de Daniele. Après tout, il est riche, il a l'habitude d'avoir toujours tout propre chez lui...

À mon tour, j'amenais le verre à mes lèvres et but la moitié du verre. Je me levais alors, changeant d'attitude et de sujet. On allait pas finir la soirée à pleurer et se ressasser ce gala désagréable.

« Un bon manager devrait quand même avoir de la bonne musique, non? »

J'avais remarqué le tourne-disque et les pochettes de vinyles à côté. Je marchais jusque là et analysais les différents disques qui s'y trouvaient. J'en choisis un au bout de quelques minutes et déposais le vinyle doucement sur la platine avant de le faire fonctionner. Je me retournais vers Daniele, un grand sourire aux lèvres tandis que je laissais le manager découvrir mon choix.

« C'est pas déjà mieux comme ça? » lui lançais-je, enjouée, tandis que la musique commençait.

On finira bien par passer une bonne soirée.

The Good Old Habits ft. Gaïana Dugopoliac

J’avais dit à Gaïana de prendre les 1000 dollars – quitte à être crédité pour rien, autant que ça serve. Ça l’aidera sûrement à pouvoir manger comme il faut et payer quelques factures importantes. Quand on était dans le cas de Gaïana, il ne fallait pas hésiter pour une question d’honneur – c’est ce que je pensais car, en vrai, je n’avais jamais été dans son cas. Elle n’était pas sûre de pouvoir accepter l’argent. Il fallait qu’elle en parle à Evan.

-Parle-lui-en. Mais n’hésiter pas trop. 1000 dollars ce n’est pas rien, dis-je sincèrement.

Elle semblait vraiment vouloir aider Evan. Elle l’aidait peut-être même plus que je ne l’avais jamais fait.

Erik était venu nous apporter le whisky. J’avais rempli nos verres – jusqu’à presque ras-bord – et j’avais bu le mien cul sec. La Soviétique s’était excusée pour le coup du verre.

-C’est pas grave, dis-je en souriant. T’aurais pas pu savoir.

C’était un problème. C’était impossible pour moi de boire dans le même verre que quelqu’un – et ça depuis que je suis tout petit. Gaïana devait être habitué à tout autre chose – on ne venait pas du même monde. Elle avait connu la rue et j’en passe, c’est clair que boire dans le verre d’un autre devait être le cadet de ses soucis.

Je l’avais regardé se lever pour se diriger vers ma platine. Elle voulait mettre de la musique – ce qui était une très bonne idée. L’alcool et la musique faisaient toujours bon ménage.

-Et comment. Il n’y a que des bons disques et il y a le choix, dis-je en souriant.

Je la regardais mettre un disque tout en me resservant un verre que j’avais encore bu d’un seul coup. Elle était vraiment jolie – à se demander ce qu’une femme aussi belle faisait dans la rue. L’album qu’elle avait choisi était d’Alice Cooper – Welcome To My Nightmare.

-Beaucoup mieux, dis-je en souriant.

Avec la musique ça donnait tout autre chose. Je m’étais levé pour faire face à Gaïana m’approchant tout près d’elle.

-Je me demande toujours comment une femme comme toi n’a pas réussi à se sortir de la rue, dis-je sans vraiment sourire. Tu es jolie. Tu n’es pas bête… Il y a sûrement moyen que tu trouves un travail intéressant, dis-je sincèrement. Tu pourrais très bien faire mannequin.

Elle pourrait très facilement devenir mannequin avec une dégaine pareille. Je m’étais perdu dans son regard – comme je faisais avec toutes les filles qui venaient ici après des soirées. Après ce qui c’était passé ce soir, je voulais vraiment me perdre et ne penser à rien. Tout dans mon attitude le montrait.

@ Billy Lighter

Spoiler:

Daniele m'avait précisé qu'il n'y avait que de bons disques chez lui. Allons voir ça. Je passais en revue divers pochettes et lorsque j'en reconnus une sympa et propice à passer maintenant en début de soirée, je la choisis. Il s'agissait donc de Welcome to my nightmare d'Alice Cooper. Je pense que c'était tout à fait ce qu'il nous fallait. Et Daniele apprécia visiblement puisqu'il précisait que c'était effectivement beaucoup mieux avec un sourire que je lui rendais.

Je reprenais en main mon verre que j'avais laissé à côté tandis que Daniele se levait de son grand fauteuil pour me rejoindre.

« Je me demande toujours comment une femme comme toi n’a pas réussi à se sortir de la rue. Tu es jolie. Tu n’es pas bête… Il y a sûrement moyen que tu trouves un travail intéressant. Tu pourrais très bien faire mannequin. »

Le manager me disait ça sincèrement alors qu'il s'avançait encore de moi, il le pensait vraiment. Et je souris à nouveau, le regard baissé, lorsqu'il me le disait.

L'idée de faire mannequinat ne m'avait jamais déplu mais sans doute avais-je manqué de tact les quelques fois où je m'étais présentée à des castings. J'avais alors laissé tombée et je faisais maintenant de la photographie... Enfin, plus maintenant. J'avais tout perdu, tout vendu. Me restait que quelques vêtements, et un peu amour-propre.

« J'adorerai mais c'est du business. Et dans le business, faut de bonnes relations... »

Et disons qu'en matière de bonne relation... Haut placée surtout, je n'avais jamais rien eu. Il n'y avait qu'à ce gala que j'avais pu toucher du bout des doigts cette sphère fermée. Grâce aussi à Daniele. Si lui avait une idée, ou de quelconques amis à me conseiller pour y arriver, j'étais toute ouïe.

Il s'était encore approché, jusqu'à ce qu'on soit à deux doigts de se toucher. Si l'un de nous deux faisait un geste, nous nous frôlerions. Et on se regardait dans le blanc des yeux. J'affichais une expression amusée, l'oeil pétillant de malice.

« Mais tu connais peut-être des gens pour m'y aider, toi? Je ne suis jamais contre d'avoir un petit coup de pouce. »

Ma voix était suave, délicate. Puisqu'il était tout près, je n'avais pas besoin de hausser la voix pour qu'il m'entende, la musique n'étant pas réglée trop forte, elle ne servait que de fond sonore, comme musique d'ambiance.

J'amenais mon verre à mes lèvres sans quitter le manager des yeux et but le restant de whisky qu'il me restait à mon aise.

« Tu en as au moins une. » m'avait répondu le manager en se pointant du doigt.

« Au moins un avantage à tirer de l'article qu'Amon a fait, c'est qu'il nous a permis de se rencontrer. »

Mon sourire s'était quelque peu atténué en mentionnant le journaliste mais nous n'allions pas en parler plus longtemps. Alors je demandais à Daniele si il avait éventuellement des tuyaux et il ne se fit pas attendre pour me donner un nom qui pourrait bien m'aider. La bonne humeur me revenait aussi rapidement qu'elle s'était envolée l'instant plus tôt.

« Merci Daniele. Je n'y manquerai pas. »

J'étais déjà sur excitée à l'idée que son plan fonctionne. Dès demain, j'allais sûrement partir à sa recherche et lui montrer tout mon intérêt que je portais à son travail et au fait que je pourrais lui être utile comme mannequin ou quoi que ce soit d'autre. Tant que j'avais de quoi gagner des sous.

« On se serrera les coudes, t'inquiètes pas. » disais-je en ce qui concernait Evan.

J'avais vidé mon verre de whisky alors je m'éloignais de Daniele pour me resservir près de la table basse. Le verre de Daniele était vide aussi, je tournais la tête vers lui pour lui demander s'il en voulait encore.

« Je te ressers? »

Je remplissais mon verre, puis sans même attendre la réponse de Daniele, je remplis le sien aussi, persuadée qu'il en redemanderait. J'avais rarement l'occasion de boire gratuitement, alors autant en profiter. Je revenais vers le manager, les deux verres en main et lui tendis le sien.

« On trinque ? »

J'étais de nouveau aussi proche du manager qu'avant, par espièglerie et je levais mon verre.

« Au rétablissement d'Evan et à notre rencontre? »

Je voyais Daniele légèrement grimacer quand je lui tendis le verre. Je pris une mine moitié offensée et frustrée, la tête légèrement penchée sur le côté et les sourcils froncés.

« Quoi? J'ai encore fait quelque chose qu'il fallait pas? »

Mais Daniele trinqua quand même, nos verres s'entrechoquèrent et j'amenais le verre à mes lèvres. Le manager le but cul sec. Mais c'était qu'il avait bien l'habitude de boire! Je ne pris que deux gorgées, ne quittant pas l'homme du regard derrière mon verre.

Et alors que je le regardais intensément, il déposa le verre sur le bar et reposa son attention sur moi.

« Je crois que je ne vais pas résister longtemps à tes beaux yeux. Il y a des trucs auquel même le grand Daniele Ricci ne peut résister, tu sais. »

Je ris, c'était plus fort que moi. Venant de Daniele Ricci c'était un grand compliment, coureur de jupon ou pas. Mais où était donc le manager imbibé d'alcool, froid et cynique que j'avais rencontré quelques jours plus tôt ici même, énervé par l'article qui venait de sortir?

« Tu as dû briser des tonnes de cœurs dans ta vie. » Et c'est qu'il ajoutait une couche en plus. Je gardais un sourire enjoué et but deux gorgées supplémentaires de whisky.

« Je ne suis pas naïve non plus, on ne brise pas des coeurs seulement avec de beaux yeux... » ni qu'avec du cul, surtout pour les hommes -ou certains d'entre eux,- mais je me gardais de le dire continuant de sourire avec amusement.

Je me retournais pour faire quelques pas dans la pièce, passant mon regard sur le plafond puis sur tout le reste de la pièce, comme si je cherchais quelque chose, tournant sur moi-même. Si Daniele était intelligent et un tant sois peu intéressé, il avait la possibilité d'un peu se rincer l'oeil, ma robe me mettant suffisamment en valeur. Je ne l'avais pas gardée en vain après toutes mes péripéties.

« Une si grande villa et tu vas me dire que tu n'as pas ne serait-ce qu'une activité à me proposer? »

J'étais de nouveau face à Daniele, mais plus éloignée et m'éloignais encore, reculant sur mes hauts talons. Mes yeux bleus scrutait sa réaction et je reluquais le reste de sa personne laissant transparaître un soupçon de provocation dans mon attitude. J'adorai jouer à ces jeux.

Je ne m'étais jamais vantée d'avoir brisé des coeurs, non. De séduire, oui, sans aucun doute mais de là à dire que j'en avais fait souffrir certains hommes... Je ne dirais pas. Je suppose qu'on pouvait déjà un peu deviner quelle genre de fille j'étais rien qu'à mon comportement, à la façon dont je regardais quelqu'un du sexe opposé, de comment j'aimais leur répondre, toujours avec l'envie de plaire. Tantôt provocante, tantôt timide... tantôt maladroite, tantôt pleine de dextérité... Et que, du coup, ils devaient savoir que je ne resterais pas, ou que je passe rapidement à autre chose.

Bien que certains ne semblaient pas vouloir le voir, et avec eux, je disparaissais tout simplement du jour au lendemain. Mais ils se comptaient sur les doigts d'une main. Ils étaient repérables. Plus sensibles à nos petits charmes, plus maladroits dans leurs manières et paroles. Contrairement à Daniele qui savait bien quoi dire pour faire plaisir.

« Oh... Tu as peut-être déjà vécu cette situation-là? » disais-je la mine attristée et la voix douce d'où on sentait poindre une légère ironie.

Il l'avait probablement vécue, mais sans doute qu'il était lui, le bourreau des coeurs et non la personne qui en souffrait. Bien qu'on ne peut jamais savoir... Chacun ses faiblesses. On finit toujours par s'attacher à quelqu'un, parfois rien qu'à peu, parfois vraiment beaucoup.

Je me reculais du manager pour contempler la villa -spacieuse- de Ricci, lui demandant au passage s'il n'y avait pas quelque activités amusantes à faire. Il me répondit par l'affirmative, m'expliquant même qu'il y avait trop de choix. C'eut été terrible n'empêche s'il m'avait répondu le contraire. J'aurai plaint Daniele qui était riche comme pas deux et qui n'aurait rien eu pour s'occuper comme il se doit.

Moi, franchement, je serai Daniele... J'aurai économisé et je me serais tiré aux îles Fidji pour une retraite vachement anticipée. Et profiter jusqu'à ce que ma tête explose d'alcool, de produits illicites et que j'aie pleins d'hommes pour me lécher les bottes. Hmmm... Ricci, t'a jamais voulu te marier par hasard?

Trève de plaisanterie... Ou enfin, passons aux choses sérieuses, plutôt. Il avait parler billard? Ouh non, même une piscine! Mais quelle rêve!

« Ai-je bien entendu piscine? »

J'avais un énorme sourire. C'était définitivement bien le paradis ici. Qu'est-ce qu'on attendait pour démarrer les festivités? Je buvais le restant de mon verre cul sec avant de le déposer sur le bar à côté de celui de Daniele. Je posais délicatement ma main sur son bras, aguicheuse.

« Qu'est-ce qu'on attends alors? »

J'arborai un petit air mutin. La soirée avait mal commencé mais au vu de ce qui s'annonçait maintenant, elle finirait très probablement très bien...

Bingo! J'avais vu juste. Bien sûr qu'il brisait quelques coeurs. Qui ne rêverait pas d'être la copine d'un homme tel que Daniele? Il était riche, beau, séduisant et il gérait pas mal de groupes de musique en tant que manager, poste qui engendrait responsabilité et pouvoir. C'était un très bon parti et je suppose qu'en voyant un homme tel que lui s'intéresser à soi avait de quoi faire déborder l'imagination de plusieurs femmes même les plus froides.

Je ne répondais cependant pas, la discussion n'en demandait pas. Puis, on passait à quelque chose d'autre. Nous n'allions pas rester debout à discuter ferme sur nos capacités à séduire et charmer. Autant essayer de se le prouver l'un à l'autre par le biais d'une petite séance à la piscine, chauffée s'il-vous-plaît en plus !

Daniele m'avait répondu d'un "allons-y" ponctué d'un clin d'oeil qui me donnait envie de craquer. Il avait une manière très expressive de manifester son humeur et de faire passer ses messages qu'ils soient exprimés à haute voix ou non.

Je le suivais et découvrais la piscine à travers une baie vitrée, illuminée comme dans les films les plus beaux. Quelques transats étaient disposé sur la terrasse et quelques palmiers et plantes pour la plupart exotiques encerclaient la piscine la plongeant dans une atmosphère féerique et paradisiaque.

« Waaaw... » Je n'avais tout simplement pas de mots pour dire ce qui me passait sur la tête ni ce que j'en pensais.

Je me laissais deux longues minutes pour l'admirer dans cette luminosité exquise, entièrement captivée par la beauté de l'endroit. Putain, je ne sortirai plus jamais d'ici, moi, si ça continuait comme ça.

« T’as plus qu’à me rejoindre. » fis remarquer Daniele qui avait déjà retiré tout attirail inutile. Sa chemise et son pantalon trônait fièrement sur le dossier d'un transat tandis que ses pieds nus trempaient allègrement dans l'eau et qu'il me dévorait du regard.

« J'arrive tout de suite! » répondais-je directement.

Il ne m'en fallait pas plus. Piscine enchantée et un homme riche à son rebord. Je souris et commençai à me déshabiller à mon aise, dévoilant mes sous-vêtements d'un noir aussi pure que l'ébène, comme s'ils étaient assortis à ma robe. Je recopiais Daniele en déposant délicatement ma robe sur un dossier de transat sur lequel je m'asseyais pour retirer mes escarpins. Haaa mais quel bonheur de les retirer après ces quelques heures! J'aimais ressentir le sol frais contre la plante de mes pieds.

De nouveau debout devant le bleu de la piscine, je regardais Daniele avec un grand sourire. Je savais qu'il n'avait pas dû rater une miette du spectacle que j'avais dû lui offrir en me déshabillant. Je pris mon courage à deux mains, une grande inspiration et je plongeais souplement dans l'eau, ressortant ma tête de l'eau deux mètre plus loin environ et nageais alors vers Daniele pour l'inviter à me rejoindre.

« Mon dieu, ça fait du bien... Allez, viens. »

Je posais ma main juste à côté de lui, sur le rebord pour me tenir puisque je n'avais pas pied et l'attendais en l'observant de tout mon soûl. S'il ne me rejoignait pas, j'allais prendre un malin plaisir à l'éclabousser... J'en souriais déjà de plaisir et il n'y avait aucun doute que Daniele comprendrait que j'avais très probablement quelque chose derrière la tête.

Daniele était rentré dans l'eau sans se faire prier non plus. Enfin, j'avais décelé une légère hésitation avant qu'il ne se lance. L'eau était fraîche c'est vrai, mais l'air ambiant sans être froid n'était pas spécialement chaud non plus. Le contraste entre la température de l'eau et l'extérieure n'était donc pas si grande que ça. On n'avait une impression de froid les deux premières minutes, puis on s'y sentait comme chez soi. Bénies soient les piscines chauffées!

Le manager avait même plongé sa tête sous l'eau avant de refaire surface devant moi, se collant alors contre mon corps. Je le regardais avec de grands yeux, feignant d'abord l'étonnement avant de me remontrer sûre de moi.

« J'étais déjà curieuse de savoir si tu allais rentrer dans l'eau ou pas... »

Comme il s'était ainsi collé contre moi, ses mains posées sur mes hanches, je ne voyais plus trop l'intérêt de me tenir contre le rebord. Daniele avait pied en plus, raison de plus pour me permettre de poser mes mains sur ses épaules et de me tenir à lui. Je le fixais intensément, avec calme et sérénité, puis passais doucement ma main dans ses cheveux qui avaient légèrement ondulés sous l'effet de l'eau.

« Ta piscine est juste magnifique... Comment pourrais-je avoir envie de partir après? »

Je laissais mon autre main descendre le long de son torse alors que j'osais approcher mon visage du sien, toujours animée par la même tension électrique que l'on avait fait duré dans la villa. A ceci près que la distance s'était considérablement réduite entre nous, puisqu'ici on était collé l'un à l'autre.

« Surtout en si bonne compagnie... »  

Ma bouche était presque contre la sienne tandis que je murmurais ces quelques paroles. Et avec une lueur de défi dans les yeux, je déposais mes lèvres sur les siennes. Ma main qui s'était perdue sur son torse remontait derrière sa nuque et je pressais ma poitrine contre lui avec sensualité.
.

Daniele avait répondu à mon baiser, propageant un courant électrique à travers tout mon corps. Un long frisson m'avait parcourue, me donnant envie de presser mon corps contre le sien et je ne m'étais pas fait prier pour le faire alors que la main de Daniele descendait dans ma culotte et que l'autre remontait dans mon dos.

Il avait mis fin au baiser pour me répondre, ses lèvres chatouillant mon oreille, et son souffle me procurait encore d'agréables frissons dans le dos. Je recevais son message cinq sur cinq, surtout s'il me parlait avec une voix si chaude et grave. Elle me ferait fantasmer à elle toute seule, cette voix, ce timbre avec cette intonation sensuelle... Graouw.

« Fais attention... Je vais probablement te prendre au mot. »

J'avais également susurré ces quelques mots à son oreille. Et c'était certain que si Daniele me faisait une proposition pareille, je risquais de revenir lui dire bonjour très bientôt. Je prendrais mon maillot alors par contre, histoire de profiter pleinement de la piscine. Sans oublier que les beaux jours allaient bientôt venir... Hmmm.

Je lâchais un soupir de bien-être sous les baisers de Daniele dans mon cou. J'avais penché ma tête en arrière, les yeux fermés pour sentir ses lèvres parcourir ma peau et la mordiller avec une lenteur exagérée.  Je ne pouvais pas y résister, les bisous dans le cou, c'était véritablement mon pécher mignon et j'en profitais autant que je pouvais. Enfin non, Daniele méritait bien un peu de mon attention. Je me mordais la lèvre et laissais également ma main glisser le long de son torse mais je ne fis que frôler son caleçon. Juste pour donner envie mais ne pas l'assouvir, un sourire malicieux sur les lèvres.

Je comptais l'embrasser une nouvelle fois quand soudain, un raclement de gorge retentit derrière moi. Je tournais la tête et Erik, le majordome, était debout dans l'embrasure de la baie vitrée. Il avait visiblement quelque chose d'important à dire, sinon j'imagine qu'il ne viendrait pas nous importuner à une heure pareille et surtout pas un moment comme celui-ci.

Daniele avait préféré ignorer son majordome et je souris en sentant ses lèvres se poser encore dans mon cou. Mais visiblement son majordome ne voulait pas nous laisser tranquille, son message était trop important que pour nous laisser nous enjailler de la sorte. En tout cas, je le suppose. Erik travaillait depuis longtemps pour Daniele et il devait très probablement savoir quand il fallait, ou non, déranger Daniele selon l'importance des messages qu'il avait à faire passer.

Je me raidissais légèrement en entendant LA People et «patron» dans la même phrase. Le suite de ce que prononça Erik n'avait pas l'air de meilleure augure non plus. Le manager n'y réagit pas plus que cela, levant les yeux au ciel comme si cela n'avait aucune espèce d'importance pour lui. Et sans doute que c'était le cas. Et plus aucun doute ne subsistait quand il disait à Erik de lui dire d'aller se faire foutre. Je souriais quand il répondit ça. Je n'aurais sans doute jamais osé répondre au patron de LA People de la sorte. Mais je n'étais pas Daniele Ricci. Mais je commençais à être vachement jalouse là.

Je pensais qu'Erik s'éclipserait contraint de laisser tomber à l'eau (quelle coïncidence) cette idée mais il n'en démordait pas, conseillant franchement à son patron et ami d'y répondre. Nouveau soupir de Daniele qui mettait bien en exergue son absence d'envie à répondre au téléphone. Comme je le comprenais, je n'aurais pas voulu non plus à sa place.

« Je crois que je vais devoir répondre… Tu viens avec moi ?
- Oui, allons-y. »

Si Erik lui conseillait d'aller lui répondre, je n'allais pas l'en empêcher ou l'en dissuader. Je pense qu'Erik était bien plus en mesure que moi de dire si ça valait la peine de post-poser notre petit jeu de séduction ou non. Je lui faisais confiance. Et Daniele encore plus, raison supplémentaire pour aller répondre au téléphone.

Je sortais de la piscine en me hissant par la seule force de mes bras contre le rebord et prenais une serviette sur le transat, prenant celle de Daniele que je lui tendis directement. On prenait une minute le temps de se sécher un minimum, pour ne pas rentrer dégoulinant avant de passer la baie vitrée et de rejoindre la pièce où le combiné était posé juste à côté du téléphone, sur une petite table.

L'agencement de la pièce avait subtilement été pensé. D'un côté, un bureau où trônait de nombreuses paperasses et de l'autre, un fauteuil avec la petite table. La longueur du câble du téléphone était juste suffisamment longue pour permettre à quelqu'un de prendre l'appareil et de le porter du bureau au fauteuil sans encombre. Ce qui était idéal pour d'un côté, pouvoir téléphoner en travaillant ou se poser et de l'autre, parler avec quelqu'un au bout du fil de manière plus décontractée. Ingénieux.

Le manager s'affala dans le fauteuil et après un bref regard dans ma direction, il prit le combiné en main et répondit d'une voix atone. Je venais me positionner derrière lui, derrière le fauteuil. Si je restais bien tranquille les deux premières minutes de la conversation, la tendance s'inversa et je commençais, à mon tour, à venir fourrer mon petit nez dans son cou pour y souffler de l'air chaud. Mes mains sont venues sur ses épaules comme une caresse et je commençais à le masser, comme pour faire passer le temps.

La conversation avait vraiment l'air d'être superfétatoire. Ce coup de fil n'avait réellement aucun intérêt, si ce n'est au patron de LA People de passer ses nerfs sur Daniele Ricci, même si nous n'avions rien à faire là-bas. Enfin, j'aurai peut-être eu ma place si seulement j'avais été en meilleur terme avec Amon et qu'il aurait été au courant de mon retour. Mais je doutais bien que le patron ne se souvienne de moi. Déjà moi, je ne l'avais jamais rencontré si ce n'est de vue et de loin, dans les bureaux du journal.

Sous mes doigts j'avais senti le manager se raidir un peu avec la conversation où se mêlait sarcasme et piques acides. Je me souviendrai de ne pas ennuyer Daniele, il avait l'art de savoir répliquer de manière cinglante et de trouver le moyen de rendre son explication indéfectible. Je ne l'écoutais cependant qu'une demi oreille, trop concentrée sur le dessin que faisaient mes mains sur ses épaules pour dissiper toute tension palpable.

Il avait raccroché le combiné avec désinvolture, ses derniers mots étaient secs et tendancieux. Daniele Ricci faisait ce qu'il voulait et il pouvait se le permettre. Il soupirait presque quand il s'expliquait. Il avait penché sa tête en arrière pour pouvoir me regarder et je lui souris en retour quand il résumait le coup de fil.

Mes mains vagabondaient toujours dans sa nuque pour défaire les noeuds de tension que son sourire disparut en évoquant le fait que je ne serais plus acceptée chez eux.

Je contournais le fauteuil puis me glissais tel un félin sur l'accoudoir de celui-ci, déjà à moitié assise sur les genoux du manager alors que mes mains revenaient s'accrocher dans sa nuque.

« Pas grave, j'y allais quand même plus. » disais-je doucement avec une certaine intensité dans le regard.

Et c'était vrai, je n'y étais pas retournée depuis que j'étais revenue à Los Angeles. J'avais dû revendre mon appareil photo... Comment pouvais-je faire alors pour prendre des photos pour Amon? Je n'avais donc pas vu l'utilité de revenir voir le journaliste si je n'avais rien à lui proposer comme clichés. J'avais mis toute mon énergie dans l'appartement d'Evan et les petits boulots d'appoints.

« Bon, on en était où...? »

J'avais récupéré mon sourire en évoquant ce petit moment dans la piscine et rapprochais mon visage de Daniele pour l'embrasser à nouveau lascivement. Mes mains descendaient lentement le long de son torse avec sensualité, recréant immédiatement cette petite bulle que l'on avait construit quelques instants plus tôt dans l'eau. Qui plus est, il ne nous restait plus grand chose à retirer puisque nous n'avions plus que nos sous-vêtements encore humides.

Je n'étais pas plus triste que ça de perdre une possibilité de gagner des sous chez LA People, disons même qu'au point où j'en étais, cela ne me faisait ni chaud ni froid. Comme je n'y allais de toute façon plus... Daniele évoquait de nouveau que je devrais aller chez Barbara pour me trouver le boulot idéal. J'ai souri, avec mon regard déjà plein de malice.

« Je n'y manquerai pas. »

Et sur ce, j'en revenais à nos moutons. Où en étions-nous à la piscine? J'avais envie de faire un petit retour en arrière à ce moment un peu plus torride. Et je n'hésitais pas à vite recommencer là où on s'était arrêté approchant mes lèvres des siennes pour l'embrasser longuement, Daniele se prêtait au jeu en le répondant à mon baiser plus sensuellement encore.

Je lâchais un soupir quand ses mains descendirent sur mon corps et venir dégrapher mon soutien-gorge sans se battre avec lui des minutes entières. Non, en moins de temps qu'il n'avait fallu pour le dire, je me retrouvais topless et avec sa bouche il vint titiller la pointe de mes seins qui m'arracha un gémissement.

Pour plus de facilité, je réajustais ma position sur Daniele en passant une jambe de chaque côté, à califourchon sur lui. Ne restait plus que le problème des sous-vêtements mais on avisera. Je plongeais délicatement ma main dans son caleçon et caressais son sexe. La tension montait inexorablement. Mon autre main était venue dans les cheveux de Daniele et en tirant gentiment mais fermement sur ses cheveux je l'obligeais à relever la tête pour l'embrasser une nouvelle fois puis je plongeais encore mes lèvres dans son cou pour le mordiller avec passion et envie.