- T'as pas intérêt à tricher hein !

Voilà ce que je dis à Billy en le tenant fermement par la main. Nous montons les marches des escaliers de mon immeuble, moi devant et lui derrière. Je ne sais pas très bien pourquoi mais mon coeur bat très vite dans ma poitrine. Peut-être parce que je suis impatiente de lui faire visiter mon appartement ? Peut-être aussi parce que je redoute un peu sa réaction ? Il est clair que mon modeste appartement ne ressemble en rien au sien. Il ne possède que deux pièces : ma chambre à coucher et une pièce spacieuse qui fait office de salon et de cuisine (avec en plus une minuscule salle de bain). Mais j'aime mon studio car il me représente : il est petit et parsemé de piles de livres et de vinyles. Au mur sont accrochés les pièces maîtresses de ma collection ainsi que quelques posters de The Lightening et des photos de ma famille.

On arrive devant la porte d'entrée et je passe la clé dans la serrure, sans lâcher la main de mon petit-ami qui n'a toujours pas ouvert les yeux.

- Je te dis quand c'est bon.

Je le guide à l'intérieur du studio, ferme la porte derrière nous et me positionne devant lui. Juste avant de lui donner la permission d'ouvrir les yeux, je profite de ces quelques secondes pour observer son beau visage.

- ... Voilà tu peux ouvrir les yeux. Tadam !, je m'exclame en écartant les bras comme une enfant.

- Merci ! Mais faudrait que je pense à remplacer ces posters par de vraies photos... tu ne crois pas ?, je lui demande avec un clin d'oeil.

Après un petit tour, main dans la main, de mon appartement, Billy s'arrête devant une de mes photos de famille accrochée au mur. On y voit mes deux parents, ma grand-soeur, mes grands-parents maternels et moi. Je ne devais même pas avoir 12 ans sur cette photo. Je ris quand Billy me dit que je n'ai pas vraiment changé depuis tout ce temps. Il n'a pas vraiment tort après tout. Si on oublie mes tatouages et ma teinture, je suis restée pratiquement la même. En apparence en tout cas.

- Cette photo a été prise à Nashville, ça remonte à loin..., je dis avec une pointe de nostalgie dans la voix.

Mais je n'ai pas le temps de repenser à tout ce que j'ai vécu dans ma ville natale, parce que Billy plonge son beau regard bleu-vert dans le mien. Je passe alors mes bras autour de sa taille, pour l'attirer un peu plus vers moi. Je sens mon coeur battre de nouveau très vite dans ma poitrine. Mais il ne pas bat plus à cause du stress. Non, c'est une toute autre force qui le fait battre aussi vite.

Après le doux baiser que Billy a déposé sur mes lèvres, je ne peux m'empêcher de sourire. Il y a des moments comme ça. Des moments où j'oublie tout et où je suis heureuse, tout simplement. Je sais que ce ne sera pas tous les jours facile d'être en couple avec une rockstar. Mais je sais également qu'on aura toujours l'occasion de partager de petits moments comme celui-là. Des moments de la vie de tous les jours d'un couple normal.

- Oui, si un jour j'y retourne, je t’emmènerai avec moi, je lui réponds sans desserrer mon étreinte.

Je comprends que la ville natale de Billy ne lui rappelle pas forcément de bons souvenirs. Mais je ne pose pas de questions. Un jour, s'il en ressent le besoin, il pourra me raconter tout ça. Il pourra me parler de tous les événements qui ont fait de lui ce qu'il est aujourd'hui. Et je serai là, tout près de lui, à l'écouter. En attendant, pour lui montrer que je suis prête à tout voir, à tout entendre avec lui, je l'embrasse une nouvelle fois. Mon baiser est un peu plus long, un peu plus passionné que le premier. Puis je me détache de lui et le reprends par la main.

- En attendant de te faire visiter Nashville, j'ai quelque chose à te faire écouter, je dis en le guidant jusqu'au canapé du salon.

Une fois Billy installé sur mon canapé, je me dirige vers une pile de vinyles qui trône à côté de mon tourne-disque. Je m'assieds par terre, faisant ainsi dos à mon petit-ami. Je trouve rapidement le vinyle qu'il me faut. Je le glisse précieusement hors de la fourre en carton et, juste avant de le placer sur la platine, je me tourne vers Billy.

- Je vais te faire écouter une chanson que j'ai découverte à 16 ans, quand j'habitais encore à Nashville. C'est avec mon premier grand amour que je l'ai écoutée pour la première fois. Elle compte beaucoup pour moi.

J'enclenche ensuite le tourne-disque et me retourne vers Billy. Je le fixe intensément du regard, sans pour autant bouger. Je reste assise par terre, à le contempler. Il y a même pas quelques semaines, j'écoutais cette chanson avec nostalgie, parce qu'elle me rappelait Ted. Aujourd'hui, je suis prête à l'écouter avec un regard totalement différent. Aujourd'hui, cette chanson va représenter mon futur. Le futur que je suis prête à entièrement consacrer à l'homme qui se trouve devant moi. L'homme que je regarde avec passion, alors que les premières notes de la chanson résonnent dans la pièce...

Durant toute la chanson, on ne prononce pas un mot. On laisse Bob Dylan parler pour nous. Je vois à travers l'expression de Billy qu'il est inspiré par les paroles et j'en suis très heureuse. Quand elle se termine, on ne dit toujours rien.  On n'a pas besoin de mots, nos regards suffisent à nous montrer qu'on s'est compris. Et il n'y a rien de plus beau que de partager ça avec l'homme que j'aime. J'ai l'impression de revivre le moment que j'avais partagé avec Ted, mais de façon très différente. Je ne suis plus une adolescente qui découvre l'amour. Je n'ai plus de doutes quant à mes sentiments. Aujourd'hui, je vis ce moment comme une promesse des jours heureux qui nous attendent. Comme une promesse d'espoir.

- On est d'accord, Bob Dylan est vraiment un génie, je réponds en rangeant le vinyle à sa place. Il est l'un des deux artistes dont la voix me touche le plus. Le deuxième...

Je laisse ma phrase en suspend le temps d'aller rejoindre Billy sur le canapé. Je m'installe en face de lui, les yeux toujours brillants d'émotion.

- C'est toi.

Je laisse Billy me prendre dans ses bras et déposer un baiser sur mon front. Je ferme les yeux et apprécie la douceur de son geste, la chaleur de son corps. Je l'écoute parler. Il m'ouvre son coeur et j'en récolte précieusement chaque petit bout. Alors que Billy me serre un peu plus contre lui et qu'il laisse ses derniers mot en suspend, je sens comme une tristesse m'envahir. Comme si les émotions de mon petit-ami déteignaient sur les miennes. Je me redresse pour plonger à nouveau mon regard dans le sien.

- Mais, tu sais, je pense que chacun a le droit d'exprimer ses émotions. Après, ce n'est que mon avis mais, pour moi, le plus important n'est pas la nature de l'émotion que tu transmets, mais comment tu la transmets.

Je lui réponds tout en caressant doucement sa joue de mes doigts fins.

- Il ne faut que pas tu penses que ce que tu as vécu ne t'as rien apporté, étant donné de d'autres chanteurs ont réussi sans avoir vécu des choses pareilles. Il faut que tu prennes ces événements comme une force, une force que les autres n'ont pas.

Billy ne m'a jamais parlé ouvertement de son passé, de ses problèmes. Mais, peu à peu, à force de le cotôyer, j'arrive à en déterminer la nature. Je sais que je n'arriverai jamais à lui faire oublier ce qu'il a vécu. Je ne pourrai jamais effacer son passé douloureux. Tout ce que je peux faire, c'est adoucir son présent et lui promettre un futur meilleur.

J'hoche la tête en signe d'approbation. En fait, je devrais prendre exemple sur Billy. Je ne devrais pas me morfondre sur les choix de mon passé. Je ne devrais pas les laisser me hanter. Mais plutôt considérer tout ce qui m'est arrivé, que ce soit des événements positifs ou négatifs, comme des étapes qui m'ont permis d'arriver là où je suis à présent.

- Tu as entièrement raison... Avant je passais mes journées à regretter les choix que j'ai faits dans ma vie. Mais à partir de maintenant, je vais chérir chacun d'entre eux. Parce que ces choix, qu'ils soient bons ou mauvais, m'ont conduite jusqu'à toi.

Billy me prend la main et je serre affectueusement la sienne. J'ai l'impression d'être sur un petit nuage et que plus rien ne pourra jamais m'atteindre, du moment que je serai avec l'homme que j'aime. Est-ce que c'est ça, le bonheur ?

Quand Billy me propose d'habiter avec lui, une drôle de sensation me prend. Une sensation agréable. Je vois enfin un avenir heureux se dessiner pour nous deux.

- C'est une merveilleuse idée. Je veux vivre avec toi mon chéri. Je veux faire partie intégrante de ta vie.

Vivre avec Billy, construire une vie à deux avec l'homme que j'aime, me réveiller chaque matin en posant mes yeux sur son beau visage, que pourrai-je avoir de plus pour être heureuse ? Avoir la certitude que l'immense bonheur que je ressens en ce moment est bien réel ? Qu'il est réel et qu'il durera. Je suis en tout cas prête à tout pour que l'expression, que je vois en ce moment sur le visage de mon amour, ne disparaisse jamais.

- Tu sais, tous les endroits me conviendront. Du moment que je suis avec toi.

Je me mets à penser à notre avenir, à notre avenir commun. Je nous imagine déjà dans une charmante petite villa, dans les alentours de Los Angeles.

- Ne t'inquiète pas pour ça. Et puis, tu sais, je peux toujours garder mon titre de groupie pour l'instant. Si tu n'as pas envie que notre relation devienne publique..

Je plonge mon regard dans celui de Billy et je peux y voir un merveilleux paysage. A côté de notre maison, il y a un grand jardin avec une piscine. Je nous vois déjà passer nos soirées au bord de l'eau, à écouter de la musique et à parler de tout et de rien. Il ne manquerait plus qu'un dernier détail et tout serait absolument parfait...

Je suis à nouveau emportée dans mes rêveries d'avenir. Je vois notre future maison comme un petit havre de paix. Ce sera notre lieu secret, notre petit nid d'amour. A ce moment précis, il n'y a plus aucun nuage dans le ciel de ma vie. J'ai l'impression que la proposition de Billy a chassé pour toujours les tempêtes qui menaçaient mon bonheur.

Je me redresse et caresse affectueusement son torse, glissant une main derrière sa nuque.

- Ce sera notre petite cachette secrète, je lui glisse à l'oreille.

Pour moi, être la groupie de The Lightening n'a jamais été quelque chose de dégradant. Du moment que je peux vivre ma passion pour leur musique, je m'en fiche de ce que peuvent dire les gens. Et c'est pareil pour ma relation avec Billy. Mais lui a l'air de prendre à coeur cette histoire et cela me touche.

- On va faire les choses bien, ne t'inquiète pas.

Je lui masse doucement la nuque sans quitter des yeux les magnifiques nuances de vert et de bleu qui s'offrent à moi. Je n'ai besoin d'aucun titre. Tout ce qui m'importe, c'est de savoir que, demain, mon amour me regardera encore avec cette même passion. C'est sûrement une vision naïve du bonheur mais c'est la mienne.

Toute cette tendresse entre nous est très agréable. Je sens la main de Billy parcourir mon dos, me provoquant quelques petits frissons. Depuis le temps, les gestes affectueux de mon petit-ami me sont devenus familiers. J'ai appris par coeur la douceur de ses mains et la sensation qu'elles me procurent lorsqu'elles entrent en contact avec ma peau.

Billy me demande alors si quelque chose d'autre me ferait plaisir. Comment lui expliquer que je ne veux rien d'autre à part lui ? Que seule sa présence, son amour, me suffisent pour être heureuse ? Je me mets à jouer avec ses cheveux d'une main, laissant l'autre sur sa nuque.

- Et toi, qu'est-ce qui te ferait plaisir ? Tout ce que je veux, c'est ton bonheur.

Il m'avait déjà tellement donné. M'accorder une place dans sa vie est le plus beau des cadeaux qu'il pouvait me faire. A présent, c'est à mon tour. Je veux tout lui donner, je suis prête à tout pour qu'il soit heureux. Parce que c'est la chose la plus précieuse que j'ai.

Je vois bien que ma question a troublé Billy. J'observe les traits de son beau visage alors qu'il semble réfléchir à sa réponse. Je ne dis plus rien, pour lui laisser le temps de rassembler ses mots. Et, alors qu'il me répond, je prends conscience d'une chose. Je réalise que je vais devoir être forte, je vais devoir me battre pour mon amour. Je vais devoir me battre pour lui et contre sa bipolarité. Mais cela ne m'effraie parce que je sais que, ensemble, on y arrivera.

- Je serai toujours là pour toi mon amour.

Je serai là pour lui à chaque instant de sa vie. Les épreuves qu'on a traversées, ces moments de bonheur et de déchirement, n'ont fait que renforcer mon amour pour Billy. Je prends son visage entre mes mains et dépose un doux baiser sur ses lèvres.

- Ensemble, on va être fort. Je te le promets.

Je vais faire tout mon possible, je vais donner toutes mes forces pour ne pas perdre le Billy qui me regarde en ce moment. Mon plus grand souhait est que jamais la lueur qui brille dans ses yeux ne disparaisse.

Blottie contre Billy, je ferme les yeux. Je sens à nouveau une douce chaleur m'envahir. Les douces paroles qu'il vient me chuchoter à l'oreilles me font frissonner. Sa voix a un tel pouvoir sur moi. C'est elle qui a atteint pour la première fois mon coeur, alors que je travaillais dans un bar. Et elle y a laissé une marque indélébile. Une marque d'amour.

A la fin de sa chanson, mon amour m'embrasse avec passion, passion que je lui rends alors que je passe mes bras autour de ses épaules pour l'attirer contre moi. Notre baiser est plus long encore, plus intense. J'ai l'impression de perdre complètement la tête. Mais, pour une fois, j'en suis heureuse car la personne pour laquelle je la perds m'est plus précieuse que tout.

Après quelques longues minutes, on se détache l'un de l'autre. Je regarde mon amour dans les yeux alors que les miens brillent de bonheur.

- C'est la deuxième fois que tu chantes de cette manière là.

Après toutes ces années, j'avais enfin renoué avec ces doux sentiments. Mais, alors que je les laissais envahir mon coeur d'une agréable chaleur, une pensée nouvelle gagna mon esprit. Je réalisai que le plus important n'était pas que j'avais réussi à aimer à nouveau. Non, il y avait quelque chose d'encore plus beau : la merveilleuse certitude d'être aimée en retour.

Rien ne pourras nous arrêter, baby ! Ni maintenant, ni jamais ! Je laisse les paroles de Billy transformer mon bonheur en fièvre alors qu'il enlève délicatement mon t-shirt. En guise de réponse, je glisse mes mains sous le sien pour le retirer. Je dépose ensuite des baiseurs langoureux sur son torse, sur son cou. Alors que je suis à califourchon sur lui, je sens ses mains se balader le long de mon dos. Un geste qui m'est devenu bien trop familier et dont je ne peux plus me passer.

Pendant que le rythme de nos gestes s'accélère, une idée me vient en tête. J'attrape les mains de mon petit-ami et les place le long de son corps. Puis je viens lui chuchoter à son oreille :

- Bouge pas chéri et admire.

Je me lève et viens me placer debout au centre de la pièce. Sans quitter Billy des yeux, je me mets à danser sensuellement. Je glisse mes mains dans mes cheveux puis les descends le long de mon corps. J'enlève délicatement mon pantalon. Cela fait, je m'allonge sur le tapis, une lueur malicieuse brillant dans mes yeux.

- Viens voir maman..., je lui dis en l'invitant à venir me rejoindre d'un signe de la main.