« Garde du corps de Billy Lighter » ! Ça sonne bien, non ? Comme ça doit être hyper cool de fréquenter presque tous les jours l’une des plus grandes rockstars de notre époque ! Comme ça doit être génial de vivre dans l’effervescence de la vie d’artiste en plein L.A. ! Voir toutes les magnifiques groupies fanatiques de The Lightening avant et après les concerts !

Ouais… La plupart du temps, c’était super cool et pas forcément pour les raisons énoncées plus haut. Ce que j’aimais, dans mon boulot, c’était bel et bien pouvoir prendre part à la vie de The Lightening, à tout ce qui les entourait… Voir, aussi, leur processus incroyable de création lorsqu’il se mettait en marche, pouvoir les écouter et être payé pour ça. Et surtout, tisser un lien fort d’amitié avec eux, au fil du temps…

Mais il y avait aussi le revers de la médaille. Car c’était bien de The Lightening qu’on parlait. Et, aujourd’hui, je ne me sentais vraiment pas bien dans ma position de garde du corps. Parce que ma présence à elle seule donnait le ton.

Nous n’allions ni à une fête, ni à une interview, ni à un concert, pas même à l’un ou l’autre procès pour l’une ou l’autre chose… Non… C’était vers Hollywood que je conduisais la Lamborghini de Billy qui était probablement bien trop nerveux que pour se mettre au volant. C’était vers Cash que je conduisais le chanteur.

Parce que Billy devait annoncer au guitariste que leur manager n’était plus Lenny Knowles, qu’ils n’étaient plus en contrat avec MTI… Et j’étais assez proche des membres de The Lightening pour savoir que c’était le genre de chose qui allait mal tourner.

C’était pour ça que j’étais là. Par intimidation… Au sein des membres d’un même groupe.

Billy était silencieux et moi aussi. Je désapprouvais ce qu’allait faire Billy et ce qu’il avait fait avant cela : se présenter à l’audition organisée par Maria Watson sans prévenir personne. Ni MTI, ni Lenny, ni les autres membres du groupe. Mais jamais je ne lui avais dit ce que j’en pensais. Parce que je n’étais que le garde du corps, rien d’autre.

N’empêche que j’allais quand même me retrouver salement pris entre deux feux.

Ce fut donc en soupirant nerveusement que je tirai le frein à main une fois arrivé devant la maison de la mère de Cash.

Parce que j’y avais à perdre aussi, dans cette histoire. J’étais le garde du corps de Billy, certes, mais j’étais avant tout un roadie appartenant à MTI. Et en mettant brusquement fin au contrat avec MTI, Billy avait aussi mis un terme à 3 ans de travail pour lui…

Cette « mission » était la dernière à laquelle je participerais en compagnie du chanteur de The Lightening…

Et j’aurais préféré qu’elle soit tout autre.

@ Billy Lighter

Le stress… Il me rongeait depuis que j’avais décidé, à deux jours de rendre les contrats à Maria, de rendre demander sa signature à Cash… Il le fallait ! Je ne voulais personne d’autre que la manager indépendante pour notre groupe.

Liam conduisait jusqu’à la maison de la mère de Cash. Les derniers jours j’avais été voir les autres membres. Ils m’en voulaient… Pas d’avoir viré Lenny… Pas d’avoir choisi Maria. Ils m’en voulaient que je ne leur avais pas demandé leur avis avant de mettre en place tout ça. Mais je n’avais pas le choix. Ça devait être comme ça si The Lightening voulait avancer…

Je n’avais pas eu le temps de prévenir. Tout avait été trop vite. Comme les émotions qui vont et viennent trop vite.

Le stress montait de plus en plus. Je me crispai dans la voiture que mon garde du corps conduisait silencieusement. Il n’y avait que la radio pour nous éviter un silence pensant. Je sentais, depuis le début, que Liam n’était pas d’accord. Qu’il désapprouvait. Il n’avait pas besoin de me le dire. Je le sentais. Je sentais tout.

Et j’avais envie de sauter de la voiture en marche pour ne plus sentir le poids de sa désapprobation qui pesait sur l’habitacle dans lequel on était enfermé. Mais je me retins parce qu’il fallait aller au bout. Il fallait faire signer Cash…

On arriva devant la maison de la mère du guitariste. Je restai, un moment, à l’intérieur de ma Lamborghini. Je me mordais violemment la lèvre. Qu’allait dire Cash ? J’avais bien Liam pour me protéger… Pourtant, je savais bien que Cash n’utiliserait jamais la violence. Mais Liam était là comme un soutien psychologique. J’en avais besoin.

Je sortis de la voiture après exactement 17 longues minutes qui ma parurent être des secondes. Je mis mes lunettes de soleil sur mon nez. Je me sentais protégé avec ça sur mon nez.

Je m’avançai vers la porte. Et je sonnai…

Je regardais Liam. Il ne disait toujours rien. Et moi non plus. D’habitude, il parlait plus. D’habitude, il me rassurait.

Ce n’était pas le cas aujourd’hui.

Et, en moi, ce faisait un nœud de peur… Et de colère. Envers Liam et envers Cash.

C’est la mère de Cash qui vint nous ouvrir. Elle était surprise de nous voir tous les deux.

-Bonjour Billy, bonjour Liam… Cash est dans sa chambre. Entrez.

J’hochai la tête et entrai alors qu’elle nous laissait la place pour le faire. Je m’avançai doucement vers la chambre de Cash, Liam sur mes talons.

Et je finis par entrer. Sans toquer. Je ne toquais jamais à la porte de la chambre de Cash.

-Cash ?

Ma voix grave s’infiltra dans la chambre de mon guitariste. C’était plus un antre qu’une chambre. Venir parler de contrats et de manager dans le repère mystique de Cash, c’était du suicide.

Mais c’était trop tard, maintenant, pour revenir en arrière.

@ Billy Lighter

De la fumée… Du brouillard… Le feu du désaccord qui consumait The Lightening quant à savoir qui serait la fille de Be Mine ! asphyxiait jusqu’à ma chambre, mon antre en plein centre d’Hollywood, en plein centre du monde.

A moins que ce ne soient les cigarettes que je fumais sans discontinuer mélangées à l’encens que je faisais brûler pour m’aveugler… Pour ne pas voir la porte qui donnait sur le Désert auquel Billy m’avait interdit l’accès le temps de la création du clip, en espérant que jamais je n’y retournerais… Accès qu’il avait terminé de verrouiller lorsqu’il avait décrété que Savannah était la fille de Be Mine !, qu’Apolline était la fille de Be Mine !… Alors que ni Savannah, ni Apolline n’était la fille de Be Mine ! Seule L.A. méritait d’être mise en scène et L.A. n’avait pas besoin de mots… Elle avait façonné Gaïana à son image.

Je la voyais toujours, cette porte, la porte de mon monde, malgré la fumée… La dernière fois que j’avais renié ce monde trop longtemps, il y avait eu l’émeute de St-Louis… Il y avait eu des morts… Même Adriana était revenue vers moi, bravant la réalité de Billy, sous la forme d’Eileen Kramer, pour me faire passer un message.

Le roi Serpent ne sortait du Désert que pour créer… Je voulais créer avec Billy, je faisais ce qu’il fallait pour ça. Mais Billy voulait Apolline Mclagan qui s’était dressée comme un mur devant moi en reniant Los Angeles.

Je ne voulais pas d’Apolline Mclagan. Je n’avais jamais aimé Savannah.

Je ne pouvais travailler qu’avec Gaïana.

Parce que je connaissais Gaïana. Je ne connaissais pas Apolline.

J’envoyai une nouvelle bouffée de fumée bleue et la porte s’ouvrit face à moi…

Je pus alors voir le feu… Les flammes oranges et un long frisson parcourut mon corps pratiquement nu…

-Billy…

Billy était là, Billy venait vers moi…

Quelque chose allait se passer. Comme à chaque fois que nous nous rencontrions.

La porte se referma derrière Billy, une fois son ombre elle aussi dans mon antre…

Billy et Liam… Faisant barrage devant la porte au moment même où j’allais ouvrir l’un des tiroirs contenant un peu de poudre du passeur… Le peu qui me restait de ce que Delfino m’avait donné il y avait une éternité.

Billy l’avait senti.

Billy venait me rattraper au vol.

Mes yeux noirs volaient de Billy à son ombre protectrice. Liam était toujours là. Liam avait le droit d’être là… Il faisait partie des meubles du monde chaotique de The Lightening.

Je désignai un coussin installé à terre, face à moi, comme si je l’avais attendu.

Et soufflai une nouvelle bouffée de fumée.

-Parle.

Parce que Billy avait toujours quelque chose à dire.

@ Billy Lighter

17 minutes. Ce fut le temps qui passa dans le silence le plus complet, si ce n’était la radio mise en sourdine dans l’habitacle de la voiture. Je ne regardais même pas Billy, perdu dans mes propres pensées. Car mon avenir était en jeu aussi : The Lightening parti, à quel groupe allais-je être attribué ? A quelle rockstar ? Car je n’étais qu’un outil dans la grande boîte qu’était MTI. Et si j’adorais mon job, je n’en étais pas moins conscient de n’avoir que très peu de libre-arbitre, voire pas du tout, en ce qui concernait qui je devais protéger.

C’était d’autant plus triste que je m’étais habitué à The Lightening, même à leurs pires défauts qui faisaient peur à tant de roadies et autres qui travaillaient pour eux. Luke Werner avait carrément abdiqué face à Cash Izbel à qui MTI l’avait pourtant lié.

J’avais, avec le temps, fini par saisir quelques tours et détours d’une logique qu’ils avaient bien à eux et entre eux aussi.

The Lightening demandait un constant travail d’adaptation, une écoute et une diplomatie hors norme… Il demandait d’avoir les nerfs bien accrochés et de devoir rester calme quoi qu’il arrive. C’était ça, que j’aimais, dans mon travail pour The Lightening.  

Mais là, la mission était d’autant plus compliquée que je me sentais concerné personnellement par ce qui arrivait…

Je n’émergeai de mes pensées que lorsque Billy plaça ses lunettes sur son nez. Les vieux réflexes ne se perdent pas comme ça et même la pire des colères ne pouvait pas faire ciller le meilleur des drills. Lighter fonctionnait aux rituels… J’avais appris à fonctionner comme ça également.

Les lunettes, c’était le signal qu’il fallait y aller.

Ça aussi, c’était une chose propre à The Lightening. La communication se fait sur plusieurs niveaux de lecture et si Billy parlait, en générale, beaucoup, son non-verbal était presque plus important que tout ce qu’il pouvait dire. Je savais le décoder, comme je me surprenais encore aujourd’hui à pouvoir suivre une conversation entre le chanteur et le guitariste quand, pourtant, aucun mot n’était prononcé.

D’aucuns disent qu’il y a un cruel manque de communication chez The Lightening. Je n’étais pas d’accord avec ça : il y avait trop de systèmes de communications chez The Lightening, et ils s’y perdaient eux-mêmes.

C’était un groupe de rock formé uniquement de génies… Avec tout ce que ça implique.

Une merveille à écouter, à regarder… A décoder.

J’en avais la gorge serrée, de penser à tout ça, à cette séparation qui nous pendait au nez… A tel point que je sortis de la voiture et accompagnai Billy jusqu’à la porte d’entrée du bâtiment sans même m’en rendre compte.

Ce fut l’intonation surprise de la mère de Cash, une afro-américaine au visage extrêmement gentil mais à la carrure loin d’être frêle, qui me sorti de ma torpeur.

-Bonjour madame Izbel…

Elle ne s’appelait plus madame Izbel depuis longtemps, les parents de Cash étant divorcés. Mais bien des gens l’appelaient comme ça. Pas à cause de son mari, mais à cause de son fils.

Et évidemment, elle se doutait bien que nous venions voir Cash, même si je n’aurais su dire si c’était ma présence ou celle de Billy qui l’intriguait le plus.

Je savais que Billy ne s’aventurait jamais chez Cash « pour le fun ». Il fallait réellement que ce soit nécessaire et important.

Mon cœur se mit à battre plus fort alors que je montais les escaliers qui menaient à l’étage derrière Billy. Et je n’osais imaginer les bonds que devait faire celui du chanteur…

Billy ouvrit la porte, sans frapper, bien que prudemment.

Nous fûmes accueillis par un épais brouillard à travers lequel je ne pouvais que distinguer vaguement la silhouette de Cash… A travers les rideaux fermés, de fins mais intenses rayons de soleil brûlants dessinaient des traits d’or sublimant les volutes de fumées qui envahissaient la pièce.

Ca sentais la cigarette et l’encens, c’était lourd, capiteux et enivrant…

Cash ? Billy…

L’appel et la réponse me donnèrent un grand frisson qui me parcourut des orteils jusqu’à mes cheveux qui me donnèrent l’impression de se dresser sur mon crâne. Je refermai la porte derrière nous et la seule source de lumière furent les rayons tranchants du soleil.

Derrière ses boucles de cheveux noirs, je ne pouvais pas voir les yeux de Cash, mais je sentais, malgré la fumée, son regard lorsqu’il se posait sur moi.

Il fit signe à Billy de s’asseoir, lui intima de parler.

J’étais témoin d’un nouveau tournant dans l’histoire de The Lightening.

Nous étions dans l’antre du Shaman et personne ne savait comment cette histoire allait finir.

@ Billy Lighter

-Billy…

Cash répondit à mon appel directement. Cash était face à moi. La pièce était remplie d’une fumée sentant l’encens et la cigarette. Cash était presque nu dans son antre.

C’est en entrant que je me rendis compte que je participais à ma propre mort. Venir révéler la vérité à Cash dans sa propre chambre c’était du suicide.

Mais j’avais Liam. Il était à mes côtés. Il m’avait suivi jusqu’ici. Il n’y avait que sa présence rassurante qui me donnait du courage. Je devais avoir la signature de Cash. Je devais faire de The Lightening le groupe de Maria Watson. Il n’y avait pas d’autre choix pour survivre.

Mes lunettes de soleil étaient, toujours, sur mon nez. Ça rendait la pièce plus sombre. Rien de rassurant… Mais les lunettes, en elles-mêmes, était une protection. Une protection contre les gouffres noirs qu’étaient les yeux de Cash.

Il me fit signe de prendre place sur un coussin face à lui. Je regardai Liam cherchant, en lui, le courage suffisant à continuer cette quête de signatures. Puis, je pris place sur le coussin. Prêt à affronter Cash.

Il voulait que je parle. Je fixai Cash, mes yeux invisibles à son regard. Je levai la tête vers lui. Et, si mon cœur battait très vite, si la peur était présente, je gardai une voix grave et stable. Parce que j’étais sûr et déterminé. Parce que je savais que le choix que j’avais fait était le bon.

-J’ai viré Lenny il y a quelques jours. The Lightening ne pouvait plus continuer avec lui. The Lightening ne pouvait plus avancer avec lui. Je voulais cesser de stagner.

Parce que ce n’est pas avec Lenny que William pourrait se libérer. Lenny était le passé. Il représentait ce que The Lightening avait été. Il me rappelait la dernière tournée et le chaos que ça avait été. Et je ne voulais plus de chaos.

-J’ai brisé le contrat avec MTI. Et je suis allé à l’audition de Maria Watson. C’est notre nouveau manager. Elle n’a pas de label. Elle est indépendante. Elle connait le métier. Elle a remis Atticus sur le rail. Elle sait ce qu’elle fait et je suis sûr qu’elle sera bien plus compétente que Lenny.

Je regardais Cash. Je soutenais son regard protégé par mes lunettes. Il fallait qu’il accepte sans concession. Je ne saurais pas toléré un refus.

@ Billy Lighter

Je voyais Billy sans le voir, pas à cause du brouillard qui emplissait mon antre mais à cause des lunettes de soleil qui m’empêchaient de planter mes yeux noirs dans les siens. Il était assis devant moi, je le sentais plus que je ne le voyais. Je sentais la présence de Liam aussi… Liam qui avait un regard dur, non dissimulé, loin de celui que je lui connaissais.

Je dis à Billy de parler.

Il parla.

Lenny… MTI… Tout cela n’était plus. Et plus qu’un contrat, c’étaient les piliers qui représentaient mes connexions avec ce monde que Billy avait brisés.

Je le laissais parler parce que Billy lancé, rien ne pouvait l’arrêter. J’étais aussi muet de terreur, mes yeux noirs plus ouverts que jamais au point que la fumée qui montait de ma cigarette les brûlait.

Tout ce que je connaissais, tous mes repères, Billy les avait balayés d’un revers de la main sans crier gare.

MTI… Lenny… Notre manager suant et imposant n’était peut-être pas le meilleur. Mais je savais comment il fonctionnait et il savait comment je fonctionnais.

Billy plaidait la cause de son élue comme il avait, il n’y avait pas si longtemps, plaidé la cause d’Apolline Mclagan. L’histoire ne faisait que se répéter : indépendance et compétence, tels étaient les atouts de celle qu’il avait choisie. Les mêmes atouts qu’il avait attribués à Apolline Mclagan.

J’avais le même problème et quand, après qu’un long silence se soit à nouveau installé entre nous, je retrouvai l’usage de la parole, je l’énonçai.

-Je ne connais pas Maria Watson.

Je ne voulais pas que ce monde déjà aussi abrupte et violent qu’abstrait, auquel j’avais tant de mal à m’attacher, change. Je m’étais habitué à Lenny, je m’étais habitué à MTI, à Liam, aux murs blancs de la tour que j’avais pourtant essayé de repeindre. Je m’étais même habitué à Eileen J.Kramer.

Je regardai Billy, en détresse.

-Je ne veux pas tout recommencer. Je ne veux pas que le monde change.

@ Billy Lighter

J’étais debout derrière Billy qui avait pris place au sol, sur un coussin. Les mains croisées dans mon dos dans une position dite de « repos », je les surplombais tous les deux et pourtant, je me sentais minuscule, appréhendant le clash des Titans.

Cash avait demandé à Billy de parler. Si la voix de Billy était profonde et grave, celle du guitariste était atypique également, contrastant avec son physique, comme moins mature, éraillée et irrégulière. Presque encore une voix d’adolescent en pleine mue.

Si on m’avait demandé comment ça se faisait qu’il avait ce type de voix-là, j’aurais répondu sans hésiter qu’elle aurait du mal d’évoluer jusqu’à la maturité tellement Cash parlait peu.

Billy fit ce que Cash avait demandé et il parla. Il avoua tous les événements des derniers jours. Tout du moins, cela sonnait à mes oreilles comme un aveu, mais je n’étais pas objectif. A mes yeux, ce qu’avait fait Billy était une erreur. Pas d’avoir choisi Maria Watson même si le fait que The Lightening quitte MTI m’attristait, mais d’avoir pris la décision tout seul, sans demander leur avis aux autres membres du groupe.

Et en particulier au guitariste.

Pourtant, nom de dieu, Billy était quand même celui qui connaissait le mieux Cash, non ? Il savait mieux que moi combien quand Cash était habitué à quelque chose ou à quelqu’un, il était difficile de l’en changer. Ses guitares elles-mêmes étaient la représentation de cette forme d’autisme : il avait les mêmes depuis le début de leur carrière au point que certaines étaient usées au possible, le bois se creusant et se satinant au point que ça en devenait fascinant.

Pendant tout le bref récit de Billy, j’avais retenu mon souffle, mais je ne m’en rendis compte que lorsque Cash ouvrit la bouche, pour prononcer trois phrases, très courtes, qui ressemblaient fort à un refus. A ce moment-là, je laissai l’air s’échapper de mes poumons en un soupir que je voulais discret, mais je ne me détendais pas pour autant, au contraire.

La situation pouvait exploser d’une seconde à l’autre. Cash avait toute la détresse du monde dans les yeux. Il avait peur, pas de Maria Watson, qu’il disait pourtant ne pas connaître, mais du changement en lui-même.

Je fis la moue… Je savais que depuis que le groupe s’était remis à travailler sur le clip, et malgré leurs divergences artistiques, le guitariste avait arrêté la dope. Comment je le savais ? Pas à son comportement parce que son cerveau devait avoir trop morflé depuis longtemps, mais à ses bras qui ne portaient pas de marques récentes d’injections.

Sa relative sobriété (parce qu’il picolait quand même à mort, comme en témoignaient les cadavres de bouteilles de Jack Daniel’s éparpillées dans sa chambre) ne tenait qu’à un fil… Fil que Billy venait peut-être de couper en rompant avec MTI.

Je voulais, cependant, venir en aide à Billy, malgré que, moi non plus, je n’étais pas d’accord avec ce changement.

Je m’accroupis derrière le chanteur, lui posant une main sur l’épaule pour qu’il sente ma présence et me mettant du même coup au niveau du champ de vision de Cash. Je transpirais plus ou moins autant qu’un foutu démineur.

-C’est une Déesse, Cash… Tu ne veux pas travailler avec une jolie et gentille manager ?

@ Billy Lighter

J’avais tout dit à Cash. Sans détour. Je déclarai avoir viré Lenny. Parce qu’avec lui, on stagnait. On avançait plus. Et un groupe qui n’avance plus est une groupe qui dépéri. Et si le groupe dépérit, je dépérissais aussi. Maria était jeune. Maria était la clé pour remettre The Lightening dans le droit chemin.

Et je ne regrettais pas mon choix.

Cash était terrifié. Je ne voyais pas ses yeux à cause de la fumée et des lunettes. Mais je pouvais sentir sa terreur. Elle me transperçait comme un poignard. Aveugle mais pas sourd, j’avais, aussi, entendu le soupire de Liam. Et toutes ses émotions négatives s’infiltraient en moi. Elle me rongeait de l’intérieur.

Mais je ne devais pas céder.

Cash ouvrit la bouche. Il déclara ne pas connaitre Maria Watson. Il m’avait dit la même chose d’Apolline. Avait-il pensé la même chose de moi lors de notre première rencontre ? Avais-je chamboulé ses repères quand j’avais débarqué à L.A. ? Et si c’était le cas, cela n’en valait-il pas la chandelle ? Il ajouta ne pas vouloir tout recommencer. Je fronçai les sourcils. Cash vivait dans sa routine. Moi, je routine, à la longue, me tuait. Elle était destructrice. Elle entrainait la stagnation et l’ennui. La routine laissait le temps de réfléchir. Elle laissait le temps pour les flashbacks et les angoisses.

Je sentis la main de Liam se poser sur moi. Il plaida ma cause. Non, celle de Maria. Il utilisait les mots de Cash. Mais ça ne m’empêcha pas de parler, moi aussi. La terreur qui émanait de Cash, c’était ce que je combattais intérieurement. Son probable refus, c’était ce que je combattais extérieurement.

-Liam a raison. Elle est gentille. Mais, elle est aussi compétente. Elle a travaillé avec The Best. Elle a appris de lui. Mais, surtout, j’en ai besoin Cash. J’avais besoin de ça. On stagnait. On n’allait plus nulle part. Lenny n’y arrivais plus. Il était au bout du rouleau. Je l’ai vu Cash. Il ne pouvait plus rien nous apporter.

Lenny n’y arrivais plus. Lenny était dépassé, fatigué, déprimé. Je le sentais à chaque entrevue. Je le sentais même au téléphone. Et on ne pouvait pas continuer comme ça. Sans oublier que :

-Et puis… Il me rappelait Saint-Louis. Les morts. Je ne pourrais plus faire de tournée avec Lenny.

Il me rappelait le bus. Il me rappelait les morts. Il me rappelait le Midwest… Là où il avait perdu ce qui lui restait de passion. Là où on s’était tous perdu.

-Cash… On doit changer. Pour un monde meilleur.

Ma voix était stable, grave, profonde. J’étais sûr de moi. Je savais ce que je faisais. Et j’y tenais.

@ Billy Lighter

Mon regard cilla quand Liam bougea, initiant des mouvements plus rapides dans les volutes de fumées, dans la brume de ce monde que je voulais occulter. Plus encore maintenant que Billy voulait me déraciner pour me planter ailleurs, en terre inconnue.

A la paire d’émeraude de Billy dissimulé par des verres fumés s’ajoutèrent des perles blues de Liam… Quatre yeux regardant dans la même direction quand je leur faisais face, me voulant immuable.

Ils firent bloc quand Liam entra en contact avec le chanteur, contact indispensable pour quelqu’un de plus éloigner du noyau dur de The Lightening. Billy était le diffuseur qui permettait que je puisse l’entendre. Et ce fut donc brièvement sur lui que mon regard se posa.

J’appréciai l’effort de langage. Liam était là depuis longtemps lui aussi. Liam faisait partie de L.A. telle que je la connaissais.

Mais Liam voulait que je rejoigne une Déesse que je ne connaissais pas.

-Et Billy ne fait pas la différence entre Déesse et Harpie.

Mon regard revint, plus ferme, sur ce dernier. Il y avait eu Savannah. Il y avait eu Apolline. Qu’est-ce qui prouvait que Maria Watson n’était pas une de leur semblable puisque le chanteur semblait les attirer irrésistiblement.

Billy parla à nouveau et je l’écoutai, jusqu’à ce que le flot se tarisse à nouveau. Ma cigarette terminée, j’en avais rallumée une autre, posant le paquet entre nous, ouvert, comme pour signifier que la communication n’était pas encore rompue.

Je pris un air pensif quand Billy souligna que Maria Watson avait appris avec The Best. J’avais rencontré The Best au gala des Sherman… J’avais parlé avec lui… Il avait fait un miracle ce soir-là. Lenny… Lenny rappelait les morts de St-Louis… On ne pouvait plus avancer avec Lenny… Mais Lenny n’avait tué personne… Nous avions provoqué l’émeute.

Je sortis de mes réflexion et reposai mes yeux sur Billy.

-Elle a appris avec le Nécromancien… Ouais…

Le Nécromancien qui avait ramené un mort à la vie… Sniper était remonté sur scène ce soir-là. Je tirai longuement sur ma clope…

Maria Watson, sa disciple, avait voulu faire de même avec Atticus Fetch.

-Mais Atticus est mort.

Billy voulait qu’on change, pour un monde meilleur. Je soufflai lentement ma fumée.

-Je connais un monde meilleur.

Je sifflai doucement avant de reprendre dans une langue que Billy comprenait.

- Je reste ici pour toi.

@ Billy Lighter

Je tentai d’aider Billy, par loyauté et aussi parce que je voulais que cette aventure se termine. Pas celle avec The Lightening, mais cette incursion dans l’antre du Shaman. Je n’étais pas aussi sensible que mes deux compagnons d’aujourd’hui, mais malgré ça, j’avais l’impression que toutes leurs émotions mêlées entraient en moi aussi sûrement que je respirais la fumée de cigarette et d’encens qui envahissait la pièce.

Accroupis derrière le chanteur, le guitariste avait alors tourné vers moi ses yeux noirs. Il répondit lentement mais sûrement à mes questions par une affirmation qui visait Billy. Une autre caractéristique de The Lightening, qui pouvait parfois utiliser des intermédiaires pour communiquer entre eux.

Mais le reproche visait bel et bien Billy. Selon Cash, le chanteur ne faisait pas la différence entre Déesse et Harpie. En une simple phrase, il disait bien plus de choses que ce qu’il y paraissait. En une simple phrase, il parlait de Savannah, de divergences artistiques, de son monde à lui, des femmes en général, de pièges et de manque de discernement…

En une phrase, commencée comme si elle était le bout d’une pensée et non une pensée complète. J’étais sûr qu’il y avait un début, mais qu’il ne se rendait même pas compte que ce début, il ne l’avait pas énoncé tout haut.

Qu’est-ce que vous vouliez que je réponde à ça ?

Ce n’était pas à moi de le faire, de toute façon. Billy reprit la parole. C’était déjà sur lui que le regard de Cash était posé. Jamais je n’aurais cru le voir si sûr de lui face à Cash. Il défendait son choix, Maria Watson, bec et ongle, mettant à nouveau l’accent sur sa compétence.

J’avais du mal à comprendre pourquoi Billy se fatiguait avec ça… Sachant moi-même pertinemment que Cash ne se forgerait sa propre opinion que sur le terrain… Peut-être même juste en un seul regard, ou sur les premiers mots que dirait Watson.

Je me demandais si la jeune femme savait dans quoi elle se lançait et si elle savait ce qu’elle allait devoir affronter et, surtout, comment l’affronter. Parce qu’elle avait peut-être convaincu Billy, cela ne signifiait pas qu’elle aurait Cash d’office… Même si ce dernier signait le contrat, une signature sur un bout de papier n’aurait aucune valeur pour le guitariste.

C’était Lenny qui avait raison… Dans ce qu’il avait dit en conférence de presse : il leur avait tout donné, et il en avait quoi comme gratitude ? Aucune…

J’avais protégé Billy pendant quatre ans… Est-ce qu’il s’était posé la question quand il s’était agi de changer d’horizon ? Non.

Si Cash se disait être le Serpent, Billy était un félin… Et un félin prend sans rien donner en retour. S’il n’a plus ce qui lui convient à un endroit, il en change…

C’était ce qu’avait fait Billy.

Et malgré tout, j’étais là et je le soutenais.

Billy ne voulait plus de Lenny… A cause des morts… Mauvaise réponse.

Cash vit la faille… Et s’y engouffra.

Je retins à nouveau mon souffle.

@ Billy Lighter

Liam était de mon côté. Mais je sentais que ce n’était pas de bon cœur. Il le faisait parce qu’il avait l’habitude de le faire. Mais il n’aimait pas ça…

Mais il milita, quand même, à mes côtés pour dire à Cash que Maria était une Déesse. Je confirmai… Mais le guitariste disait que je ne savais pas faire la différence entre une Déesse et une harpie… Venant d’un homme qui se réfugie dans la drogue, je trouvais ça insultant. Maria n’était pas une harpie. C’était une femme qui voulait faire son travail bien ! C’était une femme qui voulait avancer et nous faire avancer.

-Maria n’est pas une harpie, Cash !

J’avais haussé le ton sur ce coup-là. Lui qui avait flirter avec Gaïana. Une fille des rues qui avait réussi à devenir mannequin. Qui avait usé de son charme pour monter les échelons… Si je m’étais trompé sur Savannah… Cash s’était trompé sur Gaïana. Mais je n’avais pas toujours tort et Cash n’avait pas toujours raison ! Je ne pouvais pas accepter que les choses soient comme ça !

Et je continuai de parler. De défendre mon choix. De défendre Maria. De défendre l’avenir de The Lightening avec elle.

J’achevai de défendre ce que je voulais défendre. Et Cash se ralluma une cigarette et mis le paquet entre nous. J’en pris une. Je l’allumai. Je cédai aux offrandes du Shaman. Mais je ne céderai pas à ses caprices.

Et je repris la parole pour parler de Lenny et des morts. Et ce n’est que quand j’étais à court d’arguments que Cash repris la parole. Et que ses yeux revinrent sur les miens. Mais mes lunettes me protégeaient de ses trous noirs. Elles me protégeaient des émotions de Cash. Elles me protégeaient de tout ici. Il déclara que Maria avait appris avec ne Nécromancien. Il voulait parler de Ricci. Je ne savais pas pourquoi il l’appelait comme ça. Cash vivait ailleurs. Loin du réel. Loin de ce que j’étais.

-Avec Ricci, oui.

Et si cet argument suffisait à amener Cash à accepter mon choix, pourquoi pas. L’important c’est qu’il signe. Mais mon espoir infime disparu quand il déclara qu’Atticus était mort.

-Dans un accident de voiture… Maria n’y peut rien.

Tout ce que je voulais c’était avancer. Tout ce que je voulais c’était retrouvé l’inspiration. Reprendre la musique. William le voulait. Je le voulais. Je voulais un monde meilleur. Et Cash, déclara connaitre un monde meilleur. Je fronçai les sourcils. Il siffla. Avant de reprendre la parole pour dire qu’il restait ici pour moi.

Qu’est-ce que ça signifiait ? Qu’il était suicidaire ? Qu’il avait repris la drogue ? Qu’il voulait changer de groupe ? Qu’il voulait arrêter ? Toutes ces questions et leurs réponses étaient insupportables pour moi. Je balançai le paquet de cigarette qui était entre nous d’un revers très violent de la main. Et, à la place du paquet, je déposai les contrats.

-Quel monde meilleur Cash ? Qu’est-ce qui est mieux que celui-ci ? Que la musique ? Que ce qu’on fait ?

Je me retenai de pleurer de rage et de tristesse. Parce que ce qu’avait dit Cash me tuait intérieurement. C’est comme s’il avait dit préféré mourir que de vivre dans ce monde. Et je trouvais ça très injuste. Moi, je m’étais battu. Moi, je n’avais jamais succombé à l’appel de la mort. Moi, j’avais résisté et je résistais encore tout les jours malgré tout ce qui m’était arrivé. Malgré les appel de William à en finir ! Mais lui ! Lui qui avait vécu au côté d’une mère aimante, dans une famille aimante, il n’aimait pas ce monde ! Ce n’était pas juste !

Je lançai un bic que j’avais dans ma poche sur le tas de contrats.

@ Billy Lighter

L’ombre de Billy s’était tue, se tapissant à nouveau dans la fumée derrière le chanteur. Billy avait attiré à nouveau mon attention sur lui, mais ses lunettes de soleil m’empêchaient d’entrer… Il continuait sur la ligne qu’il avait tracée depuis le début, défendant Maria Watson, défendant son choix.

Il avait pris la mauvaise voie pour m’atteindre, mais ne semblait pas vouloir faire demi-tour.

Je me rappelais du Nécromancien… De celui qui avait ramené Sniper à la vie.

Atticus n’avait pas eu cette chance et je l’avais fait remarquer à Billy…

Ce n’était pas la faute de Watson.

-Et Lenny n’a pas lancé la bouteille…

La bouteille que j’avais vue, à St-Louis, voler dans les airs avant de répandre le sang et la mort… L’Apocalypse.

Billy voulait un monde meilleur ? Je connaissais un monde meilleur… Je connaissais bien d’autres mondes meilleurs. Mais Billy s’obstinait à fermer les yeux.

-Rien n’est meilleur que L.A., mais elle a plusieurs visages. Rien n’est meilleur que la musique qu’on fait. Mais je ne suis pas celui qui se limite.

Ma tête partit légèrement vers l’arrière, suivant du regard une volute de fumée montant de la cigarette que je tenais en main jusqu’au plafond.

-Parce que… Qu’est-ce qu’on fait, Billy ?

Où était Gaïa ? Où était River ? Où était Be Mine ! ? Perdus, tous, dans les limbes de The Lightening… Nulle part.

-Je ne fais pas confiance à Maria Watson.

Je penchai la tête sur le côté… Je pris le bic et signai « Cash » avec des lettres qui auraient pu être tracées par un enfant.

-Mais j’ai confiance en toi.

@ Billy Lighter

Les deux artistes ne s’entendaient pas sur la dénomination à attribuer à la pauvre Maria Watson dont je doutais qu’elle imaginait seulement ce qui l’attendait… Il fallait dire que ce n’était pas la première fois que les femmes étaient sources de problèmes au sein de The Lightening. C’était comme si Cash et Billy, l’un ou l’autre selon lequel portait attention à une femme, bloquait la communication entre le chanteur et le guitariste.

Comme s’ils se réservaient chacun l’exclusivité de l’autre.

Cash alluma une cigarette, posa le paquet entre eux, et le ton redescendit. Le Shaman appâtait pour mieux piéger. C’était l’impression que Cash me donnait parfois… Cette impression d’être beaucoup moins à l’Ouest qu’il ne voulait le laisser paraître.

Il perdait les gens. Et mordait au moment où ils s’y attendaient le moins.

Vif comme le Serpent.

Ils parlèrent de Ricci, mais je ne le compris que lorsque Billy traduit les termes de Cash. Ouais… Je vis plus ou moins se dessiner des lignes plus claires dans le discours qui avait pourtant l’air si mystique du guitariste.

Le Nécromancien, c’était Ricci. Maria avait appris avec Ricci… Maria avait voulu faire revenir Atticus à la vie… Et Atticus n’y avait pas survécu.

Mais qui Ricci avait-il ressuscité ? C’était ça que je me demandais, il me manquait une pièce du puzzle.

Billy défendit Maria. Cash défendit Lenny.

Je ne savais pas si je regardais une conversation ou un match de tennis particulièrement disputé.

Mais c’était quoi cette histoire de bouteille ?

Deux pièces. Il me manquait deux pièces. Mais eux avaient pourtant l’air de se comprendre.

Cash tenta d’emprisonner Billy dans ses anneaux comme l’un des pythons qui vivaient dans cette chambre, dans le terrarium juste à côté de moi.

Mais Billy se défendit, se débattit et mis Cash devant les contrats.

On ne pouvait pas faire plus concret.

Cash signa… Pas parce qu’il croyait dans les capacités de Watson que Billy s’était escrimé à mettre en avant.

Parce qu’il croyait en Billy.

Le chanteur avait encore fait mille détours en voulant se justifier.

Là où Cash l’aurait de toute façon suivi aveuglément.

@ Billy Lighter

Je défendais mon choix parce que je savais que s’était le bon. J’usais beaucoup d’énergie à le faire. Mais Cash, et ses délire mystique, m’emmenait sur des terrains glissant. Il disait qu’Atticus était mort. Je répliquai que Maria n’y était pour rien. Et lui disait que Lenny n’y était pour rien pour la bouteille. Et donc les morts. Je fronçai les sourcils.

-Lenny nous a emmenés au Midwest…

Alors qu’il savait que je voulais éviter l’Indiana. Lenny avait pris le risque de nous emmener là-bas. Il savait. Et il n’a rien fait pour éviter ça. Il était aveuglé par la pression émise par ses supérieurs. Mais Maria n’avait pas de supérieur. Maria ne nous emmènera jamais dans l’Indiana.

C’est ce monde meilleur là que je voulais. Un monde où les pressions seront moindres. Un monde où on pourra créer. Mais Cash avait déjà son propre monde. Il disait que rien n’était meilleur que L.A. Que la musique qu’on faisait. Et que ce n’était pas lui qui se limitait. Si je n’avais pas de lunettes de soleil, Cash aurait pu voir mon regard assassin. Mes lunettes me protégeaient de lui. Mais elles le protégeaient aussi de moi.

De toute façon, il ne me regardait plus. Il avait sa tête en arrière. Je ne me limitais pas ! Lenny nous limitait ! Et à la question de Cash qui demandait ce qu’on faisait, je répondis du tac au tac.

-Un clip ! C’est ce qu’on fait !

Un clip qui aurait pu être commencé depuis longtemps si Cash n’avait pas trouvé une lauréate à la dernière seconde.

Je ne savais plus quoi dire. Je voulais que Cash signe le papier que je lui avais mis sous le nez. Je voulais partir de cet antre. Je voulais rentrer chez moi.

Cash déclara qu’il ne faisait pas confiance à Maria. Et je crus que j’allais exploser. Que tout allait voler autour de moi. Je serrai les dents… Jusqu’à ce que Cash signe le papier. Et déclare qu’il avait confiance en moi.

Je repris les papiers signés d’un coup. Comme si les laisser devant Cash allait le faire faire marche arrière. J’avais parlé. J’avais exprimé tout ce que je voulais. Tout ça pour qu’il démonte toute mes justifications. Et signe quand même.

Beaucoup d’énergie… Pour rien.

Je me relevai. Il n’y avait que dix minutes qui avaient passés depuis le début de mon entrée ici. Mais elle avait été éprouvante.

-Il faudra choisir la fille de Be Mine. Et faire ce clip.

Je ne dis rien d’autre. Je regardais Liam. J’étais fatigué. Je voulais rentrer. Je serrai les contrats contre moi.

-On rentre.

J’eu un dernier regard pour Cash. Il me laissait avec le sentiment de m’être efforcer pour rien. Et j’étais sûr qu’il en retirait du plaisir. Pendant que moi je n’en retirais que de la tristesse et de la colère.

-Au revoir, Cash.

Et je sortis de l’antre de Cash…

@ Billy Lighter