-Je refuse, dis-je distinctement – avant de boire une gorgée de whisky.
Dominic Brooklier – le Parrain de la Famille de Los Angeles – n’était pas content de ce refus. Il comptait sur moi pour une nouvelle mission – putain, est-ce que j’ai l’air d’être un simple soldat, moi ? Cette fois, ce n’était pas sur ma célébrité qu’il comptait – mais sur mes liens familiaux…
-Danielino… La Casa Nuova vient de nous faire perdre des milliers de dollars rien que ce mois-ci rien que sur le trafic de drogue. Ils sont nouveaux et aucun de mes soldats n’arrivent à avoir des renseignements sur eux. J’ai besoin de toi, sinon ils risquent de nous faire concurrence, dit-il d’une voix ferme.
Tout ce que je veux, c’est le nom de quelque capos histoire de leur mettre un bon coup et leur montrer qui est le chef ici.
La Casa Nuova – une nouvelle mafia née dans le courant des derniers mois à L.A. Mon rapport avec ce parasite ? Angelo – mon oncle. Quand il avait dit vouloir monter une affaire sur L.A., je n’aurais pas cru que ça se ferait aussi vite – et pourtant… Angelo en était le Parrain – et son expérience dans la mafia romaine l’aidait à grandir bien trop vite au goût du vieux Brooklier.
-Je ne peux pas, Dom… La dernière fois qu’il a mis les pieds dans ma villa, il m’a clairement menacé de mort, dis-je en parlant d’Angelo – et en réitérant mon refus total de la mission.
L’argent ne valait pas ma vie – il pourrait me proposer dix millions que je n’accepterais pas plus… Seulement, Dominic me connaissait – un peu trop bien même.
-Depuis quand les Ricci sont des lâches, Danielino ?, demanda-t-il sur un ton plus sérieux que provocateur.
Ton père, lui, ne reculerait pas à cause de petites menaces de mort. Yay – ça faisait mal. L’insulte – et la comparaison malvenue avec mon père. La combinaison venait de porter un coup fort à mon ego. Le coup qui m’avait fait passer d’une action raisonnable à mon arrêt de mort.
-Je ne suis pas un lâche, dis-je d’une voix sèche.
J’accepte ta mission. J’irais voir Angelo. Je trouverais les noms que tu veux. Mais le prix sera de deux millions. Pas un.La satisfaction était revenue sur le visage du vieux Dominic. Il avait ce qu’il voulait – son informateur.
-Va pour deux millions, Ricci, dit-il en se levant – mon acceptation signant la fin de la discussion.
J’étais resté assis – il savait où était la sortie. Mon regard s’était perdu dans le vide. Je ne me rendais pas encore bien compte que ma manœuvre n’avait rien d’intelligente – et que ce n’était qu’un sursaut d’orgueil qui m’avait fait accepté une chose pareille.
-Ne t’en fais pas, Ricci. Personne ne sait que tu as un lien avec nous. Ton oncle y compris, dit Dominic en posant sa main sur mon épaule – avant de partir avec toute la prestance qu’un Parrain comme lui pouvait avoir.
Non, Angelo ne le savait pas.
-Il finira par le savoir, soufflais-je alors que j’étais – à nouveau – seul dans la pièce.
***
-Fouille-le !Aldo s’était exécuté – c’était la case obligatoire avant de pouvoir discuter avec mon oncle. Angelo me dévisageait – cherchant, probablement, à savoir ce que je venais foutre ici.
-Il n’a rien, dit Aldo Battista après m’avoir fouillé.
Aldo Battista, je le connaissais bien. Il était un des capos de la Casa Nuova – apparemment. C’est noté ! Premier nom de la liste.
Je pouvais avancer et m’installer – magistralement ! – sur le siège en face du bureau d’Angelo. Il ne m’avait pas encore dit bonjour – mais ce n’était pas la politesse qui l’étouffait… J’avais, sur mon visage, un grand sourie sûr de moi – un sourire digne d’un Ricci.
Première erreur.
Angelo – qui n’avait pas encore été très loquace – avait regardé vers Aldo pour lui faire un signe de tête. Avant que je ne me retourne, Battista eu le temps de faire un pas vers l’avant – et de littéralement taper ma face contre le bureau.
Cri de douleur – je regrettais déjà d’être ici.
-Putain !, jurais-je en me tenant le nez – qui pissait le sang maintenant qu’Aldo venait de me le briser.
T’es cinglé, Angelo ?!Luigi Conti – le fils d’Angelo – avait laissé transparaitre un sourire. Luigi avait presque le même âge que moi – et avait grandi à Rome, comme moi. Il tenait la place de Consigliere aux côtés de son père – avec son costard et sa position debout juste à côté d’Angelo, ça ne laissait aucun doute sur sa position. C’est noté ! Deuxième nom sur ma liste.
Il était resté de marbre.
-Tu n’avais pas à me regarder comme ça, dit Angelo en s’allumant un cigare.
Dis-moi, Junior… Qu’est-ce que tu es venu faire ici ?
-Je ne m’appelle pas Antonio Junior, Angelo, dis-je en lui envoyant un regard noir – et en me tenant toujours le nez.
Je m’appelle Daniele Ricci. Daniele pour Daniela. Ta sœur, dis-je en laissant transparaitre un sourire.
Je n’aurais pas dû dire ça – mais ça avait été plus fort que moi. Angelo avait levé le regard vers Aldo et j’avais levé les mains en signe d’apaisement.
-Non ! Pas de deuxième coup ! Je venais pour tenter de faire la paix, Angelo, dis-je mes mains en l’air – pour éviter de prendre un autre coup.
Toutes ces conneries ont assez durée, tu ne crois pas ? C’était normalement des paroles en l’air – pour tenter de gagner du temps et glaner des informations au passage – mais au fond c’était probablement le mieux pour nous deux. Enterrer la hache de guerre et oublier les rancunes entre nos deux familles – cette putain de guerre ne ramènera pas ma mère de toute façon.
Angelo s’était levé et s’était mis debout devant sa fenêtre – probablement pour se donner un genre. En attendant, mon regard s’était perdu sur son bureau. Il y avait des notes en Italien dont une qui parlait de Mirko Battista – le frère jumeau d’Aldo. Vu les mots apposé à côté du nom, aucun doute que Mirko était le second capo. C’est noté ! Troisième nom sur ma liste.
J’en avais largement assez…
-La paix ?, dit Angelo – toujours debout vers sa fenêtre.
Faire la paix avec toi ? Tu rêves, Ricci, dit-il en se retournant d’un coup.
Jamais je ne ferais la paix avec toi ou ton père. Jamais je ne pardonnerais Antonio Ricci d’avoir tué ma sœur et de s’en être sorti sans aucune peine sur le dos. Tu sais, tout comme moi, qu’il a payé les flics et les juges pour éviter d’être condamné pour ça !, dit-il en exagérant sensiblement.
Il y croyait – et il l’avait toujours cru. Il croyait que mon père avait conduit – la voiture où il se trouvait avec ma mère - complètement bourré et que c’est son état d’ivresse qui avait provoqué l’accident qui avait été fatal à ma mère. Le comble – dans tout ça – c’est que je n’avais pas le fin mot de l’histoire.
-J’avais deux ans, zio, dis-je en regardant Angelo droit dans les yeux.
Je n’ai rien à voir avec ça !
C’est – pourtant – moi qui payais aujourd’hui. Moi qui étais obligé de subir les regards d’Angelo. Moi qui étais obligé de le voir souiller mon territoire – et emmerder mes affaires. Moi qui étais obligé de l’entendre ressasser cette même putain d’histoire.
Moi ! Pas Antonio ! Encore une fois, je payais pour ce vieux con !
-Tu es comme lui, Ricci. Tu es comme ton père, soutenait-il, son regard plein de colère.
Ce n’était pas la première fois que j’entendais ça – je l’entendais même souvent, parfois même de la bouche d’Erik… Seulement, aujourd’hui, après l’avoir entendu ressasser l’histoire – tragique – de la mort de ma mère une fois de plus et l’additionner au fait que j’étais comme Antonio, c’était trop.
-Très bien, dis-je en me levant d’un coup.
Pas de paix alors... C’est toi qui l’auras voulu, rajoutais-je en tournant les talons.
Au moins, j’aurais eu le cran d’essayer, moi…C’était les derniers mots que j’avais dit à Angelo avant de sortir de sa villa.
***
-Aldo Battista, Mirko Battista et Luigi Conti…, dis-je en tenant bien fermement le cornet de téléphone.
Deux capos, un Consigliere. Je pouvais – presque ! – voir le sourire très satisfait de Brooklier à travers le téléphone.
-Bien joué, petit !, dit-il visiblement très content de mes informations.
La Casa Nuova ne nous fera plus d’ombre grâce à toi.Il avait raison – s’il gérait bien son coup, il pouvait faire très mal à Angelo et consort.
-Merci, dis-je sans arriver à vraiment me réjouir.
Oh et n’oublie pas mes trois millions. Le prix a augmenté quand Aldo à fracassé mon nez sur la table.Brooklier avait ri – je l’avais bien entendu.
-D’accord, petit. Tu auras ton argent la semaine prochaine, dit-il avant de raccrocher.
Trois jours plus tard – ouais trois putain de petits jours -, le job était fait. Dominic s’était débarrassé des frères Battista d’une balle dans la tête chacun quant à Luigi Conti sa voiture avait explosée avec lui – et sa femme… - dedans. Trois jours après ma visite chez Angelo. C’était trop peu – mon oncle n’était pas né de la dernière pluie. Il allait faire le lien.
Dominic – dans sa précipitation de vouloir en finir vite – venait peut-être de signer mon arrêter de mort.
***
Trois mois plus tard-Le courrier du matin, Monsieur. On parle encore de votre meilleur ami dans L.A.People, dit Erik avec un sourire en coin.
-Putain ! Encore ?! Jim devrait me laisser quelques premières pages, ça me manque, dis-je alors que la dernière fois qu’on m’avait vu en Une de L.A.People c’était il y a deux semaines.
J’avais lu l’article concernant Jim – et tous les autres – avant de lire le reste de mon courrier. Jusqu’à ce que je tombe sur une lettre anonyme. Encore une fille qui veut se la jouer mystérieuse ?
Non…
A l’intérieur de la lettre se trouvait une photo – celle de Luigi Conti alors âgé de quelques années. Au dos, il y avait les mots qui allaient me hanter deux ans plus tard.
- Lettre a écrit:
- Salut Junior,
Tu dois sûrement avoir reconnu Luigi sur la photo. Luigi, mon fils… Je l’aimais plus que tout au monde. Il était la fierté de la famille Conti.
Et à cause de toi, il a explosé dans sa propre voiture…
Ricci, je te conseille de n’avoir jamais d’enfant. Car au moment même où ta descendance pointera le bout de son nez sache qu’elle sera en danger de mort. Tu sauras, alors, ce que ça fait de perdre son fils.
Tu avais raison, Junior… Tu n’es pas comme ton père…
Tu es bien pire.
Ciao,
A.C.