Après mon échec cuisant chez BSC, merci Jimmy Reed, et ce malgré la recommandation de Mr Perry, se diriger vers la maison de disque rivale prenait tout son sens n'est-ce pas? Depuis ma rencontre avec Amon, le frère de Freiya, j'ai un pied dans cette autre maison de disque qui sera plus à même d'écouter ce que j'ai. Mon compatriote Amon, que je ne remercierai jamais assez, m'a obtenu un rendez-vous avec son ami manager, Mr Timmy Evans. Je me souviens lui avoir sauté au cou lorsqu'il m'avait annoncé la nouvelle puis m'être vite ressaisie.

Le jour-J est arrivé. J'ai donc tout avec moi, album et EP européens, flyers de tournées, mes démos américaines et celles faites depuis, mes écrits sur mon carnet et aussi mes contacts. J'espère que cette fois, ce sera la bonne, sinon ça risque de prendre plus de temps que prévu voire même de me valoir un billet retour pour le Danemark…

J'entre à l'intérieur du building, c'est très différent de chez BSC. On va dire que c'est minimaliste et que ça fait un peu hôpital mais ne jugeons pas un livre à sa couverture. Je m'avance vers la réception avec la boule au ventre. Je redoute une Lydia et un Reed bis je dois vous l'avouer. Je prends une tête déterminée, une démarche assurée et j'arrive au comptoir en souriant.

- Bonjour, je suis Mlle Hilja Damgaard, j'ai rendez-vous avec Mr Timmy Evans.

- Bonjour, laissez-moi vérifier…

Bon ça a l'air un peu mieux parti, en plus je ne suis pas en retard, j'ai un peu d'avance même, genre 5-10 minutes c'est pas non plus énorme.

- Vous êtes un peu en avance, mais quelqu'un viendra vous chercher bientôt.

- Entendu, merci beaucoup.

Déjà c'est un "bientôt" et non un "un instant" ce qui sous-entend une durée plus longue. Ca fait un peu moins brouillon du coup. Je m'assied non loin et feuillète un des magazine. Guitar & Pen, bon regardons ce qu'il se dit sur les dernières nouveautés musicales le temps que l'on vienne me chercher. Ca parle justement de la fille supposée de Jimmy Reed. Je lis et pile poil lorsque ma lecture se termine, un jeune homme vient me chercher pour me conduire au bureau de Mr Evans. Je sens le stress qui commence à monter en moi. Les secondes m'ont paru être des heures mais je suis enfin devant le bureau. Le jeune homme frappe et m'annonce. Nous attendons que le manager britannique me demande d'entrer pour ouvrir la porte. Ceci fait, je trouve que le bureau du manager est assez différent du reste du bâtiment, il fait plus vivant et accueillant. La porte se referme derrière moi et je salue le manager poliment.

- Bonjour Mr Evans. Je suis Hilja Damgaard, vous vous en doutez sûrement vu que nous avons rendez-vous. Je vous remercie de m'accorder du temps.

C'est un peu maladroit non? Mais il faut dire que cet homme en impose. Amon ne m'avait pas prévenu là-dessus. Au premier abord et à sa voix calme et posée, il n'a pas l'air hautain comme  Mr Reed. Ca me rassure un peu mais je n'ose pas m'asseoir ni même m'avancer sans l'autorisation du manager. J'essaye de me calmer un peu, tout va bien se passer. J'espère qu'il va me laisser une chance…

L'attente est courte chez MTI. Une fois l'heure venue, on m'accompagne jusqu'au bureau de Timmy Evans, manager et ami d'Amon. Je suis stressée. Ce n'est pas rien, il y a de l'enjeu. Si j'échoue ici, suis-je faite pour les Etats-Unis ? Je me pose des questions mais je n'aurai pas encore les réponses. Le jeune homme qui m'accompagne, frappe à la porte et m'annonce. J'ai une énorme boule dans le ventre. Je respire un peu, calme-toi Hilja !

Une fois dans le bureau, je me sens un peu mieux. Il y a une âme qui vit ici, ça se sent. Je regarde brièvement. La porte se ferme, je m'avance un peu et me présente, sûrement un peu maladroitement. Monsieur Evans est impressionnant, tout comme l'enjeu. Toute cette histoire de piston me mets un peu mal à l'aise, mais il faut faire ce qu'il faut pour y arriver n'est-ce pas? Je suis invitée à m'asseoir. Je m'exécute.

-Bonjour, Mademoiselle Damgaard. Prenez place, je vous en prie.

- Merci.

Il est assit à une petite table et non à son bureau. Ca c'est une bonne idée, c'est moins stressant et moins formel. Je préfère. Je m'assieds à mon tour, posant mon précieux sac à côté de moi. Je regarde rapidement la table et y voit du thé. Vraiment très britannique, ça me fait sourire, je suis plus chocolat chaud dans le grand nord mais je bois tout type de boissons chaudes.

-Vous pouvez prendre du thé, si vous le voulez ou bien de l’eau. Faites comme chez vous.

- Je vais me laisser tenter par le thé, je ne pense pas être déçue.

Je me sers le thé et il sent étonnamment très bon. J'ai bien fait de me laisser tenter. Je vois même un peu de fumée qui s'échappe. Il se sert à son tour. Quant à moi je prends la tasse dans mes mains et souffle un peu dessus. Je n'ose pas dire grand chose, je suis encore un peu intimidée, j'espère que le thé me détendra un peu. Et puis, monsieur Evans se charge de lancer la conversation pour moi.

- Amon m’a dit que vous étiez une artiste en recherche d’une maison de disques. Il ne m’en a pas dit beaucoup plus mais cela a attiré mon intérêt. Vous êtes chanteuses, c’est bien cela ? Jouez-vous aussi d’un instrument de musique ? Avez-vous déjà une expérience comme chanteuse ?

- Oui en effet je cherche une maison de disque ici. C'est une longue histoire, mais oui j'ai déjà une expérience principalement en Europe, avec des tournées européennes en tant que première partie et nationales en tête d'affiche. Quant aux Etats-Unis c'est plus compliqué… Autrement oui je suis principalement chanteuse et je joue du piano, je suis autodidacte. J'ai essayé d'approcher d'autres instruments mais je n'avais pas vraiment le temps d'y accorder davantage de temps.

Je me sens un peu moins stressée, la disposition de cet entretien, le thé et le tout dans son ensemble rassurent progressivement. J'esquisse même un petit sourire après ma première gorgée. Le thé est vraiment bon, j'arrête le thé sachet. Si Timmy Evans m'accepte dans sa team, je veux le nom de son fournisseur de thé.

- J'adore votre thé monsieur Evans. Je n'ai jamais eu l'occasion d'en boire un avec, je dois l'avouer, du goût.

Parle Hilja, ça va aller mieux. Il doit le savoir que son thé est délicieux mais j'insiste sur le fait de le préciser. Je préfère toujours le bon chocolat chaud sur le canapé à côté du feu de cheminé avec la neige qui nous entourait à l'orphelinat, mais le goût est là Monsieur Evans, mes félicitations.

Je suis à présent assise en face d'un manager à boire du thé. Jamais je n'aurai imaginé une rencontre comme celle-ci. Elle est le juste milieu entre être formelle et informelle, j'apprécie beaucoup la façon dont monsieur Evans me fait passer cet entretien. Ca me rassure quand même, et avec la légère vapeur qui émane du thé, cela me donne l'impression d'un bouclier si jamais je deviens embarrassante, un peu stupide peut-être mais ça marche, c'est psychologique.

Timmy Evans souhaite en savoir plus sur mon parcours, mon expérience et ce que je sais faire. Ja raconte brièvement sans trop rentrer dans les détails ce que j'ai fait en Europe avant de venir ici aux Etats-Unis. Le fait que je sois autodidacte lui plait beaucoup et ça m'arrache un petit sourire tout en redonnant un peu de confiance.

-J’aime les gens qui sont autodidactes. Ce sont souvent des gens d’une grande rigueur.

- Merci beaucoup, je le suis un peu devenue par la force des choses. J'aimerai m'essayer à un autre instrument si le temps me le permet.

Il faut dire que se promener avec un piano pour improviser une petite séance acoustique n'est pas le plus pratique. J'y pense de plus en plus à essayer un instrument comme des percussions ou la guitare, c'est plus pratique et on a pas forcément besoin d'électricité. Nous verrons bien lorsque j'en saurai davantage sur mon futur.

Je complimente alors le thé de Monsieur Evans qui est de très loin le meilleur que j'ai bu! On sent le goût du thé, la menthe est délicate et pas omniprésente, un très bon équilibre des saveurs. Le manager britannique me propose de me donner la marque. On dirait qu'il lit dans mes pensées…

- Il s’agit d’un thé à la menthe qui vient tout droit d’Angleterre. Je pourrais vous donner la marque si vous le souhaitez.

- Ce serait avec plaisir! Ca me changera du chocolat chaud.

J'apprends alors que les américains sont très café. J'avais déjà remarqué ça à New-York mais je ne savais pas si c'était un phénomène national ou juste local. Le manager vient de me donner la réponse à cette question que j'avais.

- Ce n’est pas à Los Angeles que j’ai l’habitude de croiser des gens qui savent apprécier le thé. Les gens ici sont plus portés sur le café.

- J'en bois à l'occasion, durant les périodes de grande fatigue. Ma boisson chaude favorite reste le chocolat chaud, c'est ce que je buvais au Danemark.

Je continue de boire le thé à la menthe du manager anglais tout en écoutant monsieur Evans reprendre la conversation. Il souhaite en savoir davantage sur mon expérience américaine. Je bois un grande gorgée avant de lui répondre en tout honnêteté.

- Vous semblez avoir eu une carrière tout à fait respectable en Europe mais vous dites qu’aux Etats-Unis, c’est plus compliqué. Que voulez-vous dire par là ? Avez-vous tenté de percer aux Etats-Unis sans que cela fonctionne ? Si c’est le cas, que s’est-il passé ?

- C'est surtout un manque de chance je pense. Il s'agissait d'un partenariat entre ma maison de disque danois et une de New-York. C'était supposé être un album en duo avec un américain pour que chacun de nous puisse tenter de percer de l'autre côté de l'océan. L'idée était plutôt très bien. On a fait une démo ensemble basé sur une compo sur laquelle j'avais travaillé. Ca s'annonçait merveilleusement bien mais nos deux maisons de disques ont fait faillite, on en sait pas plus. Nous avons essayé de trouver une maison de disque mais apparemment ils avaient déjà trop de demandes. J'en ai alors parlé à mon manager danois et à Freiya la soeur d'Amon. Elle m'a conseillé L.A et je suis arrivée il y a quelques jours ici.

En espérant avoir plus de chance ici, pour le moment avec BSC ça n'a pas été concluant, bien au contraire… Alors s'il vous plaît monsieur Evans aidez-moi. Je ne sais pas si j'ai été bien convaincante alors je propose le tout pour le tout.

- Je peux vous proposer d'écouter les démos de la collaboration ou ce que j'ai fait avant. J'ai tout emmené avec moi, ça va jusqu'aux flyers, c'est vous dire.

J'ai alors un petit rire qui s'échappe de moi. C'est peut-être nerveux. Est-ce être désespérée ou organisée d'avoir tant avec moi? Je pense que Timmy Evans sera à même de me le faire comprendre.

La conversation allait bon train avec le manager britannique, bien qu'encore un peu stressée et nerveuse, ce qui est logique, je me sens de mieux en mieux avec le temps. On aborde un peu le fait que je sois autodidacte au piano et que j'aimerai apprendre un autre instrument, enfin plutôt continuer l'apprentissage des deux autres que j'ai commencé.

- Si vous faite de votre art votre métier vous aurez le temps d’apprendre un autre instrument.

- C'est le but en effet! J'avais commencé il y a quelques années de ça l'apprentissage de la guitare et des percussions mais je n'avais le temps de m'y consacrer davantage malheureusement. J'espère que ça changera. Improviser en pleine soirée avec un piano, ce n'est pas le plus pratique, je peux vous l'assurer.

Je suis là pour avoir ce contrat après tout, alors je me mets en avant du mieux que je peux. Pour le moment je ne maîtrise que piano et voix, mais j'ai bien l'intention d'étendre mes compétences le plus possible. Le piano m'a tout de suite attirée, et puis ça calmait plus rapidement les deux petits monstres que j'ai en guise de frère, que tout autre instrument.

Nous parlons ensuite, avec Mr Evans de thé et boissons chaudes en général. Etant britannique, je ne suis point surprise de son amour du thé, cliché quand tu nous tiens.

- Vous n’avez pas les mêmes goûts qu’Amon sur ce point. Il est loin d’être fan de thé et de chocolat chaud. Il préfère de loin de le café mais je pense qu’il s’est un peu trop américanisé avec le temps.

- C'est bien possible, cela fait plus d'une décennie qu'il est ici, peut-être que c'est un moyen de se séparer du Danemark aussi, je ne sais pas vraiment. Après le café, lors d'un gros moment de fatigue, ça boost bien.

Je souris au manager et il me demande ensuite d'en savoir plus sur mon aventure américaine et ses complications. Après avoir fini mon explication, je reprends une gorgée de thé à la menthe.

- Le business entraine parfois ce genre de désagréments. Cependant, le fait même que ce projet ait presque vu le jour me fait penser que vous n’êtes pas une amatrice.

- Il y a eu une vrai connexion avec mon binôme américain, c'était vraiment agréable de travailler avec. Ca fait partie des aléas de la vie, le tout est de savoir rebondir. J'ai déjà quelques CD à mon actif en Europe, cela a très certainement aidé.

Sur ce j'enchaîne en lui proposant s'il souhaite voir des et entendre un peu de ce que j'ai amené avec moi. J'ai même un petit rire nerveux, mais c'est un rire tout de même, je me rassure petit à petit. Il faut dire que je suis prête  et préparée. Je reprends un peu de thé avant de savoir si ça le tente ou non. Je suis un peu nerveuse mais je relâche la pression avec cette gorgée. Mr Evans accepte ma proposition et je saute et hurle de joie à l'intérieur mais je n'adresse qu'un sourire au manager.

- J’aimerais, en effet, pouvoir écouter une de vos démos et voir ces flyers. Je vous laisse choisir la chanson qui arrivera à me convaincre. J’ai tout ce qu’il faut ici pour que nous puissions l’entendre.

Je me mets alors à chercher dans mon sac, je n'ai pas le droit à l'erreur, une seule chanson pour le convaincre. Et il me pose une nouvelle question alors que je viens de trouver THE chanson.

- Vous vous voyez plutôt faire une carrière solo ou bien vous lancer avec un groupe ? Est-ce que vous êtes prête à repartir du point de départ et faire des premières parties ?

- Pour le moment j'ai fait davantage de solo que de duo ou groupe. Je ne suis pas contre être avec d'autres personnes si les styles sont compatibles ou se complètent. Un duo avec un groupe de métal ou de hardrock serait un pari risqué.

Je tends la cassette au manager. J'opte pour la dernière composition en date qui correspond davantage à ce vers quoi je souhaite me tourner pour le moment. C'est plus expérimental que mes débuts, qui étaient davantage indie rock.

- Il s'agit de la démo américaine. Je vous suggère la piste 2, c'est le duo, ça peut sûrement vous aider à imaginer une association de voix masculine et féminine ensemble.

Je continue de boire le thé et laisse le manager déposer la cassette dans le lecteur. Je sors en attendant les flyers et autres CDs que je dépose sur la table afin que le manager anglais puisse y jeter un oeil. Il appuie sur play et arrive à la piste 2. Mon coeur bat à cent à l'heure. Si ça ne plaît pas, si ça sors un peu trop de ce qui est commun à Los Angeles? Enfin après tout, tu ne vas pas changer pour une ville Hilja. L.A t'accepte comme tu es ou pas, voilà. La chanson se lance. Après tout, l'art c'est créer, s'exprimer, se dépasser aussi et essayer.


Il est de nouveau assis et là je dois avouer, je me laisse porter par notre chanson. C'est vraiment dommage de ne pas avoir été plus loin à New York, nous étions si proches… J'en oublie presque mon thé et en profite pour le finir.

Bien que toujours stressée, je me sens légèrement mieux à chaque fois que l'on aborde un nouveau sujet. On en vient aux boissons chaudes et j'apprends qu'Amon et moi-même avons des goûts différents. Il a eu le temps de s'américaniser et est devenu un coffee addict. Je viens d'arriver en quelques sortes sur le pays et j'ai encore les petites habitudes que j'ai depuis que je suis toute petite. Franchement rien ne bat un chocolat chaud, avec une couverture devant un feu de cheminée! Je précise que j'en bois en cas de grosse fatigue, ça aide bien, c'est rapide et efficace. Un bon boost! Mr Evans partage mon avis là-dessus.

- Il est vrai qu’il m’arrive d’en boire quand je suis très fatigué, spécialement en tournée.

- C'est fatiguant les tournées certes mais qu'est-ce que c'est génial! Différentes villes, différentes personnes et différentes cultures.

C'est d'autant plus flagrant en Europe mais je me doute bien que d'un état à un autre, d'une région à une autre ça change. Prenez New-York, les gens ne disent pas bonjour, vous bousculent et sont quelque peu impolis. Ici, même si les californien semblent plus superficiels physiquement et matérialistes, ils sont plus avenants. Serait-ce le soleil?

Il vient alors le temps de parler de ma brève expérience à New York. La façon dont je réagis, à vouloir rebondir, plait beaucoup au manager britannique. Est-ce que je marque des points? J'espère.  

- J’aime cette mentalité. Vous semblez ne pas abandonner malgré les obstacles et votre obstination me fait plaisir.

- C'est arrivé, aussi, par la force des choses. Je pense que c'est une mentalité nécessaire, surtout dans l'art.

Il est temps de passer aux chose sérieuse, je lui propose d'écouter quelque chose. Il est d'accord et je n'ai droit qu'à une seule chanson. C'est très difficile et en attendant que je trouve celle qu'il faut, on continue la conversation. Ma petite boule au ventre qui avait disparue est revenue. Il évoque une carrière solo avec des collaborations, ça peut m'intéresser. Quand il donne les noms, définitivement. The Burning Fire, j'adore et Lola, j'aime beaucoup sa voix et sa sonorité un peu plus pop.

- Si je venais à vous engager, nous lancerons votre carrière solo. Vous serez entourée de très bons musiciens de sessions de notre maison de disques. Mais c’est bon à savoir que vous ne semblez pas exclure une collaboration. J’ai, à ma charge, d’autres artistes, le groupe The Burning Fire et la chanteuse Peyton Davis. Nous verrons s’il possible de faire quelque chose avec eux en collaboration.

- Ce serait avec grand plaisir. J'aime beaucoup ce que font ces artistes, en toute honnêteté.

Je lui transmet la cassette avec la piste à écouter, c'est ma dernière démo en date. Je ne sais pas si ce sera adapter à Los Angeles. J'ai changé un peu de direction par rapport à mes débuts plus rock punk acoustique tout en étant indépendant.

Il se charge de tout le reste et je bois mon thé, le termine à vrai dire, essayant de cacher mon stress derrière ce goût de menthe. Il revient et ne regarde rien, je commence à vraiment stresser, mais je me dis qu'il veut s'imprégner de la musique, n'est-ce pas? Il ne bouge pas, je me demande même s'il n'est pas mort. Allô Mr Evans vous me recevez? il se lève et ça me surprend presque, il va éteindre le lecteur et revient s'asseoir. Mon thé est fini et je ne sais pas quoi faire, alors je le suis du regard. Il ouvre enfin la bouche pour parler, ça me soulage. Ce n'est pas un oui mais y'a des compliments et c'est déjà beaucoup pour moi.

- Ce son est très intéressant. Je n’ai encore jamais rien entendu de similaire auparavant. Je dois vous avouer que votre voix à quelque chose de très beau. J’aime beaucoup cette chanson où on peut ressentir vos origines nordiques.

- C'est une sonorité moins américaine c'est sûr. Merci pour ce retour, ça fait plaisir à entendre et c'est motivant aussi.

Je ne pensais pas que mes origines nordiques se ressentaient tant que ça, je suis assez fière quelque part. Miss Damgaard est fière oui! Après, ce n'est pas encore un oui ou un non, c'est son ressenti sur une chanson. Mr Evans reprend la conversation et j'ai maintenant la gorge serrée.

- Je ne peux prédire si le public américain sera convaincu. Cependant, je veux prendre le risque. Je vais donc vous proposer un contrat afin que vous puissiez enregistrer un album et vous produire.

- Ca commence à plaire à New York mais le public est différent ici. Je comprends entièrement et je dois vous avouer que ce risque me fait plaisir, merci beaucoup. J'espère que cela fonctionnera, on sera peut-être surpris. Le changement peut être bien pris parfois.

Cet homme est complètement fou et j'aime ça pour le coup. Mon contrat américain. Mes petits frères vont être contents et fiers de moi! A l'intérieur de moi c'est la folie. Je ne remercierai jamais assez Freiya, Amon et Mr Evans pour tout ça. Ca me donne encore plus envie de bosser et de créer. J'ai tellement hâte.

Ma persévérance et mon caractère de battante ont l'air de fortement plaire au manager anglais. Serais-je en train de marquer des points pour me faire embaucher et avoir un contrat? J'espère bien oui! J'hoche la tête en signe d'accord. Je l'aime beaucoup l'ami manager d'Amon, je pense que l'on recherche la même chose en matière de management. 

- Je pense comme vous, Mademoiselle Damgaard. Vivre de son art est une question de persévérance.

On évoque ensuite la carrière. Bien que de mon côté c'est principalement du solo, j'avoue n'avoir rien contre des collaborations. Quand j'entends qui il manage, ça me donne encore plus envie. Burning Fire et Lola sont différents mais on peut être complémentaires. Je sais gérer les caractères compliqués. J'ai élevé deux adolescents, c'est loin d'être une partie plaisir tous les jours.

- Si vous aimez leur travail alors vous aimerez travailler avec eux..

- Ca ne me donne que plus envie de les rencontrer. Ca peut donner un résultat intéressant je pense.

C'est l'heure de l'écoute et avec son long silence, qui dure le temps de la chanson et même un peu plus, le stress remonte en moi. Est-ce bon signe ou pas ? Ah les britannique et leur flegme! Mr Evans faites quelque chose, clignez au moins des yeux que je sache que je ne vous aie pas tué.

La pression s'en va lorsqu'il parle enfin, pour complimenter, ça, ça me fait très plaisir. Il veut prendre le risque de me signer et voir ce que cela va donner. Il ose et j'aime ça, prends ça Mr Reed! Il y a quand même des personnes évoluées à L.A qui ne s'arrêtent pas sur un physique ou un sexe.

- J’espère aussi que cela fonctionnera. Nous mettrons tout en œuvre pour que cela fonctionne.

- J'espère aussi, avec Bowie les risques ça marche, il faut y croire! Et merci encore de votre confiance Mr Evans, vraiment !

Je cite Bowie, car cet homme, cet artiste essaye plein de chose musicalement, physiquement, et ça fonctionne. J'essayerai de m'inspirer davantage de cet artiste. Je n'ai pas envie de le décevoir maintenant. Je vais tout donner, je serais assidue, bosseuse mais aussi fun. Je dois intégrer un peu de cette légèreté californienne en moi et dans mes créations. Je pense que cela fera un bon mélange, un peu sucré-salé, chaud-froid. J'ai vraiment hâte.

Maintenant, quand est-ce que je commence ? Je suis toute excitée !! Je n'ose pas trop prendre les devant, c'est quand même lui le boss entre nous deux.

- Si vous le souhaitez, je peux vous laisser mes disques et cassettes et les récupérer plus tard… Au moment de signer par exemple, sauf si ça se fait maintenant.

J'esquisse un sourire moins crispé que les précédents et sincère. Je ne sais pas si je dois revenir ou pas pour signer. Au Danemark, généralement tout se fait aussitôt mais ici je ne sais pas.

Finalement, ce meeting ce passait plutôt bien avec le manager anglais. Bien que ce que je propose ne soit pas le genre le plus populaire, surtout en Californie, il accepte de me signer et ça, je lui en serai à jamais reconnaissante de me laisser ma chance. Je vais sûrement pouvoir vivre mon American Dream moi aussi !! On parle un peu de ses autres artistes, The Burning Fire et Lola. Ca fait envie et ça envoie, Mr Evans sait gérer les grands noms de la musique actuelle. C'est rassurant aussi d'un côté, je ne vais pas être entre les mains de n'importe qui.

Je reste plutôt positive quant à mon avenir. Ce ne sera pas facile, mais si je pars perdante dès le début, ça le sera encore moins. En plus, je suis persuadée que cela plaira au moins à quelques personnes non? Quand on prend Bowie par exemple, les risques qu'il prend fonctionne bien, alors qui sait? En tout cas c'est ce que j'espère et je remercie mon manager pour sa confiance.

- Je vous en prie.

Il faut à présent gérer la partie administrative et tout ce qui est paperasse. J'ai horreur de ça mais c'est primordial et fastidieux aussi. Mon cher et nouveau manager s'en va chercher quelque chose et revient avec ce qu'il semble être un contrat. J'écoute ce qu'il a à me dire.

-Cela pourrait se faire maintenant. Voici un contrat classique. C’est ce genre de contrat que je propose à toutes les nouvelles recrues. Je vous conseille de le lire entièrement avant de le signer. C’est toujours ce que je dis à mes futurs protégés. Ainsi vous n’aurez pas de mauvaises surprises.

- Oui cela semble plus serein, et puis quand on prend le temps on comprend mieux.

J'ai déjà lu des papiers un peu trop vite, heureusement ce n'était rien de grave mais ça met une pression et un stress qui sont vraiment, pour le coup, très inutiles! Le fait de pouvoir prendre le temps me rassure une fois de plus. Je pense avoir trouvé le manager parfait pour moi ! En échange du contrat je lui laisse ma musique pour qu'il puisse, aussi, mieux comprendre qui je suis.

-Je veux bien garder un moment vos disques et cassettes. Je compte les écouter et je vous les rendrais quand vous reviendrez avec le contrat. Cela vous convient-il ?

- Super ! Nous ferons l'échange quand je reviendrai dans ce cas.

Je suis tellement heureuse d'avoir ce contrat dans les mains. J'ai vraiment hâte de commencer aussi!