Vern, le propriétaire de la place nous avait chassé comme des malpropres de sa salle de sport mais ça nous avais freinés en rien, juste légèrement retardés. Nous avions donc célébré la victoire de mon petit ami dans à peu près toutes les pièces de notre appartement et dans autant de position que nous avions d’imagination.  

De le voir sur le ring, foutre la raclée du siècle au journaliste people m’avais excitée dans tous les sens du terme. Il était magnifique à voir, tout en muscle et en sueur et j’avais ressentis une fierté énorme de le voir se battre et puis j’étais  comme énergisée par ce que j’avais fait à la fille du samedi soir . Je n’arrivais toujours pas à m’expliquer d’où m’étais venue cette impulsion mais je l’avais fait et ça rendait de toute évidence Ward fier de moi.

Après autant de gymnastique de haute voltige, c’est dans notre lit que nous avions terminé pour une ultime fois alors que le soleil commençait à se lever. J’étais allongée sur le ventre la tête tournée vers mon petit ami qui lui, était placé sur son flanc et je passais le bout de mon index sur ses nombreuses cicatrices. Si je passais un feutre de couleur sur chacune d’elles, mon petit ami ressemblerait à un sapin de Noël !

Chacune de ses cicatrices avait sa propre histoire. Certaines partageaient la même mais n’en demeuraient pas moins unique pour autant.  J’aimerais bien entendre tout ce qu’elles pourraient avoir à me raconter mais je devine facilement que Ward n’a pas envie, pas tout de suite en tous les cas, de lever le voile sur ce qu’il ne me dit pas encore.

Sa véritable histoire.

Qu’il deal ne fait pas obligatoirement de lui un pestiféré, pourtant, pendant son combat, à voir presque tous les gens miser et encourager  Sørensen… je ne sais pas, je me suis imaginé des histoires expliquant pourquoi Ward était le mal aimé de la place.  Est-ce si terrible que ça ? Je me souviens la tête que Sørensen à tiré quand il nous a vue entrer dans le vestiaire et pire, encore, celle qu’il avait quand il a comprit que ce ne serait pas Floyd, son adversaire.

Je me sentais capable de tout entendre, et certainement, tout accepter. Qu’est-ce qui pouvait être à ce point horrible, qu’il ne veuille pas me dire et qui fiche la trouille à tout le monde qui croise sa route ? Ça rapport avec son ex, cette A.J. qui l’a largué ?

- Je t’aime, bébé

Mon doigt glissait d’une cicatrice à l’autre, de son épaule jusqu’à ton torse.

- Et j’aime tout ce qui fait de toi, l’homme que tu es alors…

S’il le voulait, s’il avait assez confiance en moi, peut-être qu’il pourrait m’en dire un peu plus sur lui, sur son histoire.

- Parle-moi de toi, sans censure.

Je m’en mordis la lèvre inférieure. J’avais osé le lui demander sans avoir de certitude qu’il accepterait ou même que l’idée lui plairait, qu’il ne se refermerait pas sur lui-même ou qu’il mettrait un terme à notre moment de tendresse pour éviter de répondre.  Je ne sais pas comment je réagirais s’il devait  me repousser. Notre histoire est bien jeune encore pourtant, je l’aime comme si nous avions bâtit ensemble un empire amoureux.

- Tu pourrais me raconter ton histoire à travers tes cicatrices… disons… celle-ci…

Mon doigt tournait autour de celle qu’il avait un peu au dessus de son nombril, vers la droite. Elle ressemblait à un impact de balle mais était déformée, comme… étirée c’était étrange et elle avait forcément dû lui faire très mal.

@ Billy Lighter

On avait laissé derrière nous la salle de sport pour fêter dignement ma victoire contre Amon. C’est d’abord dans la cuisine, puis dans le salon avant de finir par la chambre qu’on avait fait l’amour dans toutes les positions possible et ce malgré la douleur que je ressentais à cause des coups laissés par Amon. J’avais monté à Sky, toute la nuit, à quel point j’étais fier d’elle et je l’aimais.

Le soleil pointait déjà le bout de son nez alors qu’on récupérait encore de notre dernière fois. Je regardais les traits de Sky qui était tellement belle allongée, comme ça, sur le ventre. Un visage si doux qui contenait à l’intérieur, je l’avais vu à la salle de sport, une certaine rage. Une rage que j’aimais autant que j’aimais la douceur apaisante qu’elle dégageait.

J’étais tourné vers elle, allongé sur le flanc à la regarder alors qu’elle, elle passait ses doigts sur les cicatrices qui maculaient mon torse. Elle n’avait encore jamais de questions sur celles-ci… Mais je voyais, dans son regard, qu’elle avait envie de savoir. Et j’étais préparé à toutes les questions qu’elle pourrait me poser.

Je frissonnai un peu aux passages des doigts de Sky avant qu’elle ne me dise qu’elle m’aimait. Ça m’arracha un petit sourire. Ce n’était pas la première fois que j’entendais ça cette nuit.

-Je t’aime aussi, bébé.

Mais elle continua disant qu’elle aimait tout ce qui me composait. Elle aimait Ward le dealer. Elle aimait Ward le boxeur. Mais je savais qu’elle n’aimerait pas Ward le tueur. Même s’il faisait largement partie de moi.

Et elle voulait savoir. Elle voulait que je parle de moi sans censure. Elle s’en mordit même la lèvre pensant, sûrement, qu’elle était allé trop loin.

Je voulais bien lui parler… Mais j’allais devoir censurer. Sky n’était pas encore prête pour la vérité crue. Parce que mon but était de la gardée pour moi. Pour ça, il ne fallait pas l’effrayer.

Je la regardais avec le même regard que je faisais quand je penchais la tête sur le côté alors que son doigts descendis jusqu’à ma plus récente cicatrice. Celle fait par l’une des balles qu’avait tirées Reed. Je frissonnai alors que son doigt tournait autour. Elle voulait que je raconte qui j’étais à travers mes cicatrices… Elle n’avait pas tort… C’était certainement la meilleure façon de raconter ma vie.

Je regardais Sky droit dans les yeux.

-Je veux bien te parler de moi. Mais il y a des choses que tu ne vas sûrement pas aimer…

Je disais ça en caressant son bras soutenant toujours son regard avant qu’il ne descende brièvement sur ma cicatrice avant de remonter sur Sky.

-Cette cicatrice est récente…

Je montrai les deux autres cicatrices presque similaires non loin de celle-là de mon doigt.

-Ces deux-là, c’est ses sœurs.

Je regardais toujours Sky lui parlant doucement.

-J’ai pris trois balles…

Parce que j’ai enlevé Olivia Cortez.

-Dans un règlement de comptes…

Ce n’était pas faux. Reed était venu chercher sa fille. C’était un règlement de comptes.

-Je suis dealer. Ça signifie que je fais partie d’un gang. Mon gang a des ennemis. Ce qui entraine des règlements de comptes. J’ai, donc, pris trois balles pour des histoires de gangs. Un de mes alliés a retiré les balles avec un couteau d’où la forme bizarre.

Je regardais toujours Sky caressant son flanc, maintenant.

-J’ai eu mal. Très mal. J’ai failli mourir d’une infection. Tout ça parce que je ne peux pas mettre un pied à l’hôpital par risque de me faire mettre en prison. C’est mon ex qui m’a entièrement remis sur pieds. C’était un peu avant qu’elle ne me largue.

Avant que je ne la tue.

-Beaucoup de mes cicatrices sont le résultat de règlements de comptes. Mais il n’y en a pas beaucoup qui ont failli me faire crever.

Je montrai du doigt une cicatrice sur mon torse non loin de mon cœur. Une trace de balle bien nette, cette fois.

-Celle-ci, c’est ce qui arrive quand on change de gang.

Je fixai Sky qui ne devait certainement pas bien comprendre ce que je disais tellement je restais vague. Alors, je me fis plus concret :

-Quand j’ai eu 14 ans, j’ai rejoint les Los Diablos. Je n’ai pas vraiment eu le choix. Ma mère sortait avec le chef des Los Diablos. Je suis devenu dealer à ce moment-là… C’était un choix de carrière forcé.

Je marquai une pause avant de reprendre.

-Mais mon beau-père a fini par se faire assassiné quand j’avais 17 ans. Ma mère s’est suicidée le jour suivant. Elle était dépressive… Si j’avais un bon salaire en tant que dealer sous les ordres de mon beau-père, ça ne fut plus le cas avec le nouveau chef. Mais j’ai quand même mordu sur ma chique parce que je ne me voyais pas vraiment faire autre chose… J’étais doué comme dealer. Mais le manque de reconnaissance des Los Diablos à mon égard m’a fait partir en vrille. J’ai, donc, commencé à donner des informations sur les Los Diablos à la concurrence qui était, à l’époque, la Casa Nuova. Les Los Diablos l’ont appris… Le chef des Los Diablos m’a envoyé son exécuteur. Ce dernier m’a tiré dessus. Je m’en suis sorti grâce à la Casa Nuova. Du coup, j’ai rejoint la Casa Nuova… J’imagine que tu sais ce qu’ils sont devenus… Par chance, je n’étais qu’un soldat et je n’étais là lors du massacre.

Mais mon histoire n’était pas terminée.

-Après, je me suis retrouvé sans job… Mais j’étais un bon dealer… Et il me fallait un gang pour ne pas me faire avoir par les Los Diablos. Alors, j’ai rejoint les New Soldados. Ils étaient désordonnés… La plupart des membres n’étaient que des gamins. Ils n’avaient pas de véritables chefs…

Je fixai toujours Sky ne lâchant pas une seule seconde son regard.

-Alors, je suis devenu leur chef. Je suis le chef des New Soldados.

Je gardai toujours le même regard.

-Tu as toujours envie que je continue ? Tu veux toujours en savoir plus ?

Parce que ce n’était pas le pire de mon histoire.

@ Billy Lighter

Le corps de Ward, je le connaissais maintenant par cœur, cela dit, je ne savais rien des histoires cachées derrières chacune de ses cicatrices.  S’il me demandait comment j’avais eu ma cicatrice à la cheville, je pourrais lui expliquer que c’est une superbe glissade après un frappé en plein champ centre. J’ai couru à toute vitesse, aussi vite que mes jambes de 12 ans me le permettaient et j’ai dû glisser au marbre juste à temps ! Il y avait un morceau de verre sur le terrain de fortune où nous jouions, nous, les gamins de l’orphelinat et ça m’a valu trois points de sutures !

Je voulais connaître ses histoires, parce qu’elles étaient sans aucun doute nombreuses, tout comme ses cicatrices, et intéressantes. En tous les cas, pour moi, elles le seraient puisque tout ce qui venait de mon petit ami, tout ce qui faisait de lui l’homme qu’il est aujourd’hui m’intéresse.
L e beau, comme le très laid.

Je me risquais donc à le lui demander, en commençant par la cicatrice la plus visible et disgracieuse. Timidement, presque comme si j’avais peur de lui faire mal, je laissais traîner mon doigt tout autour et il commença à me raconter non sans planter son regard dans le miens et en m’avertissant que je n’allais peut-être pas aimer ce que j’allais entendre.

- Je suis prête à ça, bébé.

Je me retournais en la même position que lui, une main coincée entre ma tête et l’oreiller et je l’écoutais attentivement m’expliquer comment il avait eu cette cicatrices, ces en fait puisqu’elles étaient trois pour la même histoire. Il s’était fait tirer dessus dans un règlement de compte.

Je frissonnais légèrement, pas de peur, enfin, si un peu. S’il était mort, je ne l’aurais jamais rencontré ! C’était ce qui me rendait émotive dans son récit. Tout le reste de son histoire était aussi sombre et, il avait raison, je n’aimais pas ça. Je n’aimais pas les risques qui auraient pu lui être fatale.

Il continuait de me raconter son parcours, comment de petit dealer, il avait passé les échelons, dégringolant parfois l’échelle du gangstérisme, si je peux le dire ainsi, pour finir par prendre le contrôle du nouveau gang qui défrayait la manchette de temps en temps, comme les Los Diablos l’avait faire dans leur années ’’glorieuses’’ .

- Si tu es le chef et tu deal ?

Je ne m’y connais pas dans le domaine mais je crois pouvoir comparer ça aux grandes entreprises. Les banques par exemple. Le directeur tire les ficelles depuis sont bureau, il n’est pas en contact avec les gens. Ce sont les gérants de services et les caissiers qui font tourner la baraque.

- Pardon, je ne voulais pas t’interrompre mon amour. Oui, continue je veux tout savoir.

Quelque chose me disais qu’il s’en tenait aux grandes lignes. Pour devenir le chef d’un gang, il fallait certes être plus malin mais il fallait aussi faire ses preuves.  Ça fonctionnait comment, les promotions là dedans ? Et ceux qui ne faisaient plus l’affaire… ?  Mon imagination  tournait à plein régime.

Je me glissais sur le matelas pour me blottir contre lui et l’embrasser.  Je voulais qu’il ressente que tout ce qu’il pouvait me raconter ne me ferait pas fuir même si certaines choses n’étaient pas facile à entendre.

@ Billy Lighter

Sky m’avait clairement demandé que je lui raconte mon histoire et ça, au travers de mes diverses cicatrices. Je l’avais mis en garde déclarant qu’elle n’allait peut-être pas aimer ce qu’elle allait entendre.

Mais elle était prête. C’est ce qu’elle disait.

Alors, je commençai mon histoire en partant de mes trois cicatrices pour lui expliquer, ensuite, mon histoire. Celle des gangs. Celle des Los Diablos, de la Casa Nuova et des New Soldados. C’était ce que je faisais pour gagner ma vie. C’était un métier que j’aimais malgré que je laissais sous-entendre que ce n’était pas un métier que j’avais choisi ce qui n’était pas totalement faux. Ricardo m’avait donné une opportunité et je l’avais prise. C’est tout.

Sky m’écoutait et je la sentais, de temps en temps, frissonner sous mes doigts ne sachant pas vraiment si c’était à cause de mon histoire ou de mes caresses. Quoi qu’il en soit, elle ne s’offusquait pas. Elle me regardait simplement alors que je la questionnais pour savoir si elle voulait en savoir plus maintenant qu’elle savait mon CV.

Mais Sky était perspicace… Si bien qu’elle vit directement une incohérence dans mon discours. Oui, un chef de gang qui deal… C’est vrai que ce n’est pas courant. C’est parce que je n’étais pas un dealer… Enfin, plutôt, je n’étais pas qu’un dealer.

Je souris passant ma main sur sa joue alors qu’elle s’excusait de m’avoir coupé. Elle voulait en savoir plus. Parce que, jusqu’ici, elle ne semblait pas m’aimer moins à cause de tout ça.

-Tu es perspicaces, bébé. Il m’arrive de dealer parfois… Mais c’est vrai que c’est assez rare depuis que je suis chef de gang. La plupart du temps, j’envoie des gens dealer pour moi, j’en envoie d’autres chercher la marchandise et j’en envoie d’autres intimider les ennemis qui deal sur notre territoire. C’est ça que je fais, la plupart du temps.

Ça n’en était pas moins dangereux mais, ça, je n’allais pas faire l’insulte à Sky de le préciser. Elle le savait.

-Pour vivre dans ce milieu Sky, il ne faut pas être gentil. Dans le milieu, je ne le suis pas. C’est comme ça que j’ai grimpé les échelons. En n’étant pas gentil.

Je montrai du doigt quelques autres cicatrices.

-Ces cicatrices là, ce sont le résultat de ces combats de rues… Mais toutes ne viennent pas de ça…

Je me tournai un peu montrant à Sky une cicatrice que j’avais dans le dos. Une ligne encore assez marquée entre mes deux omoplates.

-Ça par contre…

Je me retournai vers Sky après lui avoir montré.

-Ça, c’est une des cicatrices faite par mon père… Il était violent. Il frappait sur ma mère, sur moi, sur mon petit frère. Il nous frappait pour rien.

Je regardais toujours Sky droit dans les yeux.

-Il a fait ça jusqu’à mes 7 ans. Quand j’ai eu 7 ans, la police a fini par l’arrêter. Pas parce qu’il nous battait. Mais parce que mon père n’est rien d’autre qu’un serial killer. Il est en prison. Il purge une peine de prison à vie pour de multiples meurtres.

Je regardais toujours Sky droit dans les yeux. Je voulais voir comment elle réagissait. Je voulais savoir ce qu’elle en pensait.

@ Billy Lighter

Le corps de Ward est couvert de cicatrices dans tous les genres.  Certains ressemblent à des trous, comme des impacts de balles, d’autres sont déformées, on dirait presque des étoiles, et, encore, certains sont comme des lignes, elles me font penser à de profondes égratignures ou… des coups de couteau.  

Je ne suis pas tombée amoureuse d’un enfant de chœur, il n’a pas besoin de lever le voile sur tous les détails de sa vie pour me le faire comprendre mais, je crois que je suis prête pour en apprendre quand même un tout petit peu plus sur qui il est. C’est donc attentivement que je l’écoute alors qu’il m’explique pour les cicatrices sur son abdomen qui semblent les plus récentes.  Je me rends compte surtout que j’ai passé prêt de ne jamais le connaître et ça, ça me fait frissonner.

Dans son récit,  je suis un peu surprise et je ne peux m’empêcher de l’interrompre pour lui demander pourquoi il deal s’il est le chef de son propre gang. Il esquissa un sourire tout en caressant ma joue puis me complimenta avant d’expliquer plus clairement sa position. C’est lui qui tirait les ficelles, normal, quand on est le chef !

Possible que je sois lente à donner le change mais  je compris, du moins je pensais comprendre, lire entre les lignes quand il ajouta que pour survivre dans ce milieu, il ne fallait pas être gentil et que s’il avait grimpé les échelons, c’était parce qu’il n’avait pas été gentil.   J’avais un peu peur de le dire à haute voix. Il avait pris la place du mec au dessus de lui dans la hiérarchie en faisant disparaître  son rival.  Je n’étais pas certaine que je tenais plus que ça de savoir comment il s’y était pris. Oh ! Ça ne changerait rien à mes sentiments pour lui, rien ne pourrait changer cela !

- Je comprends. La rue ne fait pas de cadeau…

À personne !

Jamais !

Puis, Ward se retourna et me fit voir des cicatrices dans son dos. Des souvenirs de son père qui le battait, lui et sa famille. Ca me rendit tout triste  de l’entendre me parler de son passé, et un peu coupable aussi, c’était moi qui le lui avait demandé.  Alors quand il se retourna pour me regarder dans les eux, je l’embrassais.

- Mais toi, tu n’es pas ton père. Tu ne tues pas des gens pour le plaisir.  C’est pour ton travail. Heu… je veux dire… j’ai cru quand tu as dit, tu sais pour les échelons… je me doute que ce n’est pas comme une promotion dans une tour de  bureau.

Je me redressais sur un coude et je passais ma main dans ses cheveux.

- Tu attends quoi de moi, bébé ?  Parce que moi, j’y suis à fond, je t’aime, tu comprends ?  

Je l’aimais probablement plus que de raison mais je n’en avais rien à foutre !  Et puis ce qu’il fait n’a rien à voir avec ce que nous faisons, ensemble.

- Les types qui sont venus ici l’autre nuit, qu’est-ce que tu as fais d’eux ?  

S’il est leur chef, il n’a pas pu laisser ça aller, autrement, quelle image cela allait donner aux autres sous ses ordres ?  C’était impossible, en mon sens, qu’il n’ait pas fait tuer par quelqu’un d’autre ou même… lui-même ces individus.

- Avant que tu me réponde, bébé, t’es l’homme avec qui je veux faire ma vie, et ça, y’a rien qui va changer ça !

@ Billy Lighter

Oui. La rue ne faisait aucun cadeau. La rue était remplie de prédateurs dont je faisais partie. Sky comprenait ça mais son envie de savoir n’allait pas jusqu’à demander concrètement ce que je voyais pas « pas gentil ». Peut-être parce qu’elle savait exactement de quoi je parlais et qu’elle n’avait peut-être pas envie dans avoir la confirmation.

Pas tout de suite, en tout cas.

Mais je n’en avais pas fini. Sky voulait que je poursuivre alors je levai le voile sur un autre chapitre sombre de ma vie. Celui de mon enfance où mon père s’amusait à frapper tous ceux qui résidaient sous son toit. Je regardai Sky avouant que mon père n’était rien autre qu’un serial killer. J’attendais sa réaction. J’attendais de voir, dans son regard, ce qu’elle en pensait. Mais tout ce que je vis, c’était une infinie tristesse.

Puis, elle m’embrassa. Je fermai les yeux pour savourer son baiser avant qu’elle ne le brise pour me dire que je n’étais pas mon père. Elle avait raison… Et elle avait tort aussi…

Elle avait tort quand elle disait que moi, je ne tues pas pour le plaisir, le reste de son discours laissant entendre qu’elle savait que je tuais pour mon travail. Si. J’aime tuer. J’y prends un plaisir indescriptible que Sky ne pourra sûrement pas comprendre. Mon père adorait ça aussi.

Mais ma ressemblance avec lui s’arrêtait là. Lui, il aimait tellement tué qu’il avait tout ritualisé. Il avait un type de victime : des femmes célibataires âgées de 20 à 30 ans. Il s’amusait à les séduire. S’amusait un peu avec… Puis, il les tuait chaque fois de la même façon : en les poignardant 18 fois. C’était son modus operandi. Mais, parfois, sa dérapait. Elles découvraient le pot au rose bien avant et il était obligé de les tuer à la hâte. J’avais été témoin de ça. C’est certainement pour ça qu’il s’est fait chopé. Parce qu’il n’était pas assez malin.

Moi, tuer n’était pas mon passe-temps comme mon père. Non. J’avais fait en sorte que tuer soit très bien accepté dans le métier que je faisais. Je pouvais tuer avec une raison tout en aimant ça et j’avais tout un gang pour masquer mes méfaits. J’étais plus malin.

Mon père n’était rien d’autre qu’un sociopathe raté qui méritait sa place en prison… J’étais autre chose.

Bref, Sky avait raison. Je n’étais pas comme lui. Et Sky était toujours aussi perspicace. Elle se doutait qu’on ne devenait pas chef de gang en faisant des grands sourires. Elle savait que je tuais pour ça. Elle venait de le dire.

-C’est vrai. Je ne suis pas comme lui.

Je passai une main dans ses cheveux.

-Et oui… On ne devient pas chef de gang comme ça. Tu as bien deviné.

Mais je n’avouais pas encore noir sur blanc avoir tué des gens même si mon discours, en soi, pouvait être un aveu. J’attendais, qu’avant même que je ne le dise, Sky accepte cette idée. Ce qu’elle était, apparemment, en train de faire.

Sky demandait ce que j’attendais d’elle. Parce qu’elle m’aimait. Elle voulait être parfaite pour moi. Je souris et caressai sa joue.

-Oui. Je sais. Et je n’attends que ça. Que tu m’aimes. C’est tout. Qu’on vive ensemble comme on le fait maintenant.

Je ne lui demandais rien de plus. C’était ça que j’avais voulu de Samantha. Mais elle ne me l’avait jamais donné. Mais Sky, elle, me le donnait mieux que personne.

Puis, elle parla des deux types qui étaient venus ici. Elle voulait savoir ce que j’avais fait d’eux. Elle me prévint, d’avance, que, peu importait ma réponse, rien n’allait changer à l’amour qu’elle me portait.

Bébé… J’ai tué ces deux types. Le soir de notre première virée à la salle de sport, je suis allé voir les deux types que mes hommes avaient enfermés dans une partie de notre planque. Je leur ai mis une balle m’arrangeant pour que celle-ci ne leur soit pas fatale directement. Puis, je les ai regardés agoniser. Felipe est mort après une heure devant son frère. Tu aurais dû voir Emilio chialer comme un môme avant que ça soit lui qui ne rende l’âme sous mon sourire glaciale une autre heure plus tard.

Voilà ce que j’ai fait, bébé. Et je l’ai fait pour toi.

Mais je me retins de dire ça de cette manière. Non. Mais ce n’est pas pour ça que j’allais cacher la vérité à Sky.

-Je les ais tués… Tous les deux. Je ne pouvais pas faire autrement. Ils t’avaient fait du mal, Sky. Ils avaient rendu ça personnel. Des membres de mon gang les ont chopés et je les ai tués le soir où on est allé s’entrainer à la salle de sport. C’est une mise en garde pour les autres aussi… Ceux qui oseront s’attaquer à toi n’auront qu’à bien se tenir.

Je caressai toujours sa joue.

-Parce que je ne veux pas qu’on te fasse du mal, bébé.

Celui qui lui en fera pourra compter ses derniers jours sur Terre.

-Tu sais maintenant qui je suis… Tu sais maintenant à quoi t’en tenir.

En partie.

-Mais toi, bébé… Je ne sais pas tout non plus, n’est-ce pas ?

Parce que tout le monde a des secrets.

@ Billy Lighter

Je mentirais si je disais que ça ne me faisais pas un pli d’apprendre que mon petit ami a quelques meurtres à son actif. Combien ? Je préférais ne pas savoir, peu, j’espérais mais dans son métier pour autant qu’on puisse appeler ça un métier car il ne devait pas faire ses impôts comme tout le monde, je me doutais qu’il devait avoir tuer pas mal de monde, surtout pour arriver à devenir le chef de son propre gang.

Il n’y avait rien de joyeux dans son récit qui donnait froid dans le dos mais le fait est que mes sentiments pour lui étaient déjà à ce point fort que je pouvais, peut-être ne pas comprendre, mais le tolérer, par amour.  Je ne voulais pas le perdre et je me disais que d’aller au fond des choses, de comprendre son histoire, savoir par où il avait dû passer pour se rendre là me ferait voir les choses différemment.

Ward me parla de son enfance, de son père, tueur en série, et des horreurs qu’il avait dû supporter.  Grandir dans une telle atmosphère avait de quoi  faire dévier n’importe qui sur des chemins obscurs.  

Il n’avait pas eu un bon modèle.

Ce n’était pas de sa faute et il n’était donc pas comme son père.  Et c’est ce que je lui dit en parlant des meurtres, puis je freinais, me rendant compte que j’extrapolais peut-être trop ou trop vite. Mai sil me le confirma en disant que j’avais bien deviné.

C’était un peu comme si, soudainement, nous tombions, lui et moi en chute libre. Je ne savais pas quand nous risquions de heurter le sol mais je savais que l’atterrissage allait être brutal. Je me risquais donc à lui demander ce qu’il attendait de moi, parce qu’il n’était pas question que je m’y mette, moi aussi !  J’avais eu un accès de colère, plutôt en frappant cette fille du samedi soir mais c’était quelque chose que je ne m’expliquais pas et que je ne m’attendais pas à reproduire de si tôt.

- D’accord mais, est-ce qu’on veut réellement la même chose, bébé ?

C’était moins certains.

Parce que je rêvais, comme probablement bien des filles de mon âge, de me marier, de fonder une famille, la belle maison en banlieue avec la clôture blanche, le garage et le colley qui aboie quand le facteur place le courrier dans la boîte aux lettres.  
Est-ce possible de rêver de ça, avec Ward ?

Totalement ! Il n’y aurait pas meilleure couverture qu’une vie d’homme rangé, père de famille qui plus est, pour éloigner les soupçons.

- Je veux me marier avec toi et avoir des enfants. Tu es merveilleux avec moi, tu es doux et attentionné et c’est exactement comment tu dois être avec des enfants. Les nôtres.

Je le regardais, avec l’espoir d’une femme amoureuse dans le regard.  Je nous voyais, dans l’avenir et nous y étions heureux !  

C’était possible, tout était possible !

Il saurait nous protéger, comme il l’avait fait le soir où les deux types étaient entrés chez nous et m’avaient menacés.  D’ailleurs, maintenant qu’il n’y avait plus de secret entre nous,  je voulais savoir ce qu’il était advenu de ces hommes.  Sa réponse fut direct et sans détour et, bien qu’elle me fit frissonner à nouveau,  je préférais et de loin, la vérité.

- Rien ne peux m’arriver, parce que tu es là. Je sais que je suis en sécurité avec toi.
Je savais maintenant qui il était et je lui devais la réciproque, seulement, après tout ça, ma vie n’était rien de plus qu’un long fleuve tranquille.

- Et bien, je n’ai jamais connu mes parents, ça tu le sais. Mais, de ce que je sais, ma mère était une pute de l’Eastside et probablement que mon père était un client.

Je me réinstallais dans notre lit pour m’assoir, un oreiller coincé entre mon dos et la tête de lit et, la couverture remonter pour me couvrir, non pas par pudeur, mais parce que j’avais un peu froid.

- Elle m’a mit au monde et elle est morte l’instant suivant. Sœur Ana dit que j’ai été trouvé au milieu des ordures et ma mère, gisant sur le sol, une aiguille plantée dans son bras.  Elle devait être connue dans le quartier parce que, toujours selon Sœur Ana, mon nom de famille est celui de ma mère.  Et donc voilà, j’ai grandis avec les autres gamins abandonnés et  c’était correct, nous avions quand même une belle enfance pour des enfants rejetés. Parfois, les religieuses organisaient une journée où les gens pouvaient venir nous voir. Ceux qui voulaient des enfants mais qui ne savaient pas en avoir. Ils se magasinaient un rejetons.  Et moi, et bien on me choisissait souvent mais pour une raison que j’ignore, les familles d’accueilles finissaient toujours par me retourner à l’orphelinat.

En fait, souvent c’était parce qu’ils me trouvaient pas assez dégourdies, ou qu’ils se rendaient compte qu’ils préféraient avoir un bébé et faire croire que c’était le leur, biologiquement parlant, je veux dire. Mon regard plongé dans le vide, je continuais mon histoire.

- J’ai fini par avoir la majorité et un diplôme de lycée en poche et j’ai plié bagage pour me retrouver à la rue.  J’ai rencontré un type, on s’est mit en couple, ça n’a pas duré. Il ne me trouvait pas assez bien comme fille, trop coincée en fait. Mais je ne connaissais rien à ça, ce n’est pas de ça que te parle les sœurs, tu sais !

Et de toute manière, je n’aurais vraiment pas voulu parler de sexualité avec une religieuse qui croit encore que tout à commencé par une pomme ! J’ai eu droit a une semaine de pénitence quand j’ai demandé, si pour peupler la terre, il avait fallu qu’au départ, les fils d’Adam et Ève avaient dû coucher avec leur mère. Bah quoi ? Elles venaient de où alors, leur fiancées ?  Bref, là n’est pas la question…

- D’un petit ami à l’autre, c’était toujours la même histoire.  Je voulais bien faire, ce n’était jamais assez. Ils me trompaient mais, parce que je me disais que c’était ma faute, je tolérais, sans rien dire et s’installait le même cercle vicieux de la violence jusqu’à ce qu’un jour je frappe aussi, pour me défendre.

Je tournais le regard sur Ward et levais mes mains vers le plafond en signe d’abandon.

- À force de toujours se faire rejetée, on finit par développer une peur viscérale.  On se convainc qu’on est bonne à rien et qu’on a que ce que l’on mérite.  Mais avec toi, non ce n’est pas ça c’est différent. Toi, tu es l’homme avec qui je veux bâtir ma vie. Je veux te cuisiner des pancakes le dimanche matin même si je cuisine horriblement mal. Et je veux voir notre amour grandir dans mon ventre et te rendre fier et heureux.

Même avant Ward, avant notre histoire, malgré les trous du cul avec qui je me retrouvais, avoir des enfants était pour moi plus que rêve, C’était une nécessité que je comblais temporairement avec les gamins des autres mais jamais l’un d’eux ne m’appelleraient maman et ça, ça devenait de plus en plus difficile à accepter.

@ Billy Lighter

J’enchainai les révélations gardant pour moi certains détails que Sky n’était pas encore prête à entendre. Parce que je voyais bien, sur son visage, qu’entendre ce que je venais de dire était déjà compliqué pour elle. Mais ça ne l’avait pas fait fuir. C’était déjà ça. Je devais me focaliser là-dessus même si elle semblait un rien perdue au point de me demander ce que j’attendais d’elle. Par rapport à mon job, je n’attendais rien d’elle. Au contraire. J’aimais quand les choses étaient bien séparées. C’était un bon moyen de la protéger, en plus, de tout séparer. Tout ce que je voulais c’était qu’on continue les choses comme on les avait commencées.

Elle approuva mais demanda quand même si on voulait réellement la même chose.

-Je ne sais pas…

Parce que je ne savais pas ce qu’elle, elle voulait. Mais j’espérais qu’on voulait la même chose. Un espoir que Sky massacra en me disant qu’elle, elle voulait qu’on se marie et qu’on aille des enfants. Elle voulait une vie normale. Pourquoi ? Parce qu’elle me trouvait parfait et elle était intimement convaincue que je serais parfait avec nos hypothétiques gosses. Le mariage… Les enfants… C’était toutes des choses qui ne m’avaient jamais intéressé. Toutes des choses qui étaient incompatibles avec la vie que je menais. Incompatibles avec l’homme que j’étais. Au point que je n’arrivais même pas à l’imaginer même en me forçant. Moi, quand je vois notre avenir, je le vois nous deux comme maintenant sans aucun autre changement.

Pas elle.

Elle, elle voyait certainement une belle maison. Mon nom accroché au sien. Sky Fleming. Je déteste ce nom « Fleming ». Il ne signifie rien pour moi. Rien. C’est le nom de mon père, ce raté de service. Nos gosses auraient le même nom. Des gosses que je n’arrivais pas à me croire capable d’aimer. Comme si l’amour que je vouais à Sky était totalement exclusif.

Et mes dans les faits, je n’y voyais que des impasses. Mariage, ça signifiait aller s’enregistré au moins à la commune en tant que marié. C’était laissé des traces à la police qui, peut-être, était à mes trousses. Pareil pour les enfants. Eux aussi, il faudra les enregistrer. Tout ça, c’était laisser des cailloux derrière moi.

Je passai mes doigts doucement dans les cheveux de Sky. Je ne voulais pas la rendre malheureuse parce que je ne voulais pas qu’elle se tire. Et je ne voulais pas briser l’espoir que je voyais dans son regard. Alors, je lui souris.

-Des enfants. C’est au pluriel, maintenant ?

Mais on en revint vite à des choses plus sombres. Du moins, pour Sky. Parce que les choses sombres pour le commun des mortels étaient mon péché mignon. Je ne lui cachai, donc, pas avoir tué les deux frères même si je n’étais pas entré dans les détails. Et je la sentis frissonner à nouveau. Même si, ses discours dénotait avec son frisson alors qu’elle disait que rien ne pourrait lui arrivé avec moi à ses côtés. Je caressai sa joue.

-Oui. Tu l’es.

Même si ma simple position de chef de gangs et les dernières menaces que m’avait envoyées Jimmy Reed la mettaient en danger. Si les Los Diablos apprenaient que j’avais une petite-amie, ils la prendront pour cible. Pourquoi ? Parce que j’avais pris un malin plaisir à ciblé autant la femme de Reed que sa fille chérie.

Il prendra Sky pour ma faiblesse. C’était certain. Pour ça que j’avais tant voulu l’entrainer rapidement. Pour qu’elle ait une longueur d’avance et qu’elle puisse surprendre les Los Diablos. Même si, au fond, je savais que Sky était totalement incapable de tuer.

Je le sentais. Et ça risquait de lui porter préjudice.

Mais avant que je ne m’enfonce encore plus dans ce genre de réflexion, je voulais, moi aussi, connaitre tout de Sky. Je savais déjà qu’elle avait grandi dans un orphelinat. Mais je savais que je ne savais pas tout.

Et elle me raconta. Sky était la fille d’une prostituée junkie et d’un client de cette dernière. Classique. Presque trop classique pour une fille qui n’avait rien de classique.

Sky se redressa et je fis de même me mettant dans la même position qu’elle sauf que j’étais un rien tourné vers Sky. Et je l’écoutai me dire que sa mère était morte peu après sa naissance de ce qui semblait être une overdose.

Classique encore une fois… Combien de gamins des orphelinats étaient le fruit de prostituées ? Beaucoup plus qu’on ne l’imagine, je suppose.

Donc Sky avait grandi au milieu d’autres gamins soit abandonné, soit orphelins. Elle ne trouvait pas que son enfance était malheureuse… Ni même heureuse, en fait.

Et quand elle continua son histoire je compris une chose : Sky n’avait pas été abandonné une fois… Mais bien plus de fois que ça. Par des familles qui prenaient un enfant pour le rendre ensuite parce qu’il ne leur convenait pas. Comme on pouvait le faire avec un chien ou un chat.

Quant à sa vie après l’orphelinat… Et bien c’était à peu près la même chose. Sauf que c’était les mecs qui la rejetait.

Je n’interrompais pas Sky la laissant s’auto-analyser. Avant de me dire qu’avec moi, tout était différent. Je n’étais pas comme les autres types qu’elle avait fréquentés.

Ça, je le savais. Personne n’était comme moi.

Et elle réitéra son envie de vie normale avec les petits déjeuners et les gamins. Encore et toujours les gamins.

Je regardai Sky penchant légèrement la tête sur le côté.

-Toutes ces familles… Tous ces mecs qui t’ont rejeté… Ils ne voyaient pas ce que, moi, je vois de toi. Ils étaient stupides et aveugles. Tout comme toutes ses nonnes qui t’ont entouré étaient stupides et sadiques.

C’était ce que je pensais. Peu importe que ça soit vrai ou faux. Ce que je pensais était vrai pour moi.

-Ici, tu es avec moi. Et ça sera comme ça jusqu’à la fin.

Peu importait la fin.

Et je me tournai vers elle pour l’embrasser d’abord doucement avant d’appuyer un peu plus mon baiser. Et quand je le brisai, c’était pour dire :

-Et je suis "pour" les pancakes le dimanche… Tant que tu ne confonds par le sucre avec le cyanure, ça me va.

Je rigolai pour montrer que c’était de l’humour. Même si ma mère avait fait ça une fois bien que, dans son cas, c’était intentionnel.

Et il restait les gamins… Un truc qui revenait tout le temps. J’aurais dû m’en douter. Je suis tombé amoureux d’une babysitter. Mais, comme pour éviter le sujet, je posai une question à la place de causer de nos futures progénitures.

-Et ton père, Sky ? Tu as cherché à savoir qui c’était ?

Parce que sa mère était morte. Mais son père, il l’était ?

@ Billy Lighter

Forcément, toutes mes déductions au fil du récit de Ward m’ébranlent mais n’abîme pas l’amour que j’ai pour lui. Il ne s’est pas levé un matin en ce disant que ce serait chouette de tuer des gens pour gravir les échelons et finir à la tête d’un gang. Ça s’est fait, petit à petit, probablement que même lui ne l’a pas vu venir et qu’il s’est juste prit la réalité en pleine gueule et réalisant qu’il était déjà trop tard. Il avait les deux mains prises dans l’engrenage.  Je n’allais pas le laisser tomber pour ça, je pouvais, avec mon amour, lui faire voir autre chose.

Je lui demandais donc s’il pensait que nous voulions la même chose. Il m’avait déjà dit ne pas vouloir d’enfants mais…

Mais c’était avant !

Avant moi, avant nous !

Nous, c’était tellement différent de ce que j’avais connu, et j’en étais certaine, de ce qu’il avait connu lui aussi.  Nous fusionnons au moindre contact. Aucun homme avant lui n’avait été aussi doux et tendre et en même temps, passionné et fougueux avec moi !

Je voyais loin, je nous transposais dans un avenir que je rêvais parfait !

- Bien, il faut toujours commencer par le premier… ensuite on verra.

Il en voudra pleins quand il verra le bonheur immense que ça représente, d’avoir sa propre famille à lui !

Puis, ensuite, il fallait que je sache, parce que tout ce que nous avions dit, surtout lui, avait fait beaucoup de chemin dans ma tête et que je ne voulais pas que plane l’ombre du toute entre nous. Je suis transparente, je veux qu’il le soit. Il avait fait le nécessaire, il me l’avait confirmé ce soir là mais je ne savais pas ce qu’il voulait vraiment dire.  Je sais maintenant que ces hommes, jamais plus ils ne reviendront.

Avec lui, je serais en sécurité comme jamais avant dans toute ma putain de vie je ne l’ai été, parce que jamais il ne laissera quelqu’un me faire du mal.  Je caressais tendrement sa joue en le regardant dans les yeux avant de me replacer dans notre lit et de lui donner le change. Il s’était livré à moi, c’était mon tour de lui raconter mes années précédentes  bien qu’il n’y avait strictement rien d’intéressant à raconter.

Fille de prostituée qui grandit dans un orphelinat avec des religieuses amer et frustrées puis qui fut baladée de famille d’accueille en famille d’accueille parce que je ne satisfaisais jamais mes parents adoptifs.  J’étais le vilain petit chaton de la bande. En général, on se plaignait de mon insécurité, de mon besoin constant  d’être rassurée. Enfant, je faisais des cauchemars à ce point horrible que j’en devenais complètement paralysée. Je n’arrivais plus à bouger, ni même à respirer convenablement.  Personne n’aime s’occuper d’une enfant de plus de quatre ans qui ne fait pas encore ses nuits.

Et puis j’étais très, vraiment très maladroite.  Par manque de confiance, fort probablement.

Ensuite, à l’adolescence, les choses ne se sont pas améliorées.  Je passais d’une relation malsaine à une autre, c’était à croire que je n’apprenais jamais de mes erreurs. Pourtant, je voulais mieux, je me disais que moi aussi, j’avais droit à ma parcelle de bonheur.  

Et je l’avais trouvé dans les bras de Ward !

- Rien ne nous séparera ! Jamais !

Ward s’approcha et m’embrassa. J’étais prête à me laisser à nouveau aller dans ses bras. Nous l’avions fait tellement de fois depuis notre retour de la salle de sport. La conversation que nous avions à l’instant était le plus long moment de pause jusqu’à présent.

Mais mon petit ami brisa le baiser pour me faire éclater de rire en disant qu’il n’était pas contre les pancakes le dimanche matin.

- Sauf si tu mets un pot de cyanure entre le sucre et la farine, ça ne risque pas d’arriver.  Quelle idée !

Et pourquoi je voudrais empoisonner l’homme de ma vie ?

Puis je fis non de la tête.

- Non, parce que je n’ai jamais eu aucun indice pour le retrouver et que de toute façon, ce serait comme… impossible. Ma mère était une prostituée, tu images combien de candidats potentiels ça représente ?

Je haussais des épaules en replaçant mes cheveux alors qu’une réflexion que je me suis souvent faite me revenait en tête.

- Je l’ai peut-être souvent croisé dans la rue. Ça, c’est plutôt flippant quand j’y pense. Quand j’étais plus jeune, je me disais parfois en rencontrant un homme, brun de cheveux ‘’ et si c’était mon père’’ ?  Honnêtement, je ne veux pas le savoir. Un mec qui se paie une prostituée pour assouvir ses pulsions, ça ne vole pas très haut en valeurs, selon moi.

La seule personne qui devait avoir une idée sur l’identité de mon père était morte alors de chercher qui cela pouvait-il être revenait à chercher une aiguille dans une balle de foin !

- Ça n’a aucune importance, je ne les ai pas connu ni un, ni l’autre et… tu sais bébé,  ton père est peut-être bien un tueur en série mais ça ne fait pas qui tu es toi.  Notre avenir, nous allons le bâtir ensemble, toi et moi, avec notre amour.

Je lui souriais puis je m’installais sur ses cuisses pour le regarder dans les yeux.

- Je t’aime, bébé !  Je vais t’aimer toute ma vie !

@ Billy Lighter

Sky n’en démordra pas. Elle voulait des enfants et c’était comme ça. Je crois que je ne pourrais pas la détourner de cette idée. Pas tout de suite, en tout cas… Elle était persuadée que je ferais un bon père mais ça c’était certainement parce qu’elle ne savait pas encore tout sur moi.

Si elle savait, elle n’en serait pas autant sûre…

Mais je ne voulais pas lui gâcher son rêve avec un « non » catégorique. Parce que, si elle était amoureuse, je savais que j’avais la capacité inouïe à me rendre peu sympathique. Et je ne voulais pas perdre Sky. Et s’il lui fallait un enfant pour ça alors j’étais prêt à ça.

Après, ce fut à Sky de me raconter son histoire plus en détails. Je l’écoutai sans l’interrompre apprenant beaucoup sur celle qui sera, jusqu’à la fin de sa vie ou de la mienne, ma petite-amie. Parce que je ne voyais pas les choses autrement. Je ne voulais pas que les choses soient autrement.

Elle, complètement amoureuse, déclara que rien ne sous séparera.

-Non. Rien.

Et je l’embrassai pour le lui prouver. Un baiser qui pris rapidement en intensité mais que je brisai pour parler de la petite vie parfaite que nous prévoyait Sky. Je rigolai un peu disant que je voulais bien ça si on évitait de mettre du cyanure dans mes pancakes. Preuve étant que certains de mes souvenirs me marquaient encore. Sky disait que ça ne risquait pas d’arriver. Je souris.

-Je suis rassuré alors.

Je disais ça toujours sur le ton de l’humour. Même si, intérieurement, j’étais sérieux.

Puis, je finis par poser une question qui me brûlait les lèvres et qui concernait le père de Sky. Elle déclara n’avoir jamais vraiment cherché vu le nombre de candidats potentiels. J’hochai de la tête. Elle n’avait pas tort.

Elle n’était pas sûr de vouloir vraiment savoir qui était son père parce qu’elle n’avait pas en grande estime les hommes qui se payaient les services de prostituées. J’évitai d’afficher un sourire jaune. Parce que j’avais déjà payé les services de prostituées surtout quand je faisais partie de la Casa Nuova… Mais inutile de mettre ça sur le tapis.

Tout ça pour dire que le père de Sky n’avait pas d’importance pour Sky… Qu’elle ne se définissait pas par ses parents tout comme elle souligna à nouveau que mon père ne me définissait pas. Si elle savait que tout était bien plus complexe que ça…

Pourtant, je voulais croire qu’elle avait raison.

-Oui. Tu as raison, bébé. Mais si, un jour, tu veux savoir qui sont tes parents, je t’aiderais à trouver. J’ai des contacts. Je pourrais dénicher des pistes.

Je voulais lui montrer que je pourrais faire beaucoup de choses pour elle, même me lancer dans ce genre de recherche.

Elle grimpa alors sur mes cuisses déclarant, encore une fois, à quel point elle m’aimait.

-Je t’aime aussi, bébé.

Et je l’embrassai langoureusement reprenant, à nouveau, nos ébats après cette longue pause.

@ Billy Lighter