Les premiers invités conviés à la fête commençaient à arriver dont notamment Victoria Hunter qui avait emmené avec elle son petit Ian. Puis Daryll Rogers et sa femme, l’ex-madame North Helen Grant-Rogers…

Bref, que du beau monde, et ce n’était que le début. Un verre à la main, Maritza et moi restions dans le grand hall pour accueillir lesdits invités qui nous couvraient de cadeau. De là, je gardai un œil sur tout mon petit monde qui allait et venait de plats en plats, de verre en verre et certains s’étaient déjà mis à danser sur la musique que John était chargé de diffuser conformément à une liste que nous lui avions donnée pour l’occasion avec nos préférences.

Il ne me fallut pas beaucoup de temps pour remarquer que dans toute cette effervescence, une seule personne restait à l’écart, statique. Et cette personne n’était autre qu’Olivia, notre fille, qui était d’une pâleur à faire peur tout à coup. Même son fond de teint dont elle s’était poudré pour l’occasion ne suffisait pas à faire illusion.

J’accueillis encore quelques invités avent de dire à Maritza que j’allais parler à Olivia. Et ce n’était certainement pas ma toute nouvelle épouse qui allait s’opposer à un tel rapprochement.

En allant vers Olivia, je pris deux coups de champagne sur un plateau qui passait et vins m’asseoir à côté de ma fille. Elle avait choisi de venir seule, pour une raison qui m’échappait, elle qui avait tellement tenu à nous présenter Julian, à nous révéler leur union célébrée dans le plus grand secret, dans le dos même de sa propre mère et avec la complicité de son beau-père.

Et là fois où j’avais rencontré Julian lors d’un souper chez eux, je ne m’étais montré nullement déranger par Julian, mais au contraire très intéressé, surtout par son souhait de faire administrer MTI lorsqu’il en hériterait… une révélation qui m’avait fait prendre quelques coups d’avance sur l’échiquier de los Angeles.

Mais voilà… Ce soir, Julian n’était pas là et Livia semblait comme une âme en peine alors qu’aujourd’hui, c’était jour de fête.

-Tu sais… Julian était le bienvenu, si tu souhaitais vivre ça en sa compagnie.

Je plaçai doucement le bout de mes doigts sous son menton pour relever son regard vers moi. Puis, je posai ma main sur la sienne, en baissant la voix pour qu’elle soit la seule à entendre ce que j’avais à dire.

-Qu’est-ce qui ne va pas, Livia ? Tu peux me le dire, je peux arranger nombre de problème, tu le sais, ça… Et si ça a rapport avec Yang, sache que je le trouverai…

Et que je le tuerai, c’était une promesse tacite. Je ne voulais plus que Livia souffre de ce qu’elle avait vécu durant son enlèvement. Je voulais la voir sourire.

Je voulais qu’elle profite de ce moment, de cette soirée, et du fait que j’avais admis être son père, pour qu’elle puisse être qui elle était, sans plus avoir à se cacher.

@ Billy Lighter

Mes parents étaient maintenant unis par les liens sacrés du mariage et ils transpiraient d’amour et de bonheur. Ils formaient l’image idyllique du couple parfait. Seulement, rien n’est parfait en ce moment.  Je crois que l’encre sur les papiers du divorce de ma mère n’a même pas encore sécher qu’elle convole pour la deuxième fois et Jimmy, qui lui a dû enfiler les conquêtes les unes après les autres, a tout un tas de squelettes dans son placard.

Non, rien n’est parfait mais ils sont heureux, alors j’imagine que cela devait suffire tous nous réunir ici pour célébrer cette nouvelle union qui a dû en surprendre plus d’un, à commencer par la secrétaire de mon père qui affiche un sourire plastique, presque forcé. Mais c’est peut-être uniquement une idée que je me fais.  Une  parmi toutes celles qui me traversent la tête en une journée.  

Je me tenais à l’écart, j’observais, j’attendais mon moment de gloire pendant lequel j’offrirais à mes parents, le présent que je leur ai préparé avec amour et fierté dès que j’ai appris la nouvelle de leur mariage.  Ensuite, je n’ai fait que  le peaufiner, pour le rendre correct et parce que malgré tout, je ne veux pas couvrir de honte mon patron.

D’ailleurs, il s’approcha de moi, coupes de champagne en main et m’aborda en me disant que Julian était le bienvenu. Je ne répondis pas, voyant là une nouvelle tentative, à l’instar de ma mère, de me questionner sur mon couple. Mais Jimmy ne se contenterait pas d’un silence alors qu’il me fit le regarder, sans me forcer, mais en tournant mon regard vers lui puis en posant sa main sur la mienne.

J’étais prête à lui parler, de Julian, de Ward, de tout ce qui se passait dans ma tête et que je taisais à la face du monde. Mes petits travers et mes délirs, tout ce qui n'allait pas, j'étais prête à les lui confier, parce que Jimmy, malgré tout, demeure mon pêre et, le plus fort, n'est-ce pas justement mon père ? Je voulais le lui dire jusqu’à ce qu’il fasse mon sang se glacer en parlant de Yang.

Je pris la coupe de champagne de ses mains et en bus une gorgée avant de le regarder à nouveau.

- Tu vas le tuer ? demandais-je en un murmure à peine inaudible tout en soutenant son regard.

Bien sûr que je souhaite la mort de mon kidnappeur-agresseur.  Mais quelque part, en moi, j’avais la certitude que la mort ne serait pas assez cher payée pour ce qu’il m’a fait. Je rêvais de lui rendre moi-même la monnaie de sa pièce en le torturant pendant des semaines.

- Je ne veux pas qu’il meurt. Je veux le torturer moi-même, même si je sais que rien de ce que je pourrai lui faire ne me soulagera.

Il pouvait, dans mon regard, y voir toute ma souffrance, tout ce que je refoulais et cachais au quotidien pour continuer de (sur)vivre.  Et moi, dans ses yeux, je voyais cette petite étincelle dont j’avais encore besoin pour croire que ça pouvait encore être possible. Alors qu’il y consente ou non, je n’avais pas besoin de son approbation, je le serrais dans mes bras. Pourquoi fallait-il que, peut importe les sentiments contradictoires il m’inspirait, je finisse toujours par me sentir comme l’enfant de 5 ans qui cherchait encore son père parfait de ses rêves ? Celui qui lui ressemblait physiquement et qui ferait de toutes ses peurs, des flocons de papier ?

@ Billy Lighter

Livia était pâle et semblait complètement ailleurs, assise à l’écart alors que ça aurait été l’occasion pour elle de rester à nos côtés. Mais elle ne semblait pas voir le cœur à cela… Ellel était loin, ma fille et quelque chose me disait que le fait qu’elle soit seule n’était pas anodin, tout comme je pouvais bien imaginer que son cœur ne soit pas encore à la fête après ce qui lui était arrivé.

Pourtant, n’était-ce pas ça qui aurait dû lui ouvrir les yeux sur le fait que chaque moment doit être vécu pleinement ? C’était en tout cas ce que l’attaque contre Maritza m’avait appris, à moi et à elle aussi.

C’était ça qui m’avait poussé à la demander en mariage puisque l’anonymat ne suffisait plus.

Je ferais tout pour protéger Maritza, mais pas que… il y avait l’enfant qu’elle portait. Mais aussi Livia que j’avais révélé au monde être ma fille.

Alors je ne comprenais pas très bien ce recul qu’avait Livia envers nous, mais aussi envers son propre mari Julian Hughes.

Je ne comprenais pas et je n’aimais pas ça. Je voulais comprendre.

C’est pourquoi j’avais laissé un instant Maritza seule mener la barque de l’accueil des invités pour aller parler moi-même à Olivia.

Je lui donnai une coupe de champagne avant de boire dans la mienne et d’entamer la conversation avec elle. Elle éluda ma question à peine masquée sur Julian, mais préféra parler de Yang, me demandant si j’allais le tuer.

Pour toute réponse, je hochai silencieusement la tête.

Et contre toute attente, Olivia me dit qu’elle ne voulait pas qu’il meurt ce qui me valu un froncement de sourcils d’incompréhension avant qu’elle ne me dise qu’elle voulait le torturer pour ce qu’il avait fait.

Je passai doucement une main dans ses cheveux.

-Tu as de qui tenir. Et je comprends ta colère… Mais même moi, je ne pense pas être capable de torturer quelqu’un.

Nous chuchotions, penchés l’un vers l’autre, pour que personne d’autre n’entende nos propos. Je repris une gorgée de champagne… Avant de dire :

-Le seul que tu torture actuellement ne serait pas Julian, par hasard ?

Je la regardai dans les yeux.

-Je te connais, Olivia Cortez. Rien à tes yeux n’est plus important que l’amour. Alors je te demande pourquoi…

Je passai ma main doucement sur sa nuque pour y faire glisser la chaîne qu’elle avait autour du cou mais au bout de laquelle ne se balançait plus son alliance.

-Pourquoi Julian n’est pas à tes côtés aujourd’hui.

@ Billy Lighter

Jimmy s’était approché de moi, coupes de champagne en main et avait, tout comme ma mère, tenté d’aborder le sujet Julian.  Je n’avais pas très envie de parler de mon divorce imminent, surtout pas avec mon père qui vient tout juste d’épouser ma mère.  Il me semblait le moment bien mal choisit, tout comme il l’était de parler de Yang mais à choisir entre les deux, je préférais  parler du psychopathe qui m’a enlevé.

Il m’avait murmurer qu’il retrouverait Yang, qu’il avait la capacité de lui faire payer pour ce qu’il m’avait fait et j’avais soutenu son regard en lui demandant sans détour s’il avait l’intention de le tuer.  Il me répondit d’un discret hochement de tête.  Il en était capable, de ça, je n’en avais aucun doute. Je l’avais vu tirer sur Ward, chaque nuit, je revoyais la scène même si je n’en gardais qu’un souvenir flou.

Seulement, même si j’ai très peur de Yang au point que la simple évocation de son nom me donne froid dans le dos, je confis à Jimmy que je ne veux pas qu’il meurt. Ce serait beaucoup trop simple.  Mon père eu un geste tendre en passant sa main dans mot dos pour me confier, toujours sur le ton du secret, qu’il ne se pensait pas capable de torturer quelqu’un.

Vraiment ?

Tous ces mois passés en tournée à me narguer de sa présence ?  De venir me réveiller dans ma chambre en Italie en jouant dans mes cheveux pour ensuite me remballer comme si je n’étais rien d’autre qu’un caillou dans sa chaussure ! On ne peut pas appeler ça de la torture physique mais psychologiquement parlant, ça m’a vraiment fait mal d’être à sa merci comme un vulgaire yoyo.

J’imagine qu’il ne voit pas les choses de la même manière et qu’il aurait une explication toute simple pour expliquer son comportement, un truc qui l’excuserais indubitablement.

- Yang souffrira… tôt ou tard.

Quand je retrouverai Ward, je saurai ce qu’il est véritablement advenu de Yang et s’il ne s’en ai pas déjà chargé, il le fera. Pour moi… Qu’importe qu’il soit ou non le véritable chef es New Soldados comme l’a prétendu Guillermo. Ça ne change strictement rien au fait qu’il a prit soin de moi et qu’il voulait que nous partions ensemble, lui et moi.

Je bus une autre gorgée de champagne en retournant mon regard sur la pièce qui s’était plutôt bien remplie depuis la fin de la cérémonie. Je ne connaissais pas beaucoup des gens et je me doutais que ce devait être la même chose pour ma mère. Tous des amis(es) de mon père alors que personne de Tijuana, sauf mon petit frère et ma petite sœur. Il était fort à parier que maintenant qu’elle avait épousé son Jimmy, tout ce qui faisait partie de sa vie d’avant n’était plus assez bon pour la nouvelle Madame Reed.

- Julian n’est pas là parce que c’est fini entre nous.

Je vidais le reste de mon verre et le posais sur le sol près de la patte de ma chaise pour éviter de le faire tomber au sol en bougeant mes pieds puis je regardais Jimmy qui, s’il était surprit par la nouvelle, ne le montrait pas. Je ne maîtrisais pas encore aussi bien que mon père l’art de la transparence mais j’y travaillais très fort depuis mon réveil à l’hôpital.

- Nos chemins n’allaient plus dans la même direction.

La vérité, c’est que mon chemin ne va plus nul part et que ce que m’a dit Ward au sujet de Julian, que ce soit vrai ou non, n’a fait que précipité une fin déjà prévu.  Jimmy pouvait comprendre ce volte face amoureux, ne l’a-t-il pas vécu lui-même  La différence est que je n’ai pas mis Julian contre son gré dans un taxi pour l’autre bout du monde.

- Mon chemin est quelque peu chaotique en ce moment.

Je ramenais mes cheveux sur mon épaule puis je me replaçais sur ma chaise, plus droite tout en observant ma mère qui était en grande conversation avec un chauve bedonnant qui tenait d’une main un cigare gros comme un barreau de chaise.

- Est-ce que je peux te demander qu’est-ce qui a changé en Italie pour qu’un moment de tendresse passes-en un rien de temps en un interrogatoire que j’ai de toute évidence échoué ? Je sais… remuer le passer ce n’est pas très mature mais, pour ma curiosité personnelle, j’aimerais savoir ce que j’ai bien pu te dire ou faire pour mérité tout ce qui s’est passé ensuite, entre nous.

Ou plutôt, tout ce qui ne s’est pas passé, serait une formulation plus exacte. Le moment, cela dit était peut-être mal choisit mais entre Julian et Yang, un passage par l’Italie ne me semblait pas si hors propos.

@ Billy Lighter

Si Olivia ne voulait pas parler de Julian, elle avait bien moins de difficultés à parler de Yang, celui qui l’avait enlevée et torturée avec le concours, voire sous les ordres, de Ward Fleming. Elle voulait que Yang souffre, elle voulait même le torturer elle-même, chose que je ne la croyais pas capable de faire, moi-même m’imaginant mal torturer quelqu’un, même si ce qu’avait fait celui-ci méritait effectivement la torture…

Mais qui sait… ? Peut-être que j’en étais capable… Après tout, je n’avais découvert que sur le tard que j’étais capable de tuer.

Elle conclut que Yang souffrirait, tôt ou tard, et j’approuvai d’un hochement de tête.

Elle parlait de Yang… Toujours de Yang… mais jamais de Ward… Et ça, je n’aimais pas beaucoup ça… Soit ça voulait dire que Ward lui avait fait des choses encore pires que Yang au point qu’elle l’éludait, soit Ward avait été assez vicieux que pour jouer celui qui venait mettre un baume sur ses blessures… Et se protéger de mon courroux via Livia.

J’insistai pour savoir ce qui se passait avec Julian, et sa réponse me fit hausser les sourcils. Et même tiquer un peu de l’œil gauche. Je serrai les dents. Ça, c’était bel et bien quelque chose que je n’avais pas prévu, eux qui croyaient que leur amour était pour la vie, pour toujours et à jamais. Eux qui avaient absolument tenu à nous faire montre que, comme des grands, ils avaient pris la bonne décision en unissant leurs vies.

Je regardai Olivia dans les yeux, parce que même pour me dire ça, elle ne les baissait pas. En cela, elle était bel et bien une Reed.

-Je suis désolé de l’apprendre… J’espère que votre décision de mettre fin à votre histoire est plus réfléchie que celle de vous unir en secret.

Mais ça m’embêtait quand même, car, dans cette union, j’avais fini par voir ce qu’il y avait à y gagner. Et Olivia, sur ce que je soupçonnais être le coup de tête d’une jeune femme désorientée par une expérience extrêmement traumatisante, venait de tout foutre en l’air, ou était sur le point de le faire.

Étais-je donc le seul dans ce monde à pouvoir prévoir les meilleurs coups à l’avance ?

Olivia admis que son chemin était un peu chaotique en ce moment.

-Raison de plus pour ne pas précipiter les choses, Olivia. Quoi que tu fasses, réfléchis bien.

Olivia se redressa sur sa chaise et je perdis le contact visuel avec elle puisqu’elle regarda en direction de sa mère qui discutait avec l’un des gros bonnets d’une marque d’instruments de musique bien connue.

Et ce fut donc sans me regarder qu’Olivia me demanda pourquoi, à Rome, ma tentative de rapprochement avait été avortée… je me mordis la lèvre, ne sachant trop par où commencer, ne sachant comment formuler ça.

-Mon but était de vraiment faire connaissance avec toi, de passer un bon moment… Mais c’est dans ta chambre, alors que tu te préparais, que j’ai appris pour ton union secrète avec Hughes. Le fils de mon rival. Pour moi, tu avais choisi ton nom et ton camp.

Je haussai les épaules.

-Alors j’étais en colère… En colère car tu avais choisi ton nom avant que je n’ai pu te donner celui qui te revenait. Tu n’avais déjà plus besoin de moi.

@ Billy Lighter

Je ferais n’importe quoi pour éviter de parler de Julian. Même parler de Yang me semble plus facile que de parler de mon mariage raté, surtout avec mon père qui sera sans aucun doute le premier à célébrer cette nouvelle.  Julian me manque. Nos moment d’avant, surtout. Cette complicité que nous avions, nos fou rire et nos jeux au lit et je ne parle pas que de sexe. Nous sommes peut-être que deux ados pleins d’hormones mais notre vie ne se résumait pas qu’à ça, bien au contraire.

Seulement, tout ça c’est brisé avec ce que m’a dit Ward et j’ai trop de fierté pour faire marche arrière.

Seulement, Jimmy ne lâche pas le morceau et je décide, sans baisser les yeux, parce que je ne veux pas qu’il me croit faible ou honteuse, je lui annonce que Julian et moi  c’est de l’histoire ancienne.  Je me vais peut-être des idées mais ça me donne l’impression qu’il est surprit de cette nouvelle mais pas forcément pour les raisons que j’aurais pu croire. Même, l’espace d’une seconde, on dirait presque que ça le désole.

Bien évidement, il ne rate pas de me remettre sous le nez notre union qui fut célébrée en secret, le contraire m’aurait étonnée.

- En ce qui me concerne, elle l’est.

Je n’appréciais pas l’intérêt que portait Jimmy à mon couple parce que je ne pouvais pas me convaincre, comme il n’y arriverait pas, qu’il s’en inquiétait pour les bonnes raisons.  

- Il n’y a rien de précipité dans ma décision mais si ça peut te rassurer, je vais continuer d’y réfléchir.

Bien sûr que non, je n’y réfléchirais plus. Il ne s’agissait rien de plus qu’une phrase bancale lancée  pour rassurer mon père bien qu’il devait, et je l’espérais, avoir des trucs plus important à songer que les amours de sa fille. Comme, ce qu’essaie de cacher ma mère sous sa robe de mariée. Il ne doit pas oublier que j’ai fait les boutiques avec elle et que, par respect pour elle qui semblait tout faire pour me le cacher, et parce que j’y ai vu là un moyen parfait d’entente tacite entre elle et moi (ne me parle pas de Julian, je ne te parlerai pas de ta grossesse).

J’observais ma mère, la reine de la soirée, en conversation avec un invité. Et sans la quitter des yeux, parce que je perdrais cette manche de regards soutenus avec Jimmy, je lui demandais ce qui avait pu se passer à Rome pour qu’il change drastiquement d’attitude envers moi. Et ce qu’il m’expliqua m’amusa et je laissais paraître un sourire légèrement sarcastique sur mes lèvres.

- Wow… si je m’attendais à ça !

Je le regardais franchement, cherchant presque à savoir s’il ne m’aurait pas mentit. Mais non, il me disait la vérité. Pour quelque chose comme celle là, il ne me mentirait pas… au fond de moi, je le sais.

- Je vais t’apprendre quelque chose qui pourra peut-être te servir un jour, sait-on jamais si tu décidais de retenter l’aventure, mais il n’y aura jamais un autre homme plus important dans le cœur d’une fille que son propre père.

Oui, j’avais choisis d’être une Hughes en épousant Julian, mais jamais je n’avais renoncé à l’espoir d’être la fille de mon père. Peut-être que pour lui, cette fierté là passe par un nom, mais s’il avait prit le temps de me connaître, il aurait vu et il aurait comprit que ce qu’il avait à me transmettre allait au-delà de son nom de famille.

J’aurais appris quelque chose aujourd’hui. Pour Jimmy, l’affiliation passe par le nom, et non pas le sang qui coule dans nos veines.  

- J’ignore si ça peut avoir encore de la valeur pour toi mais sache que dans mon cœur, et dans ma tête, et malgré tout ce que j’ai pu voir de toi, je suis fière d’être ta fille.

@ Billy Lighter

Alors comme ça, entre Julian et Olivia, c’était fini. Quelque part, ça me faisait sourire, eux qui avaient voulu se donner l’air si sûr d’eux et de leur couple quand nous étions venus souper chez eux. Mais une autre part de moi trouvait ça tout d’un coup vraiment dommage. Pas pour une question d’amour, loin de là, mais à cause de toute ce que Livia avait à gagner de cette alliance avec le jeune Hughes… Depuis que je savais qu’il voulait faire administrer MTI lorsque son père rendrait l’âme et lui léguerait la maison de disque.

Je demandai donc à ma fille si tout ça était bien réfléchi… Si sa décision était vraiment prise. Jamais Livia ne quittait mon regard et jamais je ne quittais le sien, gardant simplement Maritza à vue du coin de l’œil.

Livia m’annonça que si ça me faisait plaisir, elle allait continuer à réfléchir à la question Julian.

Je hochai la tête.

-Oui, continue à réfléchir… En perdant ton alliance avec Julian, tu perds plus qu’un amour de jeunesse : tu perds des opportunités. Surtout que je crois savoir que tu es très appréciée de Don Hughes… Et ce même depuis que le monde sait que tu es ma fille.

Olivia voulu alors savoir ce qu’il s’était passé à Rome… Pourquoi j’avais soudain mis une distance entre nous alors que j’étais prêt à la casser définitivement. C’était à cause de ce que j’avais lu dans son journal intime… mais elle ne se demanda pas une seconde comment j’avais pu être au courant de la chose entre le moment où je l’avais réveillée, et celle où elle avait réapparu de la salle de bain de sa chambre d’hôtel…

Elle ne me posa aucune question là-dessus, peut-être parce qu’elle savait, dans le fond, que j’avais été fouiner dans ses affaires.

Elle eut un rire sarcastique qui me fit lever un sourcil. Je ne comprenais pas ce qu’il y avait de drôle là-dedans.

Je plongeai mon regard dans le siens, sans jamais perdre ce combat de regards. Le premier qui baisserait les yeux perdrait un jeu tacite… mais plus que du sarcasme, je cru voir une profonde tristesse dans les yeux de ma fille.

Ma fille qui voulait me donner une leçon en annonçant qu’il n’y a pas d’autre homme plus important dans le cœur d’une fille que son propre père.

-Je n’ai pas à retenter l’expérience. Je t’ai toi.

Et elle disait que malgré tout ce qu’elle savait sur moi, elle restait fière d’être ma fille.

-Alors célèbre avec nous. Lève-toi de cette chaise et viens à nos côtés pour accueillir les gens. Sors de ton mutisme car si tu ne le fait pas, c’est que Yang a définitivement gagné.

Je lui pris la main, entrelaçai nos doigts.

-Et si tu te mets à penser comme une Reed, pense à tout ce que tu perds en perdant Julian. Car moi, je vois ce qu’il peut nous apporter… Ouvre les yeux et pense avec ta tête et pas avec ton cœur, Livia.

@ Billy Lighter

Les intentions de Jimmy me semblaient floues. Pourquoi s’intéressait-il a ce point à mon mariage alors que jusqu’à présent, ma vie lui semblait d’une insignifiance consommée ?  Tout m’apparu beaucoup plus claire quand il parla d’opportunités. Des opportunités que j’allais perdre en brisant mon mariage avec Julian.  Dès qu’il mentionna l’affection que me portait Don Hughes, je compris.

- En effet, Don m’apprécie et n’a jamais manqué de me le faire sentir.

Les opportunités ne filaient pas qu’entre mes doigts, mais entre ceux de mon père.  Je n’avais pas besoin qu’il me dresse un tableau  pour que je comprenne qu’il avait des vues sur MTI et que mon mariage avec l’héritier de Don lui permettait un pied dans la tour concurrente.

C’était bien pensé.

J’admirais cette capacité qu’avait mon père de toujours bien placer ses pions mais cela me confirmait l’impression que j’avais toujours eu : je ne représentais qu’une simple pièce de son échiquier.

J’étais prête à jouer, puisqu’il m’en donnait l’occasion.

C’est sur ce qui s’était passé à Rome que je dirigeais la conversation et je ne fus qu’à moitié surprise d’apprendre que c’est sa découverte de mon mariage avec Julian qui lui avait fait changer drastiquement son attitude envers moi.  Il avait dû le lire dans mon journal puisqu’à cette époque, j’en tenais un religieusement. Je ne manquais pas d’y raconter un seul jour de ma lamentable existence comme si le recueil de ces écrit pouvait être trépident à relire dans quelques années.  

Si Jimmy excellait en affaire, qu’elles soient légales ou non, il avait de grosses lacunes en connaissance de père, mais ça, personne ne pouvait le lui reprocher, il n’avait jamais vraiment eu la chance d’essayer.  Alors je me permis de lui apprendre quelque chose, il en fera ce qu’il voudra, qui sait si ça lui servira dans un futur plus ou moins rapproché. Et ce qu’il me répondit m’accrocha mon premier vrai sourire depuis une éternité.

Il avait raison en disant que si je restais repliée sur moi-même, je laissais gagner Yang. Alors quand il entrelaça nos doigts, et qu’il revînt sur tout ce que je perdais en laissant aller Julian, je me levais et, toujours en le regardant dans les yeux j’acceptais son challenge.

- Je prendrai les choses en mains et tâcherai de ne pas te décevoir.  

Je me levais mais sans briser le lien de nos mains alors que nous rejoignions lentement ma mère en nous faufilant  au travers des nombreux invités qui avaient, me semblait-il, littéralement envahit la demeure de mes parents.

- Au fait, il n’y avait que ma relation avec Julian d’intéressant dans mon journal ?

J’avais fait attention de ne pas parler de mariage, puisque nous avions quelque peu perdu l’intimité que nous avions quand nous étions assis un peu à l’écart. Ma question ne nécessitait pas vraiment une réponse. Je savais ce que contenait ce fichu journal et tout ce qu’il pouvait y avoir trouvé.

- En fait… je crois que je vais plutôt aller préparer mon cadeau, si ça te va. Il y a une pièce ici où je peux  être seule une dizaine de minutes ?

Il y avait un moment que je n'avais pas travaillé ma voix, il était hors de question que je me couvre de ridicule, surtout aujourd'hui que j'avais tant à prouver.

@ Billy Lighter

Je souris en coin quand Livia affirma que Don n’avait jamais manqué de lui montrer une certaine affection et apparemment, d’apprendre qu’elle était ma fille n’avait pas changé la donne. C’était bien, très bien même. Ainsi, lorsqu’il viendrait à mourir et que Julian déciderait de faire administrer l’entreprise, Livia serait bien placée.

Enfin, si elle se remettait avec Julian dont elle disait vouloir divorcer… Ou plutôt non, dont elle disait que c’était fini entre elle et lui.

Mais je ne perdais pas espoir.

Et pour ça, je ne cessais de répéter à Livia de bien réfléchir à ce qu’elle faisait, à ce qu’elle allait perdre en perdant Julian. Ma foi, si elle n’était plus heureuse en amour avec lui, même si je ne lui souhaitais pas, elle pourrait toujours prendre des amants, ce n’était sûrement pas les jeunes hommes qui manquaient de se bousculer au portillon.

Elle avait voulu savoir ce qu’il s’était passé à Rome. Pourquoi j’avais brusquement changé d’attitude envers elle. Je le lui expliquai, sans lui donner plus de détail sur le comment j’en étais venu à être en possession de cette information. Mais ma fille était intelligente et elle n’avait certainement pas manqué de deviner comment j’avais fait.

Mais ça, c’était avant que je ne sache que Julian comptait faire administrer MTI… Avant que je ne voie toute les possibilités qu’une telle alliance m’offrait.

Livia décida alors de me faire la leçon, en disant que l’homme le plus important dans la vie d’une femme restait son père. Et ma réplique la fit sourire, un vrai beau sourire… Je l’avais elle et Julius Rachel ne serait pas une fille. Une fille, je n’en avais qu’une, et je n’avais aucune intention de la perdre maintenant que je l’avais.

Je lui souris en retour et pris sa main dans la mienne. Je lui dis que si elle restait repliée sur elle-même, ce seraient ses ravisseurs qui allaient gagner… Ce fameux Yang. Et Olivia sembla se reprendre un peu. Et c’est sans quitter mon regard qu’elle déclara qu’elle allait prendre les choses en main et qu’elle tâcherait de ne pas me décevoir.

Je souris toujours, hochai la tête.

-C’est bien, ma fille.

Elle se leva sans que nos mains se délient et je me levai à mon tour pour nous diriger vers Maritza. Et, un ton plus bas, Olivia me demanda s’il y avait quelque chose d’autre dans son journal qui m’avait intéressé… Je me penchai vers elle tout en chuchotant…

-Tu te rappelles de Sylvio ?... Il est soi-disant porté disparu, depuis Rome.

Je passai mon bras autour des épaules de ma fille avant qu’elle ne s’arrête alors que nous n’étions qu’à deux pas de sa mère. Elle voulait un endroit à elle pour une dizaine de minutes. Je lui souris.

-A l’étage, tu trouveras la chambre de Maximo et Rosalyn… L’espace est à toi.

Je m’approchai doucement pour lui dépose un bref baiser sur le front avant de la laisser aller.

@ Billy Lighter