Je n’arrivais plus à dormir… J’étais couché dans mon lit et j’avais des yeux grands ouverts. Les voitures arrêtaient pas de passer dans la rue. Je n’aimais pas ça. Ça faisait beaucoup trop de bruit. Et ça faisait de la lumière aussi à travers les rideaux. Je fronçai les sourcils. Chez Maman ce n’était pas comme ça. Autour de la maison, il y avait des jardins et des arbres et personne passait sur la route la nuit.

Je mis mon coussin sur ma tête pour essayer de plus voir et de plus rien n’entendre.

-Stop…

Mais ça stoppait pas. Même avec le coussin, j’entendais toujours. Ça me contrariait. Je n’arrivais plus du tout à dormir. Pourtant, j’aimais bien dormir, moi !

Je me redressai fort dans mon lit et lançai mon coussin à travers la pièce. Je croisai les bras, le visage fermé. Ça allait jamais s’arrêter ! Je n’aimais vraiment pas ici !

Je sortis de mon lit. Je ne voulais plus rester dans ma chambre. Je ne voulais plus dormir parce que j’y arrivais pas et je n’aimais pas ne pas y arriver. Je mis mes chaussures mais je gardai mon pyjama. Je pris un Comics en main et puis, j’ouvris les rideaux. Il faisait encore tout noir… Enfin, pas vraiment tout noir à cause de toutes les lumières dehors. J’ouvris doucement la fenêtre. Il y avait pas de barreaux à celle-ci.

Je sortis dehors. Il faisait plus froid que la journée mais ça allait encore. J’avais pas si froid même en pyjama. Je regardai en l’air vers le toit. Il était pas haut du tout… Il n’y avait pas deux étages. Ma cabane dans mon arbre chez moi était beaucoup plus haute.

Je me mis alors à grimper jusqu’en haut. J’étais fort pour grimper. J’avais appris à grimper dans les arbres et sur les maisons quand j’étais plus petit. Juste après que Maman m’a dit que, si un jour j’étais en danger, je devais grimper le plus haut possible.

Ici, c’était presque trop facile.

Arrivé en haut, je m’installai à regardai droit devant moi. Je voyais les voitures rouler mais, surtout, les lumières. De l’intérieur, c’était trop moche… Mais d’ici… Les lumières, on dirait des flammes surtout si on les regarde longtemps. J’aimais bien… Et je les fixai sans bouger jusqu’à-ce que le soleil se lève et que les lumières s’éteignent toute seule.

Je pris, ensuite, mon Comics pour commencer à le lire parce que L.A. était redevenu moche. C’était plus beau la nuit avec les lumières mais pas le jour. Je restai sur le toit à lire. Je savais qu’aujourd’hui, avec Jordan, on devait aller voir son frère. Il l’avait dit hier. J’attendais que Jordan vienne me dire qu’on déjeune et qu’on part.

J’espère que le déjeuner sera bon... Parce que les pizzas, elles étaient meilleures dans le Maine…

Dormir n’était pas forcément mon truc. Normalement, à cette heure-ci, j’aurais déjà la radio allumée et tout le bordel… Mais sachant que Grant dormait dans sa chambre, je décidai de ne pas faire trop de bruit. Il venait d’un petit bled du Maine où il y avait quelque chose comme vingt fois moins de bruit. Alors il était inutile d’en rajouter au brouhaha de L.A.

C’était aujourd’hui que nous allions aller voir mon frère et sa petite amie, en espérant qu’ils veuillent bien me donner un coup de main dans cette nouvelle aventure. En faisant mon café, je n’avais aucun doute sur l’aide que Duncan allait bien vouloir m’apporter, mais je ne voulais quand même pas imposer ça à Leïa.

Surtout que Duncan devait avoir des projets d’album pour le moment et que Leïa travaillait elle aussi. Je ne savais vraiment pas comment on allait s’organiser. Mais je savais que le garçon avait besoin d’une figure féminine à laquelle s’attacher sans que ce soit pour autant ne maman de substitution… Le problème, c’était que je n’avais pas de petite-amie moi-même et qu’après ma déconfiture avec Alexie Greatfield, la journaliste de la télé, je tombais bien moins facilement amoureux.

Nous n’avions pas parlé beaucoup, Grant et moi, hier soir. Aucun d’entre nous n’étant un grand bavard. Mais je voyais dans les yeux du petit qu’il n’allait pas me rendre la vie facile. Tout simplement parce que sa vie, en ce moment même, n’était pas facile.

J’entendis comme un oiseau qui voyageait sur le toit et levai les yeux, perplexe… Ça devait être un oiseau énorme… Une cigogne, peut-être ?... Non, merci, on m’avait déjà amené ce qu’il me fallait hier et la bonne femme qui m’avait confié Grant n’avait pas la grâce d’une cigogne, loin de là.

J’avais mon café en main, bien chaud, et ma clope au bec quand je décidai d’aller relever le courrier dans la boîte aux lettres. J’avais pris quelques jours de congé en vue d’être là le temps de l’acclimatation du petit chez moi…

Et qui est-ce que je vis perché sur le toit en me retournant pour rentrer?! Grant !

-Grant ! Descend de là ! Tout de suite ! Et en faisant bien gaffe à ne pas tomber.

Mais avant de le laisser bouger, je m’écriai :

-Qu’est-ce que tu fous là, nom de Dieu ?! Tu vas finir par te pelleter !

J’étais plongé dans mon Comics quand j’entendis la prote de la maison s’ouvrir. Je levai les yeux. Et me penchai très légèrement pour voir Jordan qui sortait de la maison. Il fumait encore… il ne faisait que ça, tout le temps… Je n’aimais pas ça. Toute la maison sentait ça. Même ma chambre puait ça. Il faudra mettre des trucs pour que ça sente bon.

Je lui dirais que je déteste ça. Comme ça, il arrêtera peut-être. Et s’il n’arrête pas, je devrais construire ma cabane très vite. Moi, ça puera pas dans ma cabane.

Je ne dis rien. Je regardais Jordan sortir le courrier de la boîte aux lettres. Il ne m’avait pas encore vu… S’il me voyait j’espère qu’il me dira que le déjeuner est prêt parce que je commence à avoir très faim. Je voulais manger des céréales ou des tartines au choco... Je savais que Jordan avait des céréales alors j’étais sûr d’avoir au moins ça.

Quand il se retourna, il fut surpris. Je penchai légèrement la tête sur le côté quand il me demanda de descendre tout de suite. Quoi ? On mange ? C’est ça ? Il voulait pas que je tombe en descendant. Pas besoin de lever la voix comme ça.

Il me demanda ce que je foutais et disait que j’allais finir par tomber. Je fronçais les sourcils. C’est bon… C’est pas haut…

-Pourquoi tu crie ? Je tombe jamais. J’ai déjà monté sur des arbres plus hauts.

Je comprenais pas pourquoi il s’énervait. Ma Maman, elle s’énervait jamais quand je grimpais dans les arbres. Ici, il n’y a pas d’arbre alors je devais bien trouver autre chose.

-Je regardais les lumières la nuit et je lisais un Comics. Je faisais rien de mal. J’arrivais pas à dormir parce qu’il y a trop de bruits dehors.

Je disais ça en commençant à descendre par où j’étais monté sans trébucher une fois.  

Une fois à terre, je levai les yeux vers Jordan. J’étais pas vraiment contrarié. C’est lui qui l’était. C’est lui qui avait peur que je tombe. Moi, j’ai pas peur de tomber.

-J’ai faim… C’est l’heure du déjeuner ? Après je mettrais des habits et on ira voir ton frère.

Je disais ça sans être vraiment emballé. C’était juste ce qu’on avait à faire aujourd’hui alors j’étais prêt à le faire. Quand on rentrera je lirais des Comics.

Le petit ne voyait pas pourquoi je criais… ça me semblait pourtant évident :

-Parce que j’ai peur que tu tombes ! Allez, descends de là !

Selon lui, il ne tombait jamais… Ouais… ben y avait des pros de l’escalade qui ne tombaient jamais, jusqu’au jour où… Et je ne voulais pas commencer ma première journée en tant que tuteur aux urgences parce qu’il se serait cassé la jambe. Parce que ce serait le coup à voir rappliquer les services sociaux. Et aucun doute que la vieille rombière d’hier manquerait pas de sourire, cette fois.

Grant descendit avec une aisance à en rester les yeux écarquillés. Il n’hésitait pas, trouvait les meilleures prises et était rapide… aussi rapide que mon cœur emballé par l’adrénaline de le trouver là et de le voir faire.

Quand il fut devant moi, il m’expliqua qu’il regardait les lumières de la ville, puis avait lu un comics. Qu’il n’y avait rien de mal à ça.

-Non, il n’y a rien de mal. Mais c’est dangereux. Si tu veux faire de l’escalade, c’est comme pour la boxe, tu pourrais en faire dans une vraie salle avec des murs bien plus hauts que ça mais avec toutes les sécurités qu’il faut.

Je soupirai.

-Pour le bruit, par contre, je ne sais rien faire…

Grant affirma alors qu’il avait faim et récita le planning pour ce matin. Je souris. Question organisation, il était calé, le petit Grant.

-Ouais… On va manger et se préparer.

Grant engloutit les céréales avec du lait, moi, je bus encore facilement trois café. Puis on passa chacun à notre tour à la salle de bain. Une fois prêts, on embarqua dans ma Ford et je mis The Burning Fire dans l’autoradio. De quoi ravir au maximum ce petit taiseux qu’était Grant.

Il était un peu étrange, comme petit bonhomme, très calme, presque trop calme, sauf quand on touchait à un sujet qui lui tenait à cœur comme le bien et le mal et la justice. Sinon, il était vraiment silencieux et solitaire…

Le trajet se passa donc en silence. Je n’avais quand même pas besoin de briefer le petit pour une visite chez mon frère. Ou plutôt, chez sa copine puisque c’était à elle qu’appartenait l’appartement et que mon frère n’avait fait que s’y installer aussi facilement qu’il l’avait fait chez moi.

J’allais sonner à la porte, au niveau du nom de Leïa O’Reily et attendis…

-Tu vas voir, Grant, ce petit couple est vraiment cool. Tu vas être accueilli comme un roi.

Je lui souris.

-Mais interdiction de grimper sur le toit de l’immeuble ou sur les palmiers alentours.

L’appartement, situé sur Hollywood, avait meilleure mine que ma petite maison de l’Eastside. J’espérais que ça allait plaire à Grant. Au moins, il y avait un peu plus de verdure.

Aujourd'hui je n'avais aucun enregistrement à faire. On avait décidé de se donner un jour de congé avec les autres membres du groupe. C'était rare quand on faisait ça depuis le retour de tournée. On bossait à fond sur notre nouvel album et on se donnait du coup très peu de temps libre.

Mais aujourd'hui ça sera différent. Je pourrais enfin profiter d'une journée avec Leia qui avait congé aussi. Mais il n'y avait pas que ça qui me rendait tout fou ce matin. Il y avait aussi le fait qu'on n’allait pas tarder à avoir la visite de mon frère avec un nouveau venu dans notre famille: le petit Grant Custer. Mon frère était devenu son tuteur du jour au lendemain parce qu'il avait accepté les dernières volontés d'une femme morte bien trop jeune que mon frère avait aidée par le passé. Je trouvais ça courageux de la part de Jordan mais ça  ne m'étonnait pas de lui. Ce n’était pas le genre à laisser un enfant sur le bord de la route.

Moi j'étais impatient de rencontrer celui que je considérais déjà comme un petit frère en plus. Le petit frère que je n'avais jamais eu étant le dernier de la fratrie Keller. Je m'imaginais déjà lui montrer les studios où je travaillais et lui apprendre un tas de truc comme la guitare. Bref, tout un tas de truc que j’aurais voulu montrer à mon petit frère.

Du coup, depuis le coup de fil de Jordan d'hier, je ne parlais que de ça à Leia. On avait même acheté, en vitesse hier, de quoi manger et boire pour quand Jordan et Grant viendra.

Ce matin on avait tout mis sur la table basse du salon et je souriais à Leia alors qu'on était prêt à les recevoir.

-Tu crois qu'il aime la musique? Ou le cinéma? Ça serait cool d'aller une fois toi, Grant et moi au cinéma une fois que Jordan travaillera.

Je posai mes mains sur les hanches de Leia. Je crois qu'elle devait commencer à en avoir marre de mes questions et de mes projets. Je ne lui parlais que de ça depuis hier.

-Désolé chérie, je crois que j'en fais un peu trop.

Je souris avant de l'embrasser. Un long baiser qui ne prit fin que quand la sonnette retentit.

-Les voilà!

Je déverrouillai la porte pour les laisser monter avant d'ouvrir la porte d'entrée. Je souris à mon frère.

-Salut Jordan!

Mon regard se posa ensuite sur le petit que j'avais imaginé plus petit. Il tirait un peu la tête. Normal, il devait être impressionné par toutes les nouvelles têtes qu'il rencontrait.

-Salut Grant! Je suis content de faire ta connaissance. Je m’appelle Duncan.

J’avais un grand sourire et le petit marmonna un « bonjour », je pense.

Je les fis entrer et présentai Leia.

-Et elle, c'est Leia, ma petite-amie. Mais tu peux la considérer comme une grande sœur si tu veux.

Je fis un petit clin d'oeil à Leia laissant Grant prendre ses marques.

Duncan est en mode petite abeille guerrière. Il tourbillonne autour de moi pour tout mettre en place pour la visite de Jordan et Grant.  Nous étions passés la veille à l’épicerie pour acheter des trucs cool à grignoter comme des chips, des bretzels, des bonbons et des boissons gazeuses. J’ai dû limiter Duncan à trois choix autrement, nous aurions dans notre réfrigérateur toute la panoplie de saveur sur le marché !

Je laissais Duncan aller, me disant que la frénésie lui passerait à un moment ou à un autre. Je pouvais comprendre son effervescence, son amusement et sa fébrilité.  Ce n’est pas n’importe quoi comme situation nouvelle dans la famille. Disons que je n’aurais pas misé sur ce genre de chose si ont m’avait demandé. Seulement, de ce que je connaissais de Jordan, je pouvais  affirmer sans l’ombre d’un doute que le petit Grant était tombé sur la meilleure personne pour le soutenir et le faire marcher dans le droit chemin.

Et puis ça va aussi briser la solitude de mon beau-frère, le sortir d’une routine de vieux garçon qui s’installe vicieusement. Je parle possiblement au travers de mon chapeau, il faut dire que je ne connais pas Jordan depuis longtemps c’est pourquoi je garde mes commentaires pour moi-même.

Duncan posa ses mains sur mes hanches en me questionnant sur les possibles centre d’intérêt du petit et de planifier une sortie ciné pour quand Jordan sera au boulot.

- Tu n’en fais pas trop ’’trop’’ mais  attend de le rencontrer avant… question de voir si le courant passe bien.

Je ne doutais pas que Duncan pouvait savoir se vendre et devenir super copain avec le gamin mais  je suis un peu du genre à rester sur les gardes pour éviter justement de faire des gaffes… je préfères laisser les gens venir à moi plutôt que de vouloir me faire aimer. Et je ne suis pas spécialement à l’aise avec les tout petit, enfin, je sais que Grant n’a pas non plus trois ans alors ça devrait aller.

Duncan m’embrassa… ce genre de baiser qui ne prend pas fin facilement et qui pourrait ouvrir sur d’autres genres d’activités… qui devront attendre puisqu’on sonna à la porte. Je laissais donc mon amoureux aller ouvrir et en profitais pour replacer mes vêtements qui ont légèrement été malmenés pendant ce baiser.

Jordan et Grant entrèrent au bout d’un bref instant.  Je fis la bise à Jordan pendant que Duncan se présentait officiellement à Grant puis ce fut à moi de prendre la parole alors que Duncan  faisait ls présentations entre moi et Grant.

- Je suis heureuse de te rencontrer !  Venez, on va passer au salon ça sera mieux que dans l’entrée de l’appartement, surtout que Duncan vous a préparé un véritable festin  de grignotines !

Et puis il me semble que de grignoter, ça favorise à la discussion et si jamais ça ne se passe pas, je sortirai le Monopoly ou les dominos !

Jordan criait parce qu’il avait peur que je tombe… Les gens faisaient ça, parfois. Ils criaient parce qu’ils avaient peur. Maman l’avait déjà fait aussi plein de fois. Je ne voyais pas trop l’intérêt. Crier, ça allait pas faire partir la peur. Je crois… Je sais pas trop, en fait. Mais ça semblait pas trop logique.

Je descendis alors… Mais pas vraiment parce qu’il avait peur mais parce que je voulais aller manger. Plus vite je mangeais, plus vite on ira voir son frère et plus vite on sera rentré pour lire mes Comics.

Une fois que je fus en bas, je dis que je faisais rien de mal… Jordan trouvait que c’était pas mal mais dangereux. Je fis la moue avant de froncer les sourcils quand il disait que si je voulais escalader des trucs, je devais le faire en salle.

-C’est pas pareil…

Non… S’il y avait des sécurités et tout, c’était pas drôle. Je préférais quand c’était dangereux. C’est pas marrant s’il y a des sécurités… Moi, je comprenais pas ceux qui escaladaient dans des salles.

Et, en plus, Jordan pouvait rien faire pour tout le bruit alors je fronçai encore plus les sourcils. Mais je ne dis rien. Mais j’étais pas content quand même. J’aimais pas le bruit.

Bon… Je voulais passer à la suite pour revenir plus vite. Jordan voulait aussi alors on rentra à la cuisine et je mangeai mes céréales avec le lait. Jordan, il but que du café. C’était pas bon, le café.

Après, j’ai été me laver et m’habiller et puis on est parti dans la voiture de Jordan. Je croyais qu’il allait me parler pendant tout le voyage comme la méchante dame mais il mit The Burning Fire à la place alors je souris pendant quelques secondes avant d’arrêter de sourire pour regarder le moche paysage en écoutant The Burning Fire.

Plus on avançait et plus il y avait de drôles d’arbres. Je savais pas comment on appelait ces arbres-là mais il y avait pas beaucoup de branches, ni de feuilles dessus… Je préférais les arbres chez moi…

Jordan s’arrêta dans un endroit où il y avait ces drôles d’arbres mais aussi des immeubles. Je regardai autour de nous alors qu’on avança vers une porte où Jordan appuya sur une sonnette. Jordan disait que son frère et sa petite-amie était cool. J’hochai la tête en haussant les épaules.

-Ok…

Je verrais bien moi-même.

Puis, il m’interdit de monter sur le toit de l’immeuble ou sur les palmiers. Je fis une moue boudeuse.

-Je sais même pas ce que c’est, un palmier, alors… Et le toit, c’est trop facile. J’ai vu qu’il y a un escalier sur le côté pour y monter alors c’est pas drôle.

Oui, j’ai vu ça… Quand je vois un truc haut, je regarde tout de suite comment faire pour y monter.

On entendit un bruit et la porte s’ouvrit quand Jordan la poussa. Pourquoi il y a personne derrière ?

-Il y a personne… Comment la porte s’est ouverte ?

Je pris un air contrarié parce que j’avais pas compris. Mais Jordan continua à marcher alors je le suivis. Puis, on grimpa les escaliers et on tomba sur une porte ouverte où le type du poster nous attendait. C’était vrai, alors… Jordan était bien le frère du chanteur de BleedingHeart.

Il fit « salut » à Jordan et puis à moi. Je marmonnai :

-Bonjour…

Il nous fit entrer et je regardai autour de moi. C’était plus beau ici que chez Jordan. Je préférais ici. Puis, je vis la dame qui s’appelait Leia. Elle était belle. Beaucoup plus belle que la moche dame qui m’avait amené ici. Je lui souris enfin et je dis d’une voix distincte, cette fois :

-Bonjour, Leia.

Je pouvais faire comme si c’était ma grande sœur. Mais je ne la connaissais même pas. Alors, ça sera juste Leia. Même si j’aimais bien comme elle souriait et aussi comme elle parlait parce qu’elle se mit à parler. Elle était heureuse de me rencontrer. Je souris toujours et le suivit au salon parce qu’il y avait à manger. Je venais de manger mais j’avais encore faim.

-J’aime bien les chips !

Je m’approchai de la petite table et je pris le gros bol de chips. Je grimpai dans le divan et mis le bol sur mes genoux. Je commençai à manger. Je relevai le regard sur Jordan, Duncan et Leia.

-C’est bon. J’aime les chips au paprika. Juste ceux au paprika. Et j’aime bien cette maison même si c’est petit.

Je fixai Jordan.

-On devrait vivre ici, c’est mieux, non ? On peut faire ça ? Echanger les maisons ?

Je savais que c’était pas possible. Je suis pas con. Mais j’aimais bien ici. Chez Jordan les meubles sont pas trop beaux.

Je continuai à grignoter les chips.

Bon, l’escalade en salle ne semblait pas attirer Grant qui affirma que ce n’était pas pareil. Ouais, justement, ce n’était pas pareil parce que c’était sécurisé. Il me semblait que c’était justement le danger qui attirait Grant… Ce petit avait 9 ans et avait déjà l’air de carburer à l’adrénaline. Putain, je crois que j’aurais préféré qu’il soit déjà, comme moi, accro à la nicotine plutôt qu’à l’adrénaline.

Qui sait ce qu’il pourrait inventer pour se donner le frisson !

On rentra pour déjeuner, moi en reprenant un café et une clope et le petit en fronçant les sourcils tout en mangeant ses céréales. En tout cas, on ne pouvait pas dire que c’était un grand bavard, cet enfant. Et comme je ne l’étais pas non plus, ça n’invitait pas forcément à la discussion. C’était notamment pour ça que je me disais qu’aller voir Duncan ne serait pas un mal. J’étais plus causant avec Duncan et je me disais que peut-être, mon frère aurait le même effet sur Grant.

On écouta The Burning Fire dans la voiture en allant jusqu’à l’appartement que Duncan partageait maintenant avec Leia, sa petite amie.

Le petit sourit à l’écoute de la musique mais s’arrêta de sourire en regardant par la fenêtre. Los Angeles avait beau être belle comme une carte postale, le petit semblait ne lui trouver aucun charme. En même temps, entre le Maine et L.A., c’était un peu le jour et la nuit, pas étonnant qu’il se sente déraciné.

Une fois devant la porte de l’immeuble, je prévins Grant que c’était même pas la peine de penser à monter sur le toit ou sur les palmiers. Et sa réponse me laissa perplexe. Je lui désignai un palmier.

-C’est ça, un palmier, Grant…

Pour l’escalier de secours, je ne fis aucun commentaire mais ça confirmait un peu ce que je pensais. Si c’était trop facile et pas assez dangereux, ça n’intéressait pas Grant. Un Grant qui avait l’air, de l’extérieur, de ne pas ressentir grand-chose. J’étais pourtant persuadé du contraire. Peut-être qu’il ressentait peut-être tellement fort les choses qu’il n’avait plus de place pour parler, trop stimulé qu’il était par tout ce qui l’entourait.  

Il s’étonna de voir que la porte s’ouvrit toute seule.

-C’est un interphone… Tu n’as jamais vu d’interphone ? Les gens peuvent ouvrir la porte de leur habitation à distance.

On monta jusqu’à l’appartement des deux tourtereaux et on fut accueillis comme des rois par Duncan. Je souris à mon frère et fit la bise à Leia en entrant. Ils se présentèrent tous les deux mais Leia sembla avoir un meilleur feeling avec l’enfant.

-Comment ça va ? Duncan ne te fout pas trop le bordel ici, Leia ?

Parce que je me rappelais assez bien de l’état de ma propre maison quand BleedingHeart y résidait.

Je regardai Grant, qui avait salué Leia beaucoup plus clairement que Duncan, et souris.

-Ah… Tu as au moins droit à un sourire.

Puis quand Leia annonça qu’il y avait de quoi grignoter au salon, Grant ne se le fit pas dire deux fois et s’y précipita pour prendre sur ses genoux le bol de chips au paprika.

Et les chips semblèrent lui délier la langue. Il aimait les chips au paprika, ce que je notai dans un coin de mon esprit…

Et il voulait échanger les maisons, ce qui me fit rire gentiment.

-Je crains fort que Leia ne soit pas d’accord, mais si tu es sympa avec Leia et Dunca, peut-être que tu pourras venir souvent.

Je me tournai vers le couple.

-J’ai accepté d’être son tuteur mais seul, ça va quand même être compliqué. Alors si vous vouliez bien m’aider, ce serait vraiment bien.

Puis, à Grant.

-Et si tu nous parlais un peu de ton ancienne maison…. Ou de ce que tu aimes et de ce que tu n’aimes pas ? Hein ? Comme ça on saura…

Et j’espérais bien le faire parler un peu aussi.

Je trouvais que j’en faisais peut-être trop ce qui pourrait, à la longue, lasser Leia. Elle m’entendait parler de mon nouveau « petit frère » tout le temps depuis hier alors, elle en avait peut-être marre. Mais elle ne semblait pas en avoir marre. Elle ne trouvait pas non plus que j’en faisais trop ce qui me fit sourire. La seule chose qu’elle disait c’était d’être plus patient et d’attendre de voir si le courant passait bien entre moi et le petit avant de faire des plans sur la comète.

-Tu as raison. Un pas à la fois.

J’avais tendance à vouloir tout faire trop vite. Pourtant, avec BleedingHeart, j’avais appris, à la dure, que la patience donnait toujours de très bons résultats.

On s’embrassa alors mais on dû mettre fin à ce baiser torride quand Jordan sonna à la porte. Je crois que ça aurait été le facteur pour un coli, je ne serais pas allé répondre. Mais là, c’était mon frère et notre nouveau petit frère alors je réussi à me décoller de Leia pour aller ouvrir la porte.

Rapidement, ils furent devant le pas d la porte et je pus découvrir la bouille du petit Grant qui ne ressemblait pas à l’idée que j’avais de lui physiquement parlant. Je ne sais pas pourquoi mais j’avais imaginé ses yeux plus clair et je l’avais clairement vu plus petit.

Jordan demanda comment ça allait et je souris.

-Super bien !

Et il posa une question à Leia sur le fait que je foutais le bordel. Je rigolai un peu. Depuis que j’étais avec Leia, je faisais beaucoup d’effort sur le rangement. Chose que je ne faisais pas quand j’étais chez mon frère. Mais je laissais tout de même répondre Leia.

Ensuite, je saluai Grant et il marmonna un peu avant que je ne présente Leia à qui il parla un peu plus fort et avec un petit sourire. Il faut dire que Leia savait mettre les gens à l’aise rien que par a présence. Et, apparemment, le petit n’était pas avare de sourire comme venait de le révéler mon frère.

-Ça va venir, tu verras.

J’en étais sûr. Il fallait juste le temps que le petit apprenne à tous nous connaitre. Il venait de débarquer à Los Angeles et sa mère était morte il n’y a pas longtemps alors ça ne prêtait sûrement pas à sourire.

En tout cas, Leia semblait avoir décoincé un peu Grant parce que quand elle parla des chips, il fila au salon et pris directement le bol de chips au paprika monopolisant tout pour lui. Ça me fit rigoler et je me tournai vers Jordan.

-Tu ne l’as pas nourri, aujourd’hui, ou quoi ? Il est affamé.

Jordan devait lui avoir donné à manger. C’était juste de l’humour. Le petit était en plein croissance alors il devait sûrement manger beaucoup. Et qui disait non à des chips ?

Le petit se mit alors à parler disant qu’il aimait les chips au paprika mais pas la maison de Jordan. Il préférait notre appartement à moi et Leia et voulait échanger. Ça me fit à nouveau rire. Il avait de l’humour, le petit Grant. En tout cas, il avait du franc-parler.

Jordan rétorqua que ça n’allait pas être possible mais qu’il pourra venir parfois ici de temps en temps. Je souris en m’installant à terre et en prenant une canette de coca que j’ouvris.

-Oui, tu pourras venir de temps en temps. Enfin, si Leia est d’accord.

Je savais qu’elle le serait. Tout comme je savais qu’elle ne serait pas contre de sortir de temps en temps avec moi et Grant.

Jordan se tourna alors vers lui déclarant qu’élever un enfant seul, ça n’allait pas être facile et qu’il n’était pas contre de l’aide. Oui, je me doutais que ça n’allait pas être de tout repos et que mon frère, seul, sera de temps en temps dépassé sans compter qu’il travaillait aussi… On pourra de temps en temps venir le garder mais Leia et moi on travaillait aussi… Peut-être que Jordan devra aussi trouver une baby-sitter ? En tout cas, je ferais de mon mieux pour l’aider. Je lui souris.

-On t’aidera au maximum. Dès que tu as besoin de moi, tu n’auras qu’à appeler et je viendrais. Et quand tu travailles, si je suis là, je voudrais bien venir garder Grant chez toi.

Je ne voulais pas non plus l’imposer tout le temps à Leia. Je savais qu’il nous fallait aussi notre espace en tant que couple mais j’allais aider mon frère le plus possible.

-Et si jamais il te faut une baby-sitter en plus, je pourrais t’aider à en trouver une.

Je laissai Leia donner son avis en buvant mon coca alors que Jordan s’adressa à Grant pour qu’il parle un peu de lui. Ils ne semblaient pas encore avoir très bien fait connaissance tous les deux. En un jour, ce n’était pas simple. Je me tournai vers le petit et affichai un grand sourire.

-On t’écoute.

J’avais hâte d’en savoir plus sur lui.

Duncan ferait un excellent grand frère et même, un papa attentionné.  Je peux l’affirmer uniquement en le voyant se fendre en quatre pour que tout soit absolument parfait pour la visite de Jordan et du petit Grant. De mon côté, j’ai également hâte de faire sa connaissance du nouveau membre de la famille.

Si nos invités n’avaient pas choisi de sonner à la porte à cet instant, notre baiser  aurait fort probablement mené à tout autre chose.  Ce n’est que partie remise… Jordan et Grant firent leur entrés. Je fis la bise à Jordan, toujours heureuse que je suis de le revoir. J’apprécie le grand frère de mon amoureux, il a un petit je ne sais quoi pince sans rire, enfin, c’est quelqu’un de bien qui gagne à être connu.

- Non, ça va encore…  Ses vêtements ne trouvent pas encore eux-mêmes le chemin du panier à linge mais j’y travail !

Après avoir répondu à Jordan en blaguant, je salut Grant qui me répond en affichant un timide sourire mais un sourire, quand même ! Je les invitais à passer au salon, là où les chips nous attendaient ce qui ne manqua pas à l’attention de Grant qui s’empara d’un bol avant de s’installer sur le divan avec en disant qu’il aimait bien notre petite maison.

- Oh, et bien, je te remercie Grant, c’est gentil.

Je pris place sur un fauteuil en face de Grant et de son bol de chips alors que Jordan lui expliquais que ça ne se faisait pas d’échanger de maison mais que, cependant, il pourrait venir quand bon lui semblera ce à quoi j’acquiesçais en faisant oui de la tête.  La situation est nouvelle pour Jordan qui s’est embarqué dans une entreprise de taille. Cependant, il pourra compter sur Duncan et moi pour  le soutenir et l’aider quand il en aura besoin.

- Bien sûr que je suis d’accord.  Nous sommes là pour vous deux.

Duncan et moi voulions nous impliquer, je crois que c’est normal, en famille de se soutenir et de se donner des coups de mains quand c’est nécessaire.  

- Oui et comme le dit Duncan, tu nous passe un coup de fil quand tu veux. Il y aura toujours façon de s’arranger pour qu’il y ait quelqu’un avec Grant.

Avec le bar, mon horaire est surtout le soir donc j’ai mes journées plutôt libres pour faire des activités avec Grant. Ce dernier, entre deux bouchées de chips, demanda s’il était possible d’échanger nos maisons. Faut croire qu’il est sympa mon appart même s’il est plus petit que la maison de Jordan.

- Oh, oui ! Moi ça m’intéresse d’écouter ce que tu as à dire, Grant. Pour mieux te connaître et savoir ce que tu aimes, entre autre.

Je me penchais vers l’avant pour prendre quelques chips dans le bol que tient Grant, avant qu’il ne le termine.  Moi aussi, j’aime bien les chips au paprika.

Palmier… Interphone… Je fronçais les sourcils… Jordan me regardait comme si j’étais un peu bête parce que j’avais jamais vu ni l’un, ni l’autre. J’avais jamais vu des arbres aussi moches et je comprenais pas comment un porte pouvait s’ouvrir à distance. Pourquoi les gens descendent pas jusqu’ici ? Pourquoi ils vivent tous dans un grand immeuble tout moche ? Une maison, c’est mieux.

Je marmonnai :

-Non… J’ai jamais vu ça… Et j’aime pas les palmiers.

C’est tout ce que je dis avant qu’on ne monte dans l’endroit où vivait le frère de Jordan. Je souris pas trop à son frère qui rangeait jamais si je comprenais bien mais bien à la dame qui s’appelait Leia. A elle, je voulais bien sourire parce qu’elle semblait gentille. Jordan disait qu’elle avait le droit à un sourire. Son frère disait que mes sourires allaient venir… Ça se commandait pas. Je souris quand j’ai envie.

Mais je dis rien parce qu’il y avait des chips. Alors, je pris les chips sur mes genoux et je commençai à les manger. J’aimais bien la maison ici et j’aimais bien les chips au paprika. Leia me remercia. Elle trouvait que c’était gentil. Oui, je suis gentil. Je lui souris. Peut-être qu’elle allait accepter qu’on échange les maisons ? Mais Jordan voulait pas… Il disait, par contre, que si j’étais gentil avec son frère et Leia, ils me laisseront venir ici. Je fis une petite moue.

-C’est nul de pas pouvoir échanger… Mais je serais gentil. Je suis toujours gentil, moi. Je fais rien de mal.

Oui, sauf quand on était méchant avec moi, là, je me transformais en Batman.

Puis, ils parlèrent entre grand pendant que je mangeai des chips. Je regardais que mon bol… Mais j’écoutais aussi. Jordan voulait de l’aide… Pourquoi ? Maman s’occupait bien de moi seule… Pourquoi pas Jordan ? Puis, je sais me débrouiller tout seul aussi. Mais il voulait quand même de l’aide pour me garder et tout et Duncan et Leia voulaient bien lui en donner. Je fis juste une moue quand ils parlaient de baby-sitter. J’aime pas les baby-sitters. Ou alors, je veux bien que ma baby-sitter soit Leia. Mais personne d’autre.

Mais je ne dis rien… Jusqu’à-ce que Jordan me parle à moi. Il voulait savoir comment était ma maison et ce que j’aimais et ce que je n’aimais pas. Duncan voulait savoir aussi et Leia aussi. Leia qui tendit la main pour prendre un chips dans mon bol. Elle voulait des chips ? Je lui souris et tendis un peu le bol vers elle pour qu’elle puisse en prendre plus. Je voulais bien partager avec Leia. Maman m’avait appris à partager.

Après, je perdis mon sourire quand je reposai mon regard sur Jordan pour reprendre un air neutre et parler de ma maison d’avant.

-Ma maison était belle et plus grande qu’ici. Un peu plus grande que celle de toi, Jordan. Il y avait un grand jardin avec des beaux arbres, pas des laids palmiers. J’avais ma cabane dans un arbre. Il y avait pas tout plein de maisons autour. Juste quelques-unes un peu plus loin. J’avais une belle chambre avec des posters de Batman et d’autres héros.

Voilà pour ma maison. Maintenant, ils voulaient savoir ce que j’aimais bien et ce que je n’aime pas.

-J’aime pas Los Angeles, mon ancienne baby-sitter, les gens méchants, les gens qui étaient dans mon école, l’école, les légumes, l’avion, la dame qui m’a amené hier, le foyer où j’étais, le matin, mon père, le bruit de la ville et plein d’autres choses.

Il y avait trop à dire… J’avais tout cité comme ça…

-Et j’aime bien lire des Comics, Maman, The Burning Fire et les pizza. C’est tout.

Il savait tout sur moi maintenant. Moi, j’étais facile. Je regardai à nouveau mes chips et je me remis à les manger calmement.

Je ris avec Leia qui déclara que mon frère avait encore du mal à ranger ses vêtements, ne fusse que pour les jeter dans le bac à linge… Cela ne m’étonnait pas de Duncan qui avait tendance à abandonner un peu tout ce qu’il prenait sur son chemin…. Et moi de courir derrière pour que la maison semble encore un peu rangée. Mais désormais, cette tâche ne me revenait plus et c’était à Leia de courir, la pauvre.

Grant sembla avoir un meilleur feeling avec cette dernière qu’avec moi ou Duncan. Peut-être parce qu’elle était une femme et que Grant s’accrochait à une image maternelle, ou simplement que c’était un hasard ou le sourire de la jeune femme qui était contagieux. Mais au moins, j’eus le plaisir de voir l’enfant sourire pour la première fois.

Et mieux encore quand on lui annonça qu’il y avait de quoi manger dans le salon. Il alla alors s’installer dans le divan, à l’aise comme s’il était chez lui, avec le bol de chips sur les genoux.

Je suivis le mouvement et m’assis dans un fauteuil en répliquant à mon frère qui se demandait si je nourrissais ce gosse.

-Bien sûr ! Il vient de m’engouffrer un grand bol de céréales il y a une demi-heure.

Le couple était prêt à me donner un coup de main dans la mesure de leurs capacités. Et Duncan me proposa même de m’aider à trouver une baby-sitter.

-Ouais… Si j’ai besoin d’une baby-sitter, t’inquiète, je passerai une annonce dans un magazine… L.A.People, ça devrait le faire.

Leia alla s’installer à côté de Grant dans le salon et partagea avec le petit les chips au paprika. Gentiment, Grant posa son bol plus entre eux deux que pour le monopoliser. Au moins, le partage n’était pas quelque chose que j’allais devoir lui apprendre.

Tous trois, nous voulûmes alors connaître les goûts de Grant, ce qu’il aimait et ce qu’il n’aimait pas. Et il en revint à une voix plutôt monocorde pour énoncer une liste. Dommage que je n’avais rien pour noter mai heureusement, j’avais une bonne mémoire. Je tiquai un rien quand il dit ne pas aimer les baby-sitters mais on allait s’en sortir. Au pire, j’avais pas mal de congés accumulés à prendre.

Il n’aimait pas les palmiers non plus, soit dit en passant… Peut-être parce que c’était vraiment compliqué d’y grimper. L’école, il n’aimait pas non plus.

Quand il eut fini son énoncé, je ris un passant une main sur mon visage.

-Quelque chose me dit que ça ne va pas être de tout repos tous les jours.

De peur d’angoisser Grant alors que nous n’en étions pas encore là, je choisi de ne pas lui dire maintenant que l’école, il devrait bien y retourner un jour, tout comme je ne comptais pas manger des pizzas tous les jours.

Un truc qui m’avait fait tiquer aussi, c’était que dans la liste de ce qu’il n’aimait pas, il y avait son père. Et ça, je voulus le creuser un peu plus loin, lançant au passage un regard interrogateur à Leia et Duncan comme s’ils détenaient des réponses que je n’avais pas alors que je savais pertinemment que ce n’était pas le cas.

-Ton père… Tu connais ton père ?

Ou est-ce qu’il n’en savait que ce que sa mère lui en avait dit ?

Au moins, Leia trouvait que je n’étais pas si bordelique que ça même si j’avais encore des efforts à faire. J’essayais chaque jour d’en faire plus pour que notre vie à deux, avec Leia, soit la meilleure possible pour tous les deux.

On finit par passer au salon où grand sauta sur les chips comme si Jordan ne l’avait plus nourri depuis des siècles. Mais, en réalité, le petit avait déjà mangé il n’y a pas une demi-heure. Je rigolai un petit peu.

-Il faut croire qu’il est en pleine croissance.

Puis, j’imagine qu’à cet âge-là, ça se dépense beaucoup. Alors c’est normal qu’il ait besoin de tant manger. Et puis, qui a besoin d’avoir faim pour manger des chips ? Personne, je crois.

Après ça, Jordan sembla demander un peu d’aide. Vu qu’il travaillait, il en aura au moins besoin pour surveiller Grant de temps en temps. Moi, j’étais d’accord pour aider Jordan autant qu’il en aura besoin. Leia aussi était d’accord et je souris à ma petite-amie. Je savais qu’elle n’aurait pas refusé d’aider mon frère. Leia avait un cœur en or. Comme elle le disait, on s’arrangera.

-Oui, on fera au mieux.

Quant à me proposition d’aider Jordan à trouver une baby-sitter s’il en avait besoin, il disait que L.A.People pourrait l’aider à ça. Beaucoup de gens lisait le magazine people alors c’était clair que c’était le meilleur moyen de toucher un maximum de gens. Je souris.

-Tu as raison. L.A.People est ton meilleur allié pour ça.

Après ça, tout le monde tourna son regard vers le petit attendant sa réponse sur ce qu’il aimait et ce qu’il n’aimait pas. Je souris un peu plus quand, gentiment, il partagea ses chips avec Leia. Décidément, elle reportait tous les suffrages auprès du petit Grant.

Grant commença à parler en expliquant comme était sa maison. Il venait de la compagne d’après ce que j’en savais, du coup, il semblait ne pas vraiment aimer la ville. Je comprenais… Je venais du Nevada. Ce n’était pas autant dépaysant que le Maine mais ce n’était quand même pas la même chose que Los Angeles. Mais c’était clair que son « chez lui » lui manquait quand même.

-Ça a l’air vraiment bien, le Maine. Tu sais, on pourra y retourner parfois. En vacances, ou quoi.

J’avais maintenant assez d’argent pour ça alors pourquoi pas aller une fois en vacances là-bas tous les quatre ? C’était une bonne idée peut-être ?

Il se mit après à lister tout ce qu’il n’aimait pas d’une voix très monocorde. Je l’écoutais comprenant que l’école, ce n’était vraiment pas son truc. Certainement parce qu’il ne devait pas s’y sentir à sa place. Ça arrivait chez pas mal d’enfants. Il n’aimait pas son père, non plus… Je ne savais pas grand-chose sur Grant et Jordan devait certainement avoir plus de détails là-dessus. Quand il finit sa liste, je souris tout de même.

-Moi non plus, je n’aime pas les légumes.

Puis le petit passa à ce qu’il aimait et la liste fut bien plus courte. Ça semblait être un fan de super-héros. Tant mieux, j’adorais les Comics moi aussi. Et puis, il aimait The Burning Fire et je connaissais les membres du groupe alors peut-être que ça pourrait l’intéresser de les rencontrer.

Mais avant de proposer ça, Jordan déclara que ça n’allait pas être de tout repos tous les gens. Je rigolai un peu.

-Oui, en effet.

Pauvre Jordan… C’est clair qu’élever un enfant de 9 ans, ce n’était pas simple. Mais je savais qu’il pourra y arriver.

Mon frère nous regarda alors Leia et moi avec un regard interrogateur. Je levai un sourcil et haussai les épaules ne comprenant pas pourquoi il nous regardait comme ça. Mais tout s’éclaira quand il demanda à Grant s’il connaissait son père. Je penchai légèrement la tête sur le côté. Apparemment, les informations qu’avait Jordan ne concordais pas avec ce que savais Grant. Je regardai Jordan, puis Leia, puis le petit me taisant et attendant de voir ce que pourrait nous dire Grant à ce sujet.

Pour Jordan et Grant, il est question d’une grande période d’adaptation qui va amener beaucoup d’ajustement pour l’un comme pour l’autre.  Grant est peu bavard, encore moins démonstratifs. Ça semble tenir du miracle que j’ai eu un sourire. On ne peut pas vraiment en vouloir au petit de se refermer sur lui-même, ce doit être déboussolant que de se retrouver balloté d’un foyer à un autre.  Je n’ai pas tous les détails de l’histoire et de comment il est arrivé chez Jordan, mais quoi qu’il en soit, au final, il est bien tombé le petit.

Duncan et moi sommes d’accord sur le fait que nous voulons aider Jordan avec ses nouvelles responsabilités et que ça ne nous embête pas le moins du monde de jouer les baby sitter sur appel. C’est quelque chose d’important, de pouvoir s’entre aider en famille, en tous les cas ça me tient à cœur de pouvoir contribuer, moi aussi.  Puis si jamais  ça coince et que personne ne peut, il y aura toujours la possibilité de passer une annonce dans L.A.People comme le dit si bien Jordan.
 
Grant me laisse piocher dans le bol de chips, alors que Jordan tente une approche pour ouvrir la discussion en demandant au petit de parler  de lui, question qu’on en apprenne d’avantage. Et moi aussi, je suis curieuse de savoir ce qu’il aime et ce qu’il aime moins… ou pas du tout.

Sa maison lui manque, et Los Angeles n’arrive pas à la hauteur de cheville du Maine.  Soit, comme le dit Duncan. Nous pourrons peut-être envisager de s’y rendre pour les prochaines vacances, ça serait chouette.  En tous les cas, moi, s’il y a une plage et du soleil, je dis oui immédiatement.

Vient ensuite la liste de ce qu’il aime et ce qu’il n’aime pas.  La liste de ce qu’il n’aime pas me semble infini, et triste aussi, un peu. Il n’aime pas les gens méchants, l’école et les gens qui étaient à son école. Ça me laisse croire qu’il se faisait peut-être taquiner méchamment à son ancienne école, assez pour qu’il  envoie l’école dans la liste des j’aime pas.

Et puis son père. Il n’aime pas son père.

Je suis un peu resté accroché à la liste des négatifs au point où je secoue la tête en réalisant qu’il vient d’énumérer quelques trucs qu’il aime.

- On fera des pizzas en écoutant du Burning Fire un jour si tu veux.

Si ça peut le motiver, je suis prête à  virer sans dessus dessous ma cuisine et à flipper des pâtes à pizza dans les airs.  Pourquoi pas ?

Jordan, assit plus loin commenta sur le défi que sa nouvelle situation représentait et Duncan d’acquiescer. Je penchais un peu la tête sur le côté en me mordant la lèvre.  Effectivement, les choses ne s’enlignent pas pour être comme une belle balade tranquille en bateau, mais tout se travail un jour à la fois. Je pense que Grant est comme un onion qu’il faudra peler une couche à la fois.

Mon beau-frère questionna ensuite Grant sur son père. C’est un détail qui m’intéresse, question de mieux comprendre  Grant et en savoir d’avantage sur lui.  Et puis je me sens moins seule à tenter de faire des liens.  On dirait que nous sommes les trois suspendues aux lèvres de Grant, assoiffés de savoir la suite.

Il peut rêver pour la baby-sitter… Je ne veux pas de baby-sitter… Je ne les aime pas. Celle qui s’occupait de moi était méchante et Maman n’à plus voulu me laisser avec une baby-sitter après. Elle me prenait au travail avec elle… Jordan n’à qu’à me prendre au travail avec lui. Je l’aiderais à chasser les méchants. Je veux bien faire ça.

Je lui dirais tantôt. Pour l’instant, je mangeais des chips que je partageai avec Leia parce que je l’aimais bien. Après ça, je parlai de ma maison dans le Maine. Je voulais y retourner… Je voulais y retourner et y vivre seul vu que Maman, on pouvait pas la ramener. Je savais ça parce que j’étais pas con. Toutes les maisons, ici, ont l’air laides à côté de celle où je vivais dans le Maine.

Duncan disait qu’on pourra y retourner en vacances. Je le regardai et j’hochai la tête.

-Un jour, j’y retournerais pour toujours.

Je resterais pas à L.A. toute ma vie. Je savais que quand je serais plus grand, je pourrais faire ce que je veux et aller où je veux. Et je rentrerais dans la maison dans le Maine pour y vivre.

Après, je dis tout ce que j’aimais pas. Il y avait beaucoup de choses que j’aimais pas. Et Duncan n’aimait pas non plus les légumes. J’hochai de la tête. Oui, les légumes, c’est dégueulasse. Maman avait essayé que j’en mange une fois… J’ai dit que j’aimais pas et elle ne m’en a plus jamais mis dans mon assiette.

Après, je citai ce que je n’aimais pas… Et Leia, à la fin, dit qu’on pourra manger des pizzas en écoutant The Burning Fire. Je lui fis un sourire.

-Oui, je veux bien. Avec toi, je veux bien.

Parce que je l’aimais bien.

Jordan, lui, disait juste que ça allait pas être facile tous les jours et son frère, il pensait la même chose. Je perdis mon sourire quand je les regardai l’un et l’autre. Mais je ne dis rien. Je fronçais juste un peu les sourcils. Je suis facile… Je comprends pas… J’ai dit tout ce que j’aimais et ce que je n’aimais pas. C’était clair… Je comprenais pas ce qui était compliqué dans la liste.

Puis… Jordan posa une question sur mon père… Et tous, encore, se retournèrent vers moi pour me regarder. Je regardai Jordan en reprenant la même expression que quand j’avais énumérer tous ce que j’aimais et ce que j’aimais pas.

-Je l’ai jamais vu… Mais Maman m’en a parlé.

Elle m’en a parlé plusieurs fois. Maman avait peur de lui. Maman avait quitté L.A. à cause de lui. Maman était souvent triste à cause de lui. Pourtant, je l’avais jamais vu.

-Je sais qu’il vit ici, à L.A… Je sais que Maman en avait peu. Je sais que si elle était triste parfois, c’était à cause de lui. Je sais que c’est quelqu’un de très méchants.

Quand je parlais, mes sourcils se fronçaient un peu plus. Je n’aimais pas son père. Quand je parlais de lui, j’étais fâché à l’intérieur. Parce que quand Maman était triste, je n’aimais pas ça du tout.

-Mon père... C’est Thanos. Maman l’appelait Ward… Mais pour moi, c’est Thanos.

Quand Maman en parlait, je voyais Thanos. Parce qu’il était méchant comme Thanos.

-Maman disait que s’il me trouvait un jour, je devais courir vite et grimper sur l’immeuble le plus grand. Elle disait que, là-haut, je serais protégé.

Et je sais bien grimper !

-Maman sait pas s’il vit encore… Mais s’il vit encore… Quand je serais Batman. Je l’attraperais… Et puis je le tuerais.

J’avais pas lâché les yeux de Jordan. C’est ce que je voulais faire. Parce que des gens si méchants, ils méritent pas de vivre.

Le petit couple que formaient Leia et Duncan était prêt à tout pour m’aider au maximum. Et je leur en étais grandement reconnaissant. En plus, Leia semblait d’une patience à toute épreuve en plus de remporter des points auprès du petit Grant. Quant à Duncan, il était enjoué quoi qu’il arrive, toujours le verre à moitié plein. Alors je ne doutai pas d’être bien entouré dans cette épreuve pour tout ce que ça aurait de bon et de moins bon.

Grant nous fit la liste de ses goûte te ça nous laissait peu de marge de manœuvre. Même si ça nous donnait une belle base sur laquelle commencer. Par exemple, Leia lui proposa une soirée pizza-The Burning Fire. Pourquoi pas… En tout cas, Grant semblait d’accord de faire ça avec Leia.

-Je n’aime pas les légumes non plus, de toute façon…

Duncan, lui, proposait d’aller dans le Maine en vacances et Grant de dire qu’un jour, il y retournerait pour toujours.

-Quand tu seras en âge de choisir, si tu veux y retourner, on t’y aidera. Mais une chose à la fois.

Il y avait encore au moins 11 ans avant que Grant puisse décider où aller vivre. En attendant, il devrait se contenter de moi.

Puis, je me concentrai sur un autre point interpellant de sa liste : son père. Il disait ne pas aimer son père. Ce qui me perturbait parce que, s’il avait un père connu, ça aurait dû être vers lui que les services sociaux auraient dû se tourner, bien avant moi.

Mais ça s’éclaircit quand Grant affirma ne jamais l’avoir vu, mais que sa mère lui en avait parlé, qu’il vivait ici, à L.A. Que sa mère en avait peur… Et ça semblait retourner quelque chose à l’intérieur du petit. JE le laissai parler, sans l’interrompre. Pour lui, son père, c’était Thanos… Il s’appelait Ward.

Je passai une main dans mes cheveux, les yeux écarquillés…

-Ward ? Ward Fleming ?

Si c’était lui, je comprenais que sa mère lui ai dit de fuir si jamais il le voyait. J’avais eu à faire plusieurs fois à Ward Fleming, et il était intelligent… C’était ça qui le rendait plus dangereux que les délinquants lambda de L.A.

Grant, lui, nourrissait des envies de vengeance vis-à-vis de son père.

-Pas si le Commissaire Gordon l’enferme avant.

Combien y avait-il de Ward à Los Angeles… ? Je n’en avais jamais entendu parler que d’un. Je me levai, passant nerveusement une main dans mes cheveux et m’allumai une cigarette. Combien de Ward à Los Angeles… Cette question me taraudait maintenant.

-Tu sais à quoi il ressemble ? Ton père. Tu sais ?

Je me tournai vers lui et le regardai de haut en bas, mon cœur accélérant un peu le rythme alors que je voyais sur Grant les traits de Ward Fleming.

Comme Grant semblait adorer le Maine bien plus que Los Angeles, je lui proposai d’y aller en vacances un jour… Mais lui, prévoyait déjà d’y déposer ses valises pour de bon quand il sera grand. Enfin, « un jour », en tout cas, c’est ce qu’il disait. Je souris me disant que, peut-être, il finira par aimer Los Angeles comme j’ai appris à l’aimer. C’est vrai que les débuts sont toujours difficiles.

Jordan, lui, voulait faire chaque chose en son temps. Je reconnaissais bien là mon frère qui savait toujours bien mettre les balises, là où il le fallait. C’est pour toutes ces choses-là que je me disais qu’il était totalement apte à élever Grant même si la tâche n’allait vraiment pas être facile.

Leia, quand le liste de Grant fut terminée, proposa elle de manger des pizza en écoutant The Burning Fire ce qui semblait beaucoup emballer le petit. Je souris. Elle avait vraiment le droit à de beaux sourires, ma Leia.

-Ah ouais, ça peut être une soirée super fun !

Mais ce qui intéressait Jordan, dans toute la liste, c’était le père de Grant. Un père qui était dans la catégorie « j’aime pas ». Je regardai Grant qui sembla un peu plus bavard. Mais son discours était… Interpellant, en fait. Sa mère semblait avoir peur de son père. C’est ce que je comprenais. Et si le petit le comparait à Thanos, c’est que son père ne devait pas être quelqu’un de sympa… D’ailleurs, il disait lui-même qu’il était très méchant. Sa mère lui avait même dit de courir s’il le voyait… Ça voulait quand même dire beaucoup…

Mais c’est surtout la réaction de mon frère qui attira mon attention. Je regardais vers lui alors qu’il cita un nom de famille. Fleming. Ce nom ne me disait absolument rien… Pas plus que Ward, d’ailleurs. Mais vu sa tête et ses mots quand il parla du commissaire Gordon alors que le petit, lui, parlait de se venger en tuant son père, je sus que ce Ward devait certainement faire partie des « clients » de mon frère. En tout cas, il en avait entendu parler et c’était sûrement dans le cadre de son boulot.

C’était ma conclusion en tout cas alors que je restais à la fois pendu aux lèvres de Grant et de mon frère.

Mon frère était nerveux et s’alluma une clope alors que mon frère posait d’autres questions à Grant pour essayer de cerner si le Ward auquel il pensait été bien le Ward père de Grant. J’intervins alors.

-C’est qui ce Ward Fleming ? Il a fait quoi ? Tu l’as déjà vu Jordan ?

Je voulais en savoir plus parce qu’il me manquait des informations. Je n’avais aucune idée de qui était Ward, ni potentiellement ce qu’il avait fait pour rendre mon frère aussi nerveux et Grant aussi en colère.

Je me tournai ensuite vers Leia.

-Tu le connais, chérie ?

Je la regardai avec un air interrogateur. Leia était barmaid au Crazy Ginger… Des gens louches, elle devait en avoir connu pendant sa carrière. Peut-être qu’elle avait croisé ce Ward.

Le contact se faisait petit à petit avec Grant. Parfois il vaut mieux y aller une pierre à la fois que de foutre un TNT et espérer que ça pète sans faire de dégât.  Et puis il s’agit d’un enfant avec un parcours… disons particulier. Tout ce que nous risquons de gagner en le brusquant c’est de se voir se refermer comme une huître et devoir attendre  son premier rendez-vous avec un psy pour en apprendre plus.

À coup de petites questions toutes simple, nous apprenons que pour lui, le Maine est synonyme de terre Sainte. C’est là d’où il vient et il a la ferme intention d’y retourner pour toujours. L’idée d’aller y passer des vacances pourrait peut-être prendre la forme d’un compromis en tous les cas, pour tout de suite, Grant ne semble pas s’y opposer tout comme il accepte notre soirée pizza en écoutant The Burning Fire.

Ça me vaut un sourire de plus !  Je les collectionne comme une étoile dorée dans mon cahier d’écolière.

Dans la liste de ce qu’il n’aime pas, Jordan  reste accroché sur le détail du père.  Le petit explique alors que c’est de sa maman que lui vient les quelques informations à son sujet.  La description n’est pas joyeuse, le genre d’homme  de qui il vaut mieux se tenir loin. En parlant, le puzzle semble de moins en moins flou, Jordan en vient même à sortir un nom.

- En fait…

Je regarde Duncan qui me demande si je le connais.

- Oui… et non.  De réputation seulement. Il y a longtemps de ça il traînait quelque fois au Crazy Ginger. Il n’est plus venu depuis  très longtemps. Si je lui ai adressé la parole, ce fut que pour lui dire combien il me devait.

Je me garde bien de dire devant Grant que selon les rumeurs, Ward Fleming serait possiblement mort. Rien de bien étonnant, les petites frappes se font toujours avoir à un moment où un autre.

Je regarde Duncan, puis Jordan puis à nouveau Duncan avec un air interrogateur.  Ça change quoi que Grant soit possiblement le fils de Ward Fleming ? Ce dernier ne doit même pas le savoir, je veux dire, ce genre de mec couche sans demander de téléphone, si ça se trouve, il y a pleins de petits Fleming en liberté dans la nature. Cela dit, ça semble inquiéter mon beau-frère.

- J’ai un jeu de charades ! Ça vous dit ?

Ma proposition tombe dans le vide, je m’en doute un peu, cela dit, ce n’était qu’une tentative pour faire une légère diversion pour éviter que l’ambiance se plombe.

- Ou on peut… continuer de manger des chips. Ou appeler pour des pizzas et faire jouer The Burning Fire ?

Avec Jordan, on ne mangera pas de légumes. Il ne les aimait pas non plus. C’était bien comme ça. Les légumes, c’était pas bon.

Et je voulais retourner dans le Maine, un jour, et y vivre pour toujours. Je voulais retourner dans ma maison. J’aimais bien ma maison. Mais Jordan disait que je devrais attendre d’être grand. Je fis une moue. J’ai 9 ans. Je sais me débrouiller seul. Dans un an, je retournais dans le Maine.

-Je sais choisir…

Je mangeai mais chips mais arrêtai de manger quand Jordan posa des questions sur mon père. Je relevai le regard sur lui… Avant de parler de mon père. De dire que je ne l’aimais pas. De dire qu’il s’appelle Ward. Et Jordan fit un drôle de regard alors que j’arrivais pas à contrôler que je m’énervais à cause de mon père pour ce qu’il faisait à ma mère même en étant pas là. Je n’aimais pas ça.

Jordan demanda si je parlais de Ward Fleming. J’haussai des épaules.

-Je sais pas… Maman l’appelait juste Ward. Elle l’appelait jamais autrement.

Et moi, quand je serais Batman, je tuerais mon père. Parce que c’est un méchant et qu’il faut tuer les méchants. Mais Jordan disait que je pourrais pas le tuer si le Commissaire Gordon le mettait en prison avant. Je le regardai penchant légèrement la tête sur le côté. Le Commissaire Gordon, c’était Jordan.

-Il y a les stupides lois. Le Commissaire Gordon pourra pas à cause des stupides lois.

Il m’en avait parlé hier. J’avais retenu que les lois étaient connes. J’avais retenu que Maman aurait été moins triste sans les lois.

Jordan s’alluma une cigarette et je plissai du nez. Je n’aimais pas ça. Pourquoi il fumait tout le temps ? Je voulais qu’il arrête !

Mais il continua ses questions. Il voulait savoir à quoi ressemblait mon père. J’haussai des épaules.

-Maman avait pas de photos. Maman disait qu’il était grand et qu’il avait des cheveux noirs… Je sais plus quoi d’autre. Maman m’a dit ça pour fuir si je le voyais. Mais plein de gens sont grands et ont des cheveux noirs.

Puis, Duncan se demandait aussi qui était Ward Fleming. Je ne dis rien et quand Leia parla je la regardai et mon visage se radoucis. J’aimais bien quand Leia parlait. Elle avait une voix douce comme Maman.

Elle connaissait Ward Fleming. Il était venu au Crazy Ginger. Je sais pas c’est quoi… Mais Laie l’avait plus vu depuis longtemps. Peut-être, il est mort. Je regardai Jordan.

-Maman disait que c’est un tueur… Thanos aussi, il tue.

Leia parla à nouveau et demanda si on voulait jouer à un jeu de charade. J’aimais pas trop les jeux comme ça. J’allais le dire mais Leia proposa autre chose. Je lui souris.

-Je veux une pizza et The Burning Fire. Puis, je rentrer chez Jordan pour lire mes Comics.

Je levai les yeux sur Jordan.

-Je veux faire tout ça.

J’aimais bien faire tout ça. Je fis même un sourire à Jordan pour qu’il dise « oui » à tout ça. Ça fonctionnait mieux avec un sourire que les gens disent « oui ». J’avais appris ça.

La petite amie de mon frère semblait gagner des points auprès de Grant. C’était bien, il y aurait au moins une figure féminine à laquelle il pourrait se raccrocher.  Mais mon attention fut déviée de ça quand Grant plaça sont près dans la catégorie « Je n’aime pas » et qu’il en parla comme d’un homme s’appelant Ward.

Mon frère se demanda si je le connaissais. Si Leia le connaissait aussi… Et d’après la description qu’en fit Leia, elle voyait de qui on voulait parler.

Maintenant, était-ce bien le père de ce petit bout d’homme qui tenait ses chips serrés contre lui, rien n’était moins sûr. Mais à force de le regarder de haut en bas, couplant ça avec la définition que le petit en fit selon les dires de sa mère…

J’avais bien peur que nous parlions du même Ward.

Alors je finis par répondre à mon frère :

-Il est bien possible que je voie qui c’est… Un abonné à nos cellules, souvent pour des bagarres. Mais comme Leia, ça fait un bail que je ne l’ai pas vu.

Le petit voulait le tuer… Et je lui répliquai qu’il ne pourrait pas si je l’enfermais avant, usant des références à ses comics préférés.

-Si… même avec les maudites lois, je peux l’enfermer. C’est le tuer que je ne peux pas faire.

Sauf cas extrême où ce serait lui ou moi.

Grand continua à parler de sa mère et de ce qu’elle avait dit sur ce « Ward »… Elle lui avait dit que c’était un tueur. Je tirai plus fort sur ma clope.

-Alors il faudra suivre les conseils de ta mère, Grant. Si elle t’a dit ça, c’est pas pour rien.

Je soufflai la fumée de ma clope, alors que Leia, elle, proposai un jeu de charade… ou des pizzas et The Burning Fire… Elle me tira ainsi de mes sombres ruminations que j’avais tout en regardant le petit et en retrouvant sur son petit visage, les trait et expression d’Edward Fleming.

-Ok pour les pizzas et The Burning Fire.

Même si je n’avais plus très faim.