Livia avait envoyer les vigiles plus loin et j’avais pu tracer mon chemin jusqu’à la scène. Ça avait presque été trop facile. C’était la première fête de Ricci sur cette plage… J’savais que tout pouvait pas être parfait du premier coup et ça m’profitait largement.

Une fois derrière la scène, j’fus repéré par des roadies et autres musiciens de sessions qui buvaient des bières. Ils m’regardèrent… J’les regardai… J’mis mon doigt devant ma bouche.

-Shut…

Ils crièrent pas… Et j’m’avançais vers eux.

-Me faut un bassiste et un guitariste. Me les faut pour monter sur scène faire deux chansons. Les deux dernières de Fireworks. Dites rien à Ricci avant qu’je sois monté. J’veux bien payer votre silence.

Ils se regardèrent, ils sourirent et deux musiciens acceptèrent disant que c’était un honneur de pouvoir jouer sur scène avec moi. J’souris avant de les remercier.

-Tu tombes bien… Le groupe sur scène est à sa derrière chanson…

J’me retournai d’un coup entendant une vois que j’connais. J’fis la moue en voyant que c’était Alec…

-Ooooooooh… Aleeeeec… S’te plaiiiiit… Dis pas que j’suis làààà…

J’le connais ce vieux grincheux d’Alec. C’était, entre autre, l’ingénieur son de Jesse. Il esquissa un sourire en coin.

-Putain, entre toi et Jesse, il n’y a aucune différence. Non. Je ne dirais rien. Tu sais Stone… T’es un emmerdeur et j’ai envie de voir ce que Ricci va faire de toi. Je m’occuperais du son.

J’souris tapant amicalement sur l’épaule d’Alec.

-Merci, vieux.

J’me fichais de pourquoi il m’aidait tant qu’il m’aidait.

Le groupe inconnu sur scène termina et ce fut mon tour. J’enlevai ma chemise noir pour finir en débardeur noir.

J’étais prêt.

J’grimpai sur scène et j’me mis derrière la batterie. C’était pas la mienne mais je m’y ferais. Les autres se mirent en place aussi.

Devant nous y’avait la jet-set… Ils m’avaient même pas encore vu trop occupé à s’bourrer la gueule, flirter, discuter de choses certainement vide de sens.

Fallait que j’secoue tout ça…

J’fis un signe aux autres. Fallait que j’attire l’attention et l’seul moyen, c’était de commencer tout de suite.

J’avais fait le tour du yacht avec Maritza, Livia déjà bien loin de mes pensées. En fait, nous l’avions à peine quittée que la conversation qu’on avait eue ne m’étais pas restée en tête. Pas que je ne m’en souviendrais pas si à un moment, ça devenait important… Mais… en réalité… Je n’avais pas conscience d’avoir pu la blesser.

J’avais dit ce que je pensais de sa façon de gérer ses projets, j’avais été franc, c’était tout. Dans ma tête, elle se rendrait vite compte quand elle ferait des erreurs… Parce que malgré tout, elle avait un peu d’intelligence quand même, non ? Elle me l’avait déjà prouvé…

Seulement, pour l’instant, Howard Stone était le ver dans son cerveau… Et il lui grignotait petit à petit son bon sens.

C’était donc bien malheureux.

Mais ce n’était pas pour autant forcément grave. Le principal, c’était qu’elle savait désormais ce que j’en pensais.

J’avais donc visité le yacht avec ma femme à mon bras, en souriant, en saluant des gens… Commençant ses conversations sans jamais vraiment les terminer par-ci par-là, présentant Maritza à ceux qui n’avaient pas encore eu l’occasion de la rencontrer en personne.

Le bateau était impressionnant…

Nous étions sur le pont principal, surplombant la plage. D’ici, nous pouvions voir tout le monde.

Le premier groupe avait fini de jouer et rangeait son matériel, les enceintes reprenant le dessus jusqu’à ce que d’autres volontaires montent sur scène.

Je glissai à Maritza :

-J’ai hâte de voir Roadtramp.

J’avais repéré Eddy Cort en grande conversation avec Willow Ford, les autres membres du groupe, pas très loin et déjà bien éméché. Heureusement que ça ne les avait jamais empêché de jouer ! Je me demandais sérieusement comment ils faisaient.

Mais apparemment, ils n’étaient pas décidés à jouer maintenant. Et c’était plutôt normal… Dans un festival, ils auraient été tête d’affiche et auraient donc joué plus tard dans la soirée. Il fallait croire qu’ils reproduisaient le même schéma ici.

Je m’étais détourné vers Maritza pour lui demander ce qu’elle pensait des cabines que nous avions pu voir, dont la nôtre où elle avait pu se repoudrer brièvement le nez… Quand soudain…

-Let’s go !...

La voix d’Howard Stone.

Je m’étais brutalement retourné, les mains sur le bastingage du bateau. Oui. C’était bien Howard sur la scène. Et il se mit à s’en donner à cœur joie avec une chanson de son cru.

-Je reviens.

Je plantai Maritza là et parti à la recherche de Daniele… Un Daniele que je trouvai en train de fulminer tellement que je voyais presque la fumée sous pression lui sortir des oreilles.

Je posai ma main sur son épaule, mais mes yeux, comme les siens, étaient rivés sur la scène.

-Je pense que nous avons un problème…

Je fis la moue.

-On ne peut pas l’interrompre… Il est chez BSC. Et j’ai vu Amon Sørensen dans le coin.

Après la conversation avec les Reed et autres Hughes, j’étais passé d’invités en invités leur accordant un petit peu de Ricci à chacun. Chacun me ventait l’endroit qui était – de l’avis de plusieurs – encore plus féérique que ma villa. C’était clair qu’il y avait plus de place ! J’avais acheté un sacré bout de plage ! Mais je ne regrettais pas cet investissement.

J’avais parlé à Dustin Lakers qui analysait le groupe inconnu qui était monté sur scène en premier. Il trouvait que ce groupe avait de l’avenir. Moi, je pensais qu’ils n’avaient que du potentiels. Ils avaient de la technique mais ça manquait cruellement d’âme. Dustin pouvait les avoir s’il le voulait – ça ne fera pas décollé sa carrière de manager pour autant.

Ensuite, j’avais été me prendre un whisky remarquant au loin de le petit Cort discutait avec Willow Ford, l’actrice. Seraient-ils en train de flirter ? Cort n’avait plus eu de petites amies depuis des lustres d’après ce que j’en savais et je trouvais qu’il était bien temps qu’il se lâche même si c’est avec un morceau de plastique. Moui – Willow est un beau morceau de plastique. Elle est accro à la chirurgie esthétique. Maintenant, c’est un très gentille fille. Trop pour la jet-set. Du coup, mieux valait qu’elle flirte avec Cort qu’avec Hunter.

Cette observation faite, j’espérais que Willow n’allait pas distraire Cort au point qu’il n’allait pas grimper sur scène…

Je comptais aller vers Sammy pour recueillir ses impressions mais je m’étais fait happer par d’autres personnes venues me dire à quel point mes fêtes leur avaient manquées.

J’étais le roi ici !

Seulement, je ne m’attendis pas à ce que subitement, la fête tourne à tout autre chose quand j’entendis – venant de la scène – une voix reconnaissable entre mille.

-Stone !, m’exclamais-je alors que j’étais à nouveau seul.

Il était là ! Sur scène ! Comment avait-il fait ?! J’avais foutu une barrière et des agents de sécurités le long de cette barrière ! Il n’y avait aucune chance d’entrer sur cette plage sans se faire avoir ! Sans compter que l’endroit est rempli de foutus gens !

Pourtant, Stone était sur scène et venait de commencer sa chanson qui critiquait ouvertement absolument tous les individus présents ici ! Une chanson anti-jet-set écrite par cette garce de Lola qui avait fait partie de la jet-set jusqu’à sa foutue morte !

Je fulminais jusqu’à sentir un main sur mon épaule. Celle de Jim. J’avais toujours les yeux sur le petit manège de Stone alors que mon meilleur ami souligna l’évidence.

-Un problème ?, m’exclamais-je. C’est plus qu’un foutue problème.

Stone venait de me piéger ! C’était plus qu’un problème !

Jim avança une autre évidence. Je savais que je ne pouvais pas virer le petit merdeux de la scène sans passer pour l’enfoiré de l’histoire. Du roi, j’allais devenir le bouffon si je faisais ça ! Et ça allait faire les choux gras de L.A.People demain vu que j’avais laisser n’importe quel journaliste digne de ce nom entrer. Sørensen en avait – d’ailleurs – profité.

-Je sais, amico mio, dis-je en fulminant toujours.

Au loin, je vis les vigiles s’avancer vers la scène mais je leur fis signe de ne pas bouger. Je ne pouvais pas virer Stone devant tout le monde. Je pouvais – par contre – lui faire passer un sale quart d’heure dès qu’il sera descendu.

-Comment il a fait pour entrer ?, dis-je fâché si bien que je parlais avec les mains plus que d’habitude. Toute la barrière est surveillée ! Le seul moyen d’entrer c’est en venant par la mer mais Stone n’est pas mouillé ! Comment, putain ?!

Je ne pouvais pas croire à une foutue faille de sécurité. Et si un de mes vigiles l’avait laissé passé contre de l’argent, je le saurais.

-Dès qu’il sort, je le dézingue, lançais-je à mon ami.

J’avais enfin réussi à faire en sorte de décoller Ian Hunter de mes basques en lui promettant de ne pas trahir sa présence. Du coup, j’avais pu aller, enfin, me soulager avant de sortir de la salle de bain du yacht en trombe.

Repassant devant Syd, je lui avais fait signe.

-Viens vite ! Il y a Stone sur scène !

Du coup, j’étais sorti du yacht presque en courant pour sauter sur la plage et me diriger vers la scène. Les roadies engagés pour la scène devaient avoir choisi de jouer le jeu parce que les jeux de lumière suivaient la musique d’Howard.

J’en avais des frissons. Howard était vraiment un artiste sous-estimé.

En passant, je vis Daniele et Jimmy Reed presque collés l’un à l’autre, regardant la scène avec des yeux de merlans frits enragés. Et ça me fit ricaner. Howard avait transgressé toutes les règles d’un coup.

Et il était en train d’en mettre plein la vue à tout le monde qui commençait à s’agglutiner devant la scène.

Parce que ouais, personne ici n’ignorait que Howard était sur liste noire.

Arrivé à une bonne place, je commençai à lever le poing et à chanter avec le batteur ! Jusqu’ici, personne n’était monté sur la scène pour le jeter dehors.

A mon avis, tant qu’il chantait, il était safe.

Autant en profiter pour m’éclater !

J’avais dû aller voir ma mère. Je ne pouvais pas être ici et l’ignorer. C’était impossible pour moi. Alors, peu après qu’on soit aller visiter le bateau de Ricci, j’avais laisser Livia pour aller voir Maman… Je n’avais pas envie que ma femme m’accompagne. Je ne voulais pas qu’elle subisse les attaques de ma mère. Je voulais la protéger de ça. C’est moi qui devait affronter tout ça. Pas Livia. Livia avait eu bien assez avec les insultes de son père. Je ne voulais pas que la soirée tourne au lynchage pour elle.

Alors, je pris mon courage à deux mains et j’avais rejoint la plage où se trouvait ma mère. On resta à distance l’un de l’autre. Juste un bref salut. Son visage était dur et, sur l’instant, je regrettais de l’avoir aborder. Je n’avais pas de mot. Je ne savais pas par où commencer.

Alors c’est elle qui commença… Son visage s’adoucit. Je vis même de la tristesse apparaitre. Elle commença par s’excuser. Elle déclara voir été une mauvaise mère. Qu’elle n’aurait pas dû me frapper. Que tout ce qu’elle voulait c’était me protéger mais qu’elle ne l’avait jamais fait de la bonne façon. Je déglutis… Je vis les larmes couler sur ses joues alors que je me retenais, moi, d’afficher quoi que ce soit comme expression sur ma figure. Ma mère continua monopolisant la parole alors que j’avais une boule dans la gorge.

Elle s’en voulait… Je lui manquais… Elle aurait voulu que les choses soient autrement. Elle déclara qu’elle se faisait suivre afin de se gérer à nouveau. Elle expliqua avoir prochainement un nouveau projet. Elle déclara qu’elle voulait à nouveau pouvoir me voir de temps en temps.

-Tu me manque, Julian… Je… Je sais que ce que j’ai fait est impardonnable.

Je déglutis… Je n’avais jamais réussi à détester ma mère. Jamais. C’était impossible pour moi.

-Je… Je ne sais pas quoi dire… Pendant des années, j’ai cru que ce que tu faisais était normal. Je… Je sais que ce n’est pas le cas maintenant.

Elle essuya ses larmes et hocha de la tête. Je vis que Carrie gardait un œil sur moi. Dans cet angle, je ne pouvais voir qu’il en était, désormais, de même pour Livia.

-Je sais mon chéri… Mais j’aimerais le rattraper. J’aimerais être à nouveau un mère pour toi… Pouvoir faire des repas de famille… Tu comprends. J’essaye de revivre à nouveau et de le faire bien.

Beaucoup m’auraient dit de me méfier mais… C’était ma mère. Je savais qu’elle était sensible… Je savais qu’elle m’aimait. Alors, j’hochai de la tête. J’étais tendu. Je n’aimais pas la voir comme ça.

-Je… Je comprends, Maman… Je veux bien essayer. Je viendrais te voir… Je te le promet.

Je vis un sourire de soulagement s’afficher sur son visage alors que, sur scène, grimpa Stone.

-Merci, Julian… Je…

Elle allait continuer mais Stone commença alors à chanter. Ma mère se retourna vers la scène, incrédule.

-Stone ? Sur scène ?

J’étais encore dans l’émotion de notre conversation si bien que je mis légèrement de côté ma haine pour Stone. Car je n’arrivais pas à faire autrement que de ne pas aimer Stone depuis que Livia avait passé la nuit chez lui. C’était plus fort que toi.

-Oui…

C’est ce que je soufflai. Ma mère se tourna alors vers moi mais ce n’est pas moi qu’elle regardait.

-Ta femme…

Je me tournai pour voir, un peu plus loin, la silhouette de Livia. J’entendais bien dans la voix de ma mère que ça ne lui plaisait qu’à moitié de voir Livia ici.

-Oui… Je… Je devrais aller la rejoindre.

Ma mère hocha de la tête.

-Oui, mon chéri… Vas-y… Téléphone-moi demain, je t’en supplie.

J’hochai de la tête avant de m’éloigner pour rejoindre Livia. Je ne lui dis rien de ce qu’il venait de ce passer. Je me remettais encore de tout ce que ma mère m’avait raconter… Des efforts qu’elle faisait… Du fait qu’elle m’aimait. Mon regard était sur la scène. Et tout ce que je réussis à dire fut :

-J’espère qu’il se fera virer…

C’était sortit tout seul…

Après avoir laissé Howard à ses occupations, j’avais vogué dans la foule au gré des vagues que celle-ci formait à l’instar de la mer. J’admirai d’ailleurs le contraste entre le jeu de son et lumière particulièrement excitant et les remous monotones de l’eau sur la plage. Mais je ne passai pas beaucoup de temps à m’extasier sur ce paradoxe.

Certes, j’étais là pour faire la fête et pour essayer de voir Sonne voire plus si affinité (et si j’arrivais à l’éloigner de mon confrère Axel). Mais j’étais surtout envoyé par L.A. People pour prendre les gens en flagrant délit de frasques racontables dans le magazine.

J’étais donc passé de conversation en conversation… Et je souriais à chaque fois que les gens s’arrêtaient de parler à mon approche.

Ils se méfiaient, tous.

Je n’appris pas grand-chose en ce début de soirée mais c’était à prévoir : tant qu’ils ne seraient pas bourrés et sachant qu’il y avait des journalistes dans le lot des invités ils se tiendraient à carreau. Mais une fois qu’ils auraient ingéré assez d’alcool, la fête pourra vraiment commencer…

Pour moi.

Alors en attendant, j’entrepris de trouver Sonne dans tout ce bordel. Et je finis par la trouver.

Nous échangeâmes un regard, furtif… Mais suffisant pour que je puisse lui faire un petit signe de la main et un sourire sans qu’Axel le remarque.

Puis la musique emplit l’espace.

Et la voix d’Howard.

Il avait mis son plan à exécution ! Je ne savais pas comment il avait fait pour arriver jusque-là, ni où il avait dégoté des musiciens assez hardis pour le suivre.

Mais il était là. Et il allait les faire, ses deux chansons !

Je vis Sniper arriver au pas de course et se comporter comme une vraie groupie, dansant et chantant au pied de la scène.

Me retournant, je vis Jimmy Reed distiller son fiel dans l’oreille de Ricci.

Que la fête commence.

Ouvrir la voix à Howard avait été un véritable jeu d’enfant. Je n’avais eu qu’à attirer l’attention des vigiles autre part et mon ami musicien avait pu frayer son chemin sans peine, jusqu’à la scène. Le reste, se trouver des musiciens, était entre ses mains. Je ne pouvais rien pour lui bien que ce fut quand même avec un petit pincement au cœur que j’avais refusé sa proposition. Mon père avait carrément éteint la flamme en moi, celle qui faisait briller mes yeux, qui donnait cette belle teinte rose à mes joues.

De loin, je regardais la scène et Howard en prendre possession, heureuse d’avoir pu l’aider même si je savais qu’il risquait de se faire jeter dehors de la fête, comme un lépreux. Je restais là un petit moment avant de me décider à rejoindre la foule dispersée en petit groupe, ici et là, sur la plage. Les commentaires que j’entendais sur mon passage était diversifiés. Certains étaient heureux de voir Howard sur scène, d’autre saluait son courage avant d’ajouter qu’il venait de se tirer dans le pied.

Je me doutais bien, oui, que le geste d’Howard ce soir n’en resterait pas là. Daniele allait en faire une affaire personnelle et mon père n’allait pas le rater non plus. Une histoire d’égo surdimensionné et de power trip à son meilleur, autrement dit, rien de nouveau sous le ciel de Los Angeles. C’était d’ailleurs ce que la chanson d’Howard traduisait, en ce moment.

Il avait raison !

Tellement raison !

D’un pas lent, je me dirigeais vers Julian qui discutait avec sa mère. J’aurais aimé me rapprocher davantage pour entendre ce qu’ils se disaient mais sachant que leur histoire était compliquée, autant presque la mienne avec celui qui se prétendait être mon père, je leur laissais assez d’intimité mais je me plaçais tout de même de manière à ce que Julian sache que j’étais là pour le soutenir et prête à intervenir s’il en avait besoin.

Kate me lança un regard sans équivoque. Elle ne m’aimait pas et la réciproque était vraie. Ce fut ensuite Julian qui se tourna pour me regarder avant d’échanger encore quelques mots avec Kate et de me rejoindre.

- Ça va ?, lui demandais-je en glissant ma main dans la sienne.

Mais Julian resta muet tout en fixant la scène. Moi, je le regardais lui, inquiète, ignorant tout ce qui pouvait se passer dans sa tête. J’allais caresser doucement sa joue pour le faire me regarder avant qu’il ne siffle entre ses dents serrées qu’il espérait qu’Howard allait se faire virer.

Je lâchais la main de Julian en secouant la tête.

- Tu n’es pas mieux que lui en fait…

Il ne valait pas mieux que mon père ! L’un comme l’autre ne faisaient que souffler sur ma flamme, la ternissaient avec leur misogynie mal canalisée. Je regardais Julian avant de m’éloigner. J’avais vraiment besoin d’air.

Besoin d’air et de vodka !  

Jessica Hill était un cafare que je venais d’écraser avec le bout de ma chaussure. Des femmes comme elle, j’en voyais souvent parader devant la porte du bureau de Daniele, espérant une rencontre pour mousser une vie ancienne qui leur filait entre les doigts. Si Axel avait cru que je pourrait avoir des affinités avec Hill, c’est que mo n époux ne me connaissait pas encore très bien.

Après avoir laissé là bouche bée Madame Hill, Axel et moi avions continué de nous promener sur la plage, enfilant verre après verre, du moins c’est ce que je faisais, me plaisant à m’imaginer être l’hôtesse de cette soirée, propriétaire de ce yacht. Quelle vie cela serait que de posséder autant de richesse et de pouvoir, de voir tous ces gens prêts à nous lécher les bottes en un seul claquement de doigts. Axel et moi devions nous contenter de la classe en dessous, bien en dessous.

Heureusement que rêver ne coûtait rien !

Parlant de rêver, je cherchais désespérément Amon du regard, ne désirant rien d’autre qu’une toute petite ouverture pour m’enfuir avec lui dans une cabine où une autre. Serait-ce complètement fou et surréaliste que d’espérer que Daniele me laisse son yacht le temps d’une semaine romantique au large avec mon amant ?

Ai-je déjà dis que rêver ne coûtait rien ?

L’alcool commençait à me ramollir les jambes et à me délier la langue. J’avais un commentaire pour tout et pour rien, rien de déplacer mais je sentais que cela commençait à agacer axel qui ne tarderait pas à me larguer pour faire cavalier seul. Quand il nous planta au milieu des gens, face à la scène, je cru que c’est ce qu’il allait faire. Je regardais tout autour de nous et enfin, mon regard croisa celui d’Amon. Je lui rendis son sourire et lui soufflais des mots que seul son cœur pouvait entendre quand Axel dirigea mon attention sur la scène et Howard Stone qui venait d’y grimper pour chanter.

- Il est sur la liste noire, pourtant !

De toute évidence, une liste n’arrêtait pas Stone et je ne savais pas quoi en penser. D’un côté, je trouvais ça vraiment drôle et de l’autre, j’étais offusquée pour mon patron qui se faisait braver à sa propre fête.

- Mon amour, je vais me chercher à boire. J’ai la sèche gorge. Pardon ! J’ai la gorge sèsse… sèche !

Je ricanais derrière ma main plaquée que ma bouche, je fis même le son du porcelet, de quoi faire rouler des yeux Axel que je laissais là pour me diriger tout droit sur Amon que je heurtais presque par accident. Je le regardais, le souffle coupé par le désir qui s’emparait de moi. Répondre à mes pulsions, je me serais jeté à son cou pour l’embrasser a plein bouche mais il me restais encore assez de savoir-vivre et de décorum pour me retenir.

- Bonsoir Amon.

Je m’en dormis la lèvre inférieure, me retenant de peine et de misère à ne pas passer ma main sur son torse.

Les gens s’avançaient vers la scène. Presque tous. Intrigué parce ce p’tit imprévu. La liste noire était affichée à l’entrée. J’pensais bien que beaucoup avait vu que j’avais rien n’à foutre ici.

Mais j’étais là.

Là, pour rappeler à la jet-set ce qu’ils étaient. Une jet-set dont j’faisais partie. J’pensais pas être meilleur qu’eux, en fait. Si eux cachait leurs démons derrière des sourires plastiques, moi, j’cachais les miens derrière un mur de nonchalance. C’était pas la même chose mais l’résultat était le même.

En chantant, j’pouvais voir Reed qui s’était approché de Ricci. Z’étaient vraiment pas loin de la scène alors c’était facile de les repérer. Un peu après, j’vis Sniper qui, lui, s’amusait comme un malade me faisait un p’tit peu sourire. Snip’ et Livia, c’était de vrais artistes. Ils me comprenaient. Ils approuvaient pas tout ce que j’faisais mais ils comprenaient.

Comme quoi, être un connard c’est pas une question de génération mais d’état d’esprit.

Et les deux connards, j’les avais dans mon champ de vision si bien que quand j’terminai ma première chanson, j’fis un magistral doigt d’honneur à Reed-Ricci.

Ricci fulminait. Reed semblait plus indécodable mais j’savais ce qu’il en pensait.

Je m’étais levé de ma batterie pour boire une longue gorgée de vodka de la bouteille que Livia et moi on avait sifflé un p’tit peu. C’est sans doute mon inhalateur que j’avais besoin mais… Non. Pas devant les deux enfoirés.

Fallait que j’donne tout. Tant pis si c’est avant quelques faiblesses.

J’pris mon micro.

-Maintenant que j’vous ai rappelé ce qu’on était tous, faudrait p’t-être que j’vous rappelle d’ouvrir les yeux. Même dans la foutue jet-set y’a une hiérarchie. Vous faites pas écraser par ceux qui pensent dominer votre beau p’tit monde et vous font croire qu’ils peuvent vous détruire en un claquement de doigt. Ensemble, z’êtes plus fort qu’eux.

Mon regard tomba sur Ricci et Reed. D’ici, j’pouvais les regarder de haut et c’est ce que j’fis.

J’retournai à ma batterie. Et j'envoyai la dernière chanson avant, je le suppose, que je m'fasse virer.



J'donnai tout tapant sur ma batterie avec acharnement tout en chantant du mieux que j'pouvais avec ce que j'avais... Et comme j'étais sacrément remonté, ma performance était bien au-delà de mes espérance.

Une fois ma performance terminée, j'me levai de ma batterie, levant mon bras où je tenais mes baguettes en signe de victoire.

Daniele fulminait… moi, je calculais. C’était une de ces situations où il fallait garder son sang-froid afin de trouver une solution qui retournerait les choses à notre avantage. Howard profitait clairement de sa position chez BSC. Il savait qu’on ne pourrait pas le virer comme un malpropre et il savait qu’on ne pouvait le faire taire sans que ça passe pour de la censure.

Ce que ça aurait été, bien sûr.

Ma main sur l’épaule de Daniele, je la serrai un peu, comme pour le retenir. Il se demandait comment le merdeux avait fait pour accéder à la scène. Toutes les précautions avaient été prises.

-Les stewards sont corruptibles, Daniele… Beaucoup de gens apprécient Stone et je ne serais pas étonné d’apprendre qu’il y a des traitres dans nos rangs.

Il voulait le dézinguer dès qu’Howard sortirait de scène.

Je fis la moue.

-Ça se verra… Il faut être plus intelligent que ça.

Howard termina sa première chanson… Je voyais d’ici Sniper qui s’amusait comme un fou… Quant à Livia, elle s’éloignait de Julian, l’air sombre. Peut-être le jeune Hughes lui avait-il enfin dit d’apprendre à se tenir et que ça ne lui avait pas plu. Je connaissais le caractère parfois impétueux de Livia qui pensait qu’elle avait la liberté de tout faire.

Alors que ce n’était pas le cas.

Les gens semblaient plutôt contents, en générale, de la prestation surprise qu’offrait Stone.

Je me mordis la lèvre. Puis je murmurai…

-Une prestation surprise… Mais oui !

Je souris à Daniele.

-Laissons-le s’exprimer, j’ai une idée.

Et pour s’exprimer, Howard s’exprima… Et je croisai son regard alors qu’il mettait son public en garde contre les gens comme Daniele et moi. C’était une accusation à peine voilée.

Tout comme la chanson qui suivit, qui appelait à la mutinerie.

C’était une bonne chanson. Une très bonne chanson. Je sentais que je l’aimais au plus profond de mes tripes. Je pouvais dire ce que je voulais d’Howard Stone, je ne pouvais nier que c’était un grand artiste. Un artiste qui devait rester chez nous. Même s’il nous crachait dessus.

Quand il eut terminé, levant victorieusement ses baguettes au ciel, je glissai à Daniele.

-La bave du crapaud n’atteint pas la blanche colombe, Daniele.

Puis je le plantai là pour me diriger droit vers la scène dont je montai les escaliers quatre à quatre, m’emparant d’un micro au passage une fois sur scène.

-Et bien mes dames et messieurs… J’espère que vous avez apprécié cette surprise made in BSC !

Je tendis la main vers Howard avec un grand sourire.

-Viens donc me rejoindre, Howard. Salue ton public.

Howard était génial, comme toujours. On sentait que sa chanson venait du cœur et qu’il la chantait avec ses tripes. C’était une belle grosse critique de la jet-set… Certains diront encore qu’il crachait dans la soupe, étant membre de la jet-set lui-même mais…

Etait-ce pour autant qu’il devait tout cautionner dans ce milieu ?

Je ne le pensais pas. Il y avait des gens, dans la jet-set, qui étaient restés simples. Il suffisait de voir Sniper se déhancher et hurler point levé au pied de la scène. Lui aussi avait fait un album assez critique… Il n’en avait pas été évincé des événements mondains pour autant.

Alors pourquoi Howard et pas lui ?

Peut-être parce qu’Howard savait des choses. Des choses qu’il m’avait confiées, notamment sur Reed, et qu’il m’avait fait promettre de ne pas révéler.

Question de vie ou de mort.

Alors je me contentai de sourire quand, entre deux chansons, Howard fit un petit discours de mise en garde.

J’en avais presque oublié Sonne qui me percuta, rêveuse…

Je la rattrapai par les épaules jusqu’à ce qu’elle retrouve son équilibre, avec un petit rire.

-Bonsoir, Sonne.

Elle me regardait avec cet air contenu que je connaissais bien… Que tous les amants clandestins devaient connaître, en fait.

Sur scène, Howard attira de nouveau mon attention avec un titre révolutionnaire. Je souris, un peu triste parce que je savais ce qui allait probablement arriver à mon ami s’il continuait à tirer sur la corde sensible de Ricci.

Puis je me retournai vers Sonne.

-Je suis content que tu sois là.

Mais Howard, pour l’instant, avait pratiquement toute mon attention. Ce qui se passait maintenant était important… tant pour le journaliste que l’ami que j’étais.

De toute façon, je ne pouvais pas décemment faire le moindre geste vers Sonne maintenant. Pas ici où n’importe qui pouvait nous voir.

La deuxième chanson se termina et je m’attendais à voir la sécurité monter sur scène. Mais à la place, ce fut Reed, seul, et avec un mirco en main. En l’entendant, j’ouvris de grands yeux surpris.

Et pourtant, c’était tellement évident !

Reed faisait passer tout ça pour une surprise prévue d’avance ! Moi, je savais que c’était faux ! Howard avait bravé les rochers pour entrer ! Et il ne m’aurait pas menti, quoi qu’on pense de lui !

J’en étais bouche bée…

Je m’éclatais vraiment ! Au point que j’en avais perdu Syd dans la foule, mais elle ne devait pas être loin. Elle était peut-être allée chercher à boire ou quelque chose comme ça. De toute façon, quand il y avait de la musique, de la bonne musique, je me perdais là-dedans et je ne faisais plus attention à rien d’autre.

En plus, Fireworks était, selon moi, le meilleur groupe de cette décennie. Ils avaient un truc que les autres n’avaient pas. Que moi, je n’avais pas.

Est-ce que c’était parce que tant Howard que David étaient des âmes torturées ? Possible.

Mais je pensais surtout qu’ils avaient tous les deux des choses à dire.

Je dansais, je levai le poing en signe de protestation, complètement d’accord avec ce que disait Howard. C’était peut-être un texte de sa défunte épouse, mais personne d’autre que lui n’aurait su lui donner cette dimension-là.

-Sip the gossip, drink 'til you choke
Sip the gossip, burn down your throat
You're not iconic, you are just like them all
Don't act like you don't know, so.

Il avait raison.

Peyton avait raison.

A la fin de la chanson, j’applaudis, sifflai et en réclamai encore !

Il m’en fallait encore ! Pourvu que Daniele le laisse faire ! C’était quoi, cette histoire débile de liste noire ?

Howard dit quelques mots que j’accueillis avec de nouveaux applaudissements. Je me retournai instinctivement vers là où je savais que se trouvait Daniele. Tiens… Reed l’avait rejoint… Ouais ouais, es gars, c’est vous qui êtes visés.

Mais aucun des deux ne sembla faire quelque chose pour arrêter Howard ! Très bien ! On allait avoir droit à une deuxième chanson ! Et quelle chanson !

J’en avais les larmes aux yeux en chantant avec lui, poing fermé levé au ciel.

Puis après cette chanson, Reed monta sur scène.

Tout avait été prévu d’avance ! Tout n’était qu’une mise en scène de BSC. La liste noire… Tout ça…

Je ne savais plus trop sur quel pied danser. Je savais ce que pensait Howard de Reed…

Alors… Comme dirait David. Qu’est-ce qui était réel ?

Et qu’est-ce qui ne l’était pas ?

J’savais quel pouvoir avait Reed…

C’était un homme d’affaire qui avait hérité d’une maison de disques bien implantée depuis des décennies. L’avait à sa botte le gang le plus redouté de Los Angeles. Sa force de frappe était inimaginable. Il pouvait faire plier n’importe qui à travers des menaces ou en leur donnant ce qu’ils voulaient.

C’est l’genre de type qui pense être un Dieu. Qui pense qu’il a droit de vie ou de mort sur qui il voulait. Et j’savais que, quelque part, rien ne l’empêchait de penser comme ça parce que, techniquement, il en avait les moyens autant dans la jet-set que dans la rues. Dans mes deux mondes, on craignait Jimmy Reed.

Les gens l’admiraient autant qu’ils avaient peur de lui. Ce que Ward Fleming ne peut faire qu’au niveau des bas-fonds de l’Eastside et de South L.A., Jimmy Reed peut le faire partout.

Mais ça restait un homme qui, tout seul, ne peut rien.

Alors, fallait que les gens se réveille à commencer par la jet-set.

C’est ce que j’tentais de faire par un p’tit discours et une chanson que j’avais écrite peu après que Reed soit venu m’voir à l’hosto après que je me sois fait démolir par son alter-ego psychopathe.

J’crachais ma haine sur lui et son pote Ricci parce que c’était ma seule arme. Mais la musique est une arme plus puissante qu’on ne l’imagine.

Et une fois que j’eus terminé de cracher tout ça. J’sentais que, quelque part, j’avais gagné. Ricci avait pas pu me virer de peur que cette décision se retourne contre lui… J’avais, donc, pu l’ouvrir autant que j’le voulais.

Mais j’m’attendis pas, une fois mon triomphe fêté, voir Reed débarquer sur la scène pour s’emparer du micro, remercier tout l’monde et faire comme si tout avait été prévu par lui et son pote.

Made in BSC.

C’est de la rage que j’sentis quand j’vis le p’tit manège du patron de BSC qui avait été plus réactif que s’connard de Ricci.

Viens m’rejoindre, Howie… Viens saluer ton public. Viens montrer que tu n’es qu’un foutu petit larbin comme les autres. Viens faire croire que je suis le foutu chef d’orchestre de ta tentative de soulèvement…

En gros, « rentre dans le rang, Stone, c’est là qu’est ta place ».

L’espace d’un instant, l’idée de prendre ma bouteille de vodka pour la lancer sur la tronche de Reed m’avait traversé l’esprit.

Mais j’résistais. J’savais que si j’faisais ça, c’était foutu.

Qu’est-ce que j’le déteste !

J’le fixai n’approchant pas de lui. Il pouvait voir dans mon regard toute la haine que j’lui vouais.

J’pris quand même la bouteille de vodka et un autre micro au passage… J’voulais contrôler ma parole.

J’finis par m’approcher de Reed lui faisant face mais restant à distance d’une possible accolade qu’il me ferait pour montrer que tout ça était prévu. Puis, d’un coup, je tendis rapidement le bras où se trouvait la bouteille pour vider le contenu sur les chaussures bien cirée de Reed. Puis, j’reculai de lui me tournant vers le public saluant d’un coup avant de prendre la parole.

-Croyez ce que vous voulez. J’emmerde ce type et jamais je ne participerais à une de ses combines. Maintenant, retournez-vous bourrez la gueule. Le spectacle est terminé.

Et je lâchai le micro qui tomba lourdement au sol avant de m’approcher de Reed.

-Tu gagneras jamais la guerre.

Et j’descendis de scène ne sachant pas très bien ce qui allait m’arriver après ça…

Jim ne voyait qu’un seul moyen de comment Stone était entré ici et c’était par la corruption. Putain, fallait-il que je remplace tous mes stewards par des robots fiables ?! C’était pas l’envie qui manquait, là tout de suite.

-La prochaine fois, j’engagerais des soldats de la Famille de Los Angeles, marmonnais-je.

Je savais que je ne pouvais pas faire ça – mais ce n’était pas l’envie qui manquait. Eux ne risqueraient pas de se faire corrompre par le petit merdeux de Los Angeles.

Mon envie de dézinguer Stone était grand mais je savais que Jim avait raison quand il disait qu’il fallait être plus intelligent que ça. On ne pouvait pas risquer de passer pour les méchants de l’histoire.

J’écoutais Stone cracher sur la jet-set alors que – dans ma tête – j’étais en train de l’assassiner. Ce fut encore pire quand je vis qu’Evan semblait affreusement bien s’amuser en dansant et en chantant comme une groupie en chaleur ! Putain ! Dans quel camp il était, lui ?!

C’est là que Jim eut une idée. J’avais froncé les sourcils.

-Tu veux faire croire que tout ça vient de nous ?, demandais-je en essayant de décoder ce que venais d’insinuer Jim.

J’étais trop énervé pour évaluer son idée alors que Stone enchaina avec un petit discours qui nous visait – moi et Jim. Le problème de Stone c’était qu’il en savait trop… Beaucoup trop. Et qu’il avait décidé de nous combattre sur son terrain – celui de la musique.

Mes invités semblaient adorer – c’est bien ça le pire. En dehors de cette groupie d’Evan, il y avait aussi Kyle Davis qui s’éclatait. Et bien d’autres qui étaient déjà passablement bourrés.

Pourvu que ça finisse vite…

Une fois la chanson de Stone enfin terminée, Jim s’éclipsa pour grimper rapidement sur scène. Il prit le micro et j’adressa à la foule pour – bel et bien – faire croire à une surprise de BSC.

J’esquissai un sourire. C’était le seul plan à notre disposition… Un plan qui – hélas – me contraindra de ne pas virer Stone… Pourtant, ce n’était pas l’envie qui manquait. Je regardai autour de moi voyant la surprise et, parfois, le confusion émerger sur certains visages.

Seulement, Howard ne se laissa pas faire… Il versa sa bouteille de vodka sur les chaussures de celui qui était son patron – parce que Howard est bel et bien chez BSC, ce qu’il semble avoir tendance à oublier… Un acte irréfléchi… J’avais vu Jim détruire des gens pour moins que ça.

C’était gonflé tout comme la fin de son discours qui visait à rétablir la vérité. Sauf que Stone, après ça, descendit de scène me laissant une ouverture.

Je vins, donc, à la rescousse de Jim grimpant sur scène avec un grand sourire aux lèvres. Je devais m’en tenir à son plan. Je savais que Ricci + Reed ça restait plus puissant qu’un Stone isolé et en proie à ses émotions.

J’avais récupéré le micro au sol.

-Les artistes ont l’art de déborder du scénario, n’est-ce pas, amico mio ?, dis-je avec un large sourire en parlant dans le micro pour que tout le monde entende.

Je passai mon bras sur les épaules de Jim montrant que nous étions soudés.

-J’espère que le spectacle vous a plu. Et ce n’est que le début ! D’autres grands noms de la chansons et de BSC fouleront cette scène !, dis-je toujours souriant. Que la fête continue !

Et j’avais fait un signe pour que ce traitre d’Alec envoie la sono. Ce fut un tube de The Army qui en sortit afin que les gens se détournent de la scène et retourne se bourrer la gueule.

J’avais entrainer Jim hors de la scène.

-Bien rattrapé, amico mio, dis-je avec un petit sourire. Mais maintenant, je ne peux plus virer le merdeux…

Pas aujourd’hui, en tout cas.

J’avais rejoint Livia et elle glissa sa main dans la mienne. Je cherchais à utiliser ce contacte pour faire baisser la tension que m’avait donné cette entrevue avec ma mère. Je m’attendais à des critiques de la part de cette dernière mais ce n’était pas le cas.

Quand Livia demanda si ça allait, j’hochai de la tête. Je crois que ça aurait pu être pire. Bien pire. Et, finalement, tout ce que ma mère avait voulu, c’est renouer un lien en mettant en avant le travaille qu’elle avait fait sur elle.

J’avais usé du hochement de tête pour répondre alors que Stone faisait le mariole sur scène en crachant sur la jet-set. Alors, la première chose qui sortit de mes lèvres fut le fait que j’avais envie de Stone se fasse virer. Pas pour ce qu’il était en train de faire… Mais parce que je ne pouvais m’empêcher, malgré tout, d’être jaloux de lui.

Puis, je n’aimais pas cette façon qu’il avait de cracher dans la soupe. J’avais quelques différents avec Reed, moi aussi, notamment depuis l’enlèvement de Livia… Mais Stone devait se rendre compte que sans tout ce business, il n’aurait jamais pu grimper sur scène de sa vie.

Sauf que ma réflexion ne plut par à Livia qui lâcha ma main. Je la fixai surpris alors qu’elle déclara que je n’étais pas mieux que lui…

Que qui ?

Stone ?

Non… Je crois qu’elle parlait de son père en fait… Je n’avais en rien approuvé ce que Reed lui avait dit tout à l’heure. Au contraire, je trouvais qu’il avait été trop loin à insulter ainsi Livia.

-Livia !

Je la rappelai mais elle s’éloigna… Ça me fit un pincement au cœur. Je ne sais pas ce qu’il lui prenait…

Je voulais aller la rejoindre.

Mais quelque chose, en moi, me fit penser que d’y aller tout de suite ne fera qu’envenimer les choses.

Je me retournai vers la scène où Stone enchaina avec sa seconde chanson après quelques paroles qui nous sommait d’ouvrir les yeux.

Puis, il lança son dernier tube. Mais ce qui me préoccupait, c’était Livia… Livia que, finalement, j’avais perdu dans la foule.

On aurait jamais dû venir…

C’est ce que je me disais.

La chanson de Stone terminée, ce fut Reed qui grimpa sur scène pour clamer que tout était prévu par les soins de BSC. Je levai un sourcil ne sachant pas si c’était un mensonge ou non.

Stone clamait que s’en était un en maculant les chaussures de Reed de vodka.

Mes lèvres se pincèrent devant se spectacle qui tournait au ridicule alors qu’Howard quitta la scène laissant sa place à Ricci qui joua le jeu de Reed. A considéré que tout ça soit un jeu.

Ce fut, ensuite, la musique de The Army qui envahi la plage alors que Ricci et Reed avaient quitté la scène.

Je cherchais Livia du regard ne la trouvant pas… J’avais peur qu’une simple réflexion de ma part l’avait autant blessé que ne l’avait fait son père. Pourtant, tout ça n’était pas contre elle.

Je l’aimais. Tout ce que je voulais c’était retrouvé la paix qu’on avait au début de notre relation.

J’avais fait exprès, un peu, de foncer dans Amon pour attirer son attention aussi subtilement que possible. Ce petit stratagème servant à me rendre maladroite et secourue par le preux journaliste people était assez discret pour ne pas attirer les regards moralisateurs et je retrouvais ma stabilité rapidement au point ou tout cela n’était au final qu’anecdotique. Rien qui serait relayé d’une bouche à une autre sous un air de rumeur. Mais pour moi, c’était l’occasion qu’Amon me touche, de me faire vibrer, de m’exciter même.

- Je suis heureuse que tu sois là, moi aussi.

J’avais cru qu’il ne viendrait pas, j’aurais été triste et déçue. Les occasions de passer du bon temps ensembles étaient si rare que chaque fois, j’avais l’impression que cela faisait des semaines, voire des mois, depuis notre dernière fois. Heureusement que l’écart n’était pas si long entre nos différentes rencontres clandestines.

Seulement, je ne pouvais accaparer l’attention de mon bel amant immédiatement. Il était figé sur place, les yeux rivés sur la scène et avec raison. Howard Stone s’était incrusté à a fête de mon patron, le couvrant de ridicule avec cette bravade puérile. Je détestais toux ceux qui faisaient de l’ombre à mon patron ce qui faisait que, ce soir, j’aurais moi aussi placé Stone sur ma propre liste noire, même que, vu comment Amon n’en avait que pour sa prestation à cet instant, j’aurais gravé son nom à l’encre indélébile.

Mais que ce soit Axel ou Amon, je me devais de les laisser travailler, même un soir de fête. Je savais quelle importance cela avait pour mon amant, tout ce qu’il pourrait en dire dans son prochain article. Je le trouvais si séduisant alors qu’il devait déjà mettre les formes, dans sa tête, pour sa prochaine publication.

Stone poussa l’audace jusqu’à une seconde chanson, comme si la première n’était pas un affront suffisant pour faire passer sa bile venimeuse. Et comme Amon n’avait d’yeux que pour lui, j’enfilais deux, peut-être même trois verre de champagne de suite, forçant ce pauvre serveur à rester près de moi pour étancher ma soif.  

Jimmy Reed fit une apparition sur la scène, quand Stone termina ses lamentations, pour demander à la foule si elle avait apprécié cette surprise tout en invitant Stone à le rejoindre pour qu’il puisse saluer son publique. Reed sonnait faux, quelque chose me laissait croire que son petit discours n’était qu’une improvisation visant à sauver la face. Daniele m’aurait prévenue, d’une façon ou d’une autre, soit en maugréant cette initiative farfelue soit en voulant absolument que tout le monde sache que l’idée était la sienne. Quoi qu’il en soit, si cela avait été une initiative de sa maison de disque.

Quoi qu’il en soit, je fit comme un peu tout le monde et j’applaudissais alors que Stone se démentait ce que venait de déclarer Reed, mais plus personne ou presque ne l’écoutait.

- Tout ceci n’est rien de plus qu’un mauvais vaudeville.

Et nous étions tous d’infortunés spectateurs.

- J’ai envie d’aller explorer le yacht, à la recherche d’un peu d’intimité. À moins que tu ne veuilles intercepter Stone avant qu’on ne lui indique la sortie, tu veux venir avec moi ?

Deux chansons de Stone, c’était suffisant. Bien suffisant. Il fallait que ça s’arrête et que personne ne se rende compte de la mutinerie de Stone. Le mal était fait, maintenant, tout ce qu’on pouvait faire, c’était mettre un pansement sur la plaie ouverte et purulente.

Je montai donc sur la scène, sous les yeux étonnés de Daniele.

Au micro, j’annonçai la couleur : tout cela était prévu. C’était une surprise. Elle était belle, non ?

Mais je savais très bien que Stone ne se laisserait pas faire aussi facilement. Tout ce que je pouvais faire, c’était semer le doute dans la tête des spectateurs.

Howard s’approcha de moi, sa bouteille de vodka à la main.

Une bouteille qu’il vida sur mes chaussures et je me pris à penser que ça aurait pu être pire : il aurait pu me pisser dessus.

Face à ce dernier geste de protestation, je restai impassible. Même si je détestais ce qui m’arrivait. Stone affirma au micro qu’il m’emmerdait et qu’il ne participerait pas à mes combines. Je rivai mes yeux sur le public qui semblait perplexe…

Je devrais  me contenter de ça, je le savais.

Howard déclara le spectacle terminé, enjoignant les gens à retourner boire.

-Oh non, le spectacle est loin d’être terminé ! Le meilleur est à venir ! N’est-ce pas Sniper que je vois là ? Et Eddy Cort ?

Bref, du spectacle, il y en aurait assez et en suffisance peut-être pour dissiper le ridicule de cette situation.

En partant, Howard me glissa que la guerre, elle, n’était pas terminée et que je ne la gagnerai pas. Ce à quoi, je répondis par un sourire de requin.

Daniele monta sur la scène et je ris à sa remarque sur les artistes qui débordaient du scénario, comme pour confirmer que tout ça n’était qu’une mise en scène… Mocassins foutus y compris.

Nous descendîmes ensuite de la scène, envoyant du The Army dans les enceintes en attendant que les autres daignent monter sur scène.

Daniele salua ma manœuvre mais regrettait le fait qu’il allait devoir laisser Howard déambuler ici.

-Ou alors, il sera tellement dégoûté qu’il partira de lui-même sans faire de bruit.

Je regardai Stone qui titubait un peu plus loin.

-Il faut que je trouve comment le faire entrer dans le rang. Il doit y avoir un moyen.

J’étais effectivement très heureux de voir Sonne présente à cette fête… Même si j’avais remarqué qu’elle était accompagnée de son mari mais… elle était la promesse d’un peu d’intimité, d’un peu d’affection, qu’on arriverait peut-être à voler à un moment ou un autre.

Mais cela devrait attendre… Parce qu’il se passait sur la scène un spectacle que le journaliste people que j’étais ne pouvait pas rater. D’ailleurs, l’ami d’Howard que j’étais ne devait pas le manquer non plus. On ne savait jamais, qu’il viendrait encore me casser un carreau pour entrer dans mon loft par effraction parce qu’il aurait les hommes de Reed au cul.

Ouais… Parce que je savais qui était Jimmy Reed même si Howard m’avait bien fait comprendre que je ne devais pas le dévoiler. C’était une question de vie ou de mort pour le batteur. Car si j’avais bien compris, s’il était un jour démasqué, le magnat de BSC n’hésiterait pas à faire le ménage parmi ceux qui savaient qui il était vraiment, avant de finir à Saint Quentin.

Du coup, j’étais là, sur la plage, bouche bée…

Et ma mâchoire tomba encore plus bas quand Reed tenta de tourner les choses à son avantage… Et j’eus un peu des sueurs froides en voyant Howard verser de la vodka sur les mocassins bien cirés de Reed.

-Nom de Dieu…

Sonne, ça semblait lui faire ni chaud ni froid….

Ou tout du moins, ce qui lui donnait chaud était une toute autre histoire que ce qui venait de se passer devant nos yeux.

Mais là tout de suite, je n’avais pas vraiment la tête à ça.

Parce que Stone allait le regretter, ce geste… je le sentais. Reed trouverait un moyen de lui en faire baver. Il était ridicule aujourd’hui… Mais demain ? Qu’est-ce qu’il se passerait ?

J’entendis à peine l’invitation de Sonne. J’avais toujours les yeux rivés sur le batteur qui, furieux, avait quitté la scène.

-Il faut que je parle à Howard… Je te rejoindrai sur le yacht.

En espérant que Moriarty ne lui remette pas la main dessus entre temps.

Je m’éloignai de Sonne un peu comme un zombie, me dirigeant droit vers Howard. Est-ce qu’ils allaient le mettre dehors ? Mmm probablement pas. Mais j’avais du mal à réfléchir de façon logique.

Finalement, j’arrivai à la hauteur du batteur.

Et je lui demandai avec tout le sérieux du monde :

-Quelques mots pour les lecteurs de L.A. People ?

J’avais quitté la scène avant que Ricci n’y monte pour essayer de rattraper encore plus la situation que son pote Reed ne l’avait fait. Ma seule satisfaction était que j’avais certainement bien emmerdé Reed en foutant d’la vodka sur ses chaussures.

La jet-set était retournée à ses occupations… En sommes, m’avaient écouté quand j’leur avait dit d’retourner se bourrer la gueule. J’savais pas s’ils m’avaient cru ou s’ils avaient cru Reed. J’pense que chacun s’était fait sa propre opinion… Quoi qu’il en soit, j’allais pas participer au p’tit plan de Reed en restant ici. Non. Si j’partais, les gens allaient p’t-être se demander si j’m’étais pas fait virer, finalement.

T’façon, la fête était finie pour ça… Surtout après que j’me sois fait rejeté poliment par Willow. J’avais pas vraiment la motivation d’aller draguer quelqu’un d’autre après le rattrapage de situation de Reed qui, encore une fois, essayait de prouver qu’il n’était pas celui que j’pouvais dépeindre. Ou, en tout cas, que tout ça ne l’atteignait pas.

Je l’emmerde !

J’avais plus de vodka, en plus… Donc, c’était une autre raison d’me barrer.

J’allais me diriger vers la sortie quand Amon s’approcha de moi. J’lui souris d’un sourire légèrement dégouté. Pas par lui. Mais par la fin du p’tit concert.

Et c’est Amon, le journaliste, qui me parla.

-Que Reed est un enfoiré… Mais c’est assez banal.

J’haussai des épaules.

-Dis à L.A.People que rien n’était fait par BSC. Si la jet-set veut croire Reed, j’sais que les gens, dehors, ils préféreront la vraie version.

J’souris un p’tit peu plus à Amon.

-J’sais que j’peux compter sur toi. T’es un vrai pote quand tu veux.

J’regardai autour de nous.

-J’pense que j’vais pas trainer… Ça ferait trop plaisir à Reed si j’restais… Il manquera pas de souligner que j’profite de ce que BSC peut m’donner en restant.

Jim s’était fait arrosé ses chaussures mais avait gardé son calme. Nul doute que ses mocassins étaient bon pour un bon nettoyage… Bien qu’il soit possible qu’ils soient carrément foutus. Mais si Jim voulait garder son plan intacte, il ne devait pas céder aux provocations de Stone qui annonça – dans sa colère de voir Jim si réactif – que la fête était terminé.

Moui, non… Elle ne l’était pas. La fête allait continué et c’est que je déclara Jim. J’espérais bien que mes groupes allaient rattraper le coup faisant oublié Stone à tout le monde. Bien que je savais que la presse – demain – ne manquera pas de relater tout ça. Amon était dans le coin. Jim l’avait vu plus tôt.

J’étais venu à la rescousse de mon ami alors que le petit merdeux avait quitté la scène. J’avais suivi le plan de Jim faisant croire à une mise en scène. C’est ce qu’on avait de mieux dans cette situation qui – au départ – nous avait échappé. Après tout, nous étions plus puissant que Stone. C’est nous qui décidions que ce qui était réel ou non dans notre petit monde.

Pas Stone !

Nous étions descendu de la scène et je complimentais Jim non sans regretter que Stone risquait bien de rester après tout ça. Seulement, Jim n’était pas aussi catégorique.

-Moui et bien, je l’espère, amico mio, dis-je pensif.

A vrai dire, si Stone ne voulait pas faire en sorte que notre mise en scène soit bel et bien vraie, il avait plutôt intérêt à déguerpir d’ici.

Jim voulait trouver un moyen de faire rentrer Stone dans le rang. Il y avait certainement un moyen – effectivement.

-On trouvera, amico mio, dis-je en voyant, plus loin, Sørensen rejoindre Stone pour, sans doute, recueillir ses impressions. Des moyens, ce n’est pas ce qu’il nous manque. Stone a peut-être ses fans avec lui mais, au fond, il n’a pas que des amis. Avec ses chansons qui crache sur la jet-set, je pense même qu’il risque de se faire des ennemis. Des gens qui le prendront pour un gros hypocrite.

Ce qu’il était quelque part. Mais je doutais que, ce soir, tout le monde ait apprécié de se faire ainsi pointé du doigt et, en quelque sorte, traité de mouton.

-En attendant, profitons de la fête ! Faisons comme si tout ça avait été prévu, dis-je en tapant amicalement sur l’épaule de mon meilleur ami.