C’est à contre-cœur que j’avais quitté Amon après notre petit pique-nique improvisé et initié par moi. Ce genre de rencontre avait pour effet de me revigorer, de me permettre de recharger mes batteries pour tenir le reste de ma journée. Nous avions convenus de répéter l’expérience plus souvent ce qui était une excellente idée. Après tout, il n’y avait rien de mal à partager un repas avec Amon.

J’avais reprit place derrière mon bureau avec le dernier exemplaire du L.A.People en mains. J’avais l’intention de le tenir bien en évidence quand rentrerait Daniele de sa propre pause diner et ainsi, passer un commentaire sur l’article de mon amant et voir la réaction de mon patron. Si je le sentais favorable à la discussion, j’allais me risquer à aller plus loin mais, si ce n’était pas le cas, je n’en ferais pas plus, tel que je l’avais promis à Amon. Je ne pouvais pas nier avoir ressentit son inquiétude et décodé son avertissement concernant Jimmy Reed.

Avant l’arrivée de mon patron, je m’étais permise de retoucher mon vernis à ongles ainsi que de vider le répondeur des nombreux messages reçu pendant mon absence. Les gens ne comprenaient-ils pas que même les secrétaires avaient besoin de manger, de temps en temps ? Le ton de leur voix semblait toujours étonné lorsqu’ils se retrouvaient confrontés à une machine plutôt qu’à moi. Il faut dire que ma voix était à ce point douce et agréable… Bon je faisais de l’excès sur la proposition de Samantha mais j’avais bien le droit d’apprécier tout ceci, non ?

Le dernier Guitar&Pen était au travers de la pile des nombreux documents et dossiers que j’avais sur mon bureau. Curieuse de voir comment Reed avait fixé les choses selon sa vision au travers de la plume de mon époux, je me décidais de lire l’article. Amon avait raison ! Reed était vicieux et dangereux ! Il avait mit tout ça à sa main, réduisant Howard Stone à l’état de larve.

- Frapper sur un homme déjà à terre ! C’est comme cela qu’on atteint le sommet ?

Je refermais le magazine et même, je le balançais dans la corbeille à papier. Autant d’inepties me faisait perdre foi en l’humanité et même, en celle d’Axel ce qui faisait mal, collatéralement parlant. Venant d’Amon, je n’aurais pas sourcillé parce que c’était son job de remuer la merde alors qu’Axel se gargarisait en clamant être un journaliste sérieux, respecté et respectable.

Daniele passa les portes de l’ascenseurs et je me plaçais droite sur ma chaise et ouvrit le L.A.People à la bonne page. Allez savoir pourquoi, mon cœur battait vite et j’avais soudainement chaud. Peut-être que je devrais laisser tomber, comme me l’avais suggéré Amon et ainsi, ne pas risquer être la nouvelle cible de Reed ? Non, si Daniele se sentait piqué par ma remarque, il me le dirait sans prendre de détour et encore moins en se cachant derrière son meilleur ami et patron. J’aurais une réprimande de sa part et l’histoire se terminerait là. Peut-être aussi que Daniele comprendrait que la voix du ‘’petit peuple’’ n’était pas prête à avaler tout ce qu’on leur faisait gober.

- Pauvre homme quand même ! Démoli par le deuil et on tente de l’écraser. C’est d’aide dont il a besoin ! Oh ! Déjà de retour Daniele ? Le lunch était bon ?

Je me levais en refermant le magazine et je pris les dossiers ainsi que la piles de messages que j’avais retranscrit sur des billets roses. J’avais insisté pour avoir des billets roses pour les messages téléphonique. Ainsi, on les distinguait bien au travers des autres notes.

J’étais d’excellente humeur ! Pour cause, j’avais appris à travers Sammy que Sonne avait refusé sa proposition de contrat. Pourquoi ? Par fidélité envers moi. Je devais avoué avoir largement fêté ma victoire en vantant à Sammy tous les mérites de mon incroyable secrétaire. J’avais laissé ma femme faire sa proposition en ayant confiance en Sonne et j’avais été largement récompensé.

Depuis, rien ne pouvait entaché ma bonne humeur. Pas même l’article de Sørensen qui avait retranscris les paroles de Stone. Heureusement que le Danois était vu comme un sale menteur et que L.A.People n’est pas sérieux. Toutefois, je savais que ces paroles allaient quand même faire son chemin dans l’esprit des gens et semer le doute. Un doute que Guitar&Pen a tenté de balayer sous le tapis grâce à Moriarty.

Je dois beaucoup aux Moriarty c’est derniers temps, me semble-t-il…

J’avais passé ma pause avec Sammy à qui j’avais – encore une fois – venter les mérites de Sonne et les miens, aussi, au passage. Ensuite, j’étais revenu à la tour où Carla, la réceptionniste avait encore la tête ailleurs ce qui signifiait que le parasite était en visite ici. Pourquoi ? Mystère ! Jim n’était pas ici. Vicky non plus. Et je savais que Masters l’avait viré il y a quelques semaines déjà. Sans doute qu’Hunter était ici uniquement pour flirter ou bien pour remplir sa tâche auprès de Frances. C’est ce que Jim devait lui dire, non ? Qu’il drague Frances pour que la vieille secrétaire soit moins frustrée. S’il était là pour ça, il avait toute ma bénédiction !

Quoi qu’il en soit, je pris l’ascenseur pour grimper jusqu’à mon bureau me demandant – pendant la montée – si je ne devrais pas offrir un cadeau à ma secrétaire. Une augmentation, par exemple ! Je trouve que c’est une bien bonne idée ça !

J’étais sorti de l’ascenseur et je découvris Sonne en train de lire l’édition spéciale de L.A.People… Bien mauvaise idée de lecture… L’article de son mari valait bien plus le coup ! Mais sans doute l’avait-elle déjà lu depuis un moment… J’allais lui demander comment sa pause s’était passée quand elle s’exclama parlant d’un homme à terre démoli par le deuil. J’avais bien remarqué qu’elle était en train de lire l’article de Sørensen. Ainsi je me doutais qu’elle parlait de Stone. Seulement, je ne m’attendais pas à une telle réaction.

-Heu…, dis-je un rien déstabilisé alors que Sonne avait changé de ton pour me demander comment s’était passé ma pause. Oui, il était très bon. Sammy et moi nous sommes régalé. Et vous ?

Sonne avait refermé le magazine pour s’emparer de quelques dossiers. Seulement, j’étais revenu à ce qu’elle venait de dire.

-Vous parlez de Stone, c’est bien ça ?, demandais-je alors que ce qu’elle venait de dire correspondait à la description que venait de faire Sonne. Certes, il a besoin d’aide mais il ne semble pas vouloir en demander. Et personne n’a tenté de l’écraser… Où avez-vous vu ça ?

Stone le martyr… Je détestais que certains puissent le voir dans cette position. Le gentil petit Stone face au grands méchants Reed et Ricci… Comme si Howard avait à se plaindre ! Certes, la mort de sa femme était un drame mais Jim n’en était en rien responsable. Stone n’était pas obligé de reporter sa tristesse sur ceux qui n’y pouvaient rien.

Daniele arriva alors que je tenais le dernier L.A.People bien en évidence pour qu’il n’y ai pas de toute que ma lecture captivait toute mon attention. Mon cœur battait, un petit peu trop à mon goût mais j’avais promis à Amon que je tenterais quelque chose. Je lui avais aussi promis que je ne courrais aucun risque inutile. Mon rythme cardiaque était peut-être un indicateur que je ne me sentais plus si certaine de moi que lorsque j’avais imaginé ma mise en scène.

Le ton de mon patron ne laissa aucun doute que je l’avais pris de court avec ma réflexion juste avant d’enchaîner avec mes questions habituelles. Il me confirma avoir eu un agréable lunch avec sa femme et il me retourna la politesse.

- Mes amitiés à Samantha. J’espère qu’elle ne m’en veut pas trop d’avoir décliné son offre… Oh, je ne peux prétendre m’être autant régalé que vous mais les sandwichs du traiteur au coin de la rue sont tout de même meilleurs que ceux du distributeur.

J’avais volontairement ramené la proposition de Samantha dans la conversation pour rappeler subtilement à Daniele qu’il avait toute ma loyauté malgré que ce que la possible conversation qui allait suivre pourrait laisser croire et j’avais également omis de dire que j’avais diné en tête à tête avec mon amant sachant très bien que cela aurait paru évident que mon but était de faire passer un message.

Je suivis Daniele dans son bureau et je déposais les différents documents dont il aurait besoin pour son après-midi, ainsi que sa pile de petits papiers roses sur lesquels j’avais noté tous ses appels à retourner. Il en aurait pour un bon moment vu la quantité. Il y avait des jours comme cela, où tout le monde semblait s’être donné le mot pour tenter de contacter le meilleur manager en ville.

La curiosité de Daniele avait été touché par ma réflexion faite à son arrivée et, comme je l’avais anticipé, il me questionna là dessua avant même de jeter un coup d’œil au travail que j’avais déchargé sur son bureau. Je pinçais un peu des lèvres alors qu’il admettait que Stone avait besoin d’aide mais que personne n’avait cherché à l’écraser.

- Vous savez, quand les gens touchent le fond du baril, ils ne voient jamais qu’ils ont besoin d’aide. Cependant, leurs agissements trahissent ce fait, comme les enfants qui n’ont rien à faire de nous quand nous sommes disposés à nous amuser avec eux mais qui choisissent le moment où nous sommes au téléphone, par exemple, pour se mettre à hurler.

Quant à expliquer la suite de ma réflexion, je voyais déjà le mur avec lequel je risquais fort de faire connaissance.

- Écraser n’était pas le bon mot, ignorer aurait été plus à propos.  Avec tout le respect que je lui dois, Monsieur Reed n’aurait pas dû tenter de camoufler le discours d’Howard comme il l’a fait. Entre son discours rapporté par Amon Sørensen dans le L.A.People et l’article de mon époux, les gens préféreront malheureusement croire les ragots. Ils sont plus accessibles et malheureusement, près de la réalité.

Je laissais passer un long soupire tout en haussant des épaules.

- Le discours de Monsieur Reed aurait été plus crédible si Stone ne s’était contenté que de chanter et nous aurions tous facilement cru à une surprise de sa part.

Je marquais une petite pause et je m’étais assise sur le fauteuil faisant face au bureau de mon patron tenant mon bloc note, comme je le faisais toujours en me retrouvant dans le bureau de Daniele, prête à noter ses demandes et les diverses tâches que j’aurais à faire pour le reste de ma journée.

- Peut-être que de lui offrir une aide indéfectible et un séjour en cure de désintoxication aux frais de BSC aurait paru comme un geste de support au travers l’épreuve difficile qu’il traverse en plus de montrer la générosité de la boîte. Les gens auraient comprit à quel point Howard est affecté et instable depuis la mort de sa femme. Le fait est qu’aujourd’hui, il y a un énorme doute qui s’installe avec ces deux articles complètements contradictoires.  

Je secourais la tête tout en replaçant mes cheveux.

- Après tout ce que BSC a fait pour lui. La gratitude est une qualité qui se perd de plus en plus de nos jours…

Si les exclamations de Sonne m’avaient troublées, j’avais tout de même répondu à sa question sur comment s’était passé ma pause. Elle espérait que ma femme ne lui en voulait pas trop d’avoir décliné son offre. Elle ne devait pas trop s’inquiéter pour Sammy – je crois que ça l’agaçait bien plus que je ne lui répète sans cesse que j’étais le meilleur au point même que ma secrétaire ne voulait se séparer de moi.

-Elle ne vous en veut pas, ne vous inquiétez pas, dis-je avec un petit sourire.

Sonne avait, elle aussi, bien mangé. Il est vrai que les sandwich du traiteur tout près étaient délicieux. Ils faisaient de très bons sandwich italiens.

J’étais entré dans mon bureau suivi par Sonne qui déposa quelques dossiers et autres documents. Putain – ça signifiait pas mal de boulot, ça, vu la pile… Sans compter tous ces petits papiers roses qui signifiait que j’allais passer du temps au téléphone. L’après-midi s’annonçait réellement chargé…

Seulement, avant de commencer cet incommensurable travail, j’étais revenu sur les paroles de Sonne quand j’étais sorti de l’ascenseur et qui – j’en étais persuadé – concernait le petit merdeux de Los Angeles. J’avais donné mon propre avis sur la chose mettant en avant que le petit merdeux n’avait aucune envie de se faire aider. Sonne, elle, se disait qu’un homme au fond du trou voyait rarement qu’il avait besoin d’aide et elle pensait bien que le comportement de Stone n’était qu’un appel à l’aide.

Quand bien même… Était-ce réellement mon problème ?

-Certes, c’est peut-être le cas, dis-je en haussant des épaules. Mais je pense que c’est à la famille et aux amis de Stone de lui venir en aide, vous ne pensez pas ?

Pas à moi ! Et BSC n’était pas obligé d’être un dégât collatéral du mal-être du batteur de The Burning Fire !

Sonne revint sur son mot disant qu’ignorer était un mot plus à propos. En gros, Sonne se rangeait à la version de L.A.People. C’est ce que je comprenais. Elle était aussi certaine que les gens allaient croire les ragots de son amant. Moui – parce que je me doutais qu’elle croyait Sørensen parce qu’elle était proche de lui. Bien qu’elle était aussi très proche d’Axel Moriarty aux dernières nouvelles.

-Près de la réalité ? L.A.People ? Avez-vous bu à votre pause, Mademoiselle Ferguson ? Amon Sørensen est réputé pour mentir dans ses articles. Ça ne fait qu’une fois de plus…, dis-je assez choqué par cette affirmation.

Mais Sonne n’était pas prête de croire notre petite manigance. Elle avait trouvé le discours de Jim très peu crédible.

-Et alors ? Qu’est-ce que ça change ? Ce n’est pas en crachant dans la soupe que Stone sortira sa tête du trou, dis-je montrant que les attaques de Stone n’étaient pas vraiment une solution à ses problèmes.

Sonne s’était assise face à mon bureau avant de dire que le mieux était que BSC offre son aide à Stone. En gros qu’on l’envoie en désintoxication. Elle mit en avant les deux articles.

-Laisser planer le doute c’est toujours bon en justice, dis-je avec un petit sourire en coin. C’est mieux qu’une affirmation. BSC peut vivre avec ce doute.

Il pourrait vivre même sans. Mais Sonne semblait de mon avis quant à la gratitude de Stone.

-Je ne te le fais pas dire, lançais-je en soupirant. Et même si BSC proposait une désintox’ à Stone, je doute qu’il accepte. Mais tu as raison. On pourrait le lui proposer. S’il refuse, sans doute que votre amant pourra le rapporter dans L.A.People. Ainsi, le public verra que BSC cherche à aider son artiste. Et s’il accepte ça sera tout bénéfice aussi… Enfin…, dis-je avec un petit sourire en coin. Sauf pour Fireworks qui sera hors service pendant la désintox’ de Stone. Mais l’idée n’est pas à jeter à la poubelle. Je devrais la proposer à Jim…

Je regardai, ensuite, Sonne de haut en bas.

-Mais pourquoi ce soudain élan d’empathie pour Stone ?, demandais-je avec un air suspicieux. Je ne me rappelle pas que vous m’ayez déjà parlé de lui…

Selon Daniele, Samantha ne m’en voulait pas du tout d’avoir décliné son offre. Je le savais déjà mais je voulais garder un profil bas vu ma petite mise en scène. Je voulais faire comme si de rien n’était. Je le suivis dans son bureau avec la pile de travail qui l’attendait pour le reste de sa journée et qui, immanquablement, me retomberait dessus demain matin car Daniele n’aurait probablement fait qu’effleurer le dessus de la pile.

Mon patron n’avait pas raté ma petite réflexion sur Stone faite à son arrivée aussi, il me demanda ce que je sous-entendais pas ce que j’avais dit. Pour moi, c’était simple. Howard Stone avait besoin que l’on l’aide et non pas que l’on l’ignore. Ce qu’il avait fait lors de la fête de donnée par Daniele était un appel à l’aide, un geste désespéré pour se faire remarquer, c’est ce que j’expliquais à Daniele qui était tout ouïe. Je défendis même Stone en disant qu’une personne au fond du gouffre ne se rendait même plus compte à quel point elle pouvait avoir besoin d’aide.

- Sa famille ? Ses deux bébés d’à peines quelques mois, vous voulez-dire ? Parce que sa femme vient de décéder et qu’il n’est pas un secret pour personne qu’Howard Stone n’est pas près de sa famille. Quant à ses amis, je ne miserais pas sur eux.

Sauf Amon, personne n’était intervenu en sa faveur et là encore ! Mon amant étant en recherche de solution. Pourvu que son article fasse plus de vague que celui d’Axel !

- Non, je n’ai pas bus et je maintiens que pour la grande majorité des gens, ce sont les articles écrit dans L.A.People qui sont le plus souvent crus. Autrement, pourquoi se donner la peine d’aller démentir dans un autre journal ?

Je m’étais installée dans le fauteuil, prête à reprendre le travail tout en sachant très bien que cette conversation ne se terminerait pas ainsi, Daniele voulait poursuivre et j’étais prête à aller au bout de mon idée.

- Je ne suis pas avocate, je n’ai, non plus, aucune connaissance juridique mais si c’est bon en justice qu’un doute plane, ça l’est moins pour dans la tête des gens. Ce sont surtout eux qui faut convaincre.

Moi, quand on me disait qu’un individu était acquitté faute de preuve, je demeurais méfiante. Faute de preuve ne voulait pas dire innocent. Cela voulait simplement dire qu’il avait été assez intelligent pour ne pas se faire prendre.

- Mais si vous croyez que BSC peut vivre dans le doute, qui suis-je pour dire le contraire ? je ne suis qu’une secrétaire dont personne n’a demandé l’opinion.

Daniele laissa tomber le vouvoiement quand j’avais parlé de la gratitude qui se faisait de plus en plus rare de nos jours. Il ajouta qu’il doutait que Stone accepte l’aide de BSC et suggéra que mon amant rapporterait cela dans l’un de ses articles. Ainsi les gens verraient que la boîte se soucis de ses artistes et pas que pour faire de l’argent. Puis, si Howard acceptait le coup de main, Fireworks serait mit sur la touche un moment mais…

- Ils ne se cassent pas le cul en studio, je doute que cela ne change grand-chose à leur calendrier… pardon, je vais surveiller mon langage.

L’envie de crier victoire m’effleura quand Daniele suggéra de proposer l’idée à Reed.

- En ce cas, vous devriez présenter l’idée comme étant la vôtre… Sans vouloir manquer de respect envers Monsieur Reed, je ne suis qu’une secrétaire…

Daniele me jaugea de haut en bas et je l’imitais, craignant avoir une tache quelconque sur mon chemisier de soie. Ce serait un drame ! Il avait coûté une fortune, Axel n’avait d’ailleurs pas encore eu le relevé de sa carte de crédit !

- Je suis mère de quatre enfants… Je me sens concernée par le sort des enfants Stone. Une mère décédée prématurément et un père sombrant peu à peu. Je ne peux m’empêcher de penser à eux.

Pour Sonne, la famille d’Howard Stone se résumait à ses bébés. Moui – il était de notoriété public que le batteur était en froid avec ses parents. Il était même en froid avec ceux de Peyton ! Par contre, il se vantait souvent d’avoir énormément d’amis. Mais d’après Sonne il ne fallait pas trop compter sur eux.

-Vous connaissez tous les amis de Stone, Mademoiselle Ferguson ?, demandais-je en levant un sourcil. Peut-être que le problème ne vient pas tant de ses amis mais du fait que Stone ne veut en rien se faire aider. Quoi qu’il en soit, je doute que moi, qui ne le porte pas dans mon cœur, je lui sois d’une grande aide…

Stone n’était pas mon problème ! Je ne suis pas Saint Antoine de Padoue ! Je n’étais pas là pour m’occuper des problèmes de chaque individu de la jet-set. Je leur offre des fêtes – c’est déjà ça !

Quant à L.A.People, Sonne maintenait son affirmation. Il est vrai que les gens crédules croyaient les inepties d’Amon mais n’empêche que dans la conscience collective, L.A.People était un ramassis de conneries.

-Qui a démenti qui ?, demandais-je avec un petit sourire en coin. L.A.People reste, dans la pensée collective, comme étant un banal torchon rempli de mensonges.

Rien n’indiquait que ce n’était pas l’article d’Amon qui est le démenti de celui d’Axel. Quoi qu’il en soit, les deux articles laissaient transparaitre le doute. Mais si ça passait bien en justice, ça l’était moins dans la tête des gens. De mon avis, BSC pouvait vivre avec ce doute.

-C’est surtout que, d’ici quelques semaines voir quelque jour, plus personne ne pensera à ça, dis-je en haussant des épaules. D’autres frasques de la jet-set viendront faire oublié le concert de Stone.

Je ne m’en faisais pas pour ça. BSC s’était relevé de pire qu’un doute. J’avais confiance que les choses allaient rapidement tomber aux oubliettes. Les gens ont souvent la mémoire courte – suffit de voir l’histoire de l’Humanité pour s’en rendre compte.

Mais Sonne souleva quelque chose d’intéressant concernant la désintox’. Si BSC proposait ça à Stone son refus comme son acceptation de la chose sera à l’avantage de la maison de disques. Si BSC lui proposait ça, ça sera Stone qui sera dans l’impasse de ne plus savoir ce qu’il doit accepter pour continuer sa guerre contre Jim. C’était assez bien vu – je devais l’avouer. Alors, je ne rejetai pas l’idée. D’après Sonne, Fireworks ne se cassaient pas le cul en studio. Ah oui ? Saurait-elle des choses que je ne sais pas.

-Je n’ai aucune idée d’où en est Fireworks. C’est le problème de Perry. Tout ce que je sais c’est que Stone est en train de finaliser un projet qui n’est lié à aucune maison de disques, dis-je en haussant des épaules. Mais vous semblez bien renseignée. C’est votre amant qui vous dit où en est Stone dans ses projets?, demandais-je légèrement moqueur – une moquerie toute innocente.

Je ne rejetai, donc, pas l’idée de Sonne que je présenterais à Jim. Bien que ma secrétaire voulait que je ne fasse pas passer l’idée comme étant la sienne.

-Ça va s’en dire, dis-je avec un petit sourire complice envers ma secrétaire.

La seule femme pouvait faire passer une idée à Jim, c’était sa mère…

J’avais regardé Sonne de haut en bas – un geste qui semblait l’avoir troublé parce qu’elle baissa la tête sur son propre chemisier avant que je ne demande d’où elle avait tiré son empathie soudaine pour le batteur de The Burning Fire. Apparemment, c’est surtout des jumeaux du batteur qu’elle s’en faisait.

-Je doute qu’une vie avec Stone soit un parcours de santé quoi qu’il arrive, dis-je avec un petit sourire en coin. Ces gamins sont condamnés à vivre avec un irresponsable. Et si jamais Stone se fait retirer la garde, ce sont certainement les parents de Peyton qui l’obtiendront ce qui n’est pas non plus de bonne augure pour les gamins… Mais bon ! Qu’est-ce qu’on en peut ?, dis-je en haussant les épaules. Je comprends votre empathie de mère. Mais il faut voir les choses en face, Mademoiselle Ferguson… Le pire ennemi de Stone, c’est Stone, quoi qu’il en pense. N’êtes-vous pas d’accord avec ça ?

De ce que mes lectures des articles d’Amon m’apprenaient, Howard Stone ne pouvait pas trop compter sur sa famille pour lui maintenir la tête en dehors de l’eau et quand Daniele me demanda si je connaissais bien ses amis, je lui répondis selon la même ligne de pensée.

- De ce que j’en sais, ses amis sont autant affectés par les maux de la vie et instables que lui. Je vois mal Savannah Prescott ou David McAvoy lui dire de rester dans le droit chemin.

Ce que je faisais là revenait à juger les gens sans les connaitre mais au fond, Amon ne pouvait pas faire que mentir dans ses articles.

- J’en reviens toujours à croire qu’une personne au fond du gouffre ne voudra pas s’aider. Je sais… Je suis un peu passé par là pendant ma relation avec Atticus. Toute aide est non négligeable.

Rarement pour ne pas dire jamais je parlais de cette époque de ma vie où j’aurais bien pu y laisser ma peau.

Daniele défendait l’article d’Axel alors que je restais sur celui d’Amon en disant de ce dernier qu’il était plus accessible aux gens et que par conséquent, plus facile à croire.

- Je n’ai jamais dit qu’il valait mieux qu’un torchon. Mais il se vend, se lit et se propage comme la peste. Vous savez mieux que moi qu’un ragot s’achète plus facilement que la vérité toute belle et louable puisse-t-elle être.

Combien d’artistes publiaient des démentis et restaient tout de même aux prises avec une étiquettes, malgré eux ? Combien d’appel recevais-je pour mon patron pour une entrevue concernant telle ou telle nouvelle et ce, malgré la grossièreté de la chose. Peut-être que Daniele était trop ancré dans sa propre réalité pour accepter de croire que son grand ami Jimmy Reed ne représentait pas la vérité infuse !

Daniele croyait aussi que d’ici peu, plus personne ne parlerait de cette histoire, la frasque de Stone aura été remplacée par une autre et disparaîtra de l’imaginaire collectif. Aussi, fallait-il donc que Jimmy Reed en fasse tout autant, là était le nœud du problème.

- Effectivement ! Le monde médiatique n’est rien de plus qu’une roue qui tourne. Croyez-vous que Monsieur Reed verra les choses de cette manière ? Il semblait très contrarié, surtout pour ses chaussures…

J’essayais de faire un peu de potinage, puisque nous en parlions, pourquoi ne pas poser la question à la personne la plus susceptible de bien m’informer, sachant que je n’irai jamais le demander moi-même à Reed ?

De mon point de vue, BSC avait beaucoup à gagner en offrant son aide à Howard Stone. Si ce dernier refusait, il perdrait certainement de la sympathie des gens et s’il l’acceptait, là encore, les gens y verraient la bonne action de sa maison de disque, de l’une de ses maisons de disque puisqu’il logeait à deux adresses.

- Je ne suis informée que par des bruits de couloir, vous savez. Je ne croie pas qu’Amon soit aussi bien informé que les projets de Stone que vous le pensez.

Je ne voulais pas non plus que Daniele croie que tout ce que je savais, je le tenais de mon amant. De toute façon, ce n’était pas le cas. En travaillant ici, en allant prendre mon café en bas avec les autres secrétaires, j’entendais beaucoup d’histoire, pas toujours très intéressantes mais il arrivait parfois que certes perles fuitaient.

Daniele était assez d’accord pour faire passer ma suggestion auprès de Reed comme étant son idée. J’étais soulagée que mon nom ne ressorte pas de ce bureau et prête à travailler mais Daniele voulu ensuite savoir d’où me venait mon intérêt pour Howard Stone. J’eu un petit moment de réflexion avec moi-même avant de brandir la carte du cœur de mère. Je ne pouvais rester insensible au sort de ces bébés privés de mère et bientôt de père, s’il continuait de s’enfoncer.

- Grand Dieu ! Je n’ose imaginer quels animaux de cirques les parents de Lola feraient de ces enfants ! Peut-être qu’avec Stone, ils n’auront pas un parcours commun mais le lien de famille est important. Il l’est pour moi en tous les cas.

Daniele comprenait mon sentiment bien que pour lui, le pire ennemi de Stone était Stone lui-même. Il avait sans aucun doute raison mais déjà, j’avais presque obtenu de l’aide pour l’ami de mon amant déjà part de BSC, j’étais heureuse et je n’avais pas besoin de plus que ça.

- Vous avez sans aucun doute raison, comme toujours. Êtes-vous prêt à faire le tour de votre agenda ou préférez-vous que je revienne plus tard ?

Certes – les deux amis cités par Sonne n’allait sans doute pas aider Stone. Mais Stone n’avait pas que McAvoy et Prescott pour l’aider. Il avait aussi la famille North toute entière dont il était très proche.

-Vous oubliez que Stone est proche des North…, dis-je avec un petit sourire. Sincèrement, je suis sûr qu’il peut trouver de l’aide dans son entourage… Plus qu’il n’en trouvera chez moi…

Car je n’aimais pas Stone – point barre !

Même si Sonne avait tout de même raison sur le point qu’une personne au fond du trou ne demandera pas spontanément de l’aide. Elle évoqua sa période noir avec Atticus – une période dont elle ne parlait presque jamais mais qui, je le savais, l’avait profondément marqué.

-Certes, dis-je en soupirant. Mais je reste persuadé que je suis très mal placé pour l’aider.

Parce qu’il fallait de la volonté pour le faire et je n’en avais pas. Je ne pouvais pas m’inventer une sympathie pour un homme que je n’aimais pas.

Nous n’avions pas totalement le même point de vue sur L.A.People. Pour moi, il était clair que tout le monde ne croyait pas les conneries déblatérées par l’amant de Sonne. Bien qu’elle avait sans doute raison de dire que ça se répandait plus vite que ce que disait Moriarty étant donné que L.A.People était logiquement plus lu que Guitar&Pen qui était un magazine spécialisé.

-Je vous l’accorde. Ce que dit L.A.People se repend comme la peste. J’en ai déjà fait les frais…, dis-je sérieusement. Mais je m’en suis remis et ma réputation est intacte.

En gros, je savais qu’avec le temps, les gens oublieront ce qu’il s’est passé à l’inauguration de mon yacht. Les gens emmagasines aussi vite qu’ils oublient. De ça, Sonne était d’accord mais mis en avant que Jim n’était sans doute pas aussi d’accord que ça avec mon affirmation.

-J’aurais été contrarié aussi si on avait versé de la vodka sur mes mocassins, dis-je avant de faire la moue. Jim a déjà oublié ça, de toute façon…

Moui – j’étais certain que Jim n’avait déjà plus la tête à ma fête. Bien que je comptais proposer l’idée de son sur la désintox’… Ça me donnera une raison d’aller boire un whisky chez mon meilleur ami. Je suis Daniele Ricci – j’aimais faire d’une pierre deux coups. Quant à Fireworks, Sonne semblait avoir entendu des bruits de couloir comme quoi leurs projets n’avançaient pas.

-Ne sous-estimez pas Sørensen. Il est plus informé qu’il ne le montre… Bien que je sais que je peux vous faire confiance sur le fait que vous n’êtes pas du genre à lui donner ce qu’il veut en ce qui concerne les bruits de couloir que vous entendez. Je vous sais très fidèle, dis-je certain de ça vu qu’elle me l’avait encore prouvé récemment.

Sonne m’avait expliqué pourquoi elle s’intéressait tant à la santé mentale de Stone. C’est pour les enfants du batteur qu’elle s’en faisait, en fait. Des enfants qui, de toute façon, n’avait aucune chance d’être bien entouré entre Stone et les parents de Lola. Sonne se disait que le mieux était encore qu’ils restent avec leur père plutôt que de servir de bête de foire. Sonne mit en avant que la famille était importante pour elle. Elle parlait sans doute de ses enfants et non de son mari, j’imagine.

-Vous avez une âme d’italienne pour parler ainsi, dis-je avec un petit sourire. Hélas pour les enfants Stone, les parents de Lola sont aussi de leur famille. Tout comme les parents de Stone... Mais on ne choisit pas sa famille…

Restait que je pensais que Stone était le pire ennemi de Stone. Peu de gens pourront me contredire là-dessus. Sonne semblait d’accord et mit fin à la discussion pour qu’on entame le travail du jour.

-Va pour l’agenda ! Je suis prêt Mademoiselle Ferguson, dis-je avec un grand sourire.

- Oh ! Si la famille North sort de sa tanière de temps en temps, alors j’ose espérer qu’ils veilleront sur leur ami, en ce cas !

Ça aussi, c’était un fait que tout le monde savait ! Le couple North était très casanier et se montrait que très rarement en public. On disait même que, lorsqu’elles seraient en âge de fréquenter l’école, les filles North seraient scolarisées à domicile tant nous ne les voyons jamais hors de leur maison. Mon avis de mère était que de trop couver sa progéniture n’aidait pas à son développement.

- Je ne disais pas cela pour que vous alliez vous-même vous assurer qu’il va bien.

De toute façon, je voyais très mal mon patron faire office de nurse auprès d’Howard Stone. Si je parvenais à ce résultat, Amon me louangerait jusqu’à la fin des temps !

Daniele et moi n’avions pas la même vision concernant les publications d’Amon et d’Axel. Si Daniele croyait que les gens donneraient plus de crédit à ce que mon mari avait publié, moi, je ne démordais pas que L.A.People était plus accessible pour la majorité des gens et que malheureusement, Amon parvenait toujours très habilement à semer un doute raisonnable.

- N’oubliez pas que même si la vérité fini toujours par voir le jour, elle prend l’escalier pour se rendre au sommet alors que les rumeurs font le trajet en ascenseur.

Et quand la vérité finissait pas éclater, les dommages causés par les rumeurs demeuraient souvent trop profond, parfois irréversibles.

- Je veille aussi au maintient de votre réputation.

Je me faisais un point d’honneur à donner une image impeccable de mon patron à chaque jour de travail et chaque fois que je le pouvais au travers diverses conversations. Je vouais une grande admiration et nourrissais un profond respect pour Daniele.

À force de broder, j’en vins à proposer une désintoxe pour Howard Stone et à presque faire croie à Daniele qu’il en avait lui-même eu l’idée. J’avais avancé que cela ne nuirait pas à Fireworks ce qui fit croire à Daniele que j’en savais peut-être plus que je ne le laissais croire. Cependant, pour ce coup, il ne s’agissait que de bruits de couloirs qui étaient remontés jusqu’à moi.

- Amon et moi ne parlons rarement de ses articles… Nous avons mieux à faire, effectivement,  sans vouloir être déplacée.

Je ne laissais rien filtré de ce que j’apprenais au bureau, même si un jour l’idée de le faire pour Axel m’avait effleuré l’esprit, j’avais vite choisi mon allégeance et elle allait tout en entier à Daniele, sans regret pour les deux hommes de ma vie.

Ma surprenante dévotion pour Howard Stone venait de mon inquiétude pour l’avenir de ses enfants, c’est ce que j’expliquais à Daniele qui se demandait ce qui me prenait. Il affirma alors que j’avais une âme d’italienne et cela me fit sourire.

- C’est un très beau compliment que vous me faite et il me va droit au cœur.

Malheureusement pour les enfants du batteur, ils avaient d’horribles grands-parents qui n’hésiteraient pas à faire d’eux leur nouvelle vache à lait et comme Daniele me le faisait remarquer, nous ne choisissions pas notre famille.

N’ayant rien de plus à ajouter là-dessus, je demandais à Daniele s’il était prêt à commencer le travail à moins qu’il ne préférait que je revienne plus tard dans son bureau.

- Parfait, alors voici ce que j’ai noté pour vous cet après-midi…