« La critique ne peut s’exprimer dans ce cas. Elle est muselée par l’émotion. »

Vous savez ce que je pense d’Axel Moriarty ? C’est un petit profiteur complaisant. Je ne l’ai jamais vraiment apprécié contrairement à Jim. Je l’ai simplement toujours trouvé utile quand il s’agissait de mettre en avant mes groupes et autres artistes. Mais je devais avouer que sur ce coup-là, il avait raison.

Parce que nous avions eut nos désaccords, Sammy et moi, sur l’album hommage de Peyton qui était récemment sorti. Je ne pouvais pas aimer cet album. Pas parce que la qualité laissait à désirer - quoi que je trouve la qualité d’une chanson à l’autre assez inégale étant donné le patchwork de style et de niveau différents entre les artistes – mais bien parce que pas moins de trois de mes artistes avaient décidés qu’il était mieux de ne pas m’en parler et que ce n’était pas la première fois.

J’estime être juste avec mes poulains. J’estime faire tout pour qu’ils atteignent la gloire. J’estime me donner à fond pour qu’ils puissent enregistrer dans de bonnes conditions. J’estime, donc, avoir le droit de savoir ce qu’ils désirent faire et j’estime avoir le droit de donner mon avis sur la chose en échange. Mais chaque fois que je risque d’émettre un avis négatif, ils préfèrent passer par-dessus moi pour éviter que je ne les regarde de travers.

Alors, oui, je n’aimais pas cet album parce que ça me rappelle toute la considération que peuvent avoir parfois certains de mes poulains pour mes convictions. Est-ce mal de ne pas aimer un album dont les fonds vont à la charité ? Je ne pense pas, non ! C’est pas comme si je n’avais aucune considération pour les organismes aidant les autres. Je participe souvent à des gala afin de donner des fonds de ma propre proche et soutirer l’argent des riches pour le donner au pauvre. Mais jamais le fait que ça soit un album pour la charité ne m’empêchera de donner mon avis sur le fond ou la forme d’un album. Si on ne peut plus critiquer uniquement pour ça, je vais faire en sorte qu’une partie des fonds de tous les albums de mes poulains soient donné à un organisme ou l’autre afin qu’on ne puisse en aucun cas les critiquer ou les boycotter. Et ce n’est pas parce que Lola est décédée que je dois absolument aimer tout les hommages fait en sa mémoire. D’ailleurs, moi, personnellement, j’avais un très mauvais souvenir de la diva ! Elle avait tout de même voulu me foutre un procès pour viol alors que je ne n’avais strictement rien fait ! Un fait qui m’est resté en travers de la gorge et qui m’empêche de voir en elle une petite poupée fragile et pleine de talent ! Mais bon ! Tout le monde sait qu’une fois mort, on a plus de défauts…

C’est, donc, assez amer que je m’étais rendu dans le bureau de Jim. Je devais – de toute façon – lui parler de Stone. Sammy trouve que, sur le sujet de l’album hommage, je n’ai pas l’esprit ouvert ? Autant aller discuter avec des gens de mon esprit, alors, non ?

J’étais monté jusqu’au bureau de Jim assez content que le petit Fleming soit à l’école. Je n’avais pas envie de voir sa petite tronche de gamin buté. J’avais toqué et j’étais entré tout en même temps – Jim savait que je venais de toute façon.

-Salut, amico mio !, lançais-je. Alors ? Comment tu vas ? Tu as du whisky, j’espère ! J’en ai besoin… L’album hommage est sorti et il semble faire l’unanimité. De quoi me donner envie de voir Stone rejoindre sa femme…

Ok ! J’y allais un peu fort, là. Mais je commençais en avoir marre du martyr Howard Stone.

J’étais en train de relire l’article d’Axel sur l’album hommage à Lola. Je ne l’avais pas écouté, je boycottais. Même s’il y avait ma fille dessus, je n’en avais que faire ! Déjà, elle aurait du demander l’avis de Daniele sur la chose avant de se lancer là-dedans. Maritza voulait l’écouter ? Je lui avais dit d’attendre que je ne sois pas là. Et d’emprunter le disque, pas de l’acheter !

Je ne voulais pas qu’un seul de mes dollars serve le dessein de Sainte Lola.

Oui, parce que maintenant qu’elle était morte, c’était apparemment une Sainte ! Tout le monde semblait avoir oublié qu’elle n’était qu’une petite gamine prétentieuse et même méchante quand elle le voulait ! Tout le monde avait oublié de la détester.

J’aimais donc assez le message plutôt subtil d’Axel dans son article… Son ironie à peine voilée quand il écrivait que vu qu’elle était morte et que cet album était destiné à une bonne cause, le journaliste acerbe qu’il était n’avait tout juste qu’à fermer sa gueule, sinon, ce serait mal vu.

Je savais que Daniele voulait me voir, il l’avait dit à Frances qui m’avait fait passer le message. J’étais donc sur mon trente et un, dans mon appartement, assis à mon bureau.

La bouteille de whisky était déjà prête, sur le bureau, avec deux verres.

Je reposai l’article, soupirai et fis tourner ma chaise de cuir pour admirer le panorama de Los Angeles, cette ville sur laquelle je régnais en maître depuis des années.

Ce n’était pas Stone et Lola qui allaient changer la donne, pas plus qu’une poignée d’artistes dégoulinants de bons sentiments.

Je fis tourner encore ma chaise à 180° quand j’entendis frapper à la porte.

-Entrez…

C’était déjà fait, Daniele savait qu’il était toujours le bienvenu chez moi.

Je lui souris... Et désignai de la main la bouteille de whisky qui n’attendait que lui.

-Viens, installe-toi, mon ami.

J’attendis qu’il prenne place avant d’ajouter à la suite de son désir qu’Howard Stone rende l’âme.

-Je vais relativement bien… Si on oublie le caillou dans ma chaussure qu’est ce foutu album hommage. Maritza voulait absolument l’écouter et je ne peux pas encore l’enfermer dans un placard pour le lui interdire.

Je haussai les épaules et me levai pour nous servir le whisky.

-Je devrais, peut-être…

Je poussai le verre vers Daniele sans le lui tendre et pris le mien avant de me rasseoir en soupirant.

-Rassure-toi, je boycotte. Je n’ai pas entendu une note de cette abomination. Et Maritza a interdiction de l’acheter.

Ce serait un peu le serpent qui se mord la queue, de toute façon… Maritza étant une des figure de United For Youth, l’argent ne ferait que tourner.

Jim avait déjà sorti le whisky ! Il faut dire qu’il s’attendait à ma petite visite. Je m’étais installé dans l’un de ses fauteuils confortable demandant des nouvelles de Jim lui-même. L’album hommage étant sorti, j’imagine qu’il avait pas mal de choses à dire. C’est d’ailleurs ce sujet que j’avais mis sur la table en premier tellement tout ça me révoltait d’une certaine façon.

Pour Jim aussi l’album était un caillou dans sa chaussure. Il faut dire que sa propre fille avait contribué à cet album. Livia n’était pas bête – c’était une jeune femme intelligente… Mais il arrivait que, parfois, ça soit ses émotions qui la guide vers une décision de projet. J’imagine que c’était le cas ici… Mais ça ne pardonnait pas le coup dans le dos. Quand elle m’avait parlé de la proposition de film, elle avait mis en avant que j’étais son manager et qu’elle devait passer par moi pour ce genre de chose… Elle avait même trouvé ça bizarre que ça lui soit envoyé à elle et non à moi. Mais quand il s’agit de projet concernant Stone, visiblement, il n’y avait aucun problème pour que je ne sois pas là ! Et je ne parle même pas de Sniper et Holland ! Sniper est un multirécidiviste sauf qu’il s’était excusé d’une certaine manière.

Jim disait que Maritza voulait l’écouter et j’avais rigolé quand il avait dit qu’il devrait peut-être enfermer sa femme dans le placard. Je ne devrais peut-être pas rire – il en serait tout à fait capable !

-Mon pauvre Jim…, dis-je avec un petit sourire.

Jim n’avait rien écouté boycottant naturellement l’album.

-Oh ! Moi Sammy l’a déjà écouté. Du coup, j’en ai fait de même, dis-je en soupirant. A la limite, je n’en ai que faire de ça ce qui m’énerve c’est que, visiblement, critiquer cet album c’est mal. Depuis quand on ne peut pas critiquer ou boycotter quelque chose ? Je dois marcher sur mes conviction parce que Stone fait dans la charité ? Faut pas se foutre du monde non plus !, lançais-je toujours révolté. Et si ça fait de moi un homme à l’esprit étroit, qu’il en soit ainsi !  

Quoi qu’en pense Sammy je resterais sur mes positions concernant l’album.

-Les gens ne voient que le beau geste… Moi j’y vois de la trahison et, limite, une révolution. Cette foutue révolution de Stone. Des artistes qui vivent sans maison de disques ? Tu sais quoi, Jim ? Si ça pouvait se faire, je les laisserais mes poulains incriminés se promouvoir eux-mêmes, se trouver des concerts, gérer la paperasse et tout financer eux-mêmes pour voir s’ils n’ont pas besoin de maison de disques. Parce que c’est très facile de recourir à mes services quand ils en ont besoin et me faire des bébés dans les dos quand ils pensent que je ne vais pas aimer ce qu’ils vont faire, lançais-je toujours furieux.

Je suis un foutu capitaliste ! Qu’il n’en déplaise à certains !

-Quoi qu’il en soit, il faut que le crique de Stone cesse ! Il me ressort de partout !, lançais-je à Jim.

Je regardai Daniele d’un air torve quand il m’avoua avoir écouter l’album hommage à Peyton Stone parce que sa femme l’avait écouté… Puis, je ricanai…

-Je te jure que si ma femme fait la même chose, je la fous dehors.

Et même si je ricanais, je ne rigolais pas le moins du monde. J’avais interdit à Maritza de le faire. Si elle contestait mon autorité, je n’avais plus rien à faire avec elle. Et elle pourrait me trouver toutes les excuses du monde que ça n’y changerait rien.

Oui, j’étais prêt à divorcer pour ce genre de cause. Si ma femme se mettait à pouvoir faire n’importe quelle connerie, où allait-on ?

Et en effet, comme le disait Daniele, on ne pouvait même pas se permettre de critiquer cet album.

-Moi, je le fais quand même. Je boycotte et je ne le cache pas… Que tous ces bien-pensants aillent se faire mettre. Lola n’a été qu’une pauvre petite merde prétentieuse toute sa foutue courte vie.

Daniele ajouta que si ça faisait de lui un homme à l’esprit étroit, qu’il en soit ainsi.

Je bus une gorgée de mon whisky.

-Nous sommes des hommes à l’esprit pratique… Le sentiment ne doit pas nous faire obstacle.

Mon ami italien parlait de trahison, de révolution…

Je fis la moue.

-Le pire, c’est que tout le monde trouve ça bien alors que la plupart des artistes qui sont sur cet album n’y ont aucune légitimité. A commencer par Livia qui était la rivale de Peyton. Sniper qui la connaissait à peine, Holland qui est dessus pour une raison qui m’échappe. Vanya Kournikova qui n’est même pas une chanteuse, Billy Lighter qui est dessus juste pour prouver qu’il respire encore…

Je haussai les épaules.

-En fait, ce qu’Howard aurait du faire, c’est un album de Fireworks rendant hommage à Peyton. Ça, j’aurais compris.

Daniele était furax et il voulait que ses poulains se rendent un peu compte de ce qu’il faisait pour eux. Je pouvais le comprendre. Je soupirai.

-Ce sont tous des ingrats… Et tout ça profite à Stone. Ils sont naïfs.

Pour ne pas dire qu’ils étaient complètement débiles.

Je hochai la tête quand Daniele déclara qu’il fallait que Stone arrête avec ses conneries. J’étais bien d’accord.

-Je ne peux pas le faire supprimer… Il est trop connu… Il y aura une enquête approfondie et je ne peux pas le risquer.

Je frottai mon menton, réfléchissant.

-Il faudrait lui faire une belle frayeur… Parce que je ne pense pas que l’atteindre financièrement lui fasse quelque chose.

L’album révoltait autant Jim que moi. Il faut dire que l’album de Stone allait grandement attirer l’attention en cette fin d’année ce qui, niveau marketing, ne va ni plaire à MTI, ni plaire à BSC. En tout cas, Jim ne voulait en aucun cas entendre la moindre note, ni avoir la moindre copie de cet album chez lui quitte à virer n’importe qui – chez lui – qui aurait l’audace de débourser de l’argent dans l’hommage à Lola. Je le reconnaissais bien là…

Moi, ce qui me dérangeait dans cette histoire c’est que la moindre critique envers cet album semble interdit. Tout ça parce que c’est un hommage à une artiste décédée mais, aussi, parce que les fonds vont à la charité. Jim se fichait de ça, il boycottait avant d’ajouter que Lola n’a pas été un ange de son vivant.

-Je ne l’appréciait pas non plus. Elle m’a déjà fait un sale coup, dis-je avec un regard sombre. Mais bon… Tu sais comment ça fonctionne… Quand tu meurs, tu deviens un saint… C’est le cas pour tout le monde.

Sammy avait déclaré que j’avais l’esprit étroit… Qu’il en soit ainsi. Pour moi, cet album montrait la déloyauté de mes poulains qui ne semblait pas pouvoir encaisser le fait que je désapprouvais certaines choses. A croire qu’ils ne veulent mon avis que ce sur ce qui les arrange bien. Ils devraient prendre des cours de loyauté chez Sonne ! Jim disait que nous avions l’esprit pratique. C’est clair que dans le monde des affaires, il ne fallait pas faire trop dans le sentiment.

-Je sais…, dis-je en soupirant. Ce qui m’ennuie le plus dans cette histoire c’est l’ingratitude.

Et le fait que tout ça allait aider à la petite révolution du martyr Stone. Jim, lui, discuta la légitimité des artistes présents sur l’album. Certes je pouvais comprendre la présence des artistes de The Burning Fire. Ils devaient sûrement connaitre Peyton étant donné son lien avec Stone. Quant aux autres, j’imagine qu’ils y étaient pour la même raison que Sniper – pour Stone et pour la charité…

-Ils vont te dire que c’est pour le fait que l’argent revienne à la charité qu’ils font ça, dis-je en haussant les épaules. C’est ce que m’a dit Evan quand je l’ai mis sur le fait accompli. Ça suffira à ce que le public n’y voit pas autre chose. Quoi que… Certains pourront penser que certains artistes sont illégitimes. Bien que beaucoup sont amis de Stone et ça peut aussi suffire.

Je ne savais pas ce qui avait – individuellement – poussé chaque artiste à finir sur cet album. Mais je comptais sur la presse pour investiguer. Parce que la presse va faire ses choux-gras de cette collaboration.

Jim aurait compris que Fireworks fasse un album rendant hommage à Peyton.

-Ça n’aurait pas aussi bien vendu qu’un album avec tant d’artistes différents ! S’il fait l’unanimité c’est parce que tout le monde s’y retrouve, lançais-je avec un petit sourire jaune.

Jim confirma l’ingratitude de mes poulains. C’est clair que tout ça allait profiter à Stone qui ne cessait de cracher dans la soupe. S’il en avait marre de Jim, il n’a qu’à quitter BSC au lieu de jouer les martyr.

Le mieux – pour tout aplanir – était de faire taire cette révolution. Jim disait ne pas pouvoir supprimer Stone.

-C’est, de toute façon, un mauvaise idée. Un martyr mort, c’est pire qu’un martyr vivant, lançais-je pensant que la mort de Stone transformerait le batteur en symbole.

Vivant, il peut faire des erreurs. Ce n’est pas le cas quand il est mort.

Jim pensait lui faire peur… Moui – je ne pensais pas que ça soit véritablement efficace.

-Il a été tabassé par Ward Fleming, ça ne l’a refroidi à rien… Pire, c’est ça qui semble avoir allumé la mèche. L’effrayer pourrait empirer les choses, dis-je pensif. Non ! Le point faible de Stone, c’est la vodka. C’est son alcoolisme qui le décrédibilise. Pourquoi BSC ne lui proposerait pas une cure de désintox’ toute payée ? S’il accepte, BSC sera bien vu et montrera qu’elle veut aider Stone. S’il refuse, les gens penseront qu’Howard n’est qu’un alcoolique qui s’ignore et aime à s’auto-détruire. Dans tout les cas, les gens verront la main tendue par BSC. La presse peut-être de notre côté sur ce coup. Je pense que ça peut-être un point de départ pour étouffer cette révolution. Si Stone s'acharne malgré tout, de plus en plus de gens vont penser qu'il crache dans la soupe.

J’étais bien content d’entendre Daniele dire qu’il n’aimait pas Peyton et que la mort, pour lui, ne l’avait pas subitement transformée en Sainte pleine de bonnes intentions. Mais je ricanai quand il affirma qu’il en irait de même pour tout le monde, une fois mort.

-C’est bizarre, je suis sûr et certain que ce ne sera pas mon cas.

Personne n’allait me faire un album hommage. Personne n’allait me pleurer. J’étais assez lucide pour m’en rendre compte. Mais je n’avais pas besoin de ça. Le principal, c’était que je sois le plus intelligent dans toutes mes manœuvres de mon vivant. Une fois mort, plus rien n’aurait d’importance.

Quant à Daniele, c’était l’ingratitude qui lui faisait le plus de mal. Mais Sniper s’était dédouané en disant qu’il avait fait ça pour la charité… Je me frottai le menton puis pris une gorgée de whisky.

-Oui… Je suppose que c’est comme ça que Stone a convaincu plus d’un artiste à participer.

Je fis la grimace.

-Le pire, je me demande si ce n’est pas Prescott… Certes, elle fait partie de The Burning Fire et a donc probablement connu un peu Lola. Mais de ce que je sais, elle a aussi très bien pu la cocufier.

Ça ne m’étonnerait pas d’apprendre que Prescott et Stone ait couché ensemble du temps que Lola était avec Stone. Pas le moins du monde. C’était bien le genre à tous les deux. Ce qui rendait cette pétasse sidéenne encore plus hypocrite, dans l’histoire.

-D’un côté, je me dis : « Espérons qu’elle crève bientôt. » et d’un autre, je n’ai pas envie qu’un autre album hommage soit fait dans notre dos.

C’était ce qu’il y avait de bien, avec Daniele… Je pouvais dire tout ce que je pensais sans réfléchir. Et là, j’avais sérieusement besoin de cracher ma haine.

Daniele disait, lui, que si l’album avait du succès, c’était parce que tout le monde s’y retrouvait.

-Effectivement, difficile de ne pas trouver son chanteur préféré là-dedans. Même le petit Starky a participé… J’ai d’ailleurs mis un blâme à Perry, ça lui apprendra.

Je n’avais pas hésité une seconde. Il aurait un retrait sur salaire pendant quelques mois. Et ça faisait tache sur son CV.

Pour finalement en venir à Stone et à ce problème qui devait être réglé. Il fallait que ce cirque prenne fin. J’en avais assez de jouer. Au point que je pensais à le supprimer tout en sachant que ce n’était pas possible, comme le souligna Daniele. Je passai une main sur mon visage.

-Je sais.

Et je savais aussi que m’énerver comme ça était mauvais. Il fallait que je réfléchisse avec sang-froid, pas sur un coup de tête.

C’est alors que Daniele m’exposa un plan qui attira toute mon attention. Je l’écoutai attentivement. Il fallait envoyer Stone en désintox… S’il acceptait, c’était tout bénéfice pour nous. S’il refusait, le monde verrait que Stone n’est pas crédible et ne cherche qu’à provoquer BSC dans un désir d’autodestruction qu’il voulait remettre sur le dos de quelqu’un d’autre.

Je laissai planer un silence réfléchi quand Daniele eut fini de parler.

-Ça me semble être un bon plan… Et puis ça permettra d’écarter Stone le temps de sa désintox…

Je souris…

-Perry est manager de Fireworks… Il pourrait lui proposer… Et je ferais une déclaration dans Guitar&Pen pour qu’on comprenne bien que l’idée vient de BSC.

Jim était sûr et certain que personne ne dira que c’est un Saint quand ça sera son tour à lui de clamser. Moui – je savais que peu de gens aimait Jim. C’était un homme d’affaire impitoyable avec tout le monde et extrêmement exigeant envers les propres membres de sa famille. Livia en avait récemment fait les frais au point où elle voulait s’éloigner de son père. Et pour blaguer, je lançai :

-Ward Fleming dira peut-être des bonnes choses sur toi, dis-je avec un petit sourire en coin.

Après tout, s’il était dehors, c’était grâce à Jim, n’est-ce pas ?

-Je déconne, amico mio. Je dirais de bonnes choses sur toi, rajoutais-je avec ce même sourire.

Contrairement à moi, je doutais que Jim en ait quelque chose à faire de ce que les gens penseront de lui une fois qu’il sera mort, de toute façon. Moi, je voulais qu’on se rappelle le grand manager que j’étais !

J’avais souligné ce qui me révoltait dans cette histoire d’album. C’était en fait plus un question de loyauté – pas forcément de gros sous. Pour Jim ça devrait être les deux en plus de fait que tout ça soit orchestré par Stone. J’avais déclaré que si beaucoup avait accepté cette collaboration c’était parce que l’argent allait à United For Youth – c’était suffisant pour que beaucoup accepte. Jim était d’accord avec ça en plus de souligné l’hypocrisie possible de Prescott.

-Peut-être, lançais-je en haussant des épaules. C’est bien le genre de Stone de tromper sa femme. A moins qu’ils ne faisaient ménage à trois… Quoi que je vois mal Lola partager...

Je n’en savais rien. Je ne saurais dire qu’elle était véritablement la relation entre Prescott et Peyton Stone. Ce qui m’affligeait surtout, c’était mes propre poulains ! Mais il était clair que Jim ne portait en rien Prescott dans son cœur comme en témoignais ses paroles qui me firent un peu rigoler. Jim – en dehors de sa propre fille – avait du mal avec les femmes chanteuses. On ne le changera plus à ce niveau.

-Moui, évitons un autre album hommage, si possible, dis-je en faisant la moue.

Bien que je savais que Prescott avait attrapé le SIDA ce qui réduisait considérablement son espérance de vie. Un destin que je ne voudrais même pas pour mon pire ennemi. Mais si Jim avait des paroles si dures c’était parce qu’il était clairement en colère. Je l’avais rarement vu autant en colère. Cette album remuait quelque chose en lui comme il avait remué quelque chose en moi.

Certainement en partie parce qu’il avait du succès. Un succès qui s’expliquait par la diversité des artistes présents sur l’album. C’est là que j’appris que Perry s’était pris un blâme. Une preuve de plus de la grande colère de Jim.

-Un blâme ? Carrément !, dis-je surpris. Tu n’as pas peur qu’il aille voir ailleurs ?

La colère de Jim pouvait le pousser à faire des erreurs. Il fallait qu’il garde la tête froid. Si Perry se sent lésé ou acculé, il pourrait décidé de plier bagage avec – dans lesdits bagages – Fireworks.

L’album était fait ! On ne pouvait revenir en arrière à ce niveau. Mais il était plus que temps de faire cesser la petite révolution du petit merdeux. Jim évoqua des solutions extrêmes qui ne pouvaient être appliquées. La notoriété de Stone le protégeant.

Alors, je balançais le plan. Celui que Sonne m’avait proposé alors qu’on cherchait des solutions. Si elle, elle l’avait pensé pour la santé du batteur – ou plutôt pour les enfants du batteur -, moi j’y avais vu des avantages pour BSC. Mais inutile de faire part de tout cet historique à Jim, n’est-ce pas ?

Et, pour cause, il trouva que c’était un bon plan ! Magnifique ! C’est surtout qu’il y avait peu d’autres solutions – nous devions nous rendre à l’évidence.

-Voilà ! Le merdeux en désintox’, il n’aura pas droit au chapitre et ça montrera que BSC s’inquiète réellement pour lui, dis-je avec un petit sourire.

Jim allait soumettre ça à Perry et compte faire un déclaration dans Guitar&Pen.

-Et dans L.A.People, lançais-je avec un petit sourire. Si Sørensen ne mord pas à l’hameçon, Don Grant le fera. Deux journaux. Une même information. Si les deux disent la même chose, ça sera la vérité de Los Angeles.

Je rigolai, me détendant légèrement, quand Daniele affirma que Ward dirait quelque chose de bien à mon enterrement… Il ajouta que lui aussi. Et ce fut là que je me rendis compte que ma colère était forte et devait se voir, ce qui était rare chez moi. Mais je ressentais un fort sentiment de trahison en plus du fait que cet album dépassait ma logique par ses invités incongrus.

Parmi eux, Prescott… Daniele ne savait pas si mon hypothèse était correcte, mais il n’en aurait pas été étonné. Dieu que je détestais cette femme… Dieu que je haïssais les femmes qui pensaient pouvoir faire de grandes choses.

Mais si je souhaitais une mort atroce et lente à Prescott, je ne voulais pas d’album hommage à sa mémoire. Non, ce serait la goutte d’eau de trop.

Il y avait des gens que je pouvais atteindre, cependant… Comme Jack Perry à qui je n’avais pas hésité à mettre un blâme.

Je secouai négativement la tête quand Daniele me demanda si je n’avais pas peur qu’il aille voir ailleurs.

-Non… Il est loyal… Ce qui est con, c’est que c’est grâce à cette loyauté que j’ai pu le punir. Non, je sais qu’il réfléchira à deux fois la prochaine fois avant de se lancer dans un projet sans demander l’avis de quiconque.

Pour ce qui était du problème Stone, Daniele suggéra de le faire entrer en désintox.

Je réfléchis à l’idée et quelque chose dans le fait que Howard serait écarté de mon monde le temps que ça durerait, additionné au fait qu’il pourrait refuser (ce qui serait mal vu) ou foirer cette désintox et par là se décrédibiliser me charmait.

On pouvait essayer…

D’autant qu’on était limité dans les actions qu’on pouvait mener.

-très bien, faisons ça…

Et deux déclarations identiques dans les magazines locaux, pour bien faire.

Je vidai mon verre de whisky et le tapai ensuite contre mon bureau.

-Et la prochaine fois… On sera plus prévoyants quant aux projets de nos artistes.