Billy Lighter passait de plus en plus de temps avec la jeune Shiri, l’artiste de Samantha Mancini. Et je le voyais tout doucement se libérer de son chagrin et de sa colère dus au départ d’April Fox. Ce n’était pas plus mal. Je ne connaissais pas bien Shiri et sincèrement, je croisais les doigts pour que, qu’ils soient amants ou amis, elle ait une bonne influence sur lui.

Du coup, comme ils étaient encore ensemble ce soir, j’étais libre de faire ce que je voulais. Je pouvais souffler un peu, baisser un peu ma garde. Parce qu’être garde du corps de Billy Lighter signifiait être tout le temps alerte, même quand il n’y avait que lui et moi. Car il pouvait très bien se faire du mal à lui-même.

J’étais donc allé au Stryge Bar, pour écouter de la bonne musique. Avant, c’était le fief de Roadtramp mais désormais, le groupe avait tellement de fans que c’était pratiquement impossible de jouer dans des tout petits clubs comme celui-ci.

Mais le programme du Stryge restait toujours très intéressant !

Et en l’occurrence, alors que je buvais ma bière au bar, j’avais le plaisir d’écouter un gars qui jouait et chantait, seul avec sa guitare. Il convenait parfaitement à l’ambiance du club, avec son masque de scène représentant… c’était quoi ? Un démon ?

Il était doué…

Mais ce qui m’intriguait, c’était ce léger accent que je pouvais entendre quand il chantait, sans que je puisse vraiment l’identifier.

J’avais bien l’impression que ce gars-là ne venait pas de L.A.

J’écoutai attentivement tout son concert et quand il descendit de scène pour aller vers les coulisses, curieux, je le suivis…

Je pouvais entrer partout dans ce genre d’endroit, parce que j’étais connu pour être tout le temps avec Billy Lighter… Et aussi parce qu’en tant que garde du corps, je travaillais pour MTI. Donc, ce n’était pas un problème pour moi.

Je voulais savoir qui se cachait sous ce masque.

Je demandai à un employé de l’endroit où était la loge du dernier artiste à être passé sur scène et on m’indiqua une porte entrouverte.

-Merci, c’est cool.

Je m’avançai doucement et frappai quelques fois tout en passant ma tête par l’embrasure de la porte. Malheureusement, le musicien ne s’était pas présenté sur scène alors je ne savais pas comment l’interpeller.

-Heu… Salut… Excusez-moi… Je travaille pour MTI, je peux entrer ?

Ah l'Amérique ça fait tellement longtemps que j'ai le cul viser dans cet avion, j'en peux plus, j'ai mal aux pattes bordel !  Mais bon je suis enfin libre de mes mouvements, je récupère enfin mes deux instruments et mon sac a dos avec toutes mes affaires. J'avais entendu parler de Los Angeles et surtout d'Hollywood, j'ai réfléchis un petit moment si c'étais une bonne idée, mais bon après autant de temps dans l'avion un peu de marche ne serait pas de refus.

J'ai pas un rond non plus enfin si, mais assez pour dormir une semaine sans manger ni boire, j'ai peut-être sous-estimer la valeur de l'argent ici mais bon on va faire avec, je vais me débrouiller comme d'hab finalement. Sur le chemin je finis par tomber sur un petit bar qui m'a l'air fort sympathique je passes devant la porte  et remarque une affiche. Ils leur manquaient un groupe pour le show du soir.

Je me dis que commencer dès aujourd'hui pourrait peut-être me permettre de manger et boire. Voir même fumer si j'ai assez. Je file discrètement à l'arrière du bar dans une petite ruelle à l'abri des regards et j'ouvre mon sac à dos, dedans se trouve mon masque et ma tenue gotique, cette tenue a été, faites par ma mère à l'époque où elle allait encore bien, je l'enfile et mets mon masque avant d'entrer à l'intérieur du bar. L'ambiance me plaît ce bar un peu gotique, industriel et steampunk me rappelle le bar où je jouais à Blackpool à mes débuts avec mes amis. J'arrive au bar et me présente à celle qui semble être la serveuse. Je n'ai même pas eu besoin de lui dire ce que j'étais venu faire qu'elle m'indique ma loge. Elle me propose un petit quelque chose à grignoter.

C'est gentil, mais je ne bois et ne manges jamais avant un concert.

En effet, c'est une habitude que j'ai prise, ça m'évite certains soucis dans le masque.
Le temps défile et les groupes passent un par un. Enfin voilà mon tour de monter sur scène, l'atmosphère me plait, un peu de fumée, des lumières presque coupées, je regarde le public, il y a un peu de monde. Je fais quelques morceaux aucun de ma composition rien n'est prêts encore de mon côté, je fais des reprises ni plus ni moins et cela semble passer je ne me suis pas encore fait siffler ou insulter donc je suppose que ça passe. Je me dirige vers ma loge et à peine, j'ai eu le temps de poser mes affaires et retirer mon masque qu'on m'interpelle. Je remets mon masque et me tourne vers la personne, quand elle m'annonce travailler pour MTI mes yeux s'illuminent. À peine arrivé et déjà remarqué le rêve...

Oui bien sûr entre je t'en prie. Tu as besoin de quelques choses ?

Le mec débarque et me tutoie alors, je me permets après tout, je me jette dans le canapé et m'installe.

J'ai vraiment si bien joué que ça ? J'ai pourtant fait que des reprises, rien de bien exceptionnel !

Arrivé dans les coulisses, j’avais à peine eu le temps de voir le visage du musicien à travers le miroir auquel il faisait face avant qu’il ne capte ma présence et ne se retourne vers moi tout en se cachant à nouveau derrière son masque.

Ce geste ne me choqua pas vraiment… Je vivais la plupart de mon temps avec Billy Lighter qui avait des problèmes autrement plus graves que celui de ne pas vouloir montrer à quoi il ressemblait. De plus, mon expérience chez MTI faisait que je savais que les artistes avaient un peu tous leurs lubies.

J’avais juste eu le temps d’apercevoir que l’homme que je cherchais à rencontrer était blanc et avait des cheveux noirs. Je n’avais pas pu voir son regard et maintenant qu’il avait son masque, même s’il y avait des trous pour les yeux, j’aurais eu du mal à en déterminer la couleur.

Ce fut donc face à un démon que je me retrouvai…

Mais un démon somme toute assez sympa qui, me tutoyant alors que je l’avais vouvoyé, chercha directement à me mettre à l’aise.

Même si j’avais l’impression que c’était plutôt à moi de le mettre à l’aise.

J’entrai donc plus avant dans la petite et modeste loge qu’il occupait et lui souris.

-Non, je n’ai pas vraiment besoin de quelque chose mais… Je voulais vous féliciter pour votre prestation.

J’allais m’avancer pour me présenter et lui serrer la main mais avant que j’aie pu faire un geste, il se jeta sur le canapé mis à sa disposition.

Je restai debout, amusé.

Il semblait ne pas se rendre compte de son talent, à moins que ce ne soit qu’un réflexe de modestie. Et en effet, je n’avais entendu de lui que des reprises.

-Vous avez très bien joué. Ce n’est pas donné à tout le monde de pouvoir reprendre à la perfection des chansons de groupes confirmés.

Je haussai les épaules.

-Bref, c’était plaisant…

Je choisis alors ce moment pour me présenter.

-Je m’appelle Liam Taylor. Je suis le garde du corps de Billy Lighter et je ne suis malheureusement pas manager mais je voulais vous dire que MTI est toujours à la recherche de musiciens de sessions. Certains artistes solo seraient probablement ravis de vous avoir comme guitariste.

De quoi juste dire que je pouvais en toucher un mot à la maison de disque pour laquelle je travaillais. Je levai un sourcil et souris.

-Je peux savoir à qui j’ai à faire ? Vous devriez vous présenter après vos prestations sur scène. Sinon, ce sera dur de vous faire repérer.

Je fus surpris que le mec en face de moi apprécie ce que j'ai fait. J'estime que faire des reprises... C'est un peu facile, même trop facile. Mais bon ça fait toujours plaisir d'avoir un compliment.

Par la suite, il me dit qu'il s'appel Liam Taylor. Ouai c'est cool, mais bon ça ne m'avance à rien. Enfin, c'est ce que je croyais jusqu'à ce qu'il me sorte qu'il est le garde du corps de Billy Lighter. Bordel Billy Lighter quoi ! Ce n'est pas n'importe qui ! Bon après, il est juste garde du corps, mais bon s'il peut me faire rentrer dans une maison de disque pourquoi pas.



Donc en gros tes entrains de me proposer d'être numéro deux ? J'ai déjà essayé, mais ça n'a jamais pris à l'époque où j'étais plus petit.

Évidemment, je dis ça en rigolant, mais il est vrai que par le passé j'ai eu des soucis, je prenais trop de place d'après mes anciens collègues, mais bon on s'en fout, c'est le passé !

T'es garde du corps et t'as le droit de donner conseil aux personnes de ta direction ? Tu n'es pas qu'un simple garde du corps alors ? Écoute si ça me permet de débuter quelque part, je ne vais pas refuser !

C'est vrai que la proposition est intéressante, mais il va falloir que je fasse attention si ça marche parce que je ne veux pas finir à l'arrière moi, je veux voir ma grosse tête partout dans Los Angeles !

Par la suite, il me demande de me présenter, Il n'a pas tort, si je veux me faire un nom il faut que j'arrête de me barrer sans dire qui je suis, je le regarde puis retire mon masque pour dévoiler mon visage fatiguer, tant d'émotions en si peu de temps, je mets mon masque sur ma main et le lève en souriant.

Le mec avec le masque s'appelle Nameless et le mec sans s'appelle Jonathan Silverwood ! Je viens de Blackpool en Angleterre, j'ai 25 ans et je suis arrivé en ville aujourd'hui !

Merde, j'espère que je ne suis pas allé trop vite, c'est limite si je viens de lui gerber mon CV en plein visage.

Je suis guitariste, chanteur et bassiste. J'ai commencé la guitare en 1965 et la basse en 1975. Le chant, j'en ai fait depuis toujours, puisque je n'ai jamais vraiment appris.

Je garde mon sourire et m'allume une clope avant de lui tendre le paquet. Il m'a été offert à mon arrivée dans le bar.

Ce gars avait un certain talent, mais faire de très bonnes reprises ne signifiait pas qu’il était capable de composer lui-même ses propres chansons. Cela demandait un talent encore tout autre que même des artistes confirmés comme Billy et Cash pouvaient avoir du mal à gérer. The Lightening était créatif, mais c’était un groupe lent. Cela leur était souvent reproché.

Quand j’annonçai au démon que je pouvais peut-être glisser un mot pour lui chez MTI pour qu’il devienne guitariste de session ou musicien pour un artiste solo, il rigola en disant qu’être numéro 2, ce n’était pas sa tasse de thé.

Il avait un certain égo, non ? Même s’il essayait de faire passer ça pour de l’humour.

Mais je ne m’en offusquais pas, me contentant de hausser les épaules en souriant.

-Il faut bien commencer quelque part. Et puis, je ne t’ai entendu faire que des reprises… Donc…

Donc je ne savais pas s’il avait un potentiel plus grand.

Mais au final, je me trompais peut-être sur ma première impression parce qu’il disait que si je pouvais l’aider à commencer quelque part, c’était bien. Donc il n’était apparemment pas tant contre l’idée de commencer petit et d’évoluer avec le temps.

Je me grattai la tempe.

-Donner des conseils à ma direction, c’est peut-être un peu beaucoup dire. Mais le bouche à oreille parmi les roadies, ça peut aller vite. Et les managers sont à l’écoute de ce genre de bruit de couloir.

Mais pour que son nom circule, il fallait que je le connaisse. Or, il ne s’était pas présenté, sur scène. Et en plus, comme on ne voyait pas son visage, c’était difficile de le décrire… Ou pas ? Parce que finalement, ce n’étaient pas tous les artistes qui performaient déguisés en démon.

Il enleva son masque, ce qui ne fut pas pour me déplaire, et se leva de son canapé en souriant. Il était jeune, avait des cheveux noirs en bataille et des yeux d’un vert hallucinant. Il s’appelait Johnathan Silverwood et venait d’Angleterre. Il avait l’air crevé et pour cause : il était arrivé en ville aujourd’hui même.

Je lui tendis la main pour qu’il la serre maintenant qu’on avait échangé nos identités. Mais il continua en me donnant son CV avec les dates et tout le toutim. C’était assez intéressant en fait.

-Tu as un drôle d’accent, même pour un Anglais. J’arrive pas à déterminé lequel.

J’étais curieux.

-Ton parcours est impressionnant. Mais tu n’as joué que des reprises. Tu composes aussi ?

Il s’était allumé une cigarette et m’avait tendu le paquet pour que j’en pioche une.

-Non, merci, je ne fume pas.

Ah le fameux accent. Je ne m'attendais pas à ce que cela s'entende si vite, mais bon, je ne peux le cacher.

Ah ben ça. Je vivais à Paris jusqu'à hier avant de prendre l'avion.

J'éclate de rire en tirant sur ma clope, je fais bien attention de ne pas lui cracher la fumée au visage et je tourne la tête à chaque bouffée de fumée que je crache. Il refuse la clope que je lui propose alors, je repose le paquet et le briquet sur la table tout en le regardant, il me demande si je faisais aussi des compositions.

C'est avec un grand sourire que je pose ma clope dans le cendrier et je me dirige vers ma housse de basse. Je sors le début d'un morceau que j'ai pris le temps d'écrire à l'aéroport avant de monter dans l'avion. C'est vrai que j'ai attendu au moins trois bonnes heures avant de monter alors, j'avais largement le temps. Il n'y a que les partitions de basse et de guitare et encore ce n'est que le début, il n'y a pas grand-chose.

Je lui sors aussi un grand cahier avec des partitions gribouillées dessus, ce sont des projets que j'ai depuis un certain temps. J'ai écrit des choses pour ma mère et mon père, mais il me manque des partitions de batteries et des notes pour la guitare.

Je compose un petit peu. J'essaye des choses, mais j'y travaille dur, même très dur à en faire des nuits blanches...

Je le regarde et explose de rire avant de tirer une nouvelle fois sur ma clope, je l'écrase et le regarde.

J'ai même une démo sur une vieille cassette si tu veux. J'ai l'impression de t'offrir toute ma maison !

Je continue de rire, sûrement de fatigue... Ou alors, je me trouve vraiment drôle. Même moi, je ne le sais plus !

Il parut surpris que j’aie repéré son accent, mais il n’en fait pas de mystère. Je siffle d’admiration quand il m’annonce qu’hier, il était encore à Paris.

-Wow ! Paris ! Je comprends pourquoi je n’ai pas identifié l’accent alors. Pour moi, la France, c’est vraiment exotique…

J’y étais déjà allé plusieurs fois, en tournée avec The Lightening, notamment. Malheureusement, en tournée, on avait pas toujours le temps de visiter même si j’avais quand même pu voir la tour Eiffel de près ainsi que l’Arc de Triomphe.

Je rigolai.

-Je me rappelle surtout des restaurants, en fait.

Je pensais souvent avec mon estomac et les restaurants qu’on avait fait en France étaient vraiment très bon.

Mais soit, on parlerait de la France un autre jour, si on en avait l’occasion. Quand je lui demandai s’il composait, il ne me répondit pas tout de suite, posant sa cigarette sur son cendrier et allant chercher sa basse.

Je le regardai avec curiosité et quand il se prépara à jouer, je me permis de me mettre un peu plus à l’aise en m’asseyant sur le divan qu’il avait occupé un peu plus tôt. Il joua un morceau, ce qui me confirma dans le fait que c’était un bon musicien. En tout cas, il arrivait à transmettre de l’émotion. Pour sa technique, je ne pouvais pas me prononcer, je n’étais pas musicien moi-même.

Mais l’émotion, c’est le plus important, non ?

Ensuite, il déposa son instrument et me sortis un grands cahier que je regardai par-dessus son épaule après m’être relevé. Il y avait des partitions que j’étais incapable de lire parce que je n’avais jamais fait de solfège, mais aussi des esquisses de paroles.

Johnatan disait travailler très dur… Avant d’exploser de rire. Pourquoi ? Bonne question. Il était peut-être crevé… Après tout, il avait débarqué aujourd’hui et Paris, c’était pas la porte à côté.

-Je vois… Donc, tu composes… C’est ce qui est intéressant pour les managers si tu veux avoir un espoir de ne pas être seulement musicien de session. Même si c’est déjà pas mal de commencer par là.

Il affirma avoir aussi une cassette, une démo. Mon visage s’illumina même si je ne comprenais toujours pas l’accès de rire du musicien. Apparemment, cette démo était tout ce qu’il avait de plus important.

-Tu en aurais une copie pour moi ? Je pourrais la filer à des managers que je connais…

Je finis par ranger ma basse dans sa housse et je fouille dans la poche avant. Je finis par trouver une copie de ma cassette, je lui tends et reprends mon sérieux.

Tien c'est pour toi certes, c'est une copie, mais c'est toute ma vie là-dedans, je compte sur toi pour en prendre soin, ça me tient vraiment à cœur.

Je lui donne puis je commence à regrouper mes affaires. J'espère que ma composition va plaire même si la qualité n'est vraiment pas géniale.

J'ai enregistré ça avec un vieux micro dans mon garage, je ne te garantis pas une qualité exceptionnelle.

Je me gratte la tête un peu ennuyée de devoir dire ça, mais je ne pouvais pas lui mentir, mais c'est vrai que c'est très important pour moi. Maintenant, il va falloir que je trouve un endroit où me poser.

Dis voir tu n'aurais pas une bonne adresse pour m'installer ? Vu que je viens d'arriver je ne sais pas où je peux aller dormir et manger, j'avoue que si tu pouvais me conseiller ça m'arrangerait.

Je ricane un peu embêté de lui demander ça, j'ai l'impression d'être un SDF qui demande un logement, moi qui n'ai jamais eu ces soucis. Je suis définitivement parti trop tôt de la maison, mais ça valait peut-être le coup.

J'ai assez je pense pour dormir et manger pendant une semaine.

Je suis réellement dans la merde.

Johnatan fouilla dans la housse de son instrument et s’approcha de nouveau de moi avec une cassette. Cela semblait vraiment important pour lui, ce qu’il y avait sur cette bande. Il me demandait d’en prendre soin. Je tournai et retournai la vie du musicien entre mes doigts, me demandant bien ce qu’il pouvait y avoir dessus.

-Promis, j’y ferai attention. Et je ferai  attention à qui je la donne aussi.

A qui ? Samantha ? Avec The Ligthening et The Warriors, elle avait fort à faire. Timmy Evans ? Mmm… Il venait de perdre BleedingHearts donc pouvait avoir une place.

Ou Hughes… Brent Hughes… le frère du big boss et qui était spécialisé, si on voulait, dans les débutants. Oui, peut-être que ce dernier serait intéressé.

Johnatan s’excusait d’avant pour la piètre qualité du son, expliquant qu’il avait fait ça avec un vieux micro et dans un garage dans lequel, je supposais, l’acoustique n’était pas géniale.

Je lui souris.

-Ne t’en fait pas, c’est rare les artistes qui commencent et qui ont un bon son sur leur démos. Les managers ont l’habitude… Ils savent faire abstraction de ça.

Il avait commencé à rassembler ses affaires… Apparemment, il était sur le départ. Seulement… Je levai un sourcil quand il demanda si je ne savais pas où il pourrait dormir.

-Putain… T’es vraiment parti à l’aventure toi…

Fallait avoir des couilles pour quitter son pays et se lancer à la conquête de L.A. sans avoir un pied-à-terre. J’étais à la fois admiratif… Et un peu sidéré devant tant d’inconscience.

Je me grattai la tête.

-Heu… Je t’aurais bien invité chez moi mais… je bosse beaucoup et la plupart du temps, je vis chez Billy Lighter.

La rockstar avait quasi toujours besoin de quelqu’un auprès de lui, comme un petit enfant perdu. Il ne me demandait pas de faire grand-chose, juste d’être là.

Johnatan ajouta qu’il avait de quoi vivre pendant une semaine, de quoi me rassurer un peu.

-Il y a un motel pas cher sur San Fernando Valley. Et si jamais tu es vraiment dans la merde, je suis sûr qu’ils t’accueilleront à bras ouverts à la mission Saint John’s, dans l’Eastside.

Je soulevai la cassette à hauteur de mon regard.

-Mais avec ça… Et un peu de chance… T’auras pas à tomber si bas.

Je continue de ranger tout mon bordel, je ferme toutes mes housses et reprends mon sac à dos. Il me dit que je suis parti à l'aventure, il n'a pas tort.

Je n'avais plus rien qui me retenait en France, j'ai perdu mes parents il y a peu donc bon, je me suis dit qu'il fallait que je trace mon propre chemin.

Je le regarde droit dans les yeux en souriant, j'essaye de garder le sourire malgré tout, mais ce n'est pas facile.

Il me conseille par la suite d'aller dans un vieux motel à San Francisco Valley. Enfin un endroit où je vais pouvoir dormir.

Bien, j'irai. Si jamais tes patrons me cherchent, je serai là-bas : je ne sais pas quand tu comptes y aller, mais sache qu'ils me trouveront là-bas s'ils ont envie de travailler avec moi.

Je récupère le paquet de clopes, m'en allume une et lui tends ma main.

En attendant ça m'a fait plaisir de te rencontrer, et je te remercie pour tout, vraiment  je ne m'attendais pas à ça dès mon premier jour.

Je lui fais un grand sourire..

Johnatan était effectivement sur le départ… Mais il prit tout de même la peine de m’expliquer qu’il avait perdu ses parents récemment, ce qui l’avait poussé à tracer son chemin.

-Je vois, toutes mes condoléances, ça ne doit pas être facile.

Sur quoi, je lui indiquai où il pouvait dormir. Il prit le conseil avant de dire que si les managers à qui j’allais faire écouter sa démo étaient tentés par son talent, ils n’auraient qu’à le retrouver là… Je me grattai la tête, un peu scié par son attitude… Son… arrogance ?

-Je vais donner ta cassette à qui de droit dès demain… Mais…

Je fis une moue sceptique.

-Ils te convoqueront sûrement… En appelant le motel et en donnant ton nom, par exemple, en te disant de venir les trouver à leurs bureaux. C’est pas eux qui vont te courir après. C’est à toi de faire l’effort d’aller vers eux, je pense.

Parce qu’après tout, ce type n’était encore personne.

Même Billy devait se déplacer jusqu’à la tour pour voir Lenny ou Samantha. Et Billy n’était pas personne.

Je retrouvai un sourire.

-Enfin, tu comprendras vite comment ça fonctionne ici.

Je lui serrai la main qu’il me tendait.

-Tout le plaisir était pour moi… Bienvenue à L.A., là où tout est possible.

Il me présente ces condoléances et je le regarde avec un petit sourire.

Je te remercie. Vraiment ça me touche.

Je le regarde et là, il commence à me dire que c'est à moi  de me déplacer à la maison de disque. Cela me semblait évident, mais il semblerait que l'on ne se soit pas compris.

Oui oui, c'est ce que je voulais dire. Si jamais ils me cherchent, ils savent où me contacter.

Je ricane et me gratte l'arrière du crâne, un peu gêné par la réflexion que je viens de me prendre. Il va vraiment falloir que j'apprenne à communiquer avec les gens autrement qu'avec la musique sinon je vais avoir des soucis. Il me dit que je vais comprendre comment marche le business ici.

J'ai hâte, ça m'évitera les bourdes, n'es-ce pas ?

Je le regarde en éclatant de rire, essayant de détendre l'atmosphère avant de lui donner une grosse poignée de main bien ferme. Une poignée de main d'homme avec un regard plein de détermination, j'ai envie de réussir et je vais le montrer par tous les moyens.

Il me souhaite la bienvenue à Los Angeles.

Je te remercie, j'ai hâte de commencer ma vie d'artiste ici. Et je compte bien réussir !

Je tire un bon coup sur ma clope et je l'écrase, je lève la main droite en guise de salutation avant de remettre mon masque.

J'ai hâte de recevoir un coup de fil, je te remercie pour tout, j'ai hâte de te revoir, je saurai te le rendre, ne t'en fais pas !

Je prends mes affaires et quitte le bar sourire aux lèvres sous mon masque.