-Je vais bien, ok ? Maintenant, arrête de m’appeler ! Je suis en train d’écrire un scénario de film ! J’aimerais du silence, ok ? Et pas le foutu téléphone qui sonne toutes les cinq foutues minutes !

Enora grommela à l’autre côté de fil avant de dire qu’elle passera tout à l’heure que je le veuille ou non avant de raccrocher brutalement. Putain ! Elle était obligée de venir ? Elle passait absolument tous les jours ! Tout comme elle avait décidé de se pointer sur le tournage de Spaceship tous les jours aussi ! Pourquoi ? Parce que je m’étais pointé en retard l’autre jour sur le tournage parce que j’avais fait une crise chez moi alors que j’étais tout seul. Il m’avait fallu le temps de reprendre mes esprits et d’appeler un foutu taxi ce qui m’avait mis en retard. J’avais balancé une excuse à la con mais on ne la faisait pas à Enora Lee.

Donc, depuis, elle passait absolument tous les jours et elle me téléphonait tout autant ! Et je savais qu’elle allait faire ça jusqu’à-ce que son anxiété baisse !

Mais j’avais d’autre chose à faire que de rassurer mon ex-femme, moi ! J’avais un nouveau scénario à écrire qui m’avait été inspiré par cette histoire de coureur Ferrari dont m’avait parlé Julian et Johnatan. Ça en plus des épisodes de Spaceship où je voulais réintégrer Five et Datalore afin de montrer à Maxwell que sa série ne vaut absolument pas la mienne ! J’étais en mission pour reprendre les parts de marché volé par Galactic Wars !

Furieux de cet énième appel d’Enora, je balançai mon téléphone portable dans la piscine ! Ainsi, je suis certain qu’il ne sonnera plus ! Je tentai, ensuite, de me reconcentrer sur mon scénario que j’écrivais au crayon dans un grand carnet à moitié allongé sur mon transat. Ça faisait, maintenant, plusieurs heures que j’étais là habillé d’un t-shirt, d’une chemise et d’un short alors que j’étais pieds nu.

Seulement, Enora m’avait tellement énervé à son centième « est-ce que tout vas bien ? » de la journée que je n’arrivais plus à me concentrer ! J’avais besoin d’un foutu rafraichissement !

Je me levai, furieux, déposant mon carnet sur mon transat’ avant de rentrer dans ma villa par la porte-fenêtre… Sur le chemin de la cuisine, je passai devant les écrans de caméras. J’y jetai un œil remarquant, assez vite, qu’un foutu intrus armé d’un appareil photo était là. Je plissai des yeux.

-Et ma foutue alarme ?! Elle ne s’est pas déclenchée ?!

Apparemment, non ! Il allait falloir que j’appelle la foutue entreprise qui m’a vendu cette foutue alarme. Je fixai un moment l’écran en noir et blanc. Avec une telle qualité d’image, impossible de savoir si c’était un paparazzi que je connaissais ou non !

Quoi qu’il en soit, il allait se rendre compte qu’on n’entre pas dans ma propriété comme ça !

Furieux, je changeai de cape me dirigeant vers un placard d’où je sortis mon fusil de chasse. Je l’armai avant de ressortir sur ma terrasse où se trouvait ma piscine. C’était vers se côté-là que se planquait le paparazzi.

Sans hésiter et sans crier gare, je visais avant de tirer à quelques mètres de lui. Loin de moi l’idée de le tuer. Ce n’était pas le but. Le but était de lui faire peur et de montrer que je ne rigolais pas avec la règle de la priorité privée !

-Je t’ai vu, hein ! Qui que tu sois, tu es sur une foutue propriété privée ! Tu as pas vu le panneau à l’entrée ?! Qu’est-ce que tu veux ?! Tu as rien d’autre à foutre de ta journée ! Ça vaut si cher une foutue photo de moi qui bronze ?! Sors de ton trou!

Je le visai toujours prêt à tirer encore s’il ne sortait pas de son trou !

Les rumeurs couraient sur Stephen Shran et Enora Lee… D’après les rumeurs, le réalisateur et la productrice de Spaceship se seraient remis ensemble alors qu’ils étaient divorcés. Si Shran n’avait été que le réalisateur de Spaceship, ça ne m’aurait intéressé qu’à moitié, parce que ça n’aurait intéressé que les nerds et encore… Les nerds se foutaient un peu de la vie privée de ceux qui réalisaient leur série préférée parce que les nerds n’en avaient qu’après de nouveaux scénarios et de nouveaux épisodes… Au point tel que certains semblaient penser que leurs personnages préférés étaient réels.

Mais Shran n’était pas que le réalisateur de Spaceship… il avait aussi réalisé la monumentale trilogie à succès, Love In L.A. quant à Enora Lee, elle était la fille de Laura et Gene Lee, les célèbres acteurs !

Donc, ces deux-là intéressaient les gens.

Sauf que quand j’avais voulu recruter des paparazzi pour aller capturer des clichés à la villa de Shran, ils avaient tous refusé.

Personne ne voulait se pointer à la villa du réalisateur.

Alors j’en étais réduit à jouer les paparazzi moi-même. Armé de mon appareil photo avec un zoom qu’on avait au moins daigné me prêter, j’avais conduit ma Mustang jusqu’à Beverly Hills… Pour arriver devant un chemin privé bien délimité et bien marqué par un panneau qui disait « No Trespassing »…

Peuh… J’étais au-dessus de ça.

Je laissai ma Mustang là et continuai à pied. Je ne m’étais jamais rendu aux abords de la villa de Shran et on pouvait dire qu’elle était bien planquée, au milieu de la végétation.

Je finis quand même par la trouver et me glissai pour être côté jardin. Il faisait beau, en ce mois de mars et si Enora Lee et Stephen Shran comptaient passer du bon temps, je pensais bien qu’ils le feraient dans la piscine…

Bien caché dans les fourrés, je me mis en place. Stephen était là, sur son transat’, un cahier à la main et il écrivait.

Pas de trace d’Enora Lee et en arrivant, je n’avais vu qu’une voiture, une BMW un peu sport, pas du tout féminine. Peut-être n’était-elle pas là.

Je voyais mal là d’où j’étais alors je profitai du fait que Shran rentra un instant à l’intérieur pour me faufiler un peu plus près et là où j’avais une meilleure vue.

Mais quand il ressortit, ce fut avec un fusil de chasse !

-Mais qu’est-ce que… ?!

J’avais eu juste le temps de murmurer ça avant de voir une plante à côté de moi exploser littéralement.

-Bordel !

Shran m’intima de sortir et je voyais bien que si je n’obtempérais pas, il allait tirer à nouveau… Je levai alors les mains en l’air et me redressai, laissant pendre mon appareil à mon cou.

-Ne tirez pas ! Ne tirez pas !

Je désignai mon appareil photo.

-Je suis Amon Sørensen…

Comme si ça allait me protéger… M’étais avis que ça allait plutôt faire l’effet inverse.

-Je voulais juste une photo de vous…

Et en plus, je faisais l’innocent…

Avec les appels incessants d’Enora, je n’étais vraiment pas de bonne humeur ! Mais ce fut pire que je remarquai qu’un intrus s’était aventure sur ma propriété. Un intrus qui, comme il semblait passer par la végétations qui arborait les alentours devait sûrement être un foutu paparazzi ! Vous savez c’est quoi le problème des paparazzi ? C’est qu’ils ne savent pas lire ! Pourtant, il y a un panneau à l’entré qui leur rappel qu’on ne peut pas entrer ici !

Dans mon jardin se trouvait, donc, un illettré qui, s’il persistait, allait se retrouver avec une tête explosée. C’est, du moins, ce que je voulais lui faire penser en sortant dehors armé de mon fusil de chasse. Et pour bien lui montrer que je ne rigolais aucunement, je tirai à quelques mètres de lui faisant la fête à une des plantes qui poussait dans les alentours.

Je lui recommandai, alors, de sortir de son trou me demandant bien ce qu’il trouvait d’intéressant à venir photographier ici. Il n’y avait aucun intérêt à me photographier au bord de la piscine. Pas de quoi en faire un article, en tout cas. Sans compter que contrairement aux acteurs et autres chanteurs, on se fiche de ma plastique ! Quoi que, je suis acteur aussi… Mais je suis moins connu pour ça que pour mon statut de réalisateur. Sans compter que, depuis quelques années maintenant, je fais le même rôle… Celui d’un alien bleu avec des antennes. Donc…

Le type finit par sortir de son trou les mains en l’air en invoquant ma clémence pour que je ne tire pas. Je fronçais les sourcils… J’avais l’impression d’avoir déjà vu ce grand blond… Et, pour cause, il s’agissait d’Amon Sørensen ! Pas un paparazzi, donc, mais un journaliste. Le pire journaliste people de L.A.. Celui qui passe son temps à inviter des vies aux stars.

Je ricanai en ne baissant toujours pas mon fusil.

-Je devrais te descendre rien que parce que tu es Amon Sørensen ! Tu ne sais pas le nombre de stars qui me remercieraient pour ça !

Il affirma qu’il voulait juste prendre une photo de moi comme en témoignais l’appareil photo qui pendait à son coup. Je fronçais les sourcils, le visant toujours.

-Une photo de moi, hein ?! Pourquoi faire, hein ?! Quelle histoire tu vas inventer avec une foutue photo de moi au bord de ma piscine ? Il n’y a rien n’à dire ! Tous les paparazzi savent que c’est très risqué de venir ici. J’ai une tonne de caméras de surveillance et une tonne d’alarmes. Aucun d’eux ne peux m’atteindre sans être vu. Si tu es venu malgré tout c’est que tu avais une bonne raison. Je veux savoir laquelle ! Et pas un mensonge, hein ! Je veux la vérité ! Uniquement la foutue vérité ! Si tu en es capable.

J’étais énervé et ça s’entendait dans ma voix alors que je n’avais toujours pas baissé mon flingue. Pas tant qu’il ne m’aura pas dit ce qu’il essayait de venir chercher ici.

Putain ! La plante à côté de moi venait d’exploser dans un grand éclat de feuilles déchiquetées. Il tirait carrément à la chevrotine ! Ce qui faisait que même sans bien viser, il pouvait me toucher quand même ! Shran était complètement fou ! Je savais qu’on le disait parano, mais jamais je n’aurais imaginé que c’était à ce point-là !

J’aurais dû me douter qu’il y avait une couille dans le potage quand tous les paparazzi que je connaissaient avaient refusé cette mission.

Parce que c’était une mission suicide !

Alors quand le réalisateur armé jusqu’aux dents me demanda de sortir de ma cachette, je ne me le fis pas dire deux fois.

Nous étions à quelques mètres l’un de l’autre, moi piétinant ses plantes, lui me pointant avec son fusil de chasse. C’était la première fois que je voyais Stephen Shran d’aussi près. Bien sûr, je l’avais déjà aperçu sur des tapis rouges et à d’autres événements, comme j’avais aussi vu pas mal de photos… Mais je ne lui avais jamais parlé… je ne l’avais jamais interviewé… Tout simplement parce que je n’en avais jamais eu l’occasion ni trouvé un intérêt particulier.

Même d’ici, je constatai qu’il était particulièrement petit. Surtout par rapport à moi. Comment une femme comme Enora Lee avait-elle pu s’éprendre de ce farfadet ?

Parce que ouais… Pour le glamour, on repasserait.

Bref, Je m’étais présenté, pas très fier quand même d’avoir son canon braqué sur ma poitrine… Et évidemment, mon nom ne plaisait pas vraiment en ma faveur car, comme le dit si bien le réalisateur, s’il me tuait maintenant, il serait élevé au rang de héros par le monde de la jet-set.

Je pinçai les lèvres.

-Vous aurez de gros problèmes si vous me blessez ou si vous me tuez… Pas avec la jet-set, mais la justice s’applique aussi à vous.

Je ne voulais pas vraiment le provoquer, ce n’était pas le moment. Mais je voulais qu’il ouvre les yeux sur la connerie qu’il allait éventuellement faire. Parce que même s’il n’avait que l’intention de me foutre les jetons, ce qui était réussi, le fait qu’il pointe son arme sur moi ne me rassurait pas. Une fausse manipulation et le coup pouvait partir même s’il ne le voulait pas.

Quand je lui déclarai tout simplement que je voulais prendre une photo de lui, ce qui n’était pas tout à fait vrai, il se demanda bien ce que j’allais pouvoir en faire. En effet, ce n’était pas un réalisateur de science-fiction en short, en chemise et pieds nus au bord de sa piscine qui allait faire rêver les lecteurs de L.A. People.

-Ouais… Je vois maintenant pourquoi personne ne voulait de cette mission… Non seulement, ce serait mal payé, mais en plus, c’est dangereux.

Mal payé parce que Stephen Shran n’était quand même pas Howard Stone et Enora Lee n’était pas Livia.

Il voulait que je lui dise ce que je cherchais, au juste et, les mains toujours en l’air, je vis là l’occasion de transformer cette malencontreuse rencontre en une interview déguisée.

-Enora Lee… Il parait que vous vous êtes remis ensemble. Je voulais en avoir la preuve. Vous vous voyez de plus en plus, d’après ce que je sais. Vous avez même passé la nuit chez elle récemment.

Je souris.

-Alors dites-moi la vérité et je n’aurai pas besoin d’inventer.

Je regardai le fusil.

-Et si vous pouviez pointer ce truc sur autre chose, ça m’arrangerait.

L’intrus qui avait osé s’aventurer dans MA propriété n’était autre que le journaliste, Amon Sørensen. Celui que tout le monde détestait dans la jet-set car il avait l’habitude d’exagérer voire même d’inventer des histoires afin de rendre ses articles plus attractif. Jusqu’ici, je n’avais jamais été sa cible mais il semblerait que, cette fois, il en soit autrement. Moi qui pensait qu’arriver à 47 ans, je n’aurais plus aucun intérêt pour les types comme Sørensen !

Je m’étais trompé, apparemment !

J’avais déclaré que si je tuais un type comme lui, tout le monde dans la jet-set risquait bien de me voir comme un héros. Ça changeait du rôle d’outcast, pour être tout à fait honnête. Un rôle que j’avais depuis mon entrée dans ce foutu monde de fou. Mais le journaliste ne perdait pas le Nord déclarant que si je le tuais ou le blessait, je risquais bien d’avoir des ennuis avec la justice. De gros ennuis.

J’en étais conscient et c’était bien pour ça que sa tête n’avait pas encore explosée !

-Ah ouais ? J’en ai autant à foutre que toi tu en as à foutre du respect pour la loi sur la foutue propriété privée. Tu es hors la loi, là, Sørensen ! Et tu piétines mes plantes, en plus !

J’étais clairement énervé ! Il disait que la loi s’appliquait à moi, hein ? Bah, elle s’applique aussi à lui ! Les journalistes ne peuvent pas entrer sur une propriété privée même avec leur foutue carte de presse !

Je hais ces foutus paparazzi ! Ils se croient tout permis ! Ils ont rien d’autre à foutre pour gagner leurs foutus dollars ?

Amon disait qu’il était venu pour prendre une photo de moi. Pourquoi ? Pourquoi moi et pourquoi maintenant ? C’était la grande question ! Il affirma alors qu’il comprenait mieux pourquoi aucun paparazzi n’avait voulu de ce job. Un job mal payé et dangereux. Je ricanai.

-Et, visiblement, ils ne t’apprécient pas assez que pour te mettre en garde…  

Non… Ils avaient préféré le laisser aller tout seul s’aventurer ici en terrain miné. Rien ne pouvait échapper à mes caméras ! Je voyais absolument tout !

Quant au fait que c’était mal payé, ça ne m’étonnait pas ! J’étais réalisateur et j’avais 47 piges ! Je n’étais pas encore assez imbu de ma personne que pour pensé que ma photo valait plus que celle d’artiste de la musique ou bien d’acteurs plus jeunes et avec une plus grande notoriété comme des Stone, des Livia, des Lighter ou autres Robin North… C’est, d’ailleurs, pour ça que je me demandais bien ce qui avait pris à Amon de venir ici. J’exigeais, donc, de lui la vérité.

Et il me donna la vérité. Il pensait qu’Enora et moi étions à nouveau ensemble. Je plissais les yeux surpris par cette déclaration.

-Hein ? Quoi ?

C’est n’importe quoi !!

Sauf que… Les suppositions d’Amon ne lui étaient pas tombées du ciel… Non ! Il s’était basé sur le fait qu’Enora et moi se voyons de plus en plus. Il savait même que j’avais passé la nuit chez elle l’autre jour. Le jour où je l’avais retrouvée dans le lit de Brent et qu’elle avait voulu que je revienne chez elle parce qu’elle s’inquiétait que je fasse une crise… D’ailleurs, Enora venait de plus en plus souvent pour cette unique raison !

Pas parce qu’on s’est remis ensemble ! Jamais on ne fera cette foutue erreur. JAMAIS !

Il disait que si je lui disais la vérité, il n’aura pas à inventer. Preuve que c’était déjà dans son intention d’inventer sans preuves !

Quel enfoiré !

Et il ose me demander de baisser mon flingue ? A la place, je le remontai vers sa tête, furieux par toute cette situation.

-Je devrais t’exploser la tête rien que parce que tu me demande le contraire !

Mais je n’allais pas le faire… A la place, je baissai mon fusil. J’étais tellement énervé que je risquais bien de faire un faux mouvement et de réellement lui exploser la tête. Or, mon fusil de chasse ne servait pas à tuer des journalistes, aussi vicieux soient-ils. Il était là pour leur foutre les jetons. Je savais que ça avait fonctionné sur Amon.

Quant à la vérité… Je ne pouvais pas la lui donner pour la simple et bonne raison que le grand public ignorait ma condition et que je ne voulais pas que cette information m’échappe de cette manière.

-Enora et moi, on ne s’est pas remis ensemble ! Ce n’est que des spéculations à la con que tu fais. Jamais on ne fera cette erreur, c’est compris ? Si elle vient souvent ici c’est parce que c’est ma foutue productrice et que, de temps à autre, on a besoin de bosser ensemble ! Ça ne nous plait pas plus que ça mais ça fait partie de son job et du mien ! On doit, par période, accorder nos violons ! On est dans ce genre de période.

Bon ! Amon n’allait peut-être pas gober entièrement ça parce que ça n’expliquait pas pourquoi j’avais dormis chez elle l’autre jour.

-Et si j’ai dormi chez elle l’autre jour c’est parce que on a bossé tard ! Trop tard pour que je rentre chez moi. Sa villa est grande et j’ai dormi dans un des chambres d’amis, si tu veux tout savoir. Ça te va ? Arrête de te faire des films !

Bon… La villa d’Enora était à, à peu près 600 mètres d’ici et elle était facilement atteignable à pieds. Donc, pas sûr qu’Amon gobe ce que je venais de dire, là… Je plissai des yeux.

-Comment tu sais que j’ai dormi chez elle ? Vous nous prenez en filature ou quoi ?!

Je n’étais vraiment pas fier, debout dans les buissons, les mains en l’air, avec un canon braqué sur moi par un type dont la réputation était d’être impulsif. Putain, j’étais prêt à parier que ce serait encore moins dangereux de s’aventurer chez Hank North ! C’était dire !

Alors, le plus calmement possible, j’essayai de lui faire comprendre que c’était bien beau de vouloir passer pour le héros qui aurait buté Amon Sørensen dans la jet-set, mais que ça ne l’empêcherait pas d’avoir de gros ennuis avec la loi. Ce à quoi il répondit par le fait qu’en gros, j’avais été le premier à ne pas respecter la loi puisque je m’étais introduit sur une propriété privée.

-Alors portez plainte contre moi pour ça. Je peux même vous payer les plantes que j’ai détruites…

Et mon regard disait : « Mais s’il vous plait, ne me tuez pas »… J’étais prêt à payer une grosse amende, mais pas à mourir !

Je comprenais mieux maintenant, pourquoi tous les paparazzi, même les meilleurs, avaient décliné ma proposition de mission. Et je ne me gênai pas pour faire cette observation tout haut tellement j’en voulais à ces gars pour ne pas m’avoir prévenu d’être plus prudent !

Shran ne me loupa pas, du coup, disant que personne ne m’aimait assez pour me mettre en garde.

-Je ne peux en vouloir qu’à moi-même. J’ai créé ma réputation.

Avec tout ça, j’avais toujours les mains en l’air et un canon braqué sur la poitrine. Il voulut savoir pourquoi j’étais là… La vérité, si c’était possible.

Alors je ne la lui cachai pas. Pourquoi ? Pour finir avec un trou gros comme un ballon de basket dans la poitrine ? Non merci.

Je lui avouai donc les rumeurs qui couraient sur lui et Enora Lee et que j’étais là pour confirmer. Confirmer à coup sûr, pas infirmer si il s’avérait que ce n’était pas le cas. Ça ferait un article de merde de dire « Vous y avez tous cru, mais ce n’est pas vrai »… Non… Tout le monde aimait les potins romantiques. Ce que je voulais, c’était une photo assez parlante pour que les gens y croient encore plus !

Ah… Et je lui demandai de baisser son arme aussi, ce qu’il ne fit pas, choqué par ma dernière déclaration au sujet de lui et de la productrice de Spaceship. Au lieu d’accéder à ma demande, il pointa son fusil sur ma tête et je reculai d’un pas, trébuchant presque dans une plante.

-Merde !

Heureusement, Stephen Shran baissa enfin son arme, et je pus baisser les bras…

Et là, il devint un véritable moulin à parole. Il réfuta les rumeurs sur lui et Enora Lee, prétextant qu’ils n’étaient plus que des collègues de travail… Qu’ils ne feraient jamais l’erreur de se remettre ensemble.

Je profitai qu’il parlait pour m’extirper de la jungle dans laquelle j’étais coincé et atterrir un peu plus près de Shran. Mais sans faire de mouvement brusque car il avait toujours son arme à la main.
Je haussai les épaules.

-Comme toutes les stars de Los Angeles. Et puis... Il y a les Shippies... Certains sont assez tarés pour suivre leurs héros dans la vraie vie... Quelques dollars pour leur permettre d'aller aux conventions et le tour est joué, ils parlent.

Les Shippies étaient les fans de Spaceship... Des nerds, pour la plupart.

J’évitais de sourire aussi, sachant que ça ressemblerait à de la provocation et la dernière chose que je voulais, c’était le provoquer.

-Mais… Travailler, ok… Néanmoins, que je sache, Spaceship : The New Generation est rodé maintenant. Ça marche. Quels changements vous allez faire pour avoir besoin de travailler autant…

Je fis la moue.

-Et la villa de Lee est à même pas un kilomètre d’ici… Fallait être vraiment fatigué pour devoir rester là-bas.

Je le regardai dans les yeux.

-Les rumeurs sont peut-être fausses, mais vous vous appréciez encore assez pour passer énormément de temps ensemble.

Sørensen préférait avoir un procès sur le dos plutôt que de voir sa tête exploser. Il était même prêt à payer chaque plante qu’il avait piétiné en s’aventurant sur ma propriété privée. Sauf que…

-Je ne fais pas confiance aux avocats. Je préfère régler ça moi-même.

Et je disais ça en le visant toujours lui montrant bien que je ne rigolais absolument pas avec la loi sur la propriété privée. Ce qui était étonnant c’était qu’Amon n’était pas au courant qu’il était très risqué de venir ici. Pas mal de paparazzi avait déjà eu affaire à moi et, à chaque fois, chacun d’entre eux n’osaient plus venir ici. Preuve qu’Amon n’avait pas eu le mémo comme quoi piétiner les plantes de Stephen Shran était passible de la peine de mort ! Il l’apprenait à ses dépends alors que, moi, je ricanai presque en constatant que si les autres ne lui avaient rien dit c’est qu’ils ne l’apprécient pas plus que ça. Sørensen n’objecta pas déclarant que c’était sa faute car il avait créé sa propre réputation.

-Une réputation de merde si tu veux mon avis ! Tout ça pour des foutues thunes !

J’avais perdu une de mes actrices fétiches, Karen Felberbaum, avec ses conneries d’articles. Certes, Karen avait sûrement des problèmes en dehors de ça… Elle était, aussi, très sensible… Mais ça n’empêche que j’étais certain que l’article avait été la pichenette de trop !

C’est, en autre, pour ça que je déteste les journalistes. Ils se tapent des thunes sur les déboires des autres. Comme s’il n’y avait pas des choses plus constructive à faire dans ce foutu univers !

J’incitai Amon à me dire pourquoi il risquait sa vie pour avoir une foutue photo de moi et ses révélations me surpris au point où, à la place d’obtempéré à sa demande de baisser mon fusil, je fis tout l’inverse le remontant vers ça tête ce qui lui provoqua un mouvement de recule et la mort de plusieurs autres de mes plantes !

Mais comme je me sentais de plus en plus tendu et énervé, je finis tout de même pas baisser mon fusil. Si jamais le coup partait tout seul, c’était moi qui allait franchement le regretter !

Donc, Amon pensait qu’Enora et moi on s’était remis ensemble ? C’était la pire connerie que j’ai entendu ce mois-ci ! Pourtant, j’en ai entendu des conneries, ce mois-ci !

Je me défendis de toutes ces allégations stupides sans réellement dire la totale vérité à Amon avant de demander comment est-ce que le journaliste savait que j’avais passé la nuit chez Enora l’autre jour. Il rétorqua que les fans de ma série étaient prêt à me prendre en filature contre quelques billets pour aller aux conventions. Cette affirmation me choqua.

-Tu payes mes fans pour qu’ils me prennent en filature ?! Putain ! T’es pire que je le pensais ! Et ceux qui acceptent ça sont des foutus traitres !

Ouais ! Je me sentais trahi ! Pour la énième fois ce mois-ci ! Par mon ex-femme, par mon meilleur ami et, maintenant, par mes foutus fans !

Rien n’allait plus dans ce foutu monde !

Amon ne croyait qu’à moitié à mes histoire. Il affirmait que ma série était sur de bons rails depuis des années et que, pour cause, hormis de gros changements, on avait pas besoin de travailler autant Enora et moi. Je fronçais les sourcils foudroyant Amon du regard.

-On voit que tu ne connais strictement rien au business du cinéma, hein ! C’est pas parce qu’une série fait de bonnes audiences depuis des années qu’il faut se reposer sur ses lauriers ! C’est du boulot de faire en sorte que Spaceship tienne la distance ! Tu crois quoi, toi ?!

Visiblement, il ne se doutait absolument pas de tout le boulot que j’abattais chaque foutue journée !

Il ajouta que la villa d’Enora n’était pas loin… Le seul point faible de mon demi-mensonge. Je pris un air hautement contrarié.

-J’étais vraiment fatigué ! Parce que j’ai un vrai boulot, moi !

C’était ma seule excuse… Je ne voulais pas dire à Amon la vérité sur ma nuit passée chez Enora qui n’avait, en réalité, aucun rapport avec une quelconque relation entre elle et moi.

Amon disait que, même si ses allégations étaient fausses, Enora et moi, on s’appréciait encore assez que pour passer beaucoup de temps ensemble. Il commence sérieusement à me taper sur les nerfs !

-Et depuis quand c’est un scoop qu’un ex-couple entretien des relations cordiales, hein ? Surtout qu’on est obligé de bien s’entendre et de bosser ensemble parce qu’on a un foutu bébé ensemble et ce bébé c’est Spaceship. Tout simplement. Il n’y a rien de plus à voir là-dedans ! Et ça n’a rien de bien sensationnel. Tu risques ta vie pour des banalités qui ne t’apporteront aucune matière pour un foutu bon article !

Je m’énervais vraiment fort au point où je finis par avoir mal au crâne. Je plissai des yeux en grommelant avant d’être contraint de reculer un peu pour m’asseoir sur le bord d'un de mes transat’ déposant mon fusil à côté de moi. Il était vraiment temps que je retourne voir mon foutu médecin… Je massai mes tempes non sans jeter un œil vers Amon.

-J’ai mal au crâne tellement tu me tapes sur les nerfs ! Surtout que je sais que même si je te prouve par A+B qu’il n’y a rien entre moi et Enora, tu écriras quand même ce que tu veux. L’épisode Karen Felberbaum ne t’as rien appris, Amon ? A moins que de foutre des stars en dépression t’amuse, hein !

Est-ce que je tentais de le culpabiliser ? Ouais ! Et si ça ne marchait pas c’est que c’était un pire enfoiré que je ne le pensais.

Je tendis alors la main.

-File-moi ton appareil photo, maintenant !

Je ne voulais pas le laisser partir avec des potentielles photos de moi dans son appareil !

Shran voulait faire justice lui-même plutôt que de porter plainte… Et ça ne me rassurait pas. Pas avec le canon braqué sur moi. Putain ! Pourquoi personne ne m’avait prévenu ? Ok, je savais que Shran avait une tendance à la paranoïa, c’était de notoriété publique. Mais qu’il soit armé jusqu’aux dents ? Non, je n’avais pas imaginé ça.

Déjà, je n’avais pas imaginé qu’il me repèrerait aussi vite. Mais il fallait bien l’admettre, j’étais journaliste, pas paparazzi. Je ne prenais mes photos moi-même que lors d’événements officiels, de concerts dans les clubs ou des trucs du genre…

Pas en me cachant pour prendre des photos à l’arrache.

En plus, Enora Lee ne semblait pas être là… Ce qui voulait dire que je risquais ma vie pour rien.

Si personne ne m’avait rien dit, c’était parce que Shran avait raison : je n’étais pas plus apprécié dans le monde du journalisme que je ne l’étais dans la jet-set. Shran trouvait ça débile de se faire haïr pour l’argent.

Je haussai les épaules.

-Tout le monde n’a pas la fibre artistique et il faut bien bouffer.

En réalité, j’avais voulu devenir ce que j’étais… Un être abject, impitoyable… J’avais été entraîné en partie par Timmy Evans. Le truc c’était que, dans le fond, je n’étais pas si détestable. Et c’était encore ce qu’il y avait de plus difficile à vivre, cette dualité.

Bon… j’avais dit à Shran pourquoi j’étais là et s’il était pas mal choqué que je puisse croire que lui et son ex-femme s’étaient remis ensemble, il finit quand même par baisser son arme, ce qui me soulagea au plus haut point.

Et comme j’étais incorrigible, je ne le lâchai pas. C’était un peu con de ma part. J’aurais dû faire profil bas et partir. Mais au point où j’en étais, je voulais quand même essayer d’avoir de la matière pour un article.

Il fut d’autant plus choqué d’apprendre que je payais des Shippies un peu tarés pour le suivre. Parce que les Shippies savaient tout… Même ce que Shran avait pris au petit-déjeuner. Il les traita de traitres.

-Vous êtes dur avec eux. Ils vous idolâtrent, c’en est pathétique. Ils vivent Spaceship, ils mangent Spaceship et ils dorment Spaceship… Vous n’avez pas créé une série… vous avez créé une religion.

Et apparemment, pour en arriver là, il fallait bien plus de travail que je ne le croyais. C’est ce que me renvoya le réalisateur quand je lui déclarai que sa série étant sur les rails depuis des années, ils n’avaient plus qu’à laisser faire. Apparemment, je me gourais.

-Et pour que ça tienne la distance, il faut du renouveau… Ou du fan service… C’est ce que vous êtes en train de faire ? Vous avez un plan pour rebooster Spaceship face à Galactic Wars ?

Comme je l’avais dit, j’allais faire de cette dangereuse rencontre une interview déguisée. Parce que je savais que quelqu’un comme Shran ne m’en accorderait jamais par les voies officielles.

Quant au fait que la villa d’Enora Lee était à moins d’un kilomètre, il prétexta avoir été trop fatigué pour rentrer chez lui. Je fis la moue.

-Mouais… Admettons.

J’écrirais quand même ce que je voudrais.

Shran plaida sa cause en disant que si Enora et lui travaillaient autant, c’était non seulement parce qu’ils s’entendaient bien, mais parce qu’ils avaient un bébé ensemble. J’avais ouvert de grands yeux avant de comprendre que le bébé en question, c’était Spaceship. Il n’y avait pas d’enfant caché… Dommage…

-J’aurai toujours de la matière… Il y a toujours à dire…

Le fait que Shran tirait à vue sur les intrus était déjà une information croustillante en soi…

Il finit par reculer pour aller s’asseoir sur le bord de son transat’, se séparant de son arme pour se masser les tempes. Il avait mal au crâne, mais restait réaliste. Par contre, je ne m’attendais pas à ce qu’il me parle de Karen Felberbaum…

Là, je redevins très sérieux, cherchant son regard.

-Je n’ai pas oublié Karen Felberbaum. Mais elle l’a cherché.

C’était une longue histoire… Karen Felberbaum aurait pu m’éviter à la fois l’exil en témoignant car elle avait été le seul témoin direct de l’homicide que j’avais commis. Elle aurait pu raconter la véritable histoire… Mais non. Elle ne l’avait pas fait.

Shran voulait mon appareil photo.

-Non. Vous allez me le casser. Je n’ai encore pris aucune photo, de toute façon. Vous ne m’en avez pas laissé le temps.

Je pris mon appareil entre mes mains.

-Je voulais une photo de vous et d’Enora Lee… Mais elle n’est pas là, apparemment.

La réponse d’Amon concernait son métier à la con me fit tiquer. Il fallait bien bouffer, hein ? Et quoi ? En dehors d’artiste il n’y a que journaliste people comme autre métier ? Il se fiche de moi, le Sørensen ?

-Tu sais qu’il existe un tas d’autre métier qui permettre de rendre la société meilleure et pas pire comme celui que tu exerces ?

Moi, je pensais bien que si Amon était journaliste people c’était qu’il aimait ça. Parce qu’il fallait tout de même se démener pour avoir une place chez L.A.People. Ce n’est pas un métier qu’on fait par défaut. M’est, donc, d’avis que Sørensen aimait ça !

Donc, il méritait d’être vu comme étant un sale connard !

Bref… Amon déclara que s’il était là c’est qu’il soupçonnait que je me sois remis en couple avec Enora ce qui était une belle grosse connerie. Je tentai de lui prouver en déclarant que, si on se voyait tant avec Enora c’était parce qu’on avait une relation purement professionnelle. En soi, c’était absolument vrai ! Je n’étais bel et bien pas en couple avec Enora. Jamais je ne ferais cette erreur une seconde fois !

J’appris qu’Amon obtenait des informations sur moi en payant mes propres fans. Je ne pouvais m’empêcher d’insulter cette partie des fans qui n’hésitait pas à balancer des informations sur ma vie privée en échange de quelques thunes. Amon me trouvait dur avec eux clamant que pour mes fans, Spaceship était une vraie religion.

-J’en suis conscient ! Mais ce n’est pas une raison pour tout balancer à un journaliste comme toi. S’ils m’aimaient tant que ça, ils ne feraient pas ça !

Les fans de Spaceship savent certainement que je déteste les journalistes et, surtout, que j’aime que ma vie privée reste privée !

Quant à mes excuses, Amon tenta de les balayer mais je mis en avant qu’il n’avait aucune idée du travail que ça demandait de garder une série comme la mienne sur de bons rails. C’était un travail colossale ! Et, en bon journaliste qu’il était, Amon chercha à me tirer d’autres informations ! Et il titilla mon égo en plus de ça ! Rien qu’entendre le mot Galactic Wars me donnait de l’urticaire.

-Et tu crois sincèrement que je vais te répondre, hein ? C’est top secret ! Tu le découvrira en même temps que tout le monde ! Et Galactic Wars est la série de science-fiction la plus merdique de l’histoire de la science-fiction ! Ça tu peux l’écrire et dire que je l’ai dit !

Même si ça n’allait sûrement étonner personne. Tout comme ça n’étonnera personne qu’un ex-couple puisse arriver à s’entendre pour le bien de leur enfant. Dans le cas d’Enora et moi, notre enfant n’est autre que Spaceship notre mariage ayant trop peu duré pour qu’on en ait un de chair et de sang. D’ailleurs tous mes mariages et mes relations avaient trop peu duré pour ça.

Mais malgré tout ce que je disais, Amon déclara qu’il aura toujours de quoi dire ! Je fronçais les sourcils.

-Ouais et au pire tu inventeras, hein ?! T’es vraiment un connard !

Mon mal de crâne se fit plus intense alors je finis par m’asseoir sur le transat’ en déposant mon arme à côté de moi. Je me massai les tempes espérant que ça n’annonçait pas une crise à venir… Je n’avais aucune envie de me mettre à convulser devant Amon…

J’affirmai alors qu’il m’avait mis sur les nerfs avant de pester sur tout ce que représentait Amon, le blâmant pour ce qui était arrivé à Karen. Il affirma ne pas avoir oublié la jeune actrice mais je ne m’attendais pas à ce qu’il n’exprime aucun remord. Pire, il disait qu’elle l’avait cherché. C’était évident qu’il y avait un grief entre lui et Karen. Mais quand bien même je trouvais sa réflexion extrêmement déplacée. Je le foudroyai du regard.

-Karen était une jeune actrice pleine de talent et sensible. Elle ne méritait pas toutes les saloperies que tu as dit sur elle. Si tu avais un problème avec elle, il fallait régler tes comptes en homme en allant lui parler et pas en l’attaquant à travers la presse comme un foutu lâche.

Si le journaliste voulait tomber encore plus bas dans mon estime, c’est réussi !

Je demandai, ensuite, qu’il me file son appareil photo mais il refusa ! Il disait qu’il n’avait pas eu le temps de prendre une photo de moi car tout ce qu’il voulait c’était une photo de moi et Enora. J’allais me relever et lui prendre des mains mais j’entendis une voiture arriver dans mon allée de l’autre côté de la villa.

Je reconnaissais ce moteur. C’était Enora…

-Putain, manquait plus que ça !

Elle venait quoi ? Donner de la matière à Amon ?! Ça pouvait pas tomber plus mal.

Je tentais de me lever mais quand je le fis ma tête tourna alors, je me rassis directement.

-Merde !

Je foudroyai Amon du regard.

-Donne l’appareil photo. Tout de suite !

Parce qu’il risquait bien de prendre une photo au vol de moi et Enora. Sauf que je doutais qu’il me le donne et le temps que j’insiste, Enora passa la porte-fenêtre de ma villa en lançant d’un ton à la fois agacé et inquiet.

-Pourquoi tu ne réponds plus au téléphone ?! Tu sais que je m’inquiète et…

En s’avançant, elle finit par voir Amon. Elle fut, un moment interdite avant de se reprendre pendant que je tentais de contenir mon mal de crâne...

-Bonjour, Monsieur Sørensen.

Elle l’avait reconnu. Enora avait toujours été physionomiste. Ce n’était pas mon cas.

Elle regarda autour d’elle… Elle fis une moue en remarquant le téléphone qui flottait dans la piscine mais sembla particulièrement en colère quand elle vit l’état des plantes.

-J’ai planté ces plantes moi-même, Monsieur Sørensen… Je peux savoir ce que vous faites ici ? C’est un propriété privée. Je pourrais appeler la police et vous coller mes avocats au cul. Tout est filmé ici. Vous n’avez aucune chance de gagner un procès.

Ouais... Sauf que les images on allait pas pouvoir les utiliser... Pas sans que, moi aussi, j'aie quelques ennuis...

La situation tendue dans laquelle je m’étais trouvé initialement semblait vouloir se changer en conversation. Houleuse, certes, mais une conversation quand même. Et j’avais bon espoir de tirer quelque chose de cela pour mon article.

Si toutefois, je sortais de là avec une tête entière.

Shran m’attaqua sur mon métier en disant que si je voulais bouffer, il y avait de meilleurs jobs que celui que j’exerçais.

-On est pas dans Spaceship le monde n’est pas tout beau et tout gentil… J’ai fait un choix, celui de nourrir la curiosité mal placée des gens et vu les ventes de L.A. People, Los Angeles en a grand besoin.

Je haussai les épaules.

-Si je ne leur jetais pas quelques informations en pâture de temps en temps, ce sont des centaines et des centaines d’intrusions auxquelles vous auriez à faire.

Parce que les gens viendraient voir par eux-mêmes ce qu’il en était, j’en étais sûr !

Il se demandait comme j’avais su qu’il avait passé la nuit chez Enora Lee et se mit à pester contre ses propres fans. Bon, ceux qui me vendaient les informations n’étaient certainement pas les meilleurs… Comme le disait Shran, s’ils l’aimaient tant que ça, ils ne le trahiraient pas.

Je continuais ma petite interview déguisée, espérant glaner quelque chose de croustillant. Je voulus en savoir plus sur ce qu’il allait advenir des prochains scénarios de Spaceship : The New Generation mais même énervé, Shran ne perdait pas le nord.

-Il y a donc bien quelque chose de top secret ! Vous préparez quelque chose !

Pour mon article, ce simple teaser pouvait suffire.

De plus, j’avais l’autorisation d’écrire que pour Shran, Galactic Wars était merdique. Je souris.

-Je n’y manquerai pas.

De toute façon, j’écrirais ce que je voudrais, ce qui me valut d’être traité de connard par Shran.

-Je ne l’ai jamais nié.

C’était le personnage que je m’étais façonné. Celui du journaliste impitoyable, sans cœur et sans éthique. Un personnage que je voulais fort pour cacher mes faiblesses, dont une trop grande sensibilité… Une trop grande gentillesse. J’avais joué les héros une fois et ça m’avait valu l’exil… Alors que personne n’était venu m’emmerder à partir du moment où j’avais choisi de devenir un enfoiré.

Il me balança l’histoire de Karen à la tronche… Probablement dans le but de me faire culpabiliser. Je faisais comme si ça ne me touchait pas… A vrai dire, j’avais un sentiment partagé sur le suicide de l’actrice. D’un côté, je pensais qu’elle l’avait bien mérité… Et d’un autre, que ma vengeance n’avait pas été proportionnée par rapport à ce qu’elle avait fait (ou plutôt pas fait).

N’empêche, en écrivant mon article, je n’avais quand même pas pu prévoir qu’elle allait sauter d’un foutu pont ! J’avais voulu lui faire mal, pas la tuer…

Mais je ne devais pas perdre contenance devant Shran qui, maintenant, me traitait de lâche.

-Elle a été lâche, j’ai été lâche, on est quitte.

Je tournai la tête quand j’entendis le moteur d’une voiture qui approchait. J’étais moins sur mes gardes maintenant que l’arme était posée à terre et que Shran semblait bien emmerdé avec son crâne qui semblait le faire souffrir le martyr.

Quand je retournai mon regard vers lui, ce fut pour me faire foudroyer. Il voulait absolument mon appareil photo.

-Hors de question !

C’est alors qu’Enora Lee en personne apparut sur la terrasse. Elle se demandait pourquoi Shran ne répondait pas au téléphone et je pointai l’appareil qui flottait à la surface, dans la piscine.

-Le téléphone est en dérangement.

Ce ne fut que là qu’elle capta ma présence et me salua.

-Mademoiselle Lee…

Elle râla pour les plantes qu’elle disait avoir plantées elle-même. Elle voulait savoir ce que je foutais là, avant de me menacer…

-J’espérais prendre une photo de vous deux ensemble. Maintenant que vous êtes là, vous pourriez poser, non ? Et on pourrait s’arranger sur ce que je vais dire et ne pas dire.

Bon, c’était la jouer au culot, mais je n’avais plus que ça.

-Quant à vos menaces… Les caméras auront probablement aussi capté le moment où votre ex-mari a fait exploser une de vos précieuses plantes à quelques centimètres de moi, avec son fusil de chasse…

Egalité.

Oh mais c’est vrai ! Le monde réel n’est pas comme ma série ! Merci Amon, de me l’avoir rappelé ! Que ferais-je sans toi ? Je l’écoutais me balancer que s’il n’avait pas choisi de travailler pour L.A.People pour assouvir la curiosité mal placée des gens c’était parce que les gens en voulaient. C’est clair Amon ! Si un gamin veut un bonbon, donnons leur ! Ceux avec le plus de sucre et en grosse quantité, si possible ! Gavons-les !

Et en plus c’est limite si Amon ne me disait pas que, sans lui, j’aurais un tas de gens dans mon jardin qui chercheraient à savoir ce que je bouffe au petit déjeuner !

-Mais tu t’entends causer, là ? C’est limite si t’es pas en train de me dire que j’ai besoin de toi ! C’est n’importe quoi, hein ! Moins il y a des gens comme toi, mieux je me porte !

Amon se faisait des films entre moi et Enora alors qu’il était loin de la vérité. Mais la vérité, en soi, je ne pouvais pas la dire alors j’optai pour un demi-mensonge. Parce que, pour être tout à fait honnête, quand je suis avec Enora, on parle quand même boulot, donc. Mais le journaliste essaye d’en profiter pour me tirer les vers du nez concernant Spaceship et du peu que je lui donnai, il tira des conclusions qui me fit rouler des yeux. Il me désespérait ! Il ajouta qu’il ne manquera pas de dire à ses lecteurs à quel point j’adorais Galactic Wars. Ça, il pouvait bien le dire, je m’en foutais car, de toute manière, je savais qu’il allait écrire ce qu’il voulait !

C’était un connard !

Il ne le nia pas me désespérant d’autant plus.

-Putain, je ne vois vraiment pas comment on peut savoir qu’on est un connard sans essayer de changer en mieux…

Il me dépassait vraiment. Au point où je me fis, moi aussi, un rien vicieux en évoquant Karen. Mais il n’exprima aucun remord. Que du contraire, dans sa bouche, on avait l’impression que Karen méritait ce qu’il lui était arrivé. Pour moi, Amon avait agit en lâche mais, d’après lui, ça avait aussi été le cas de Karen.

-Quitte ? Elle est morte ! Je n’appelle pas ça être quitte.

Lui est vivant, non ? Peu importe ce que Karen lui avait fait ça n’était sûrement pas pire que la mort. Il est bien vivant le Amon. Assez pour venir m’emmerder dans ma propriété en tout cas !

J’étais maintenant assis sur un transat’, désarmé et en proie à un mal de crâne qui ne m’annonçait rien qui vaille. Je pestais encore sur Amon alors que j’entendis Enora arrivé en voiture… Juste ce qu’il ne fallait pas quoi ! Amon allait pouvoir se faire de foutus films !

Mais il n’aura aucune photo ! Du moins, je ne voulais pas qu’il en ait une seule alors je lui sommais de me donner son appareil photo !

Mais il refusa. Ma tentative de me relever échoua alors je fus contraint de rester assis alors qu’Enora fit son apparition en pestant contre moi qui n’avait pas répondu au téléphone.

Une téléphone qui flottai à la surface de l’eau de ma piscine comme le montra Amon. Cette vision ne plus pas à Enora mais celle des plantes piétinées fut encore pire. Après avoir salué poliment Amon, elle s’en prit à lui le menaçant d’appeler la police et de porter plainte contre lui… Je me massais toujours les tempes laissant Enora déverser sa colère contre l’intrus.

Sauf qu’Amon avait toujours ce foutu culot agaçant ! Il affirma qu’il était ici pour prendre une photo de nous et nous proposa de poser et de construire avec lui l’histoire qu’il écrira dans L.A.People. Je secouai la tête dépassé par ce foutu culot.

-Tu te fiches de nous là ?!

Comme si on allait le croire ! Si on faisait ce qu’il disait rien ne nous indiquait qu’il n’allait pas inventer ce qu’il voulait quand même, hein ?! Il nous croit naïf ?! Il m’a dit lui-même qu’il ne niait pas être un connard ! Je n’ai pas l’habitude de croire les connards !

Encore moins de leur donner ce qu’ils veulent.

Enora sembla, elle aussi, contrariée par le demande d’Amon comme en témoigna ses poings bien campé sur ses hanches. Sauf qu’Amon ne tarda pas à balayer les menaces de mes ex-femmes en parlant de mon petit numéro avec le fusil de chasse.

Enora détestait ce flingue… Elle détestait que je m’amuse à tirer à vue sur les intrus. C’était une des nombreuses autres raisons qui avait conduit à notre divorce.

Mais au lieu de m’engueuler ou de montrer toute son exaspération par rapport à la situation, elle jeta un œil vers mon fusil, puis vers moi et me lança.

-Tu aurais dû visé sa tête, pas ma plante ! Il te faut de nouvelles lentilles !

Je savais qu’elle m’en voulait. Mais, visiblement, elle n’avait aucune envie de donner à Amon le bonheur de nous voir nous disputer.  

Elle foudroya alors Amon du regard.

-Vous pensez vraiment qu’on va vous donner ce que vous voulez ? Vous pensez vraiment qu’on va croire que vous allez dire exactement ce qu’on veut ? Vous pouvez inventer ce que vous voulez ! Que Shran et moi on va se marier dans deux jours… Qu’on a dix enfants cachés… Je m’en fiche complètement ! Si les gens veulent vous croire, tant pis pour eux. Moi, je sais ce que je fais de ma vie, mes proches aussi, c’est tout ce qui compte. Ce que le grand public en pense, je n’en ai que faire. Mais je ne vous donnerai pas le plaisir de prendre une photo de moi et de mon EX-mari.

Voilà ce que ça donne une Enora énervée. Visiblement, elle n’avait pas apprécié le culot d’Amon. Et, moi, j’avais bien l’impression qu’il fallait le virer au plus vite. Je le fixai et, dans un élan de colère face à son culot, je me levai un peu trop vite. Ma tête tourna un peu trop au point où j’en perdis l’équilibre.

-Wow…

Enora se tourna d’un coup et, dans un geste rapide, elle vint me soutenir avant que je ne tombe bêtement à terre.

-Ne te lève pas si vite, abruti ! Il n'en vaut pas la peine!

C’est ce qu’elle lança à la fois inquiète et contrarié. Je secouai la tête essayant de reprendre mes esprit appuyé contre Enora. Cette dernière, elle, savait qu’il fallait se débarrasser d’Amon.

-Partez tout de suite… Si vous partez maintenant, je vous garanti que personne ne portera plainte pour diffamation sur votre article qui parlera de nous.

Je savais que si je répliquai quelque chose, les mots n'allaient pas sortir de façon cohérente... Alors, je laissais Enora gérer...

Plus je parlais, plus j’énervais le réalisateur. Bon, ok, j’avais un sacré culot… Au point d’insinuer que sans moi, les fans seraient incontrôlables… Mais Shran, lui, disait que moins il y avait des gens comme moi, mieux il se portait.

-On ne saura jamais qui de nous deux a raison…

Parce que des journalistes people, il y en aurait toujours… Parce que ça rapportait. Et Shran pouvait bien dire ce qu’il voulait, il fallait bien admettre que les gens adoraient ça. L.A.People était le magazine qui faisait le plus de ventes en ville.

Il en conclut que j’étais un connard, ce que je ne niai pas, d’autant plus que j’avais mis des années à me créer ce personnage. Mais Shran, lui, ne comprenait pas comment je pouvais m’en rendre compte sans essayer de changer.

-J’ai mes raisons.

La première, c’était que c’était une façon de me protéger en devenant un méchant parmi les méchants. Les loups ne se mangent pas entre eux, comme on dit… Et deuxièmement, il y avait toujours une partie de moi qui voulait être digne de la famille Sørensen… Une famille qui m’avait toujours considéré comme le mouton noir… Parce que j’étais trop gentil, pas assez impitoyable.

Quant à Karen Felberbaum, pour moi, on était quitte. Mais cette déclaration était trop extrême pour le réalisateur qui était choqué parce que l’actrice était morte.

-J’ai écrit un article, je ne l’ai pas poussée du pont non plus. Elle avait d’autres problèmes.

Ou alors, elle était très mal dans sa tête à la base. Déjà, pour ne pas se présenter à un tribunal quand on a la clé de la liberté de quelqu’un, il fallait ne pas être bien ! Pourtant, en se suicidant, elle était devenue une sainte ! Une martyr !

C’était là, alors que Shran était apparemment pris d’un mal de crâne horrible, qu’Enora Lee se pointa, visiblement furieuse que le réalisateur ne réponde pas au téléphone. Ils étaient là tous les deux, maintenant. Peut-être que je pourrais arriver à un accord avec eux et en sortir indemne ?

Encore une fois, j’eus le culot de leur proposer de me dire ce qu’ils voulaient que je raconte sur eux dans mon article…

Et ça les choqua. Au point que même Lee déclara que Shran aurait dû me faire exploser la tête… Enora Lee me foudroya du regard avant de se lancer dans un véritable plaidoyer, tout ça pour me dire que mon deal, elle n’y croyait pas.

Et elle avait probablement raison de ne pas y croire. Bref, je pouvais écrire ce que je voulais, elle s’en foutait.

-Ok… j’ai bien compris… Merci.

Pas de photo, donc… Mais je pourrais probablement en trouver quelque part. Au moins une de Shran, pour étoffer mon article.

Le réalisateur voulait se lever, mais beaucoup trop vite et il fut pris de tournis… J’étais en train de me demander si Shran ne souffrait pas de quelque chose. Il avait mal à la tête et son ex-femme semblait le materner et être très inquiète pour lui.

Enora m’intima alors de partir… En abandonnant toute éventuelle poursuite.

-D’accord… Ok… je m’en vais.

J’avais largement de quoi faire, de toute façon.