Je venais de raccrocher avec Julian qui venait de m’apprendre la disparition de ma fille ! J’avais conseillé au jeune homme d’appeler la police mais ce n’était pas pour autant que j’allais attendre patiemment de voir en combien de morceaux ils allaient la retrouver.

Mais quelque chose me tordait l’estomac. La peur. J’avais peur pour Olivia mais j’avais peur aussi de ce que j’allais devoir apprendre à Maritza. J’avais peur pour cette dernière et peur aussi que le stress qu’engendrerait cette très mauvaise nouvelle ne crée des complications pour la grossesse de ma bien aimée.

J’avais tout fait pour protéger Livia de ce qui la liait à moi. Mais L.A.People avait fait un lien que même un démenti ne pouvait pas défaire. Ce que personne ne semblait avoir vu jusqu’ici semblait avoir éclaté à la gueule du public tout simplement parce que Amon Sørensen avait mis deux photos côte à côte… Et par là même, il avait exposé Olivia à mes ennemis.

Je montai les escaliers qui menaient à notre chambre. A 23 heures passée, Maritza était déjà couchée, attendant patiemment que je me décide à mettre fin à ma journée. Sauf que cette journée n’aurait de fin que lorsque j’aurais retrouvé Olivia. En espérant ne pas perdre Maritza en chemin.

En gravissant les escaliers comme Sisyphe porte son fardeau le long d’une montagne, les reproches de Daniele me tournaient dans la tête, encore et encore : « Si tu veux mettre ceux que tu aimes à l’abri, tu sais ce que tu as à faire ». Oui, peut-être, mais cela reviendrait à abandonner égoïstement les Los Diablos et les Pequeñas Manos. Or, je ne pouvais pas, je ne voulais pas, céder au moindre problème, surtout après les avoir mis en tous en danger en déclarant une guerre ouverte au New Soldados et à ce fameux El Lider.

J’entrai finalement dans la chambre et vins m’asseoir près de Maritza en lui chuchotant et en lui caressant la joue.

-J’ai peur d’avoir une très mauvaise nouvelle, mon amour.

Ma voix se cassa légèrement mais rien d’autre ne marquait mon inquiétude.

-Notre Olivia a été enlevée…

Que dire d’autre ? Et pourquoi passer par mille chemins avant d’en venir au fait… ? Je m’attendais à tout comme réaction, à des pleurs, très certainement, à me faire gifler, à ce qu’elle m’insulte.

Je m’attendais à tout et surtout au pire… Qu’El Lider me fasse perdre le peu que j’étais arrivé à gagner ces derniers mois…

@ Billy Lighter

Je suis allongée dans mon lit depuis deux bonne heures quand Jimmy entre me rejoindre.  J’avais si hâte qu’il vienne me retrouver pour que je lui dise ce que j’ai ressentis, un peu plutôt dans la baignoire puis encore, en m’installant au lit. Le doux chatouillement d’ailes de papillons, encore assez subtile pour que je puisse douter la première fois, puis un peu plus franc pour que j’en ai la certitude la seconde fois.

Le fruit de notre amour commence à bouger en moi.

Julius Rachel Reed grandit, grossit et me fait sentir sa présence autrement qu’avec des symptômes  incommodant de début de grossesse. Bientôt, je l’espère, Jimmy saura le sentir lui aussi en posant sa main à plat sur mon ventre.

La porte s’ouvre enfin et je sens l’excitation me gagner. Si je ne me retenais pas, je bondirais du lit pour enlacer Jimmy et lui dire avec empressement, le bonheur qui m’explose le cœur. Je me contiens, parce que je sais qu’il n’aime pas les effusions, même dans le privé, et que je veux lui annoncer pendant qu’il caressera mon ventre, comme il le fait toujours depuis que nous savons que je suis enceinte.

Mais au lieu de s’allonger derrière moi, à sa place dans notre immense lit, Jimmy s’assied sur le bord, de mon côté et m’annonce tout en chuchotant, être porteur d’une mauvaise nouvelle. Pour qu’il prenne le temps de me centrer, cette nouvelle doit être très grave. J’ai tout de suite sa mère en tête. Serait-il arrivé un malheur à ma belle-mère ? Ou un ami…

Non, c’est tout autre chose, pire encore.

- Olivia ?!

Je crois ressentir le même vertige que lorsque j’ai constaté qu’elle avait fuguée, me laissant qu’une simple note me disant qu’elle était partie en quête de son identité. Elle ne peut pas avoir remit ça pour une seconde fois ! Elle a trouvé ce qu’elle cherchait…

Non…

Jimmy a bien dit…

- Elle a été enlevée ?  Et Julian ?

Si Julian est avec elle alors il ne s’agit pas d’un enlèvement… mais d’un caprice d’adolescents qui se croient un peu trop libre.  Mais selon les traits de Jimmy, je comprends que c’est beaucoup plus grave que ça, qu’il en sait plus qu’il ne me le dit.

Instinctivement, je porte ma main à ma poitrine, là où on m’a tiré dessus puis je m’assoie dans le lit avec l’horrible sensation qu’on vient de m’arracher le cœur. Combien de fois dans ma vie ai-je ressentis cette douleur ? Combien de fois encore devrais-je la ressentir ?

- Avez-vous rejoins Jack ? Et Enrique ?

Si ça se trouve… ils savent peut-être quelque chose. Olivia a peut-être décidé de partir d’elle-même et Julian a sauté trop vite aux conclusions.

- Il faut que ce soit ça… il faut qu’elle soit là, tu comprends ?

J’avais pris les mains de Jimmy entre les miennes au moment où mes larmes avaient commencé à couler sur mes joues. Je ne peux pas me résigner à croire qu’on ait pu faire du mal à ma fille sans avoir éliminé absolument toutes les options.

-  Elle doit y être ! Appelles, Jimmy je t’en pris !

@ Billy Lighter

Il ne fallut pas longtemps pour que le visage de Maritza se décompose quand je lui annonçai l’enlèvement de notre fille. Son cœur et son cerveau de mère se sont automatiquement mis en branle. Elle s’était redressée sur le lit et j’avais peur que J.R. ressente déjà que je venais, verbalement, de poignarder sa mère qui le portait.

-C’est Julian qui m’a contacté… Il n’a rien.

Ma voix grave grésillait un peu, malgré que je tentais de garder toute consistance, j’avais juste envie de hurler à la fois de rage, de tristesse et peut-être un peu de haine contre moi-même, mais surtout contre les Los Soldados…

Tout ça ne me rappelait que plus cette lettre bourrée de fautes d’orthographe que j’avais reçue il y avait une éternité d’ici… Une lettre des South Panthers qui disait qu’ils savaient où frapper… Et qu’ils frapperaient si je n’abandonnais pas les Los Diablos. A cette époque, j’avais renvoyé Maritza à Tijuana… Et j’avais assis encore bien plus confortablement mon pouvoir.

Mais aujourd’hui, je ne voulais plus me priver… Je n’avais pas voulu éloigner ma fille comme j’avais éloigné sa mère… Et jusqu’à il y a peu, elle avait bénéficié d’un anonymat confortable.

La presse… J’en voulais à la presse…

Et je détestais ce que je voyais dans les yeux de Maritza à l’instant en sachant que j’en était le seul responsable.

-Si elle était chez Perry, elle aurait prévenu son mari. Tout ce que m’a dit Julian me laisse penser à un enlèvement.

Je serrai les mâchoire et les poings…

-Il y a eu cet article de L.A. People… Et cet article est sorti alors même que je suis aux prise avec El Lider et ses New Soldados. S’ils voulaient frapper fort, cette fois, c’est réussi.

Je ne voulais pas parler à Maritza des tache de sang que Julian avait trouvé dans la cuisine.

-J’ai dit à Julian d’appeler la police, de signaler sa disparition.

Je serrai les mains de Maritza dans les miennes.

-Mais moi aussi, je vais chercher… Et s’il faut que je retourne les USA et le Mexique pour la retrouver, je le ferai… Je ne resterai pas ici.

Puis, je lui sortis le scénario le plus soft, pour essayer de la rassurer.

-Avec un peu de chance, cela n’a rien à voir avec les gangs… Avec un peu de chance, ce sera une demande de rançon, et je la payerai…

Mais plus le temps avançai, sans qu’il n’y ait de contact aucun avec les ravisseurs, moins je pensais que ce scénario soit crédible.

-Je retrouverai Livia, Maritza. Je te promets que je la retrouverai. A n’importe quel prix.

Et je savais par où commencer : la planque la plus connue des New Soldados.

@ Billy Lighter

À chacune de mes respirations, c’est comme un coup de poignard qui s’enfonce dans mon cœur. C’est plus douloureux encore que la balle que je me suis prise pour la seule et bonne raison qu’on s’en est prit à ce que j’ai de plus précieux, plus cher encore que ma propre vie : mon enfant.  Je refuse de penser au pire. Olivia m’a fait cette peur une fois, en fuguant. Elle pourrait être capable de le refaire, qui sait ?

Peut-être s’est t-elle querellée avec Julian et se serait enfuis chez Jack mais cette hypothèse est tout de suite écartée par mon fiancé.

- Mais qu’est-ce qu’il t’a dit ? Qu’est-ce que tu ne me dis pas, Jimmy !

Je me laissais tomber, assise sur le lit, tremblante comme une feuille au vent, impuissante. Ma fille est sans aucun doute morte de peur en ce moment même et je n’ose même pas imaginer les sévices qu’elle peut subir. Je ne pourrai pas supporter ça longtemps, ne pas savoir si elle va bien, malgré tout.

- Ce journaliste ! Il faut qu’il sache, qu’il voit les dommages que son article de merde à causé !  Je veux qu’il prenne comme fardeau notre douleur!

Je veux que quelqu’un d’autre souffre avec nous, les parents de Livia et Julian et il me semble logique que ce soit celui qui a mit le feu aux poudres. J’ai maudit cet homme, Amon Sorensen quand l’article à paru. J’aurais voulu lui faire ravaler chacun de ses mots, mais je me suis dit que je ferais confiance en la vie, que j’avais déjà prit la balle pour ceux que j’aime et que le pire était maintenant derrière nous.

Jimmy a dit à Julian d’appeler la police mais là, tout de suite, je doute qu’ils puissent faire quelque chose.

- Ils ne savent même pas attraper un rhume et tu veux qu’ils trouvent notre fille ?

Et si de rendre la disparition de notre fille public énerve le kidnappeur et décide de faire bien pire que de la garder captive ? El Lider et ses New Soldados ne feront qu’une bouchée de ma fille.

Jimmy serra mes mains dans les siennes en tonnant qu’il retournerait la ville sans dessus dessous, le Mexique même, s’il le fallait mais qu’il la retrouverait.  C’est la première fois que je doute de ses paroles. Pourquoi ? Parce que j’ai le goût amer de son démenti dans Guitar&Pen, malgré que je savais que ses intentions étaient les bonnes. Je savais très bien que ce n’était pas ce que voulait Olivia, et avec le résultat d’aujourd’hui, la tentative fut vaine.

- Jimmy, nous savons très bien toi comme moi que si ce n’était qu’une question d’argent, tu serais déjà entrain de discuter avec ton banquier parce que Julian aurait trouvé une lettre demandant l’argent. Au lieu de ça, tu es ici entrain de spéculer.

Je passais ma main sur sa joue, mes yeux embrumés ancrés aux siens.

- Tu doute, alors que jamais tu ne doute.

Je me laissais aller contre lui, à pleurer en silence toutes les larmes de mon corps.

- Ramène-là moi, Jimmy ! Je t’en pris, mon amour !

En attendant,  il fallait que je bouge, que je fasse quelque chose pour  ne pas sombrer et devenir complètement folle d’inquiétude.

- Je crois que Julian ne devrait pas rester seul alors soit il vient ici, soit je vais m’installer chez eux et… je vais téléphoner Jack.

Et Enrique… parce qu’il devait apprendre cette horrible nouvelle par la télévision ou la radio, il ne me le pardonnerait jamais. Et je redoute déjà que ça puisse compromettre la bonne entente que nous avions jusqu’à présent et qu’il refuse que Maximo et Rosalynn  puissent revenir de si tôt.

@ Billy Lighter

Maritza était maintenant complètement paniquée. C’était à prévoir. D’ailleurs, j’étais aussi complètement paniqué. La seule différence entre Maritza et moi, c’était qu’elle n’avait pas peur de ses émotion et leur laissait libre court.

Maritza haussa le ton… j’assurais que notre fille n’était pas chez Jack Perry et elle réclama de savoir ce qui me faisait dire ça… Un détail que je ne lui disais pas. Alors je murmurai :

-Julian a trouvé des taches de sang dans la cuisine.

Elle me voulait honnête. Très bien. Me voilà honnête. Et elle s’était laissée tombée sur le lit, fragile, tremblante. J’avais mal de la voir comme ça car à ma propre et profonde inquiétude s’ajoutait la sienne que je ressentais comme amplifiée.

Et comme moi, Maritza maudit L.A.People et Amon Sørensen… Il n’y avait pas eu de problème avait que le journaliste de mettre l’évidence sous le nez de tout le monde. C’était sa faute, sous prétexte d’une ressemblante certes frappante mais qui ne signifiait rien… Sous prétexte de faire plus de ventes… Il avait donné ma fille en pâture à mes ennemis.

-Avant de penser à la vengeance, nous devons d’abord retrouver Livia. Je dois retrouver Olivia.

Sørensen attendra.

Car tout cela était ma faute, la faute de mon orgueil mal placé. J’en avais conscience, même si je n’arriverai probablement jamais à me résoudre à me défaire des Los Diablos. Ce serait insulter la loyauté de certain qui, comme Alonso, comptaient aussi sur moi.

Je dis aussi à Maritza que Julian allait appeler la police, mais ma belle n’avait pas foi en leur service. Moi non plus, à vrai dire, pas si c’était quelqu’un d’aussi intelligent et fourbe qu’El Lider qui se cachait derrière tout ça.

-Je ne sais pas s’ils la trouveront, mais je veux mettre toutes les chances de notre côté.

Je promis à Maritza de retrouver Livia où qu’elle soit. Mais dans son regard, je voyais de la colère, de la colère contre moi, contre ce que j’étais. Très bien. J’acceptais cette colère. Elle ne changerait de toute façon rien du tout. Le résultat était là. Et bien loin de moi de baisser les bras maintenant ou de montrer un quelconque signe de faiblesse vis-à-vis de mon concurrent.

-Je sais que ce ne sera pas une demande de rançon. Mais n’est-ce pas toi qui pense que l’espoir fait vivre ?

Et elle osai me dire que je doutais ? Non. Je ne doutais pas. Je savais quoi faire. Je savais quoi faire comme je l’avais su au moment de m’attaquer aux Conti. Je ne doutais pas, je cherchais juste par où commencer.

Alors quand elle se laissa aller contre moi, je l’écartai.

-Je sais ce que je dois faire.

Et je la maintins, fermement, pour ne pas qu’elle s’affale contre moi. Je la regardai dans les yeux alors qu’elle me suppliait de lui ramener sa fille.

-C’est ce que je ferai.

Elle voulait que Julian vienne ici… Elle voulait contacter Perry et le mettre au courant.

-Bien… Fait ça… Et pleurez ensemble. Moi, je me charge d’agir.

Je me levai, la laissant là. J’avais moi aussi des coups de fils à passer.

@ Billy Lighter

Je suis anéantie et même bien au-delà. Je n’arrive pas à croire que quelqu’un ait pu enlever mon bébé, parce que oui, peu importe son âge, Olivia restera toujours et à jamais mon bébé.  Chacun des battements de mon cœur me rappel les paroles de Jimmy.

Il est si calme, c’est ce qu’il veut que je crois mais je sais très bien qu’en lui, c’est tout autre chose. Et j’ai bien peur qu’il ne me dise pas tout, ne serait-ce que par de légère hésitation ou est-ce mon instinct qui cherche à en savoir plus.  Et ce qu’il me murmure est pire que tout le reste.  

Julian a trouvé des traces de sang dans sa cuisine.  J’imagine la scène, un intrus qui prend les traits de mon agresseur. Pourquoi lui ? Parce que son visage est à jamais gravé dans ma mémoire et qu’aujourd’hui, mon cerveau le superpose au malheur de ma fille. Olivia ne le voit pas, elle est de dos, elle travail dans ses bouquins. Je sais qu’elle aime s’installer dans sa cuisine pour étudier, elle me l’a dit. Il l’a probablement… poignardé… ou frappé à ce point fort qu’elle fut blessée.

Tout ça ne serait pas arrivée si Sørensen n’avait pas mit son nez dans nos histoires de famille ! Il ne pourra jamais savoir  la douleur et la peur que son article aura occasionné.

- Je sais…  Même de l’exprimer ne me fais pas de bien.

Parce que ça ne ramènera pas Livia et que rien de ce que je pourrais lui faire ou lui souhaiter ne saurait rivaliser avec ce que nous ressentons en ce moment même, Jimmy et moi.

Jimmy avait demandé à Julian d’appeler la police.  Je n’ai aucunement confiance en eux, n’en demeure pas moins que c’était la chose à faire.  Et puis cette histoire de rançon, je n’y crois pas, je ne la sens pas.  Et Jimmy ne douterait pas.  Il n’est jamais pris au dépourvu, c’est ce que j’admire le plus chez lui. S’il y avait une chance que ce soit ça, je sais qu’il serait déjà entrain de tout arranger et le fait qu’il soit ici à émettre une hypothèse me fait craindre le pire.  Si même Jimmy ne sait pas quel pion bouger, qui le saurait ?

Quelque chose se passe, je ne saurais dire quoi mais mon amour change brusquement d’attitude alors que je pleurais contre lui. Il est froid, mesquin jusqu’à un certain point. J’en déglutis difficilement, ne comprenant pas ce qui vient de se passer.

- Jimmy ? …

Il me fait peur, je ne le reconnais pas… en fait si… Je reconnais le Jimmy de 65, celui qui, sans crier gare, sans avertir, change brusquement d’attitude et me blesse parce qu’il est plus simple de le faire que d’avouer autre chose.

Jimmy sait quoi faire, mais moi, je suis impuissante.  Je veux protéger Julian, qui a-t-il de mal là dedans… prévenir Jack me semble aussi la chose à faire. Il s’écarta de moi, vomissant avec dédain que je n’avais qu’à faire ça, comme si de toute façon, je n’étais bonne qu’à ça.  Je suis resté là, figée, à le regarder sortir de la chambre, une main sur mon ventre et l’autre sur mon cœur.

Soit belle et taie-toi Maritza.

@ Billy Lighter