Nous étions mercredi après-midi… Jesse et Alvaro devaient être à la maison en train de déguster un goûter gargantuesque préparé par Brooke. L’avantage d’avoir une fiancée professeur d’histoire, c’était que ses horaires collaient avec ceux des enfants. Nous n’avions donc pas trop à nous tracasser de trouver des babysitters ou autre pour Alvaro et Jesse… D’ailleurs, bientôt, Alvaro serait de toute façon assez grand pour s’occuper de son petit frère si jamais on devait d’absenter.

Parce que bientôt, il faudrait qu’on pense sérieusement à notre mariage. Nous étions fiancés depuis un bon moment, maintenant… Mais avec tout ce qui s’était passé entre temps, l’adoption des enfants et tout, on avait pensé très peu à nous.

J’avais dans l’idée d’inviter Brooke au restaurant un de ces quatre et de lui refaire ma demande… Peut-être quand BleedingHeart aurait signé officiellement. J’aurais ça en moins en tête.

Mais en attendant, j’avais un autre problème… Grant W. Fleming.

Il fallait que je le vois, que je lui parle…

Et le meilleur endroit où le trouver pour ça était justement mon lieu de travail… ça tombait plutôt bien.

En arrivant, j’avais vu la Cadillac du patron, sur le parking. Cela voulait donc dire que Grant devait se trouver à monter la garde devant la porte de Reed…

J’en revenais toujours pas qu’il faisait ce boulot à la place de faire ses devoirs ou d’aller faire du BMX au skate park comme les autres enfants de son âge.

Pourtant, il adorait ça… Il me connaissait, le petit Grant, et malgré ça, il réclamait toujours de voir mon badge de manager… C’était… drôlement chiant… Mais je ne savais pas si on pouvait vraiment reprocher à l’enfant d’avoir une discipline militaire… Peut-être que c’était ce boulot qui allait l’empêcher de devenir un délinquant…

Qui savait ?

Je montai donc, par l’ascenseur, au dernier étage de la tour… Je préparai déjà mon badge.

Grant était bien là, sur une chaise, juste à côté de la porte de l’appartement du boss… Je me pointai devant lui, brandissant mon saint badge.

-Salut, Grant… Je peux te parler ?

J’étais retourné à l’école depuis un petit moment… J’étais aussi retourné chez Jordan depuis un petit moment. L’école m’ennuie toujours autant. Il y a toujours autant de looser et Jesse est toujours la star de l’école.

Moi, j’avais pu parler à Sofia. Elle disait que son père ne voulait pas que je vienne à la maison parce que je suis le fils de Ward Fleming. Elle a dit qu’elle osait pas me le dire avant. Elle a dit que ça l’ennuyait que son père pense comme ça. Ça m’avait fait râler. Pas contre Sofia mais contre son père. Moi, je suis pas mon père. Moi, je comprends pas pourquoi je ne pourrais pas voir Sofia ! Je hais son père !

Et je hais le mien aussi ! Il n’était toujours pas venu me chercher ! Moi, je pense qu’il se fiche de moi.

Tout ça m’énervait.

Jesse, Guillermo, Alvaro, Arnold, Dylan, Brad… Ils m’énervent tous. Guillermo arrête pas de me donner des surnoms débiles et ça fait rire ce petit looser de Jesse.

Et après, ils viennent chialer quand, moi, je me défends !

Bref, j’étais mieux chez BSC. Moi, ici, on me respectait parce que si on le faisait pas, pas de parking et pas de passage pour aller chez Jimmy. Alors, j’étais bien ici et Jimmy, lui, il me respectait. Il savait que j’étais doué. Pas comme tous ces gros loosers à l’école.

Je montais la garde devant la porte de Jimmy. Aujourd’hui, il n’y avait pas cette grosse nouille de Victor Hunter pour venir me faire chier. Parfois, il monte ici juste pour ça. Moi, je devrais le tuer…

Moi, je crois que Jimmy devrait le virer. Moi, je lui ai déjà dit.

Et quand la porte de l’ascenseur s’ouvrit, je crus que c’était Hunter. Mais non. C’était Jack Perry. Le père de Jesse et Alvaro. Il était manager ici. Moi, quand je lui demandais son badge, ça avait chaque fois l’air de l’emmerder.

C’est comme ça. Il faut montrer le badge.

Et il le montra. Il était pas sur la liste des gens qui vienne voir Jimmy Reed aujourd’hui mais, parfois, les gens veulent le voir sans rendez-vous comme sa fille ou Daniele Ricci.

Mais là, c’est moi que voulait voir Jack.

Moi, je levai un sourcil.

-Moi ? Pourquoi tu veux me parler ? On a pas rendez-vous, toi et moi.

Moi, je tutoie les gens dans la tour. Je suis au même niveau qu’eux.

Je plissai les yeux toujours assis sur ma chaise la tête levée vers Jack Perry.

-Vas-y, moi, je veux bien t’écouter…

Grant, installé sur sa chaise devant la porte de Jimmy Reed, me vit arriver. Il attendit patiemment que je sois devant lui et que je lui montre mon badge. Si je voulais lui parler, autant ne pas le braquer d’entrée de jeu.

D’ailleurs, je ne voulais pas vraiment lui faire des reproches, je voulais comprendre. Parce que je savais que les petits harceleurs comme Grant ne l’étaient pas par gaieté de cœur. Enfin, c’était ce que je croyais en tout cas.

Je me disais que si Grant faisait du mal aux autres, c’était qu’il était malheureux, quelque part.

Je ne connaissais pas grand-chose à la vie privée de Grant… Seulement deux ou trois choses que Jesse et Alvaro m’avaient racontées, comme le fait qu’il était le fils d’Edward Fleming mais ne vivait pas avec son père, mais avec un tuteur.

Grant leva un sourcil interrogateur quand j’affirmai vouloir lui parler. Il disait qu’on avait pas rendez-vous, ce qui me fit sourire.

-Je ne savais pas qu’il fallait prendre rendez-vous.

Je pris une chaise dans le petit couloir, preuve que Jimmy faisait parfois attendre les gens ici. Et je la rapprochai de celle de Grant pour m’y installer.

Il voulait bien m’écouter, ce qui était une bonne chose.

-Et bien voilà, Grant… Tu sais que je suis le père adoptif de Jesse et Alvaro, non ?

Je pinçai les lèvres, le laissai assimiler l’information avant de continuer.

-Je crois savoir que ce n’est pas le grand amour, entre vous… J’aimerais comprendre pourquoi.

Je regardai Grant dans les yeux.

-Parfois, mes fils ont peur ou pas envie d’aller à l’école parce qu’ils ne veulent pas te voir… J’aimerais juste savoir pourquoi tu leur fais du mal comme ça.

Jack disait qu’il savait pas qu’il devait prendre rendez-vous pour me parler. Tout le monde prenait des rendez-vous pour parler avec tout le monde, ici, pourquoi ça serait différent pour moi ? Moi, je travaille ici alors il faut prendre rendez-vous.

-Si… Mais moi, je veux bien te parler car j’ai le temps.

Oui. Parfois Jimmy voulait bien parler à des gens qui avaient pas rendez-vous car il avait le temps. Moi, j’avais le temps aujourd’hui alors je voulais bien parler à Jack Perry.

Puis, il avait son badge alors il pouvait me parler. S’il ne l’avait pas il aurait dû aller le chercher avant de me parler.

C’est comme ça.

Il prit une chaise. Il va parler longtemps ? Apparemment, oui. Je levai un sourcil. Il disait qu’il était le père adoptif d’Alvaro et Jesse. Je plissai les yeux. Ils voulaient parler d’eux ? Moi, j’étais pas sûr que j’allais aimer tout ce qu’il allait dire.

-Oui. Je sais ça.

Il disait que ce n’était pas le grand amour entre eux et moi. Moi, je les déteste très fort. Il n’y a pas d’amour du tout ! Mais Jack voulait comprendre pourquoi je les aimais pas. Je levai un sourcil.

Parce qu’ils m’ennuient ! Voilà pourquoi.

Jack disait qu’Alvaro et Jesse avaient peur d’aller à l’école. Quand ils sont à l’école on dirait pas trop qu’ils ont peur. Ils rigolent. Ils me volent Sofia. Ils m’ennuient. Et je fronçai fort les sourcils quand Jack dit qu’il ne comprenait pas pourquoi je leur faisais mal.

-Moi, je me défends. Moi, j’aime bien Batman et Guillermo Quinn m’appelle le Joker. Dylan m’appelle le Boucher de West Hollywood. Et Alvaro et Jesse, ça les fait rire. Moi, je me défends en disant que c’est des loosers. Puis, ils me volent Sofia. J’aime jouer avec Sofia. Ils ne peuvent pas jouer avec. Ce sont des minus.

Voilà. Des minus et des loosers. Je disais tout ça d’un ton monocorde mais mes sourcils étaient froncés parce que j’étais fâché.

-Moi, je pense que Jesse veut pas aller à l’école parce qu’il est nul en math et Alvaro il fait tout comme Jesse. Moi, s’ils m’ennuyaient pas, je leur ferais rien. Mais ils m’ennuient alors je me défends.

Oui. J’ai le droit de me défendre.

Grant voulait bien me parler parce qu’il avait le temps. C’était déjà un vrai petit homme d’affaire dis donc ! En même temps, à force de voir comment se comportait Jimmy Reed à longueur de journée, ce n’était pas étonnant.

J’avais pris une chaise parce que je comptais bien avoir une bonne conversation avec le garçon. Mais par-dessus tout, je voulais comprendre.

Je resituai donc les choses, lui rappelant que j’étais le père adoptif de Jesse et Alvaro. Mais il semblait très au courant.

J’entrai alors dans le vif du sujet, expliquant à Grant le mal-être qu’il provoquait chez mes garçons. Jesse et Alvaro allaient à l’école avec des pieds de plombs et je savais que ce n’était pas seulement parce que l’école, c’est ennuyeux pour tout le monde. D’ailleurs, ça m’aurait étonné venant de la part d’Alvaro.

Mais Jesse et lui parlaient souvent de Grant.

Après avoir mis les choses en place, je laissai Grant s’exprimer. Et je fus assez surpris par son discours. A l’entendre, il était victime en premier des quolibets de la part des autres élèves, dont Guillermo Quinn, le fils du chanteur de The Warriors.

Et si Grant ne fit pas mention de petits surnoms venant de la part de mes fils, ceux-ci semblaient bien rire aux dépends de Grant. Grant qui disait ne faire que se défendre.

Et puis, il y avait une fille dans l’histoire aussi. Sofia Vega. Elle était déjà venue à la maison pour jouer avec Jesse et Alvaro. Ils s’entendaient bien.

Mais apparemment, Grant ne bénéficiait pas du même amour venant de la petite fille. Il était jaloux, en plus de se sentir insulté à longueur de temps.

Je comprenais un peu mieux la situation…

Mais tout ce qu’avait dit Grant, il l’avait fait sur un ton froid et monocorde… Ce qui cachait qu’il bouillonnait intérieurement.

-Et si je dis à Jesse et Alvaro de ne plus rire ? Parce que c’est ça qui te fait du mal, non ?

Je regardai Grant dans les yeux.

-Plutôt que de les traiter de minus et de losers, pourquoi tu n’essayes pas de t’en faire des amis? Tu sais, je suis sûr que Jesse et Alvaro ne se rendent pas compte que de les voir rire de toi te fait du mal.

Je pinçai les lèvres.

-Tu devrais essayer de leur expliquer… Parce que j’avoue que « le Boucher de West Hollywood », ce n’est vraiment pas gentil.

Surtout quand on savait d’où il venait…

Jack Perry, il venait pour me voir moi. Parce que Jesse et Alvaro se plaignait de moi. Alors que c’est eux qui m’ennuient. Moi, je n’ai rien fait d’autre que me défendre. Je n’aime pas l’école non plus ! Moi, je vois pas pourquoi Jack veut tout remettre sur mon dos.

Alors, j’expliquai. Moi, je dis qu’Alvaro et Jesse se foutaient de moi à cause des surnoms que me donnaient Guillermo et Dylan. Puis, je déteste quand ils me prennent Sofia. C’est MON amie, quoi qu’en dise Jordan qui veut toujours que je partage.

Moi, je partage pas Sofia.

Je disais tout ça à Jack sur on ton très froid. Moi, je n’aimais pas qu’on m’accuse alors que je ne faisais que me défendre. Si ces loosers arrêtaient de m’emmerder, moi, je me défendrais pas.

Puis, je hais Jesse. Il se prend pour la star de l’école parce qu’il chante et fait de la batterie. Il m’énerve. Des élèves lui demandent des autographes. Pendant ce temps, moi, je suis le Boucher de West Hollywood ! C’est pas juste !

Moi, je suis plus doué que Jesse en tout. Je suis plus fort, plus grand, plus malin… Mais c’est lui qu’on aime bien.

Moi, je comprends pas ça.

Jack demanda si j’allais arrêter de me défendre si Alvaro et Jesse ne riaient plus. Je plissai des yeux en le regardant.

-J’aime pas qu’on se moque de moi. Toi, tu aimes ? Non. Moi non plus. Ils vont encore rire… Moi, je sais que même si tu leur dit, ils riront toujours. Et ils joueront toujours avec Sofia.

Et ils inviteront Sofia et elle ira chez eux parce que son père veut pas qu’elle vienne chez moi. Pourquoi ? Parce que je suis le fils de Ward Fleming.

Jack me fit prendre mon plus gros air sceptique quand il dit que je devrais devenir ami avec Jesse et Alvaro. Pourquoi ? Je ne les aimes pas ! Je vais pas devenir ami avec des gens que j’aime pas !

-Moi, je crois qu’ils savent que ça fait mal. Quand on se moque d’eux, ils sont pas content non plus. Et je serais jamais ami avec eux. Je les aimes pas. Moi, je vais pas me forcer à être gentil avec eux. Ils m’énervent tous. Je veux pas être ami avec eux.

Jack pensait que je devrais leur expliquer. Quoi ? Que c’est pas gentil ce qu’ils font. Je fronçai fort les sourcils.

-Non. C’est méchant. Moi, je suis pas comme mon grand-père.

Moi, je suis mieux que lui.

-Et moi, je sais qu’Alvaro et Jesse savent que c’est méchant. Ils disent ça justement pour m’ennuyer, alors… Surtout Quinn. C’est qu’un sale petit con. Et Jesse, il se prend pour une star alors qu’il est tout petit et très bête.

Je me renfrognai sur ma chaise.

-Et puis, je sais me défendre, alors… Ils m’insultent ? Je les frappe. C’est comme ça.

Oui, c’est comme ça.

-Et ils m’ennuient à inviter Sofia… Moi, elle peut pas venir chez moi parce que son père veut pas parce que je suis le fils de Ward Fleming. Je vis même plus chez mon père…

Je soupirai et passai une main sur mon visage. Grant se faisait ennuyer en fait… Et dans sa bouche, bien plus et d’une façon plus vicieuse qu’il n’ennuyait Jesse et Alvaro.

-Non, je n’aime pas qu’on se moque de moi.

Grant ne croyait pas que je pourrai empêcher mes fils de se moquer de lui. Je ne savais pas si ce que disait Grant était tout à fait vrai. Peut-être qu’il exagérait pour passer pour la victime. Cela dit, je savais aussi que Jesse et Alvaro pouvait être capable de rire au dépens des autres. Surtout de quelqu’un qu’ils n’aimaient pas comme Grant.

Grant disait que les petits savaient que ça faisait mal. Et aussi qu’il ne serait jamais ami avec mes enfants. Je le regardai, un peu déçu.

-Je sais que c’est beaucoup demander. Mais j’expliquerai à Jesse et Alvaro qu’ils ne doivent pas rire de toi, c’est promis.

Surtout si on l’appelait le Boucher de West Hollywood. Ça, c’était très dur. Et super méchant. Grant protesta qu’il n’était pas comme son grand-père, le tristement célèbre Boucher de Los Angeles.

-Je n’en doute pas. Je vois le travail que tu fais ici. Tu es strict et c’est bien. Mais…

Je cherchai un peu mes mots.

-Mais parfois ça te fait avoir une mauvaise image… Tu pourrais… essayer d’être plus sympathique ? Demander les choses gentiment… ?

Comme quand on devait lui montrer notre badge par exemple. Parce qu’il demandait toujours ça comme s’il serait ravi de nous renvoyer jusque dans nos voitures pour aller chercher le saint badge.

Puis il y avait sa façon de parler, froide et monocorde.

Il répéta qu’il savait que mes fils savaient que rire de lui était méchant. Et il y alla d’insultes envers Guillermo Quinn et Jesse.

-Je ne connais pas bien Guillermo. Mais Jesse est un très gentil garçon… Alvaro aussi. S’ils rigolent, c’est peut-être parce qu’ils ont peur que les autres les trouvent faibles. Je ne sais pas vraiment.

Et on en vint au nœud du problème : quand Grant se sentait insulté, il frappait. C’était ce que Jesse disait : que Grant frappait. Mais il s’était bien abstenu de me dire qu’ils riaient de lui.

-Tu sais, frapper n’es pas la solution. Je ne doute pas que tu saches te défendre comme ça, tu as l’air fort. Mais tu pourrais les ignorer… Ou aller en parler à un professeur qui nous dirait, à nous, parents, les méchantes choses que Jesse et Alvaro font.

Je fis la moue.

-Et on les punirait en conséquence.

Par contre, là où il ne pouvait pas en vouloir à mes fils, c’était sur le cas Sofia.

-Tu sais, mes fils n’en peuvent rien si le papa de Sofia ne veut pas qu’elle aille chez toi. Et ils ont le droit d’être amis avec elle.

Soudain, j’eus une illumination.

-Qu’est-ce que tu dirais d’un jour venir jouer à la maison ? Quand Sofia serait là ? Ce serait l’occasion pour vous tous d’apprendre à vous connaître en dehors de l’école.

Jack disait ne pas aimer qu’on se moque de lui. Normal. Personne aime ça. Moi non plus. Jack, il pensait qu’Alvaro et Jesse savaient pas que ça me faisait mal. Moi, je pense qu’ils savent alors quand Jack dit qu’il allait leur dire, j’haussai des épaules. Moi, je sais que Jesse est stupide mais il sait que c’est pas bien de ce moquer. Tout le monde sait ça.

-Toi, tu peux leur expliquer mais ils savent.

Jack était déçu que je veuille pas être ami avec Alvaro et Jesse. Moi, je pense pas que Jack serait content de devoir être ami avec ses ennemis. Pourquoi, moi, je devrais me forcer ?

Les autres enfants m’appelaient le Boucher de West Hollywood alors que je n’étais pas comme mon grand-père. Moi, je l’avais même jamais rencontré. Je l’avais juste vu en photo dans L.A.People. Même mon père l’aimait pas… Jack savait que je n’étais pas comme Thomas Fleming. Il disait que je travaillais bien ici.

Mais…

Mais il y avait un « mais ». Il disait que j’avais parfois une mauvaise image et que je devrais être plus sympathique. Je plissai des yeux en foudroyant Jack du regard. Pourquoi être plus sympathique ? Je dois surveiller pas être gentil avec les gens.

-Moi, je fais mon travail. Je suis pas ici pour être gentil avec les gens mais pour surveiller et vérifier. Jimmy trouve que je travaille bien. Il me demande pas d’être plus sympathique. Si vous oublier pas vos badges, je ne vous dis rien. Il faut son badge. A l’école, si je fais pas mes devoirs, le prof est pas gentil avec moi non plus. Ici, c’est pareil. Tu oublies, tu retournes chercher. Moi, je vois pas pourquoi je serais gentil si tu oublies.

Moi, je dis à Jack qu’Alvaro et Jesse savaient que c’était méchant et que Guillermo était un sale con. Jack disait que Jesse était un gentil garçon et je roulai des yeux. Il disait que s’ils faisaient ça c’était pour pas que les autres les trouve faible. Je fronçai des sourcils.

-Non. Ils rigolent parce que ça les fait rire. Jesse c’est la star de l’école. Personne se moque de lui.

Alors, moi, je me défendais en frappant. Mais ça n’allait pas à Jack non plus. Il disait que je devrais les ignorer ou en parler à un professeur. Je penchai légèrement la tête sur le côté.

-Frapper ça marche mieux. Les ignorer ça fonctionne pas. Et pourquoi je le dirais alors que je sais me défendre moi-même ? J’ai besoin de personne.

Pour que Jack puisse les punir ? C’est ce qu’il disait. Je fronçai les sourcils.

-Moi, je crois pas que tu vas bien les punir… Toi tu dis que Jesse est gentils et qu’ils font ça parce qu’ils ont peur des autres. Toi, tu trouves tout le temps des excuses.

Je préférais les punir moi-même.

Et pour Sofia… Il disait que c’était pas la faute de Jesse et Alvaro. Je me renfrognai.

-J’aime pas le papa de Sofia.

Jack me proposa alors de venir chez lui quand Sofia sera là. Moi, aller chez Alvaro et Jesse ? Moi, je suis déjà revenu à l’école pour voir Sofia… Maintenant, je devrais aller chez mes ennemis pour ça ? Je fixai Jack pensant le pour et le contre.

-Moi, j’aimerais voir Sofia seul. J’aimerais qu’elle vienne chez moi !

Je plissai du nez… Pourquoi je devais toujours faire des choses que j’aime pas pour avoir les choses que j’aime bien.

-Moi, je veux bien… Mais je serais pas ami avec eux. Je viendrais pour jouer avec Sofia pas avec eux.

Oui. Je voulais ça.

Grant n’était pas convaincu par les choses que je comptais mettre en place, dont avoir une conversation avec mes fils sur leurs moqueries. Parce que quand Jesse et Alvaro me racontaient ce qu’il se passait à l’école, ils ne mentionnaient pas qu’ils se moquaient de leurs petits camarades. Cela dit, je les en pensais tout à fait capables.

Pas qu’ils soient méchants, c’était tout le contraire, mais les enfants sont parfois cruels.

J’expliquai à Grant ce qui faisait peut-être qu’on se moquait de lui à l’école. Son air toujours renfrogné et sa façon de s’adresser aux gens n’attiraient pas vraiment la sympathie. Je lui conseillai donc d’être plus avenant…

Mais ce fut comme foncer droit dans un mur.

Grant ne comptait pas changer d’attitude, que du contraire.

Je soupirai.

-Tu n’as pas tout à fait tort… Mais il ne faut pas t’étonner que les gens ne t’aiment pas beaucoup, alors, Grant.

Mais apparemment, seul l’avis de Jimmy Reed comptait pour le petit. Et ce n’était pas vraiment une référence.

On en revint à Jesse que Grant ne portait pas du tout dans son cœur. Il semblait jaloux de la notoriété de Jesse. Du coup, le seul mode d’expression de Grant face à la frustration était de frapper. Je lui dis qu’il y avait d’autres solutions, mais il pensait que frapper était plus efficace.

-Ah oui ? Si c’est si efficace, explique-moi pourquoi mes fils et Guillermo Quinn se moquent toujours de toi ? Ça ne me semble pas marcher aussi bien que tu ne le dis.

Je voulais bien prendre des mesures avec Jesse et Alvaro… Mais chacun devait faire un effort, Grant y compris.

Grant, lui, trouvait que je cherchais tout le temps des excuses.

-Je cherche surtout à comprendre, Grant. Je ne suis pas là pour t’engueuler ou te juger. Juste pour comprendre. Et essayer que tout se passe mieux à l’école, pour toi y compris.

Puis il y avait le problème « Sofia »… Seigneur ! Qu’est-ce que ce serait à l’adolescence s’ils étaient déjà tous à courir après la même fille maintenant ?

Je proposai à Grant de venir jouer à la maison un jour que Sofia serait là. Je n’étais pas obligé de dire à Alonso que Grant serait là, pas vrai ? Ce serait un peu lui jouer dans le dos, mais je trouvais que priver Grant d’une après-midi avec son amie sous prétexte que son père était Edward Fleming était un peu dur. Surtout que Grant ne vivait pas avec son père.

Il voulait qu’elle vienne chez lui. Je posai ma main sur sa petite épaule et me surpris à sentir des muscles déjà bien développés sous son t-shirt.

-Je sais. Je trouve ça injuste aussi pour toi.

Après mûre réflexion, Grant accepta mon invitation. Mais en mettant les limites : il jouerait avec Sofia et avec personne d’autre.

Je souris et lui tendis la main.

-Alors on a un deal. Mais promets-moi d’essayer, d’accord ? Je parlerai à mes fils.

Moi, je voulais pas changer d’attitude chez BSC. Moi, j’étais ici pour surveiller et dire quand les gens faisaient mal. Tant pis si ça leur plaisait pas. Je plissai des yeux quand Jack disait que j’avais pas tort mais que je devais pas m’étonner que les gens ne m’aimaient pas beaucoup.

-Moi, je m’en fiche qu’ils m’aiment pas tant qu’ils m’ennuient pas.

Je faisais mon travail. C’est tout. Moi, je suis pas ici pour plaire aux gens. S’ils sont pas content tant pis pour eux.

Moi, j’expliquai que Jesse était la star de l’école et qu’il savait bien quand il m’ennuyait. Ils savent tous. Moi, quand ils m’ennuyaient, je frappais. Mais Jack disait que ce n’était pas la solution. Moi, je pensais bien que c’était la bonne solution. Les autres solutions ne marchent pas. Mais Jack disait que celle-ci ne fonctionnait pas non plus. Je penchai légèrement la tête sur le côté en le regardant.

-Les autres solutions non plus. Et je me sens mieux après avoir frappé alors ça marche.

Oui. Je me sens bien après avoir frappé. Comme à la boxe. Je me sens bien en frappant. Quand on m’ennuie, c’est pareil.

Moi, je savais bien que Jack allait pas bien punir Jesse et Alvaro parce qu’il leur trouvait tout le temps de excuses. Pour lui, Jesse et Alvaro faisait ça pour pas que les autres les prenne pour des faibles. Moi, je crois qu’ils rigolent parce que ça les fait rire, tout simplement.

Ils ne m’aiment pas…

Je ne les aime pas…

Jack disait qu’il cherchait juste à comprendre. Je plissai des yeux.

-Moi, j’ai expliqué. Mais tu cherches quand même des excuses à Jesse et Alvaro. Ils rigolent parce qu’ils veulent être méchant avec moi.

Et ils me volaient Sofia. Mais je ne m’attendais pas à ce que Jack me propose de venir chez lui jouer avec Sofia vu que Sofia ne pouvait pas venir chez moi à cause de son père. Je préférais que Sofia vienne chez moi ! Et pas devoir voir Jesse et Alvaro ! Jack trouvait ça injuste aussi. J’hochai de la tête.

-Oui. Injuste. Je n’aime pas le père de Sofia.

Je finis par réfléchir à la proposition avant d’accepter à la seule condition que je voudrais jouer seul avec Sofia. Je ne jouerais pas avec Alvaro et Jesse !

Jack accepta.

Je serrai sa main.

-Moi, j’essaye. Deal.

Je pouvais toujours promettre… Quand j’aurais vu Sofia, je ferais ce que je veux après.

-Maintenant, toi, tu peux partir car j’ai du travail. Moi, je te téléphonerais pour venir chez toi.

Oui. J’ai du travail.