Faith avait eu une idée de génie ! Elle nous avait, un jour, ramené Hugh Crusher dans notre studio et il n’avait pas fallu longtemps avant que la magie opère. S’il avait été timide au début, après quelques bières et quelques échanges, il avait réussi à se détendre et, ensemble, on a réussi à faire de son texte une superbe chanson. On ne s’est pas arrêté là… Je lui ai aussi proposé de chanter sur un texte de mon cru que j’avais en stock depuis des années mais pour lequel je ne trouvais pas la bonne voix. Hugh était cette bonne voix et je n’ai pas été déçu de lui dévoiler tout ça.

Une journée. C’est le temps qu’il nous a fallu pour enregistrer ces deux titres sur cassette. A la fin, on était complètement bourré mais ça avait valu le coup. Largement le coup. C’est le lendemain qui a été plus compliqué. Pas tellement pour le mal de crâne mais pour convaincre Hugh de faire de ces deux chansons un super single. J’avais dû sortir mon armada d’arguments pour le convaincre et il avait fini par dire « oui ». A vrai dire, je pensais bien qu’il n’osait pas dire « non »… Mais comme j’avais son « oui », je n’allais, donc, pas me gêner d’aller faire entendre tout ça à Jack !

J’avais, donc, pris rendez-vous avec Jack en lui disant que j’avais quelque chose à lui faire entendre sans lui expliquer réellement quoi. Je voulais lui faire la surprise en fait. J’étais certain qu’il n’allait absolument pas savoir qui chantait sur notre titre.

C’est, donc, à ce rendez-vous que je me rendis ma cassette en poche. J’étais de super bonne humeur et super enjoué. Ce qu’on allait proposer là était du vrai punk mais bien différent, je trouvais, de ce qu’on avait fait avant. C’était quitte ou double mais j’étais très confiant que ça puisse, après notre album, nous donner encore un souffle supplémentaire et finir par convaincre totalement les gens que BleedingHeart peut sortir de sa zone de confort et faire des choses pas si mal.

J’entrai dans les bureaux de BSC avec un grand sourire au lèvre et j’avais interrompu Carla dans sa grande conversation avec Victor Hunter pour qu’elle prévienne Jack que j’arrivais. Elle s’exécuta et je lui souris avant de prendre l’ascenseur pour me rendre au bureau de Jack. Je toquai à la porte et quand il m’invita à entrer, je le fis.

-Salut Jack ! J’espère que tu vas bien ! Moi, je pète la forme !

Ouais, je pétais la forme. Depuis la sortie de notre album, j’allais beaucoup mieux et j’étais pressé de pouvoir embarqué sur une tournée même si je savais que tout ça prenait du temps à préparer. Du temps qu’on passait à inviter de nouvelles chanson.

Je sortis la cassette de ma poche.

-BleedingHeart n’a pas chômé. J’ai deux super titre à te faire écouter. J’aimerais avoir ton avis. Voir si c’est aussi bien qu’on le pense.

Sans attendre et parce que j’étais chargé comme une pile électrique, je me dirigeai vers son lecteur pour mettre la cassette et envoyer la première chanson. Je sais… J’étais très impatient… Mais j’étais pressé d’avoir l’avis de Jack.

J’appuyai sur « play » pour envoyer la musique.


Je me retournai vers Jack avec un grand sourire. Il allait se rendre rapidement compte que ce n’était pas ma voix au chant. Jack avait une excellente oreille.

J’étais plutôt content… Et soulagé aussi…

J’avais réussi à aplanir les choses avec Howard. Je n’étais pas bête, je savais reconnaître mes torts. Or, j’avais été injuste avec le batteur… Plus que ça, j’avais été carrément méchant. Ça n’avait pas vraiment été intentionnel… J’avais voulu le réveiller, lui faire un électrochoc. Ce n’était pas la bonne méthode. J’aurais dû y aller, bien au contraire, plus doucement et avec plus d’empathie plutôt que de le couvrir de reproches injustifiés.

Bref, j’avais écrit à Howard, il m’avait répondu et pardonné… Et pour l’instant, j’allais le laisser tranquille, le laisser réfléchir. Il devait de toute façon partir en Afrique avec Livia pour United For Youth. Peut-être qu’un peu de temps loin de L.A. allait lui faire du bien.

Pour le reste, l’album de BleedingHeart était sorti et avait eu son petit succès. Même le fait que l’album de Shiri sorte peu après ne nous avait pas fait de l’ombre. Pour la simple et bonne raison, à mon avis, que ce n’était pas le même public.

Depuis, je passais mon temps au téléphone. Comme Howard allait partir, cela ne valait pas encore la peine de me pencher sur la première tournée de Fireworks, même si j’y pensais déjà sérieusement. Mais comme je ne savais pas, en plus, si Howard allait faire sa désintox’ et, s’il décidait de la faire, quand, je ne pouvais encore contacter personne.

Donc, je m’occupais de BleedingHeart, je leur cherchais des scènes, des dates, dans tout le pays. Ils avaient déjà fait une tournée mondiale en première partie, mais être tête d’affiche, c’était différent. Alors, j’avais pris le pari de commencer petit pour ensuite, voir plus grand.

J’avais déjà une dizaine de dates planifiées, mais je gardais cela pour moi pour ensuite en faire la surprise à mon groupe.

En espérant que ça leur plaise, ce dont je ne doutais pas.

J’allais peut-être monter cela à Duncan aujourd’hui, puisqu’il avait pris rendez-vous pour passer me voir… Je me demandais un peu ce qu’il me voulait… Peut-être du matériel ou quelque chose comme ça.

Quand il entra, il rayonnait littéralement.

-Salut, Duncan…

Je le regardai, à la fois amusé et interloqué.

-Je vais très bien et je constate que tu as l’air aux anges… qu’est-ce qu’il se passe ?

Il ne s’installa pas sur la chaise qui était à sa disposition. Non. Il m’expliqua que BleedingHeart n’avait pas chômé. Ce qui me fis levé un sourcil intéressé et dessina un beau sourire sur mon visage. Il alla directement vers mon lecteur, outils indispensable à tout manager qui se respectait et envoya la sauce.

J’écoutai attentivement, les poils se dressant sur mes avant-bras et dans ma nuque. Mais qu’est-ce qu’ils étaient en train de me faire là, ces petits gars ? Quelle magie était en train de se jouer dont il me faisait l’honneur d’être le témoin ?

La chanson pris fin et Duncan appuya sur « stop ». Je le regardai droit dans les yeux, mais n’arrivais pas à me départir de mon sourire.

-D’où vous me sortez une pépite pareille ? Et qu’est-ce que tu as fait à ta voix ? On dirait que ce n’est pas toi qui chante…

J’étais extrêmement enthousiaste quand je passai la porte du bureau de Jack, notre manager. Je crois que la seule chose qui pourrait entacher ma bonne humeur serait que Jack me dise que nos chansons ne sont pas aussi bien que ce que l’on avait imaginé mais, très sincèrement, j’en doutais. J’avais un extrêmement bon feeling.

Jack disait aller bien. Je souris de plus belle. S’il allait bien alors, c’était tant mieux ! Mais mon attitude semblait attisé sa curiosité. J’expliquai, donc, que BleedingHeart n’avait pas chômé. La journée qu’on avait passée avec Hugh Crusher nous avait permis de sortir des choses qu’on avait encore jamais testé auparavant. Je trouve qu’en une journée on avait découvert des facettes de notre musique qu’on ne connaissait pas encore ce qui était vraiment stimulant pour un artiste.

Comme les actes étaient souvent plus éloquent que les mots, je pris l’initiative de mettre ma cassette dans le lecteur de Jack et d’envoyer la première chanson qui était sortie de notre petite session musicale avec Hugh. J’écoutais en souriant et en regardant Jack qui écoutait religieusement. BleedingHeart faisait du punk rock… Et je trouvais qu’il n’y avait pas plus punk que cette chanson. Il faut dire que Hugh Crusher avait l’attitude d’un punk sans le style vestimentaire qui allait avec… Il suffit de parler quelques minutes avec lui pour s’en rendre compte.

Quand la chanson fut terminée, j’appuyai sur « stop » avant que la seconde ne démarre. Je voulais déjà l’avis de Jack sur la chose. Je voulais entendre ses réactions. Il souriait. C’était plus que bon signe.

Et toute de suite mon manager posa quelques questions. Il avait bien remarqué que la voix sur l’enregistrement ne ressemblait pas à la mienne. Je rigolai.

-Ce n’est pas moi qui chante. Ce n’est pas moi non plus qui ait écrit les paroles. C’est Hugh Crusher. L’ancien acteur… Il bosse actuellement comme guitariste pour Victoria Hunter.

Jack savait sûrement qui c’était vu que Hugh avait été un acteur connu il y a plus de 10 ans d’ici. Puis… L.A.People en avait parlé dernièrement aussi au grand dam de Hugh. Surtout que le magazine avait largement spéculé sur une possible relation entre lui et Jessica Hill. Les deux étaient amis, tout simplement.

Sans compter que Jack devait savoir que Vicky avait changé de guitariste… Larry, son ancien guitariste qui est guitariste de session chez BSC, n’arrête pas d’en parler. Il n’a pas digéré d’avoir été éjecté de l’équipe de Vicky de cette manière pour être remplacer par le pire guitariste de Los Angeles. Ce sont ses mots, pas les miens…

-Faith a vu un de ses textes et lui a proposé de le mettre en chanson. On s’est réuni pour ça et on a enregistré cette chanson. Et une autre aussi… Attends…

Je me retournai vers le lecteur et avant de faire « play », je lançai :

-L’autre chanson c’est un texte à moi mais c’est Hugh qui chante. Ecoute…


Je le laissais écouter cette seconde chanson toujours avec le même sourire aux lèvres. Quand elle fut terminée, je vins, enfin, m’asseoir face à Jack.

-Alors ? Tu en penses quoi ?

Duncan était excité comme un gosse le matin de Noël et je me demandais bien ce qui pouvait le mettre dans cet état. Certes, leur album marchait bien et BleedingHeart avait un très bon contact avec son public, d’après ce que j’avais vu de la tournée de promotion qu’on avait commencée.

Il se passait quelque chose, mais quoi.

Je savais que Duncan n’allait pas faire durer le suspense indéfiniment. Il était beaucoup de choses, mais jouer de mystère n’était pas dans ses habitudes.

Quand il sortit une cassette de sa poche, je souris.

Aaah nous y voilà donc : BleedingHeart, maintenant qu’ils étaient lancés, semblait-il, pour de bon, ne pouvait plus s’arrêter de créer.

Et c’était une excellente chose.

Surtout que quand il fit tourner sa cassette, je fus plus qu’agréablement surpris. Ceux qui, dans leurs critiques sur l’album City Of The Damned avait dit que ce n’était pas assez punk allaient être servis avec cette nouvelle chanson.

Quand il fit « stop » pour avoir mon avis. Je le regardai dans les yeux. C’était très bon, mais la voix me turlupinait.

Et pour cause ! Ce n’était pas lui qui chantait mais Hugh Crusher.

Je haussai les sourcils, surpris.

-Hugh Crusher ? Oui, je le connais… Enfin, je sais qui c’est. J’ai vu Love In L.A. et Spaceship en son temps. Et j’ai effectivement entendu dire qu’il était de retour dans l’entourage de Victoria Hunter mais…

Je regardai mon lecteur dans lequel la cassette était toujours.

-J’ignorais qu’il savait aussi chanter. Pourtant, je pensais qu’il n’avait pas l’oreille musicale… On le dit très mauvais guitariste.

Cependant, pour chanter, il ne semblait pas avoir ce problème.

-Donc le texte est de lui ? Décidément, il est plein de surprise…

Duncan n’en avait pas fini. Le texte suivant était de lui, mais c’était encore une fois Hugh qui chantait. Et cette chanson était aussi bonne que la première. Mais surtout, elle avait un rythme particulier qui faisait qu’une fois qu’on avait entendu une fois le refrain, on pouvait aisément chanter avec… Ce que je me mis à faire plus ou moins, remuant les lèvres.

Chances thrown
Nothing's free
Longing for, used to be
Still it's hard, hard to see
Fragile lives
Shattered dreams (Go!)

Quand Duncan arrêta la cassette, je n’avais qu’une envie, me la repasser en boucle !

Je le regardai avec des yeux ronds.

-C’est vraiment… Vraiment très bon.

Je passai une main dans mes cheveux parfaitement coiffés.

-Il faudrait que je rencontre Hugh Crusher. Il m’intrigue. Mais est-ce que vous savez déjà ce que vous voulez faire de ces deux chansons ?

Jack avait bien entendu que ce n’était pas ma voix sur l’enregistrement. Alors, j’avais expliqué que c’était Hugh Crusher qui chantait. J’avais ajouté que c’était ce même Hugh Crusher qui avait écrit les paroles. BleedingHeart n’avait fait que la musique ce le premier titre que j’avais présenté à Jack.

Je souris alors que le visage de Jack exprimait la surprise. Il disait connaitre Hugh à travers les films qu’il avait fait. Il savait aussi que l’ancien acteur bossait, désormais, pour Victoria Hunter. Seulement, tout comme moi avant que Faith me présente Hugh, il ignorait que Crusher savait chanter. Je devais avoué avoir été surpris, moi aussi, pour les mêmes raisons que Jack. Hugh était un très mauvais guitariste et semblait ne pas avoir l’oreille musicale. Mais c’était faux, en fait.

-C’est un très mauvais guitariste, c’est vrai. Mais c’est parce qu’il manque cruellement de dextérité et, soyons honnête, je crois sincèrement qu’il déteste jouer de la guitare. S’il a accepté de jouer pour Victoria c’est uniquement pour faire plaisir à Victoria… Mais il a quand même une certaine oreille et il a une certaine facilité pour chanter.

Hugh nous avait un peu parlé de lui alors qu’il avait déjà pas mal d’alcool dans le sang et on avait bien compris qu’il n’aimait pas spécialement jouer de la guitare.

Jack disait que l’ancien acteur était plein de surprise. J’hochai de la tête pour confirmer.

-Ouais, il l’est. Ce texte, il l’a écrit il y a 20 ans. C’est ce qu’il a dit.

Mais j’avais encore une chanson à faire écouter à Jack et je le fis de plus en plus confiant que notre idée pourrait marcher. Je souris en voyant les lèvres de Jack remuer lorsque que le refrain arriva pour le seconde fois. Il semblait aimer et quand la chanson se termina, il confirma que c’était vraiment bon. Mon visage s’illumina alors que j’avais pris place sur le siège face au bureau de Jack.

-Merci !

Jack voulait rencontrer Hugh mais il voulait aussi savoir ce qu’on voulait faire de ces deux chansons. J’étais toujours très souriant.

-On aimerait en faire un single… Mais… C’est très proche de notre dernier album. Est-ce que ça posera problème ? C’est rare de sortir un single après un album… C’est souvent avant…

Seul Jack pouvait répondre à cette question. C’était lui l’as du marketing. Nous, on avait créé ces deux chansons qu’on aimerait, effectivement, sortir… Je me mordis, ensuite, la lèvre parce qu’il y avait un possible autre problème.

-Ah et… Hugh ne veut pas que son nom soit cité sur le single. Je lui ais dit que je ne pouvais pas faire ça alors il a pensé à un surnom. En gros, il ne veut pas que tout le monde sache que c’est lui qui chante. A vrai dire, il n’était pas très chaud de sortir ça en single mais je pense que je l’ai convaincu…

J’esquissai un petit sourire.

-Mais peut-être que tu pourrais le convaincre entièrement, toi, non ? Il mérite qu’on sache que c’est un bon chanteur… BleedingHeart n’aurait jamais su sortir ça sans lui.

Hugh Crusher semblait être allergique à la célébrité. C’était ce que j’avais compris, en tout cas.

J’étais vraiment très agréablement surpris par ce que me proposait BleedingHeart. Et encore plus de savoir que ce n’était pas Duncan qui chantait mais bien Hugh Crusher… Je connaissais l’acteur, mais ça faisait un bail, si je ne me trompais, qu’il n’avait plus rien fait à la télévision ou au cinéma. Il avait comme simplement disparu du paysage et voilà qu’il réapparaissait de la plus surprenante des façons. Et aussi… Dans le dernier L.A. People en date où on parlait de sa relation avec Jessica Hill et de son projet de film.

Je savais qu’il travaillait avec Victoria Hunter, mais ça avait fait très peu de bruit. Surtout qu’apparemment, il était mauvais. Ce qui était bizarre parce que je venais de l’entendre et on ne pouvait pas dire qu’il n’avait pas l’oreille musicale ! Que du contraire !

Duncan me confirma qu’il était mauvais guitariste. Mais qu’il l’était devenu pour faire plaisir à Hunter.

-Je vois… Mais s’il continue à se faire remarquer comme maintenant avec cette cassette, il ne restera pas longtemps à ce poste. Il va avoir des propositions.

J’ouvris un tiroir et en sortis le dernier L.A. People que je tendis à Duncan.

-Ce que je pense, moi, c’est qu’il est en pleine renaissance.

Apparaître dans L.A. People était un signe. Dans un certain sens.

Quant au texte que je venais d’entendre, Hugh l’avait écrit 20 ans plus tôt. Je haussai les sourcils.

-C’est très punk pourtant. Et il l’aurait écrit alors que le genre n’en était même pas à ses balbutiements ?

C’était d’autant plus impressionnant. Mais Duncan n’en resta pas là, me faisant écouter une autre chanson. Elle était aussi bonne que la première, sauf que cette fois, le texte était bien de Duncan. Je me découvrais une vraie passion pour BleedingHeart ! Pas que je n’aimais pas ce que proposaient mes autres groupes, que du contraire ! Mais BleedingHeart avait quelque chose qui prenait autant aux tripes que ce que Fireworks pouvait faire.

Je demandai alors à Duncan ce qu’il voulait faire de ces deux chansons. La réponse ne fut pas une surprise. Moi aussi, j’y avais pensé.

Je me frottai le menton.

-Je ne pense pas que ce soit un problème de sortir un single aussi vite après votre album. Au contraire, je pense que vos fans seraient contents.

Et pour BSC, que le groupe avait préféré à MTI, ce serait une preuve que notre collaboration fonctionnait on ne peut mieux !

Seul problème : Hugh Crusher ne voulait pas être cité sur le single, à moins que ce ne soit caché derrière un surnom.

-Si on sort ce single, on sera obligé de le citer, même si c’est sous un surnom, parce que vos fans vont se rendre compte directement que ce n’est pas toi qui chante.

Cependant, j’avais vraiment envie de rencontrer Hugh, de savoir quel âme tourmentée se cachait derrière des paroles aussi justes. Et Duncan pensait que je pouvais le convaincre d’apparaître en son nom…

Je souris.

-Je ne sais pas si je peux faire ce genre de miracle, mais je peux essayer. Je suis sincèrement curieux de le rencontrer. J’espère qu’il acceptera de me voir.

Je pointai le lecteur du menton.

-Je peux garder la cassette ? J’aimerais la réécouter. Et dès que j’aurais un accord avec Hugh, je vous enverrai le graphiste, pour la pochette du single.

J’avais confirmé que Hugh était bel et bien un très mauvais guitariste. Ça se voyait qu’il ne prenait aucun plaisir à jouer de la guitare et il était bien trop tendu que pour avoir la dextérité requise pour ça. Par contre, il savait chanter ce qui signifiait qu’il avait un minimum d’oreille chose qu’il était difficile à croire quand on l’entendait faire de la guitare.

Pour Jack, si l’ancien acteur continuait comme ça, il ne restera pas bien longtemps le guitariste de Victoria Hunter. J’hochai de la tête.

-C’est clair… Et, sincèrement, je crois que c’est mieux pour lui.

Mais il ne semblait pas vouloir lâcher Victoria… Pas pour l’instant en tout cas.

Jack sortit un numéro de L.A.People de son tiroir et me le tendit. C’était le L.A.People où apparaissait Hugh et où Amon Sørensen avait supposé qu’il était, à nouveau, en couple avec Jessica Hill. Pour Jack, cet article était la preuve que l’ancien acteur était en pleine renaissance. J’affichai une petite moue. C’est exactement ce que Hugh nous avait expliqué fuir. Il ne voulait plus de cette célébrité même s’il savait que sa future implication dans un film d’Hank North allait le ramener sous le feu des projecteurs. C’était pas vraiment évitable, ça…

-Ouais… C’est le cas de le dire. Même si ce qu’il y a dans cet article, c’est de la pure connerie. C’est Hugh qui nous l’a dit… Il n’est pas en couple avec Jessica Hill…

J’expliquai que Hugh Crusher avait écrit cette chanson il y a 20 ans. Ça surpris Jack étant donné que le punk n’était encore qu’à ses balbutiements à l’époque. J’hochai de la tête.

-Oui. Mais il ne l’a pas écrit pour la mettre en chanson mais pour se vider la tête, je pense. Il a tout un carnet rempli de textes et de chansons qu’il n’a jamais fait lire à personne. Je doutais qu’il se rendait compte que ça sonnait punk.

Je fis, ensuite, écouter l’autre chanson à Jack et ça lui plu tout autant. J’étais vraiment heureux que ça lui plaise. Depuis la sortie de notre album, le groupe avait repris confiance.

Il se demanda ce que nous voulons faire de ces deux chansons. Je parlai directement d’un single sans savoir si, stratégiquement, c’était une bonne idée. Mais d’après Jack, il n’y aura aucun problème à sortir un single aussi près de notre album. Je souris.

-Super !

Restait un bémol : les réticences de Hugh à paraitre sous son nom sur notre single. Je savais que juridiquement, je ne pouvais pas m’approprier son travail. De toute façon, je n’en avais strictement aucune envie. Jack confirma que l’ancien acteur devra être cité sur le single quoi qu’il arrive et peu importe sous quel nom. J’hochai de la tête.

-C’est ce que je lui ai dit.

J’avais aussi bien vu que la possibilité de sortir ça en single lui faisait peur. Il m’avait dit « oui » mais ça avait été un très petit « oui ». J’espérais, donc, que Jack pourrait entièrement le convaincre. Il comptait, de toute façon, aller le rencontrer. Il comptait, du même temps, essayer de le convaincre mais pensait bien ne pas pouvoir faire de miracle.

-Je sais que tu feras au mieux.

Il voulait garder la cassette. Je me levai de mon siège.

-Oui. Tu peux la garder. J’ai hâte de voir ce que nous proposera le graphiste !

Je souris.

-Merci, Jack.

Je pensais bien que Hugh Crusher n’allait pas rester le guitariste de Victoria Hunter bien longtemps. Pas tant parce qu’il était mauvais et que même lui-même s’en rendait compte… Mais parce que si BleedingHeart sortait cet article et que le film de Christopher North faisait un tabac, sa notoriété allait peut-être même dépasser celle qu’il avait déjà connu à l’époque de Love In L.A.

Duncan pensait que c’était mieux pour Hugh si sa carrière de guitariste était avortée par d’autres projets.

Des projets dont parlait notamment le L.A. People que je tendis au chauteur. Il m’expliqua alors que, comme souvent, ce que racontait Sørensen n’était, au moins en partie, qu’invention. Hugh Crusher ne sortait pas avec Jessica Hill.

-Peu m’importe avec qui il sort. J’espère juste que ce qu’on raconte sur le film de North est vrai. Parce que Hugh est vraiment un acteur hors pair.

Pour m’avoir fait aimer une comédie romantique… Que dis-je ?! Pour avoir transcende le genre de la comédie romantique, il fallait être plus que bon, il fallait être excellent. Et c’était ce qu’il avait fait.

Duncan affirmai que Hugh avait tout un carnet rempli de textes et de chansons qu’il n’avait fait lire à personne.

Je souris.

-Une chance qu’il en ait au moins partagé un avec vous.

On écouta la deuxième chanson et l’affaire, pour moi, fut pliée. Il fallait évidemment que je rencontre Hugh, que je lui parle et que j’achève de le convaincre de se laisser citer sur la pochette du single. Une mission qui allait peut-être être ardue.

Mais j’étais prêt à relever le défi. Parce que ce que j’avais entendu valait vraiment le coup. L.A. devait entendre ça.

Duncan se leva et prit congé, me laissant la cassette que j’allais certainement me passer en boucle le reste de la journée.

-A bientôt, Duncan. Bonjour à Drake et Faith.

Je souris.

-Et merci.