Nous y étions.

Nous étions sur la dernière ligne droit qui allait me conduire à ma liberté.

Le procès avait commencé aujourd’hui dans le palais de justice de Downtown. J’avais passé les heures avant à faire le trajet en combi sécurisé jusqu’à l’endroit où j’allais être jugé pour des crimes qui pourraient me mener à la chaise électrique. J’aurais pu avoir une mine plus sombre si je n’étais pas sûr du dénouement du procès.

Car je faisais une confiance aveugle en l’influence de Jimmy Reed. Je faisais surtout une confiance aveugle en sa volonté de ne pas finir au même endroit que moi.

Au palais de justice mon m’avait fait attendre dans une cellule avant que des flics ne viennent me cherché. On m’avait menotté pour m’escorter jusqu’à la salle d’audience. Mon avocat était déjà là ainsi que pas mal de gens. La salle était, en fait, quasi comble.

Sky était là. Je l’avais vu du coin de l’œil mais ne lui adressait aucun regard. Pas tout de suite, du moins. Je crois aussi avoir repérer Riley Raphaël et Finan Quinn. Mais comme pour Sky, je ne les avais pas regardé.

C’est menotté qu’on m’amena jusqu’à ma place à côté de mon avocat. Là, on m’enleva les menottes et je pus m’asseoir plus confortablement. Je dénotais face à tout ses gens biens habillés alors que, moi, j’avais ma tenue orange de la prison.

Face à nous trônait sur son siège l’énorme juge Earl Dorsley. Un juge que je savais corrompu. Du moins, je supposais qu’il l’était. Comment truquer un procès autrement qu’en passant par le juge ?

Mon air restait impassible.

Et le procès commença.

D’abord, on expliqua tout ce qu’il m’était reproché. C’était une mise en contexte pour bien montrer pourquoi tout le monde était ici. Proxénétisme, association de malfaiteurs, trafique de drogue, violence conjugale,… Ça faisait un paquet de choses… Toute liée d’après le procureur qui comptait bien, à l’issu du procès, que je reçoive la plus grosse peine.

Ça allait être lui mon pire ennemi pendant le procès. Et celui du juge aussi, je suppose. Quant à Dan… J’imagine qu’il allait faire ce qu’il pouvait. J’espérais qu’il sera à la hauteur.

Après la mise en contexte et tout un tas de blabla, c’est le psychiatre qui avait fait mon évaluation psychiatrique qui était monté à la barre. C’était une façon pour tout le monde de mieux comprendre qui j’étais. C’était ce qu’avait dit le procureur en tout cas.

Et le psychiatre expliqua tout ce qu’il y avait dans le rapport. Mon manque d’empathie, mon narcissisme, mes talent de manipulateur et j’en passe. Dan devait se débrouiller avec ça. Moi, j’écoutais attentivement. On parlait de moi. Tout le monde écoutait et, quelque part, ça avait quelque chose de grisant.

Après plus de blabla, un premier témoin fut appelé à la barre.

Riley Raphaël.

La petite pute. Celle qui c’était échappée. Elle venait sûrement pleurer devant la cours que j’étais le pire homme de l’univers.

Mon regard tomba sur elle alors qu’elle alla à la barre. Je ne savais pas si le procureur l’avait préparée. J’imaginais que oui.

Et je la fixais.

Je ne comptais pas la lâcher du regard. Je voulais qu’elle sache que je n’allais pas rater une miette de ce qu’elle allait dire.

C’est d’abord le procureur qui lui posa des questions. Il était de son côté bien sûr. Riley était son témoin. Alors les questions étaient plus là pour me charger plutôt que l’inverse.

Pour me faire passer pour le méchant.

Quand les questions du procureur prirent fin, ce fut à Dan de monter en scène.

Je lui jetai un regard. Celui qui voulait dire qu’il avait intérêt à assurer.

Je m’étais levé quand mon client, Ward Fleming, était entré dans la salle d’audience, tout d’orange vêtu. Quand on lui avait enlevé les menottes, lui rendant un peu d’humanité, je lui avais serré la main. Puis, nous nous étions assis, face à l’énorme Juge Dorsley.

Ward demeurait impassible, regardant les gens d’un air neutre. Il était possible que le verdict soit la chaise électrique… Mais il était bien loin de se chier dessus.

C’était comme s’il savait…

Ou comme s’il était tellement résigné que plus rien ne le touchait.

Quant à moi… j’allais faire de mon mieux pour le défendre… Parce que je n’avais aucune idée de sa culpabilité ou pas… Il pouvait très bien être le même monstre que son père, dans une version plus intelligente et donc plus dangereux.

Tout comme il pouvait être totalement innocent, simple comptable du Wild, qui s’était fait berné par des femmes avides de vengeance non justifiée.

J’allais me baser sur cette dernière hypothèse pour plaider la défense de Ward.

Le procès commença par une longue lecture de l’acte d’accusation pendant laquelle j’en profitai pour regarder du côté des témoins à venir. Je reconnus Sky Fleming, toujours mariée à mon client pour une raison qui m’échappait si Ward était vraiment coupable de ce qu’elle lui reprochait. C’était bon pour moi.

Puis il y avait la dénommée Riley qui sortait de nulle part et accusait mon client de proxénétisme et de torture. Elle me semblait des plus dépravées… A la voir, je ne ressentais aucune sympathie pour elle.

Le seul qui m’inquiétait un peu, c’était Finan Quinn. Parce que lui-même avait été accusé d’association de malfaiteurs. Cependant, si lui avait été blanchi, il n’y avait aucune raison que Ward ne le soit pas aussi.

Après l’acte d’accusation, le psychiatre fut appelé à la barre. Une fois son speech terminé, je pus me lever pour objecter. Je signalai alors au juge Dorsley que l’expertise psychiatrique de mon client était irrecevable car nullement objective. En effet, une partie de la théorie du psychiatre se basait sur une potentielle tare psychiatrique héréditaire. En gros, à cause de son père, Ward serait automatiquement un psychopathe. Mais comme je le signalai, aucune étude sérieuse ne prouvait que les enfants de personnes présentant une psychopathologie en héritaient automatiquement.

Et mon objection fut acceptée par le juge. C’était déjà un point pour nous.

Je me rassis et Riley Raphaël fut appelée à la barre pour témoigner. Le procureur posa des questions à la jeune femme qui accabla Ward comme s’il était le pire des monstres.

Quand ce fut à mon tour d’interagir avec elle, je n’y allai pas par quatre chemins.

-Mademoiselle Raphaël… Avant de rencontrer mon client, pour autant que vous l’ayez réellement rencontré, quelle était votre profession, comment gagniez-vous votre vie ? Je vous rappelle que vous êtes sous serment.

Avec Zeke, nous étions de retour de New York après avoir rêvé d’une vie meilleure. Le rêve était mort dans l’œuf tout comme Peyton Stone qui avait passé l’arme à gauche en donnant naissance à ses marmots. Mon petit ami avait donc perdu son job avant même de pouvoir en faire les preuves et nous n’avions plus de raison ni les moyens de demeurer à New York. Qui plus est, je devais témoigner au procès le plus attendu, sans aucun doute, de l’année.

Tous les matins des cinq derniers jours précédant le procès, je m’étais levée nauséeuse comme jamais et cette désagréable sensation m’avait suivi au travers de la journée, jusqu’au soir avant de se transformer soit en insomnie, soit en cauchemar. Le fait de témoigner au procès de Ward Fleming me rendait malade, littéralement ! J’en tremblais et je passais mon temps à demander à Zeke si je pouvais changer d’idée. Ils n’avaient pas besoin de mon témoignage pour condamné à perpétuité Ward ! Il y avait assez des témoignages de sa femme et de Finan Quinn pour peser dans la balance !

D’ailleurs, je me demandais si ce n’était pas de devoir raconter devant la femme ou plutôt l’ex-femme de Ward que nous avions couché ensemble qui me rendait à ce point anxieuse. Elle n’irait certainement pas jusqu’à me foutre une baffe monumentale en plein tribunal ! Puis à force d’y penser, je me disais que fort probablement qu’elle ne m’en tiendrait rigueur puisqu’elle l’avait dénoncé pour violence conjugale. Elle serait probablement compatissante et se dirait que j’ai été manipulée tout comme elle l’avait été.

Le matin du procès, j’avais vomit mes tripes au moins trois fois, cassée la fermeture éclair de mon jeans, fait sauter trois boutons de mon chemisier en tentant de le boutonner. J’avais donc dû changer de tenue et des habits qui ne faisaient pas vulgaire, je n’en avais pas des tonnes. Zeke avait eu bon de m’acheter plus d’un ensemble de vêtements, puisque j’allais peut-être devoir témoigner sur plus d’une journée mais aussi parce que le procès allait être long et que je ne pouvais pas porter tous les jours la même tenue.

Une fois sur place, j’avais été rencontré par le procureur qui voulait revalider certains points de mon témoignage puis nous fûmes tous conviés à entrer dans a salle. Je tenais la main de Zeke tout le long, je ne voulais pas le lâcher faute de quoi, je pourrais trouve run moyen de fuir, en courant jambes à mon cou ou en m’envolant, carrément !

J’écoutais attentivement tout ce qui se disait et je fuyais le regard de Ward que je sentais sur moi. Peut-être regardait-il sa femme, ou Quinn, ou un autre comme le psychiatre ayant fait son évaluation psychologique.

Il s’était écoulé un bon moment déjà avant que je ne sois appelé à témoigner. Avant de me lever, je regardais Zeke comme pour puiser un peu de courage puis je m’avançais à la barre des témoins où l’on me fit mettre la main sur la bible et de jurer de dire la vérité et rien que la vérité, ce que je comptais faire puisqu’on m’avait assuré aucune représailles. Tout ce que j’avais à faire, était de répondre aux questions qu’on me poserait.

L’interrogatoire mené par le procureur fut facile et je m’en sortie plutôt bien. J’avais tout de même les jambes molles et la gorge sèche mais je répondis avec aplomb aux différentes questions jusqu’à ce que l’homme déclare ne plus en avoir et me laisse entre les mains de son confrère qui lui, je le sentais déjà, n’allait pas me ménager.

J’allais répondre à la question quand le procureur se leva et s’objecta sur la formulation de l’avocat de la défense qu’il disait suggestive. Il expliqua que son collègue ne pouvait émettre une supposition quant à savoir si j’avais bel et bien rencontrer Ward puisque ce fait avait déjà été établi dans l’enquête préliminaire. Une fois les fais rétablis, je répondis à la question, même si je l’avais mentionné au procureur lors de son propre interrogatoire.

- Je me prostituais.

Je n’avais pas honte de le dire, de toute façon, ça avait été dit tellement de fois depuis le début de toute cette histoire que d’essayer d’enjoliver la réalité aurait été aussi stupide que mensonger.

Riley et moi avions enterré nos rêves de New York en même temps que Peyton Stone était morte tragiquement en donnant naissance à ses enfants. C’était une histoire terrible qui avait secoué le monde de la musique du monde entier. Si Howard Stone aura certainement du mal à s’en remettre, Riley et moi devions aller de l’avant et trouver autre chose pour commencer notre nouvelle vie.

Mais avant de passer à cette nouvelle vie, il fallait enterrer l’ancienne. Et dans l’ancienne il y avait mon cousin, Ward Fleming. Son procès avait lieu aujourd’hui était le stress était palpable dans le chef de Riley. Elle devait témoigner à la barre contre Fleming. C’était un poids énorme pour elle. Déjà, elle avait se retrouvé devant celui qui avait abusé d’elle dans tous les sens du terme. Elle allait devoir affronter son regard. Mais, surtout, elle allait devoir parler devant un tas de gens et un avocat qui ne lui fera pas de cadeau.

Parce que j’étais certain que l’avocat de Ward n’allait pas abandonner sans se battre malgré les preuves accablantes retenues contre Fleming.

Le procureur avait rencontré plusieurs fois Riley afin de la préparer avec le jour-j. Il tenait à gagner ce procès et allait plaider pour que Fleming reçoive la peine maximale. Soit une peine encore plus élevée que celle infligé au Boucher de Los Angeles, lui-même.

Riley avait eu peur au point où ça la rendait complètement malade. Les quelques jours précédents le procès avait été pénible pour elle et pour moi qui la voyait souffrir. Mais c’était important de passer par là. Quand Fleming sera condamnée, elle pourra enfin respirer. C’était ce que je lui disais alors qu’elle avait mainte fois demandé si elle pouvait se désister ou non.

C’était trop tard pour revenir en arrière.

On y était désormais.

Riley était repassé chez le procureur pour une dernière mise au point et puis on avait rejoint la salle d’audience. Elle était remplie autant de gens venu accompagner des possibles victimes de Ward et des gens venus témoigner.

Le dernier a entrer fut Ward lui-même. Il était accompagner de flics et était en tenue orange de prisonnier. Son avocat s’était levé pour lui serré la main après qu’on lui ait retiré ses menottes. Je serrai la main de Riley afin qu’elle ne prenne pas ses jambes à son cou. Je la connaissais. Elle pouvait parfois être une vraie anguille.

Quand Ward fut assis, le procès commença. D’abord par la liste des faits reprochés à Ward et, ensuite, avec le témoignage du psychiatre qui avait évaluer Ward et le qualifiait de psychopathe. En gros, c’était ça. Mais l’avocat de Ward se défendit bien et, le pire, c’est que le gros juge Dorsley était enclin à accepter ses objections…

Après quoi, ce fut à Riley d’aller à la barre. Je lui soufflai avant qu’elle ne lâche ma main :

-Tout ira bien.

Elle prêta, ensuite, serment et ce fut le procureur qui la questionna en premier ce qui devait la mettre en confiance étant donné qu’il était pleinement acquis à notre cause.

Mais les choses se compliquèrent quand ce fut à Maitre Anderson de se mettre face à Riley pour la questionné. Il commença par une question sur son passé objecté par le procureur mais le juge laissa quand même Riley y répondre.

Et elle y répondit en disant la vérité. Avant Ward, elle était prostituée. Ainsi, ce n’était pas Ward qui l’avait poussé dans la prostitution… Je supposais que c’était ça que voulait faire savoir Anderson… Il voulait montrer que Riley était peu crédible par rapport à son passé.

Je serrai des dents.

Ce procès allait être long et difficile…

Riley Raphaël n’avait pas l’air dans son assiette quand elle vint se présenter à la barre des témoins… D’ailleurs, dans ce cas-ci, elle était même considérée comme une victime. Je voyais sur son visage, maintenant qu’elle était plus près de moi, qu’elle portait sur son visage les marques de la lutte contre son addiction dont elle avait brièvement parlé avec le procureur lors de la plaidoirie du Ministère Public.

Et moi… Moi, j’allais utiliser ça contre elle… Sans même être vraiment sûr que mon client était innocent.

Est-ce que j’étais en train de faire une erreur ?

Ou est-ce que le système faisait une erreur ?

Dans ma tête, je m’accrochais au fait que personne n’est coupable tant que ce n’était pas prouvé. Cependant, ça me faisait un pincement au cœur d’enfoncer des gens sans même les connaître.

Fallait pas faire avocat, Anderson… Tu le savais que tu ne défendrais pas que dans anges.

J’avais donc posé ma première question à Riley Raphaël… Quelle était sa profession avant de soi-disant rencontrer Ward ? Parce que je n’étais toujours pas sûr que la jeune femme l’ait rencontré parce que celui-ci avait fait d’elle une prostituée.

Et en effet, elle répondit sans se cacher que même avant, elle se prostituait pour gagner sa vie.

Je me tournai vers le juge.

-On peut donc aisément en venir à la conclusion, Votre Honneur, que mon client n’est pas à l’origine du mode de vie de la « victime ».

Le procureur se leva.

-Objection !

Le juge Dorsley vrilla ce dernier de ses petits yeux porcins.

-Objection rejetée. Continuez, Maître Anderson.

Je souris.

-Merci, Votre Honneur.

Je regardai à nouveau Riley Raphaël.

-Vous avez accusé mon client de maltraitances s’apparentant à de la torture. Mais vous avez dit vous-même avoir été sous l’influence de la drogue à cette époque. Alors je n’aurai plus qu’une question pour vous, Mademoiselle Raphaël.

Je marquai une pause puis lançai.

-Etiez-vous en pleine possession de vos moyens lorsque vous avez accusé Edward Fleming de toutes ces atrocités ?

Témoigner contre Ward et devant lui serait sans aucun doute la chose la plus difficile que j’aurai eu à faire de toute ma vie. Bien que le procureur m’avait drillé à toute éventualité, l’avocat de Ward me rendait inconfortable. Il me semblait être un parvenu qui s’en foutait de toute la souffrance que ce monstre qu’il appelait son client avait pu nous faire subir et continuait de faire subir, même depuis le fond de sa prison.

À sa première question, il me demanda comment je gagnais ma vie avant de rencontrer Ward, si je l’avais bien rencontré. Le procureur s’étai objecté parce que l’avocat de Ward venait d’émettre une opinion hypothétique mais le juge balaya du revers de la main. Je répondis tout simplement et sans détails que je me prostituais. C’est ce qu’on m’avait demandé de faire. Pas de me prostituer ! Mais de répondre simplement aux questions.

Maitre Anderson se gargarisa alors, comme s’il venait de mettre sous lumière un fait qui allait changer le cours de l’humanité, que ce n’était pas Ward qui m’avait forcé à me prostituer ! Si je n’avais pas été devant un juge et que je tenais plus que tout à ce que ’’El Lider’’ croupisse pour le restant de sa vie en prison, j’aurais répliqué à son avocat qu’il ne fallait pas être Sherlock Holmes pour savoir quelque chose que j’avais mentionné dans ma déposition ! Au lieu de ça, je m’en mordis l’intérieur de la joue et je cherchais du regard Zeke dont je pouvais encore sentir la main sur la mienne.

Le procureur tenta tout de même une objection mais elle fut elle aussi rejetée, à croire que le juge n’en avait que faire des pitreries d’Anderson qui menait son interrogatoire comme une envie de pisser ! Je n’étais pas certaine de comprendre là où il voulait en venir surtout qu’il n’avait qu’une seule autre question pour moi.

Je l’écoutais attentivement parler de mon addiction aux drogues et faire le lien entre l’influence de ces drogues et de mes accusations entre Ward Fleming. Intérieurement, je me demandais si c’était une blague. Des policiers m’avaient rencontré, j’étais sobres et salement amochée et ils avaient recueillis mon témoignage en long et en large, à l’endroit et à l’envers et je n’avais pas changé une seule virgule cette fois, même quand j’avais protégé Finan.

Anderson était-il entrain de tenter de discréditer des policiers en fonctions ayant faits leur boulot en m’interrogeant ?

Ça y ressemblait !

- J’étais en pleine possession de mes moyens et sobre.

Il m’avait fallu encore me parler mentalement pour le pas lui cracher au visage que le mien portait encore les traces des sévices de son client et que la victime dans cette histoire-là, n’était là où il semblait le croire !

« Mon client n’est pas à l’origine du mode de vie de la victime ». Non… Mais ça n’empêchait que son client avait torturé Riley. Et bien que Riley avait un mode de vie dissolu, elle n’avait jamais demandée à être torturée.

Le procureur objecta. Mais le gros juge Dorsley rejeta l’objection me faisant faire une moue. On aurait dit que Dorsley avait une dent contre le procureur. Ce qui permis à Anderson de continuer et de semer le doute dans la tête des juré. Je savais que la défense de Ward Fleming partait du simple fait qu’il n’avait absolument jamais rencontré Riley… Il niait tout : son implication avec les New Soldados, les tortures sur Riley, la violence conjugale contre sa femme.

Absolument tout. Sa défense c’était : je n’ai rien fait, je suis un comptable pour le Wild et ce que disent les gens sur moi viennent d’ancienne rancœurs, de délires ou du fait que je suis le fils du Boucher de Los Angeles.

Donc, Anderson ne pouvait pas attaquer Riley sur le fait qu’elle avait tué quelqu’un dans le QG des New Soldados et, quelque part, c’était un avantage…

Anderson continua son interrogatoire en demandant si Riley était en plein possession de ses moyens quand elle avait porté plainte. Je levai un sourcil quand il disait que c’était sa dernière question. Il avait longuement sous-entendu que Ward n’avait, de toute façon, jamais rencontré Riley.

Et Riley clama être en plein possession de ses moyens quand elle avait porté plainte. Les policiers avaient pu s’en rendre compte. Même si j’imaginais bien qu’Anderson se fera un plaisir de démolir le rapport de police…

Riley restait clame. Elle devait sûrement prendre sur elle pour garder son sang-froid alors qu’Anderson cherchait à la décrédibiliser. Le procureur l’avait bien mis en garde là-dessus.

Elle était forte et je la soutenais de mon regard alors qu’Anderson déclara ne plus avoir de questions. Je ne savais pas ce qu’il avait derrière la tête ni qu’elle était sa tactique. J’étais un bon agent mais les tactiques d’avocats, je n’y connaissais absolument rien.

Quand Riley quitta la barre et me rejoignis, le l’embrassai furtivement avant de la serrer contre moi.

-Tu a géré.

C’est ce que je lui soufflai.

-Bientôt tout sera terminé.

Et on pourra aller de l’avant.

La presse locale ne parlait que de ça… Le procès de Ward Fleming avait lieu aujourd’hui. J’allais être un acteur de cet évènement en venant témoigner à la barre. Je devais avouer que je n’étais pas à l’aise… Pas parce que j’avais peur de parler des méfaits de Ward mais j’avais peur que les pires choses à mon sujet soient étalée devant tous les gens présents dans la salle.

Parce que j’étais sûr que l’avocat de Ward n’allait pas me rater… C’était son job… Je ne lui en voulais pas. Mais je savais que dans les prochaines heures, j’allais le maudire plus d’une fois.

Je m’étais habillé en costard pour l’occasion. Il fallait que je sois présentable. Même si j’étais loin d’être à l’aise dans ce genre de tenue. Mais il le fallait. Ce n’était qu’un mauvais moment à passer.

Tiff m’avait accompagné. Je lui en étais vraiment reconnaissant. Elle était toujours avec moi dans tous les combats. On était plus qu’un couple. On était de véritables partenaires. Et c’est main dans la main qu’on entra dans le tribunal. Je stress augmenta quand je vis qu’il y avait bien plus de personnes à l’intérieur que je ne l’aurais imaginé. J’avais même serré un peu plus la main de Tiff quand on s’était avancé vers notre place réservée aux témoins. Dans le tas s’ajoutèrent très vite Riley Raphaël qui était accompagnée de Keenan… Sky n’était pas loin non plus avec Sigurd. J’aurais voulu aller leur dire bonjour mais la situation ne s’y prêtai probablement pas alors je me retins. Ça faisait bizarre de ne pas saluer Sigurd qui, désormais, était un membre important et indispensable de The Warriors depuis notre concert au Hollywood Bowl.

C’est après que Ward arriva menotté. Il avait une sale tronche. C’est la première chose qui me sauta aux yeux. Probablement à cause de sa barbe de plusieurs jours et de son teint blafard. Il faut dire qu’il n’y a certainement pas beaucoup de soleil dans les cellules de Saint Quentin…

Après que Ward fut installé, le procès commença avec d’interminable explications des chefs d’accusations et de ce que l’enquête avait mis en lumière. Ça faisait pas mal de chose et j’étais certain que Ward n’allait en aucun cas s’en sortir vivant. Surtout que le rapport du psychiatre en rajouta une couche vu qu’il qualifiait Ward de psychopathe. S’en était un… Quoi que Maitre Anderson essayait de nous faire croire. Car il s’évertuait à discréditer le rapport… Alors que… Il ne fallait pas forcément fréquenter Ward longtemps pour se rendre compte que ce type à un grain.

Sauf s’il veut vous faire croire le contraire. C’était hélas ce qui était arrivé à Sky et bien d’autres personnes.

C’est après tout ça que le premier témoins fut appelé à la barre. C’était Riley. Et elle se plaça à la barre après avoir prêté serment. Je jouai nerveusement avec la main de Tiff alors que Riley se faisait interroger par le procureur qui mis en avant toutes les tortures subies par Riley à cause de Ward. Je déglutis me sentent coupable parce que c’était notre plan qui avait conduit Riley à subir tout ça. Sans ça, elle ne se serait jamais fait capturée par Ward… Elle n’aurait jamais subi tout ça.

Je m’en voulais…

Anderson intervenait de temps en temps et ses objections étaient souvent acceptées par le juge… Je tiquai à chaque fois alors que le procureur n’avait pas tant de chance.

Puis ce fut à Anderson de poser des questions. La première me fit rouler des yeux. Le passé de Riley l’avait peut-être conduit à rencontrer Ward mais pas à être torturée par lui… Mais Riley resta calme et répondit par la vérité sans rien ajouter. Le procureur m’avait aussi rappelé hier qu’il fallait s’en tenir à des phrases simples et courtes qui ne laissait pas place à l’interprétation.

La question suivant me fit soupirer. Ouais… Riley était considérée comme une droguée. Elle n’avait pas nié ce fait quand le procureur l’avait questionné mais elle déclara qu’au moment de faire sa déclaration à la police, elle était sobre.

C’était la dernière question d’Anderson et ça me fit lever un sourcil.

-C’est tout ?

C’est ce que je soufflai à Tiff… J’espérais qu’Anderson me pose aussi peu de questions… Bien que Anderson et Ward juraient que Ward n’avait jamais rencontré Riley. Que tout ça était un délire d’une femme en manque d’attention. Alors ils continuaient sur leur ligne de défense alors qu’Anderson avait simplement remis en avant ce qu’il voulait que les jurés sachent de Riley : c’est une prostituée droguée qui délire.

Quand Riley quitta la barre ce fut moi qui fut appelé. Je dégluti avant de laisser un bref baiser sur les lèvres de Tiff.

Je prêtai serment avant de recevoir les questions du procureur. Je parlai, donc, du passé de Ward en tant que Los Diablos mais, aussi, du fait que, récemment, il avait été le chef des New Soldados. Tout le monde savait que même si je faisais partie de The Warriors, j’avais continué à être Los Diablos pendant un moment. J’avais été condamné pour ça.

Je décrivis, ensuite, Ward comme un homme violent et ce depuis aussi loin que je me rappelle.

Je tenais bon redoutant, tout de même, le tour d’Anderson.

C’est main dans la main avec Finan que l’on traversa la foule massée devant le tribunal de Los Angeles pour le procès le plus attendu de l’année. Personne vivant ici et même en ne s’intéressant pas du tout à ce genre de nouvelle, pouvait ignorer ce qui se passait aujourd’hui tant on ne parlait que de ça.

J’étais très nerveuse pour mon gros nounours qui allait devoir témoigner et je redoutais que les questions qui lui seraient soumises puissent raviver son passé sur lequel nous tentions tant bien que mal de tirer un trait. J’avais cependant bon espoir qu’après aujourd’hui, nous pourrions aspirer à ce que cela devienne réalité. Nous pourrions ensuite nous concentrer sur notre groupe et notre famille qui avaient tous les deux beaucoup souffert de nos diverses tourmentes.

On trouva nos places et, assise bien droite, je regardais discrètement tout autour de nous pour trouver des visages familiers. Il y avait Sigurd et Sky. En voyant la jeune femme, je fus surprise de constater que je n’étais toujours pas fixée sur ce que je pensais d’elle. Finan me disait qu’elle avait été une bonne amie, presque une petite sœur du temps qu’ils avaient partagés à l’orphelina mais qu’ils s’étaient perdus de vue ensuite. Il pensait qu’elle avait été embobinée par Ward, je voulais bien le croire. Je me souvenais cependant avec quelle agilité et malice elle s’était immiscée dans ma tête pour semer encore plus de confusion au sujet de Finan. J’espérais que sa relation avec Sigurd ferait ressortir le meilleur d’elle et non l’inverse car le jeune homme faisait maintenant partie de notre groupe, ma famille et quiconque touchait à ma famille allait me trouver sur son chemin.

Le procès débuta avec le dépôt du rapport psychologique qui traçait le sombre portrait de Ward Fleming. J’en frissonnais même en me disant que ce simple document serait suffisant pour faire enfermer le psychopathe derrière les barreaux pour le restant de ses jours.

J’analysais mentalement Maitre Anderson en me disant qu’il mettait beaucoup d’effort dans une cause perdue. Il utilisait tout ce qu’il pouvait pour discréditer le rapport et, bien que le juge semblait pencher en sa faveur, je me disais que personne ne se laisserait dupé par les grands sparages de l’avocat.

Ce fut ensuite au tour Riley Raphaël de se présenter à la barre et de témoigner. On voyait sur son visage des traces de ce qu’elle avait vécu.

- Elle a dû souffrir, pauvre fille !, murmurais-je à Finan alors que la jeune femme témoignait avec aplomb.

Le procureur faisait du bon boulot en mettant en lumière tout ce que la sœur de Bailey North avait traversée, un véritable cauchemar ! Elle avait beaucoup de chance d’être encore en vie. Dans la salle, plusieurs étouffaient difficilement des sons trahissant leur stupeur devant autant d’atrocité. Le témoignage de Riley était difficile à entendre mais elle restait calme et en pleine possession de ses moyens, même quand l’avocat de Ward, quand ce fut son tour, tenta de la discrédité. Il empruntait un chemin différent que son collègue contre qui il argumentait aujourd’hui, en évitant soigneusement de parler des New Soldados. Je ne devais pas être la seule dans la salle à froncer des sourcils en ne comprenant pas pourquoi le juge refusait d’amblée les objection du procureur.

Je regardais la jeune femme se diriger vers sa place, quand on la libéra de son rôle de témoin, et rejoindre celui qui devait être son amoureux dans la salle. Elle se blottit tout contre lui, elle était toute pâle, elle me semblait fragile, comme une poupée de porcelaine.

Ce fut Finan ensuite qui dû aller témoigner. Il m’embrassa furtivement avant de se lever et de se diriger vers le banc des témoins où il prêta serment de ne dire que la vérité, main sur la bible. Mon gros nounours resta concis dans ses réponses, comme le procureur le lui avait demandé lorsqu’ils s’étaient rencontrés peu avant l’ouverture du procès. Il parlait clairement, calmement et je croisais les doigts pour qu’il en soit encore ainsi quand Anderson prendrait le relais.

Riley fuyait mon regard. Pourtant, je ne cessais de faire peser le mien sur elle. Silencieux, le regard neutre, je l’écoutais répondre aux questions du procureur.

Tout ça avait été préparé. C’était clair et net. Elle expliquait qu’elle avait été prostituée pour moi et que j’avais fini par la torturer. Ce n’était pas de la torture gratuite, hein ! Elle s’était foutue de moi et pensait pouvoir me tuer. Jimmy Reed, Alonso Vega, Finan Quinn, mon propre père et j’en passe. C’est tant de gens qui avaient essayé de me tuer. Des gens d’un bien autre calibre qu’une petite pute comme Riley. Ils avaient échoués alors qu’est-ce qui avait fait pensé à Riley qu’elle aurait pu réussir ?

Personne ne me tue.

Même pas la chaise électrique. C’est ce que tous ces gens dans la salle allaient constater à l’issue de ce procès.

Mais avant ça, j’écoutais. Et quand ce fut à mon avocat de se lever mon regard était toujours resté neutre. Il posa une question à Riley censé prouvé, j’imagine, que ce n’est pas moi qui lui avait fait choisir le chemin de la prostitution. Il soulignait, d’ailleurs, que je n’avais sans doute jamais rencontré Riley de ma vie.

C’était ce que j’avais dit à la police. C’était ce que j’avais dit à mon avocat. C’est ce que tout le monde devait croire. Que Riley n’était qu’une petite fabulatrice.

Riley répondit par la vérité et mon avocat posa une ultime question. Je ne bronchai pas même si je trouvais que deux questions c’était peu pour assurer ma défense… Mais qu’importe. Je vais quand même gagner.

Parce que Jimmy Reed s’en était sûrement assuré.

Ainsi Riley affirma être en pleine possession de ses moyens quand elle avait témoigné. Mouais… De ce que j’en sais elle était quasi shootée H24 donc, sincèrement, j’en doutais. Mais Riley n’était pas à un mensonge près, pas vrai ? Elle n’arrêtait pas de mentir. Bible ou pas c’était plus fort qu’elle.

Après ça, s’en fut terminé du témoignage de Riley. Quand elle quitta la barre, je la toisai la suivant du regard jusqu’à-ce qu’elle aille se réfugier dans les bras d’un homme. Keenan ? Peut-être. A moins que Riley ait trouvé un autre couillon pour vivre à son crochet.

Elle est comme sa sœur. Quoi qu’elle en pense. Sauf que Bailey avait été plus maligne en allant chercher un plus gros portefeuille.

Je ne dis rien à mon avocat. Si je n’avais pas eu Jimmy Reed dans ma poche, j’aurais remis en cause sa tactique. Mais le dénouement ne dépendant pas de la qualité de mon avocat, ça allait.

Ce fut, ensuite, Finan qui fut appelé.

Il se leva après avoir embrassé Tiffany Quinn. J’avais suivi dans L.A.People qu’ils avaient eu un enfant. Un petit roux qui ressemblait à sa mère. Je suivis des yeux l’Irlandais qui finit par prêter serment et commencer à répondre, lui aussi, au question du procureur.

C’est mon passé de Los Diablos qui fut alors mis sur le tapis ainsi que, plus récemment, celui de chef des New Soldados. Finan devait s’exposer pour me descendre et je pouvais voir qu’il n’était pas à l’aise.

Restait à voir ce qu’aller dire Anderson.

On voyait sur le visage de Riley Raphaël les ravages de la drogue bien plus que ceux des soi-disant sévices infligés par Ward. Est-ce que tout ça était vrai ou non ? Même si ça me turlupinait, ce n’était pas mon rôle de déterminer qui mentait et qui disait la vérité. Mon job à moi, c’était de défendre Edward Fleming coûte que coûte.

Je me détestais un peu de descendre des gens sans avoir réellement de preuve légitime. Mais comme l’avait dit mon associé, on ne devient pas un Maître Louis en défendant des gentils.

Riley affirma que lorsqu’elle avait témoigné contre Ward, elle était en pleine possession de ses moyens et sobre. Je la regardai quelques secondes dans les yeux, l’air dubitatif, sans rien dire.

Puis j’ouvris la bouche.

-Peut-être… Peut-être qu’au moment de témoigner, vous étiez en pleine possession de vos moyens. Mais on peut aisément croire que tout ce que vous avez dit, étant donné vos antécédents de toxicomane, n’est que le résultat d’un délire de plus.

Je haussai les épaules.

-Et peut-être que vous y croyez réellement.

Mon regard se porta sur Sky dans l’assistance.

-Et Dieu sait que vous n’êtes pas la seule fabulatrice dans ce tribunal.

-Objection !

Dorsley émis un grognement agacé.

-Maître Anderson, en avez-vous terminé avec mademoiselle Raphaël.

Je hochai la tête.

-Oui, votre Honneur.

Riley quitta la barre pour laisser place à Finan Quinn. Le temps que le procureur l’interroge, j’allai me rasseoir à côté de Ward.  Il ne fit aucun commentaire et moi non plus. Il avait toujours l’air aussi sûr de lui.

Une fois que le procureur en eut terminé avec l’Irlandais, je me relevai et m’approchai de la barre.

-Nous sommes bien d’accord, Monsieur Quinn, que vous avez donc fait partie des Los Diablos pendant des années. Et pour cela, vous avez écopé de la peine minimale. Maintenant, expliquez-moi pourquoi mon client, qui a admis avoir eu le même passé délinquant chez les Los Diablos, ne pourrait pas bénéficier de la même clémence ?

-Elle a souffert…

C’est ce que je soufflai à Tiff alors que Riley témoignait. Je voyais totalement bien Fleming faire subir à une femme ce que Riley était en train de décrire devant la cour. Il n’avait aucune pitié peu importe qui il avait en face. Je le savais depuis longtemps mais je avais eut la confirmation quand Fleming a assassiné toute la famille de Lyna…

Anderson avait, ensuite, posé uniquement deux questions à Riley. Il cherchait à la décrédibiliser en mettant en avant son passé de prostituée et de junkie. Malgré ça, Riley restait clame. Elle ne se laissait pas emporter.

Encore une fois, Anderson remis en cause la santé mentale de Riley au moment des faits. D’après lui, elle avait tout fabulé. Je roulai des yeux. Je savais que c’était son rôle… Mais il ne fallait certainement pas beaucoup d’âme pour faire ce job.

Il visa alors quelqu’un d’autre dans l’assemblée. Probablement Sky. Je fronçai les sourcils et fut rassuré de voir le procureur réagir bien que le juge ne semblait jamais vraiment vouloir faire taire Anderson.

Quand cette mascarade fut terminée, ce fut à moi de me présenter à la barre. J’avais commencé par répondre aux questions du procureur de la manière dont il m’avait demandé de répondre. J’essayais de rester calme et clair.

Quand le procureur céda sa place à Anderson, je toisai ce dernier. Il n’était pas question que je baisse le regard. Je comptais lui montrer que je n’avais pas peur quelque soit la question qu’il posera.

J’écoutai la première question. Il parla de ma peine et compara ça avait les méfaits de Ward. Je levai un sourcil assez surpris par la question.

-Parce qu’il y a une différence significative entre être membre des Los Diablos et être le chef des New Soldados. Ward a pris la tête d’un réseau entier de prostitution et de trafic de drogue… J’estime que de frapper un homme dans un bar est moins grave que ça. J’ai payé pour ce que j’ai fait à cet homme. Mais je ne vois pas vraiment où se trouve le point commun entre ce que j’ai fait et ce que Ward a fait.

Ce fut bientôt au tour de Finan Quinn de se présenter à la barre. Lui n’avait pas de passé de junkie, ce qui en faisait théoriquement un témoin plus fiable. Cependant, son passé jouait contre lui. Il avait été un Los Diablos pendant des années…

Cependant, je connaissais la musique de The Warriors et Finan était indéniablement quelqu’un d’intelligent. Ça se ressentait dans les paroles de ses chansons que j’écoutais avec grand plaisir. Du coup, ça me faisait un peu mal de devoir l’enfoncer pour sauver les miches de Ward.

Mais bon, encore une fois, c’était mon job. Et je devais oublier que j’avais une âme, des hobbys, des gens que j’aimais… Bref, je devais oublier que j’étais humain.

Et si avec quelqu’un comme Riley Raphaël, qui ne signifiait rien pour moi, c’était facile. Ça l’était moins vis-à-vis de quelqu’un qu’on admirait.

A ma question, Finan répondit calmement et posément. Il fit la différence entre être membre d’un gang et chef d’un gang… Ce qui me fit faire une moue dubitative. Heu… Là, il me décevait un peu. Faire partie d’un gang, c’est faire partie d’un gang. J’imaginais bien que Finan, parmi les Los Diablos, n’avait pas fait que vendre des petits gâteaux.

Il disait que le crime qu’il avait commis n’était pas grave comparé à ce qu’avait fait Ward.Et il souligna qu’il avait payé pour ça.

Je pris une grande inspiration.

-Monsieur Quinn. Vous avez fait partie des Los Diablos pendant des années… Et je doute fort que sur toute votre « carrière » de Los Diablos, vous n’ayez commis que le crime pour lequel vous avez été pris, jugé et condamné.

Je me tournai vers les jurés et écartai les bras.

-Allons-nous vraiment croire que la vie de Los Diablos est moins violente que celle d’un New Soldados ?

Je me retournai vers Finan Quinn.

-Monsieur Quinn… Dans quelles circonstances avez-vous connu Riley Raphaël et qu’est-ce qui vous a conduit à vous liguer contre mon client en justice ?

Maitre Anderson s’était amusé à comparer ma situation à celle de Ward… Je n’avais jamais été chef de gang. Je n’avais jamais torturé personne. Je n’avais jamais prostitué personne. Alors, je trouvais qu’il y avait une différence significative entre ce qu’avait fait Ward dans sa vie et moi.

Je ne suis pas un serial killer. Il l’est.

Je tentai d’exprimer ça du mieux que je le pouvais. Le procureur m’avait dit que j’allais certainement être attaqué sur mon passé de Los Diablos… Mais que je devais garder en tête de faire des réponses courtes et claires.

Ce n’était pas évident.

Parce que la situation était complexe. Parce que beaucoup de gens classent absolument tous les criminels dans la même case. La merde ne se hiérarchise pas, parait-il…

J’avais tenté de suivre le conseil du procureur avec ma première réponse. Je vis bien la moue d’Anderson mais je ne bronchai pas. Il mit en avant le fait que, durant ma carrière de Los Diablos, je n’avais pas commis que le crime pour lequel j’avais été jugé…

Le procureur ce leva.

-Objection ! La défense suppose des faits non prouvés.

Je gros juge Dorsley grogna :

-Rejeté. Continuez Maitre Anderson…

Quoi ? C’est sérieux ça. Je tiquai alors qu’Anderson se tourna vers les jurés pour se demander si les Los Diablos sont vraiment moins violent que les New Soldados… Ce n’était pas moi qu’on jugeait aujourd’hui, que je sache !

Mais je ne dis rien. Il ne s’adressait pas à moi.

Il se retourna pour, enfin, me poser une question. C’était sur Riley Raphaël. Je fixai l’avocat de Fleming dans les yeux.

-Je l’ai rencontré quand elle a voulu rejoindre les Los Diablos. C’est moi qui l’ai approuvée.

J’avais dit ça aux flics aussi. Mais Riley et moi avions le droit de parler sans être poursuivit car les flics voulaient de plus gros poissons.

Quant à son autre question… Ça ressemblait à un piège.

-Parce que j’ai une femme, deux enfants… J’ai quitté les Los Diablos. Je ne pouvais pas laisser se procès se passer sans parler. Et ça même si ça expose mon passé peu glorieux.

Je lâchai l’avocat du regard pour fixer Ward.

-Si Ward Fleming est jugé aujourd’hui c’est parce que, enfin, des gens ont bien voulu parler. Je n’ai pas eu peur de parler. Je veux qu’il le sache.

J’avais peut-être été trop loin… Je n’en savais rien.

Je ne sus me retenir de lever un sourcil assez étonné quand le juge rejeta l’objection du procureur… Parce que je savais que je dépassais largement les limites de l’acceptable dans ma plaidoirie. J’aurais du être muselé par Dorsley, mais ce n’était pas du tout le cas !

Plus ça avançait, plus j’avais l’impression d’avoir déjà le juge dans ma poche.

J’avais donc continué quand on m’y avait autorisé. Un rien ébranlé moi-même, mais je n’en laissai rien paraître.

J’avais posé à Finan Quinn une question sur un point qui restait flou dans tout ce qui avait été dit jusqu’ici : le lien entre le chanteur et la prostituée…

Finan répondit franchement, sans vraiment s’attarder ou s’expliquer.

-Vous l’avez « approuvée » ? Qu’est-ce que ça veut dire ?

En tant que prostituée ? Que dealeuse ? En posant la question, je mettais en avant, tout du moins je l’espérais, que le membre de The Warriors, qui avait été largement gracié lors de son procès, ne valait pas vraiment mieux que Ward Fleming.

-Approuvée en tant que quoi ?

Je vrillai Finan du regard… Néanmoins… je n’étais un tueur dans mes plaidoiries que lorsque j’étais persuadé de l’innocence de mes clients. Et ce n’était pas vraiment le cas de Ward… Ce qui faisait que je doutais fort de faire vraiment peur à Finan…

Quand je lui demandai ce qui l’avait amené, avec Riley Raphaël, à se liguer contre Ward, il mit en avant son rôle de mari et père de famille. Même s’il parla de son passé qui n’avait rien de reluisant, c’était un point sur lequel je voulais appuyer.

-Et qu’est-ce qu’il se passera, Monsieur Quinn, lorsque quelqu’un sortira du bois pour parler de VOS propres méfaits ? Quand quelqu’un osera parler ?

Je me tournai vers l’audience.

-Monsieur Quinn désirera autant que mon client avoir droit à une défense digne de ce nom ! Il espérera sans doute pouvoir s’en sortir aussi facilement que la première fois !

Je m’adressai maintenant au juge.

-Mon client, Votre Honneur, est lui aussi père de deux enfants. Des enfants qui lui ont été odieusement retirés suite aux accusations qui sont à l’ordre du jour aujourd’hui. Et comme Monsieur Quinn, Edward Fleming a fait son possible pour trouver un emploi légal ! Encore une fois, je vous le demande ! Quelle est la différence entre Quinn et Fleming ?

Je frappai une fois dans mes mains.

-J’en ai fini avec le témoin, Votre Honneur. Mais pensez-y.

Quand le juge rejeta l’objection du procureur, je tiquai légèrement. Mais je devais rester calme. Il ne fallait pas que je me fasse déstabiliser. Tout ça c’était du show. Je faisais confiance aux jurés pour comprendre que Ward Fleming méritait d’être condamné.

J’avais répondu à la question sur le comment je connaissais Riley… Mais j’étais resté plutôt flou et, évidemment, Anderson voulu en savoir plus.

-Ça veut dire que j’ai approuvé Riley comme membre des Los Diablos… Pour dealer… Les Los Diablos ne font que dans le deal de drogue.

Je soulignai ça parce que je voyais bien qu’Anderson cherchait à montrer qu’il n’y avait aucune différence entre moi et Ward… Sauf que même entre les New Soldados et les Los Diablos il y avait des différences significatives. Les New Soldados faisait dans le trafic de drogue et la prostitution… Les membres étaient sélectionné après un combat sur un foutu ring… Ils se complaisaient dans le guerre de gang. Les Los Diablos dealaient… Je ne dis pas qu’ils sont des anges. Ils ne l’étaient pas… Mais je trouvais qu’ils avaient un semblant de morale, eux au moins.

Maitre Anderson me vrillait du regard mais je soutenais son regard. Je n’allais pas flancher parce qu’il me regardait un peu intensément. J’en avais vu d’autres. Et des gens qui faisaient beaucoup plus peur que l’avocat de Fleming.

La question suivante était plus complexe mais je mis en avant qu’il était temps que quelqu’un parle contre Ward. Que je ne regrettais pas mon geste. Que si Sky et Riley avaient décidé de parler, je ne pouvais pas les laisser aller seules au front.

L’avocat demanda ce qui se passera quand quelqu’un sortira du bois pour témoigner contre moi. Je lançai un bref regard au procureur mais il s’était déjà levé pour lancer :

-Objection ! Spéculation.

Le juge Dorsley qui avait clairement l’air de se faire chier fixa le procureur avant de dire de sa grosse voix :

-Retenu.

Ah quand même ! Mais Maitre Anderson s’était déjà tourné vers les gens présents dans la salle y alla de son commentaire comme si ma réponse à sa question n’avait pas d’importance. Il disait que si je me retrouvais dans la même situation que Ward, je voudrais, aussi m’en sortir facilement.

Mais je n’avais pas fait tout ce qu’avait fait Ward.

Mais je me tus alors qu’Anderson s’adressa au juge. Il mit en avant mes enfants. Il fit le parallèle avec les enfants de Ward qu’il ne pouvait plus voir. Je secouai la tête et me retins de répondre à la question rhétorique d’Anderson.

J’étais différent de Ward ! Point à la ligne !

Anderson clama qu’il en avait terminé. Je soupirai et me levai pensant ne pas forcément avoir été à la hauteur. Je rejoignis Tiff et soupirai avant de lui souffler :

-Je crois que je n’ai pas géré…

Mes lèvres se pincèrent… J’avais l’impression d’être dans une foutue pièce de théâtre… Ou dans un très mauvais film.

C’était maintenant au tour de Sky… J’espérais qu’elle aura plus de chance que moi.

J’étais attentive au témoignage de Riley Raphaël. La jeune femme parlait clairement et demeurait concise c’était la meilleure attitude à adopter. Le procureur l’avait bien préparé, il en avait fait de même avec Finan. L’avocat de Ward Fleming semblait cependant avoir la faveur du juge qui ne relevait aucune des objections du procureur. Pourtant, Maitre Anderson dépassait outrageusement les limites en y allant d’opinions à peine voilées en posant ses questions. Je serrais des dents en sentant en moi l’envie de me lever et de demander si quelqu’un allait mettre fin à ce cirque à un moment ou à un autre.

Ce fut ensuite au tour de Finan de se présenter à la barre des témoins. Mon cœur palpitait désagréablement et battait dans mes tempes. Mon gros nounours s’en tira très bien avec le procureur, évidement puisqu’ils étaient dans la même équipe si je puis dire ainsi alors qu’Anderson lui, tentait le tout pour le tout pour faire innocenter son client. Un client qui demeurait impassible dans le box des accusés, comme s’il regardait un train passer.

Les questions d’Anderson s’orientaient vers le passé de Finan, un passé pas si lointain que ça quand il était un membre important des Los Diablos. Là encore, je serrais les poings en me retenant de mon mieux de me lever et de m’exclamer à savoir si nous étions ici pour faire le procès de mon époux, un procès qui avait déjà eu lieux et duquel il en était ressorti condamner ou bien si nous étions ici pour faire celui de Ward Fleming !

Mon regard croisa celui de Sigurd. Il devait redouter le contre interrogatoire de Sky autant que je vivait très mal celui de Finan. Ça ne faisait aucun sens la façon avec laquelle Anderson surfait entre médisance et opinion personnelle pour faire valoir son point alors que le procureur lui, se faisait constamment rappeler à l’ordre.

Quand Anderson demanda en tant que quoi Finan avait dû approuver Riley, je contenu difficilement une exclamation de dégoût. Finan avait peut-être des défauts et il n’avait pas toujours su tenir ses promesses mais il m’était fidèle ! De ça, j’en avais aucun doute et je ne douterais jamais de lui.

À la question suivante, un miracle se produisit ! Le juge accepta l’objection du procureur et remis Anderson a l’ordre. Cependant, ça n’empêcha pas Anderson de faire son show en se tournant vers nous dans la salle et de spéculer sur le possible sort réserver à son client.

Finan fut libéré et me rejoignit avant de me murmurer qu’il pensait ne pas avoir assurer.

- T’en fait pas… Ce n’est pas que vous ne gérez pas, c’est le juge qui mange dans la main d’Anderson et lui il en profite largement ! Il ne fera qu’une bouchée de Sky !

J’anticipais mal la suite pour la jeune femme, nouvelle petite amie de Sigurd. Je posais ma tête contre l’épaule de mon gros nounours et j’entrelaçais nos doigts alors que Sky, maintenant devant la cours, jurais de dire que la vérité, main sur la bible. /div>

C’était à Quinn de passer à la casserole et je me délectais d’avance de voir comment il allait se débrouiller. Après une fabulatrice, comme le disait si bien Anderson, on avait le droit à un criminel condamné. Heureusement que les témoins avaient chacun un passé douteux sinon, je me demandais bien comment le juge allait faire pour truquer les choses sans que ça se voix.

Bien que pour le moment, on voyait clairement qu’il avait une dent contre le procureur… Ou qu’il aimait beaucoup mon avocat. Et j’aurais trouvé ça étrange si je ne savais pas que les débats étaient truqués d’avance.

Anderson lança les hostilités en décrédibilisant Quinn. Il mit en avant son passé similaire au mieux. Il se demandait en quoi je ne pourrais pas recevoir la même clémence que Quinn à son propre procès. Quinn qui avait, d’après ce que j’en savais, eut le droit à être défendu par Maitre Louis. Il faut dire que j’imaginais bien que MTI et Samantha voulait qu’il s’en sorte le mieux possible et qu’ils avaient sorti leur portefeuille pour ça.

Comme quoi, lui et moi, on est vraiment pas si différent. Il avait été Los Diablos. Moi aussi. Il avait tué. Moi aussi. Il avait fait une erreur. Moi aussi. Il avait utilisé ses puissantes ressources pour s’en sortir. Moi aussi.

C’était ironique, non ? Surtout quand on voyait, là, Quinn s’évertué à dire que lui et moi on était pas les mêmes.

La seule différence entre Jimmy Reed et moi et entre Finan Quinn et moi c’est que, moi, je m’assume !

Quinn, devant la cour, hiérarchisait le mal. Los Diablos c’est moins pire que chef des New Soldados. Trafic de drogue c’est moins pire que prostitution. Soyons honnête, tout est relatif. Je donnais des emplois à toutes ses filles qui n’en trouveraient pas ailleurs tellement elles sont à la masse. Suffisait de voir Riley. Quand je l’ai connue, elle n’avait aucune envie de s’en sortir. Elle n’avait même pas envie d’être une pute douée. En gros, elle n’était bonne à rien. Et en voulant éviter de devenir comme sa sœur, elle avait fait exactement la même chose. Suffisait de la voir accrochée à son petit ami qui devait être le fameux Keenan.

Pendant que Dorsley s’amusait à rejeter les objections du juge, Finan, lui, pataugeais dans ses explications à la con. Il expliqua avoir voulu parler parce qu’il avait une femme et deux enfants. Sortez les violons ! S’il avait parlé ce n’est pas pour ça mais parce qu’il me vouait une haine sans borne et qu’il avait vu une opportunité se présenté.

Celle qui avait eu les couilles (ou qui était complètement inconsciente) dans l’histoire, c’était Sky.

C’est elle qui aura failli détruire le terrible Ward Fleming.

En vain, bien sûr… Mais elle aura au moins eu le courage d’essayer. Sûrement parce qu’elle avait moins à perdre que Reed, Quinn, Vega et Raphaël. Sans compter Stone qui, lui, n’avait même pas témoigné. Il faut dire qu’il avait une femme à enterrer. Comme quoi le karma frappe tout le monde.

Je ricanai légèrement jaune quand Quinn lança que si j’étais jugé aujourd’hui c’est parce que des gens biens avaient voulu parler.

C’est la plus grosse connerie que j’ai entendu aujourd’hui.

Riley a tué deux personnes dont une pute innocente. Finan a tué deux personnes de sang-froid et éborgné mon second. Sky a tiré dans les couilles de son ex avant de me laisser l’achever sans compter la fois où elle avait psychologiquement torturé Tiffany Quinn.

Finan devrait revoir la définition de « gens biens ». Je pensais que c’était moi qui avait du mal avec la frontière entre le bien et le mal…

Anderson finit par aller un peu trop loin ce qui fit que le juge dû tout de même approuvé une objection du procureur.

Anderson finit par conclure en mettant en avant mes enfants que je comptais récupérer dans une prochaine bataille judiciaire. Mais avant, il faudra que je trouve une nouvelle carrière.

Anderson arrêta ses questions et c’est un Quinn tout penaud qui rejoignis sa belle.

Ce fut alors au tour de Sky.

Elle se leva et c’est là que je remarquai qu’elle était accompagné de ce foutu Sigurd. Je tiquai alors qu’elle se présenta devant le juge pour prêté serment. Quand ce fut fait et qu’elle prit place à la barre, je la fixai jouant exprès avec mon alliance que je tournais sur mon doigt. Une alliance que j’avais toujours parce que Sky n’avait en rien demandé le divorce.

Ça allait jouer contre elle.

Je le savais.

Elle se mit alors à répondre aux questions du procureur… Sa voix m’avait manqué malgré tout.

Quinn répondit qu’il avait « approuvé » Riley en tant que dealeuse. Mon dieu que c’était vertueux de sa part ! Je le regardai en faisant la moue, un peu dépité. Je ne savais pas quoi penser de ce procès.

Je finis par continuer, cherchant les limites et les trouvant ! Le procureur objecta et le juge retint l’objection ! Seigneur ! Il était presque temps ! C’était comme si j’avais le droit de dire tout et n’importe quoi, jusqu’ici.

Je finis par lâcher la grappe au chanteur de The Warriors, non sans avoir insisté sur le fait que ce dont était accusé Ward et ce qu’avait fait Quinn lorsqu’il était un Los Diablos était pratiquement pareil, d’un point de vue moral.

Finan avait une femme et des enfants. Ward aussi. Alors pourquoi mon client ne pourrait-il pas usé de cette excuse pour être gracié ?

Finan retourna à sa place dans la salle. Je le vis chuchoter avec sa femme.

Moi, je repris ma place également, à côté de Ward qui restait d’une impassibilité à toute épreuve. Il ne me dit rien et je ne lui adressai pas la parole non plus.

Ce fut au dernier témoin/victime de se présenter à la barre. Sky Fleming, la femme de Ward.

Le procureur l’interrogea sur les sévices qu’elle avait subis de la part de Ward.

Je savais que mon intervention avec elle serait très courte.

Quand le procureur en eut fini, je me levai, reboutonnant la veste de mon costume, puis m’avançai vers la barre.

Sky Fleming était une femme jeune, avec un beau visage métissé et une peau dorée. Elle avait du charme et semblait en pleine possession de ses moyens… Cependant…

-Madame Fleming… C’est bien votre nom ?

Je marquai une pause, la regardant dans les yeux.

-Pourquoi vous nommez-vous toujours « Fleming » alors que vous avez eu tout le temps de divorcer de mon client?

Ce serait ma seule question pour cette femme qui, non seulement semblait tenir à rester mariée à mon client… Tout en batifolant avec le tout nouveau batteur de The Warriors…

A un moment donné, il faut choisir. Il faut savoir ce qu’on veut.

Ce procès était une véritable mascarade ! Je voyais venir mon tour à la bar au fil des différents témoins qui y défilaient et je sentais que j’allais passer un mauvais quart d’heure. Riley, la pute avec qui Ward m’avait trompé avait gardé la tête haute tout au long de l’interrogatoire du procureur, tout comme le psychiatre et Finan Quinn. Les choses se gâtaient toujours quand l’avocat de Ward entrait en scène.

Le rapport psychologique avait été pratiquement invalidé, Riley Raphaël et Finan Quinn s’étaient faits malmenés comme de vulgaires poupées de chiffons. Chaque fois, je regardais, impuissante, Sigurd. Le juge Dorsley avait visiblement un partit prit, il fallait être complètement aveugle ou tout simplement de mauvaises foi pour ne pas s’en rendre compte ! Et tout ça profitait à Ward dont j’évitais soigneusement le regard.

Je l’avais profondément aimé et je l’aimais certainement toujours. Un amour aussi fort ne s’oubliait pas aussi facilement, bien qu’avec Sigurd, je vivais un amour tout aussi fort mais tellement différent. Avec lui, je reconnectais doucement avec celle que j’avais été autrefois, celle que Finan avait connu à l’orphelinat.

Le témoignage de Finan terminé, ce fut mon tour d’être appelé à la barre. Je cru que mes jambes n’allaient jamais me conduire jusqu’à l’avant de la salle de cours et que mon cœur allait exploser dans ma poitrine. Je sentais le regard de Ward braqué sur moi. Savait-il qu’à ce moment précis, il avait toujours autant d’emprise sur moi ? Oh oui, il le savait !

Je posais ma main sur la bible et je jurais de dire toute la vérité.

Sinon, j’irais en enfer !

Le procureur s’avança et me posais question après question. J’y répondais au mieux de mes capacités, en me rappelant qu’il avait insisté, en rencontrer privée avant d’entrer dans la salle de cours, sur le fait que je devais répondre le plus directement à toutes les questions, sans m’empêtrer dans de trop nombreux détails. Ce n’étais pas à moi de prouver quelque chose mais à l’avocat d’en faire la preuve.

Le procureur me remercia et déclara au juge en avoir terminé avec moi. Anderson prit le relais et, avant qu’il ne commence, je risquais un regard vers Ward qui jouait avec son alliance. Je me souvenais très bien de ce jour quand, à Vegas nous avions convolés sur un coup de tête. Ce jour-là j’avais cru que c’était le premier jour de ma nouvelle vie au paradis. C’était en fait un premier pas dans un enfer sombre.

- Oui, c’est mon nom.

Je n’avais pas encore entamé les procédures de divorce et c’est directement là-dessus qu’Anderson décida de commencer son interrogatoire.

- Non, je n’ai pas eu le temps, mais c’est prévu.

J’avais eu besoin de me refaire une santé mentale, prendre soin de ma fille, de nous trouver un endroit sécuritaire pour y vivre. Ça ne se faisait pas en un clin d’œil.  

Sky FLEMING… Que penser d’elle ? En réalité, je n’avais pas à en penser quoi que ce soit. Mais c’était humain, non ? En tout cas, je devais la faire tomber dans un piège. La faire se discréditer elle-même. Et comme elle portait toujours le nom de mon client, je voyais là une preuve que cette femme ne savait pas ce qu’elle voulait… Ou qu’elle voulait le beurre, l’argent du beurre et le sourire de la crémière sans aller à l’épicerie.

Elle confirma que Fleming était bien son nom.

Quant au divorce, elle prétendait ne pas en avoir eu le temps ! Mais que c’était prévu !

-Doit-on comprendre, Madame Fleming, que vous n’avez plus aucun sentiment pour mon client ?

Elle avait juré de dire la vérité, toute la vérité et rien que la vérité.

Je ne la laissai pas répondre tout de suite.

-Je rappelle que cette femme qui se tient devant vous aujourd’hui accuse Monsieur Fleming de l’avoir violentée. Elle l’accuse aussi d’adultère…

Je désignai Riley de doigt.

-Pouvez-vous, Madame Fleming, confirmer que cette Riley qui s’est présentée aujourd’hui est la soi-disant maîtresse de votre mari ?

Je m’adressai à nouveau à l’audience.

-Je rappelle que le prénom « Riley » est plus que courant aux Etats-Unis.

Je me tournai à nouveau vers Sky.

Qu’elle jongle avec ces questions, maintenant. Elle avait l’air un peu impressionnée par tout le décorum du tribunal… Mais Ward me l’avait décrite comme une menteuse, une femme qui se faisait des fils sur un simple coup de fil.

Et sincèrement, le fait qu’elle n’ait même pas encore, sans entamer la procédure pour autant, demandé officiellement le divorce, ça me semblait assez sidérant…

Ce procès ne rimait à rien. Je le compris très vite… Au moment où Anderson s’amusa à discrédité le psychiatre sous le regard impassible du gros juge Dorsley, j’avais compris que j’étais en train de regarder un mauvais spectacle.

J’en eus la confirmation aux passage des Riley Raphaël et de mon ami, Finan Quinn. Aujourd’hui, j’étais loin de l’effervescence du Hollywood Bowl… Aujourd’hui, j’avais l’impression de vivre une bien drôle de journée.

J’avais accompagné Sky parce que je me devais d’être à ses côtés dans ce qui représentait une véritable épreuve. Elle allait devoir être exposé devant tous ces gens et être cuisinée par Anderson. Elle qui se remettait tout doucement du jour où elle avait décidé d’aller voir la police pour rapporter les violences qui lui avait fait subir Ward Fleming. Pour le faire tomber de son trône de chef de gang. Je savais que c’était difficile pour elle mais je la savais aussi courageuse. Mais être courageux ne voulait pas dire qu’on avait pas besoin de soutien.

J’étais, donc, là pour elle. Et, hormis Ivar, la cour était devenue une petite réunion de The Warriors vu que Tiff était venue soutenir Finan qui venait de se faire malmené par Anderson.

J’avais déjà été témoin d’un procès… Celui de mon propre père. Et je n’avais jamais vu un juge rejeté autant d’objections que venait de le faire Dorsley avec le procureur.

Quand Finan rejoignis sa place après que sa vie de Los Diablos ait été exposé à tous, c’est Sky qui dû passer à la casserole. Je lui soufflai des mots d’encouragement avant qu’elle ne prête serment.

Sky géra son passage devant le procureur mais je redoutais Anderson. Et j’eus raison parce que, directement, il l’attaqua sur le fait qu’elle était toujours marié à Ward.

Sky n’avait pas eu le temps, abruti d’avocat ! Tout simplement ! Elle était passé par un centre pour femme battue. Elle avait dû se reconstruire. Elle avait dû même se séparer momentanément de sa fille pour ça. Ensuite, on avait dû trouver le bon appartement. Le procès était arrivé trop rapidement pour que Sky lance la procédure de divorce.

Je grommelai dans ma barbe qu’Anderson était un enfoiré alors que Sky répondait qu’elle n’avait simplement pas eu le temps.

Il demanda alors à Sky si elle avait encore des sentiments pour Ward… Je n’étais pas certain que la question allait la mettre à l’aise… Et je n’étais pas sûr que j’avais envie d’entendre la réponse… Même si je savais qu’elle m’aimait, j’avais peur d’entendre quelque chose que je n’aimerais pas entendre.

Heureusement, le procureur réagit.

-Objection ! Les sentiments du témoin n’est pas lié aux violences subie par Sky Fleming et, donc, pas lié à l’affaire.

Le juge Dorsley foudroya le procureur du retard.

-Rejeté. C’est largement lié à l’affaire, Monsieur le procureur. Continuez Maitre Anderson.

Je levai les yeux au ciel. C’est sérieux tout ça ?

Anderson parla alors de Riley. Il la pointa du doigt. Il demanda si c’était la même Riley que Sky avait cité. Je soupirai espérant que Sky gère les deux questions parce que j’avais l’impression que le juge Dorsley veut voir un serial killer en liberté dans les prochaines heures.

J’étais assise à la barre des témoins d’où je pouvais sentir le regard de Ward sur moi. J’évitais de le regarder bien que je sentais j’allais finir par craquer. Tout ça n’avait rien de simple. Je l’avais dénoncé sur un coup de tête puis tout le monde avait voulu me convaincre que j’avais fait la bonne affaire. Sigurd était là, pour me soutenir et bien qu’il était un petit ami formidable, une figure paternel parfaite pour Heaven qui n’avait jamais autant sourit et rit qu’en sa présence, je ne pouvais balayer tout ce que j’avais vécu avec Ward sous le tapis.

Ça ne se faisait pas si facilement.

Alors quand son avocat me demanda pourquoi je n’avais pas encore divorcé alors que j’en avais eu, selon lui, amplement le temps, je répondis simplement que c’était sur ma liste de choses à faire. Il fallait que je me contrôle pour me répéter tout ce que le procureur m’avait dit mais Anderson me donnait envie de sauter par-dessus ce qui nous séparait pour lui écrapoutir le nez d’un bon coup de poing.

- Pas amoureux, en tous les cas !

Je mentais mais je préférais mentir sur la bible que de satisfaire Ward et son avocat en avouant avoir encore des sentiments pour mon mari. Qui plus est, Sigurd était assit là et il allait souffrir de m’entendre le dire.

C’était tellement compliqué !

Anderson fit son show ensuite, en se tournant vers le jury et en me pointant du doigt avant de pointer Riley qui avait affirmé avoir eu une relation adultère avec mon époux. Il me demanda si je pouvais confirmer qu’il s’Agissait bien de cette Riley avant de fanfaronner qu’il y avait plus d’une Riley aux États-Unis.

- Je n’aurais pu affirmer qu’il s’agissait d’elle avant aujourd’hui mais comme elle l’a elle-même confirmé dans son témoignage, alors oui. Oui la femme que vous venez de pointer du doigt a eu une aventure avec mon mari.

Je ne voyais pas ce qu’il voulait de plus comme preuve. Un examen gynécologique de Riley pour voir s’il restait du sperme de mon mari en elle ?  Riley avait raconté en long et en large tout ce qu’elle avait vécu avec Ward. Comment leur relation avait commencé, les fois qu’ils avaient couché ensemble, où ça avait eu lieux. Les marques qu’elle lui avait faites coïncidaient avec celles qu’il avait voulu me faire croire en être responsable.

Le procureur m’avait interrogé à ce sujet, à savoir comment j’en étais venu à douter et j’avais parlé de ses putains d’égratignures ! Il voulait quoi de plus Anderson ? Si je pouvais me mettre à lui hurler dessus qu’il n’aurait pas dû faire avocat parce qu’il n’avait pas du tout le sens de l’écoute, je l’aurais fait !

En dedans de moi, je bouillais !

Je sentis bien que j’énervais Sky Fleming avec mes questions. C’était le comble ! Je n’étais que l’avocat de la défense et tout ce beau monde allait vouloir me mettre sur la gueule uniquement parce que Ward Fleming avait, comme tout citoyen, droit d’être défendu !

Quel boulot de merde.

J’étais sûr que tout le monde pouvait sentir que Sky bouillonnait intérieurement quand elle affirma ne plus avoir de sentiments amoureux pour Ward. Et moi, j’étais sûr que la question la dérangeait parce que justement, elle était contrainte de mentir !

Et comment ! Vu que son nouveau petit-ami était dans la salle ! Si elle avouait, ça n’allait probablement pas le faire !

J’avais envie que ça se termine. Parce que tous autant qu’ils étaient, ils me dégoûtaient. Ward, Riley, Sky.

Il n’y avait que Finan qui sortait du lot !

En même temps, qui peut croire une femme sur parole quand elle ouvre la bouche ? J’étais pratiquement sûr que Ward n’était pas innocent… Mais j’étais sûr que Riley et Sky en rajoutaient.

Je n’ajoutai rien sur les sentiments de Sky à l’égard de Ward Fleming.

Mais par contre, je mis en doute le fait que la Riley du témoignage de Sky puisse être celle qui était dans la salle.

Et sa réponse ne tenait qu’à un fil.

Je me tournai vers le juge.

-Votre Honneur. Je crois que l’on peut maintenir un doute raisonnable quant au fait que Riley Raphaël soit effectivement la même Riley que celle dont aurait entendu parler Madame Fleming.

Je passai une main dans mes cheveux et me retins de soupirer. Si je ne me faisais pas attaquer par des furies en sortant de la salle d’audience, je serais content.

-Je n’ai plus de questions.

J’allais me rasseoir à côté de Ward et lui chuchotai à l’oreille.

-Si vous avez une deuxième chance et que vous sortez d’ici, Ward… Choisissez-mieux vos femmes.

Parce que celles-ci n’attiraient en rien la sympathie.

Dorsley avait, à nouveau, rejeté une objection du procureur. Ça devenait fatiguant de voir à quel point, pour le juge, les témoins n’avait le droit à aucune compassion. Or, étaler les sentiments actuel de Sky devant la court alors que ça n’avait rien n’à voir avec ce que Ward lui avait fait, était un manque de compassion pour elle.

Je retins mon souffle et c’est une Sky qui semblait contrarié qui déclara qu’elle n’avait pas de sentiment amoureux à l’égard de son ex-mari. Je soufflai de soulagement. Quelque part, je redoutais la question… Sans doute parce que notre relation, à Sky et moi, n’en était qu’à ses débuts et que je savais que l’ombre de Ward planait toujours au-dessus de nous.

J’espérais que cette ombre allait disparaitre aujourd’hui quand Ward sera définitivement mis à l’ombre.

Anderson en vint aux questions sur Riley. Mes lèvres se pincèrent alors que Sky se défendit tant bien que mal en se raccrochant à ce qu’avait dit Riley. La coïncidence était quand même grande comme une maison, non ? Même le juge pouvait la voir mieux qu’il ne pouvait, sans doute, voir ses pieds !

Anderson se tourna alors vers le juge déclarant qu’il y avait un doute raisonnable. Mes lèvres se pincèrent… Cet avocat m’énerve.

Il s’arrêta alors là et je vis bien que Sky bouillonnait à l’intérieur. Je commençais à savoir décrypter ses émotions… Et je voyais qu’elle avait certainement envie d’arracher la tête de Dorsley et Anderson.

J’avais aussi envie de les démolir.

Sky put quitter la barre et je la pris dans mes bras quand elle arriva près de moi.

-Tu as fait de ton mieux… Tu verras. Bientôt, il sera enfermé pour toujours.

Je l’espérais…

Le juge parla alors un moment tout ça pour dire que les jurés allaient, désormais, délibérer.

Je fixai Sky.

-Viens… On va aller prendre l’air…

On en avait bien besoin.