Je suis né un beau matin de mai 1935, à Los Angeles, dans la famille Hughes. Mon grand frère n’est autre que Don Hughes qui, à l’époque, avait 13 ans et déjà les idées bien arrêtées sur ce qu’il voulait devenir : un des plus gros promoteurs de la musique angelenos.

J’avais également un autre frère, Geordi, de 5 ans mon aîné avec qui je jouais beaucoup. Il est le seul à avoir choisi une carrière militaire. En 1955, il a du aller se battre au Vietnam. Il a participé longtemps à cette foutue guerre et j’ai longtemps pensé qu’il y survivrait. Je croisais les doigts pour ça. Malheureusement, il a été tué en 1968 en marchant sur une mine. Il laissait derrière lui sa veuve et nous… Mais également son filleul âgé de 1 an, le fils de Don, Julian.

Don a toujours été très protecteur envers moi et il faut bien dire que je lui en faisais voir de toutes les couleurs. Curieux dès mon plus jeune âge, j’avais l’art d’échapper à la vigilance de notre mère, aidé par Geordi. Et les choses ne se sont pas arrangées quand notre père a été enrôlé pour aller se battre en 1944. Aujourd’hui, il est l’un des survivants de cette page notable de l’histoire.

Grâce à Don, j’ai passé mon enfance et mon adolescence baigné dans la musique. Mon frère ayant des goûts très éclectiques, j’étais biberonné au rock, au jazz, au funk, au gospel… Bref, à tout ce qui lui passait sous la main.

Comme je courais beaucoup les rues de los Angeles, seul ou avec Geordi, je faisais tout pour gagner un peu d’argent : porter les commissions des vieilles dames, tondre des pelouses, ramasser des bouteilles consignées. Et le moindre sous que je gagnais, je le donnais à Don. Il refusait toujours mais j’insistais parce que je lui disais : « Toi, tu sais quels disques acheter ! »

En 1941, Don avait déjà fondé Major Tom Inc, ce qui commença à faire de l’ombre à la vieille boîte qu’était BSC. J’avais alors 6 ans (Don avait mis les moyens pour réaliser son rêve) et il m’offrit une guitare. Mais… Même si je m’inscrits à des cours et tout, je n’avais pas le talent qu’il fallait pour devenir un vrai musicien. J’appris à jouer quelques chansons faciles, mais je passais beaucoup d’heures à m’entraîner pour un piètre résultat.

Ce que j’aimais vraiment, en fait, c’était écouter de la musique. Pas en faire moi-même.

Mon adolescence fut donc des plus classiques. Je fis mes études à Fairfax, me servant de mon sourire et de mes maigres talents de guitariste pour séduire les filles.

Dans le même temps, Geordi s’engageait à l’armée et moi… Bah moi, je me laissais vivre, dans tout ça, étant le dernier de la fratrie et celui à qui on pardonnait tout.

Mais vint un moment, après Fairfax, où je du décider de mon avenir. N’ayant aucun talent particulier, ni de réel centre d’intérêt, si ce n’était passer mon temps à écouter des disques, je vécus de petits boulots et tout genre… Jusqu’à ce que je me trouve un travail que j’aimais vraiment bien : organisateur d’événements. J’organisais des concerts, des pièces de théâtres, des projections de films et autres… Tout ce qui avait trait à la vie culturelle de Los Angeles.

Et pendant tout ce temps-là, je n’avais pas conscience que  Don me jaugeait, me testait… Toujours dans une optique de me protéger. En 1960, alors que je commençais à me faire un nom dans l’événementiel, j’avais alors 25 ans, Don me mit une proposition sur la table : continuer ce que je faisais… Ou jouer la sécurité en rejoignant MTI en tant que manager.

Je n’ai pas hésité une seconde. Ce n’était pas tous les jours qu’on pouvait travailler avec son héros.

Je commençai donc à manager des petits groupes… Mais ce fut en 1964 que je ratai l’occasion de ma foutue vie ! Encore un peu et je faisais signer The Army chez nous ! Mais ce petit arriviste italien qu’était Daniele Ricci, et qui était légèrement plus jeune que moi, me les fit passer sous le nez.

Sur ce coup-là, j’avais vraiment eu la haine. D’ailleurs, encore aujourd’hui, j’ai quelques rancunes envers Daniele, même si je dois reconnaître que c’est un maître dans son domaine.

Niveau personnel, à la mort de Geordi, j’héritai du titre de parrain de Julian. Un rôle que je prends très au sérieux car c’est ma façon à moi d’honorer la mémoire de mon défunt frère. Quand j’ai appris qu’il avait été abusé toute son enfance par sa mère, Kate, ça m’a mis hors de moi… Contre moi-même surtout, de n’avoir rien vu.  Autrement, j'ai toujours soutenu Julian, que ce soit dans son mariage précoce avec la jeune Livia ou dans ses ambitions concernant sa marque de voiture.

Niveau professionnel, j’eus tout de même quelques succès, de quoi très bien vivre mais sans réellement faire de coup d’éclat avec un groupe qui aurait une renommée mondiale. Mais je ne désespère pas. Je sais qu’un jour, mon tour viendra.